Inconditionnelle de la Phèdre de Racine, j'étais curieuse de découvrir ce qu'en avait fait l'audacieuse Sarah Kane dans cette réécriture. Ai-je été déçue ? Pas totalement, mais un peu quand même. Des scènes de masturbation (avec des chaussettes, oui bien sûr) ? OK, c'est Sarah Kane, rien d'étonnant. Un nouveau personnage, Strophe, avec un jeu de mot facile "C'est pas la cata… Strophe !" Pourquoi pas, mais il y avait mieux à tenter. Tiens, v'là un prêtre qui se ramène, tu paries combien qu'il va y avoir un truc sexuel limite ? Certes, on a droit d'une certaine manière à une critique acerbe des familles royales, ce qui n'est pas anodin en 1996, mais à mon sens, un mythe comme celui de Phèdre méritait un traitement plus soigné, même si on ne peut guère reprocher à l'auteure d'être fidèle à elle-même.
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Très bonne lecture, donnant envie de découvrir les autres œuvres de l'auteur.
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Viol, domination, pratiques sexuelles violentes, cannibalisme, énucléation. Tel est le début, le mi-temps et la fin d’Anéantis. Pas de répit pour les braves, l’autrice ne vous donnera pas l’occasion de reprendre votre souffle pour tenter de juguler la nausée qui monte.
C’est d’abord la violence d’un homme sur une femme qui devient à son tour victime d’un militaire qui a oublié comment on est un être humain.
Au début j’ai trouvé que c’était trop, trop de violence, trop loin, trop de justifications faciles à des actes barbares. Avant de me rendre compte que mon malaise face à cette lecture est aussi le reflet d’une réalité : tout ça n’est pas qu’une fiction. La guerre existe, les atrocités qu’elles drainent dans son sillage aussi, la banalisation de la violence qui entraîne une déshumanisation opportune pour assouvir toutes ses pulsions tient la place de choix de 9 JT sur 10. Alors oui, la pièce est violente, elle l’est sciemment, elle est aussi le reflet de ce qu’un homme peut être. C’est aussi à ça que sert la littérature.
Quelle place pour la femme lesbienne dans cette historie ? Celle de l’insulte bien-sûr, la gouine, la gousse, la lécheuse de fente…
Pour public avertis.
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Pièce très forte et étonnante avec des rapports humains cherchant une forme d'absolu, une fusion. Beaucoup de chaos, physique, psychique et sexuel. C'est très dur mais parfois on peut retrouver une grande insatisfaction ou de l'amour, une amitié fortes. Ici les personnages sont parfois des enfers les uns pour les autres tout en laissant d'autres possibilités. Très dynamique dans ses dialogues également, comme des claques ou des coups portés. Fort.
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J'aime beaucoup les pièces de théâtres dont la mise en scène est déjà dans l'écriture (en dehors des didascalies bien sûr). L'atmosphère et, presque, les gestes sont déjà dans les paroles.
Anéantis est une pièce sur l'horreur de la la guerre. J'ai décelé deux niveaux, horribles chacun à leur façon.
Tout d'abord, ce couple dans une chambre d'hôtel dont les sous-entendus et les détails de la conversation laissent à penser que la relation est malsaine. Cate est une jeune femme influençable et émotive qui a probablement été abusée très jeune par l'homme, Ian, qui a peut-être été son beau-père. Cate entrevoit la possibilité de commencer vraiment sa vie propre avec un travail et un petit ami tandis que Ian, paranoïaque, veut jouir encore de tous les plaisirs avant de mourir.
Le second niveau, évidemment, c'est la guerre qui déboule sur la ville, sur l'hôtel et sur la chambre sous la forme d'un soldat. Les horreurs qu'on a pu supposer à Ian avant l'irruption de la guerre, des horreurs malheureusement banales et quotidiennes, apparaissent infimes au regard des exactions commises par le soldat. Le message me semble être : il n'y a pas de limites à l'horreur ; on s'accommode de toutes les horreurs et on continuera à le faire de tortures en massacres. L'inacceptable est déjà dans la première violence, dans la gifle ou dans l'insulte.
La pièce, extrêmement sombre et crue, se conclue néanmoins par un signe d'espoir. Le soldat et Ian sont morts . Cate est bien vivante. Une pièce d'une grande force qui donne envie de se confronter au reste de l'œuvre de Sarah Kane.
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J'ai lu, vu et étudié cette pièce et je n'ai qu'un mot: écœurant. Alors oui, Sarah Kane veut dénoncer la violence de notre époque, le voyeurisme, la violence quotidienne, etc. Mais pour moi cette pièce est juste insoutenable et je ne pense pas qu'elle pousse les gens à réfléchir tellement Sarah Kane va loin dans la forme et dans le fond. Il y a d'autres œuvres sur le thème de la violence qui sont mieux réussies. L'intention de choquer pour faire réfléchir était peut-être bonne, mais c'est raté pour cette œuvre qui ne provoque que dégoût en nous. La preuve: le nombre de spectateurs qui ont quitté la salle lors des premières représentations.
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Un texte très émouvant!
Une autre manière de cette auteure de déclarer tout haut et de manière crue '' le monde est fou'' ''la loi du plus fort'' ''la loi de la jungle''
A travers le décor d'un hôtel, Anéantis n'est que le mal du monde présenté sous forme d'une nouvelle tragédie.
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Il s'agit d'une oeuvre original et une bonne adaptation de Phèdre dans les temps modernes.
Cependant, je la trouve bien trop potache même si je reconnais que je suis facilement déranger par le sexe, celui-ci est omniprésent et peu ragoutant...
Je ne peux pas dire si j'ai aimé ou pas, je suis resté scotché sur la réécriture de Sarah Kane tout en étant dégoûtée... C'était vraiment bizarre...
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Un monologue d’une écriture et d’une construction puissamment théâtrales et poétiques, alliant complexité et simplicité, pour témoigner dans sa plus terrible vérité de la dépression, cette affection congénitale, et de la tentation du suicide qu’elle provoque. Une réponse cinglante à tous les « malcomprenants » qui considèrent encore cette maladie qu’ils reprochent aux malades comme une auto-complaisance dont les victimes seraient les coupables.
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Tellement partagée par cette pièce qui a provoqué en moi un profond dégoût et l'impossibilité de me figurer une mise en scène. Cela part du malaise et se termine en franchement dégueulasse, avec un moment paroxystique immonde pendant lequel on se demande si cela peut aller plus loin.
Et pourtant, il reste en moi une espèce de respect pour la dénonciation en mode claque dans ta tronche, pour ce côté désabusé où rien ne vient sauver la situation et où l'homme est une bête.
Bref vraiment mitigé pour moi cette lecture.
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Sarah Kane est une dramaturge britannique qui s’est suicidée à l’âge de 28 ans. Elle signe ici sa dernière pièce de théâtre, alternant entre monologue et dialogue avec le médecin. Avec des mots forts, des phrases dures et d’une extrême violence elle y décrit la noirceur de ses pensées, la douleur indescriptible de la dépression et le manque d’amour qu’elle ressent. C’est un long poème bouleversant qui s’apparente à un cri qu’elle partage ici et qui fut publié juste après son suicide.
Peu de mots peuvent résumer ce que j’ai pu ressentir à la lecture de ce livre. Une douleur vive sans hésiter.
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Ce livre, c’est F qui me l’a fait découvrir. Une pièce de théâtre toute en poésie et en douleur. Il s’agit de la lettre d’adieu de l’autrice, laissé là juste avant son suicide. Un texte poignant, terriblement marquant et qui m’a bouleversé et qui me troublera toujours à chaque relecture.
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Cette pièce est celle que j'ai le moins appréciée de Sarah Kane. Certes, le propos sur le manque est intéressant, et l'anonymisation des quatre personnages tout à fait pertinente eu égard à l'intention de la pièce, mais forcément, c'est complexe à lire, et donc difficile à apprécier. On ne sait jamais vraiment qui parle à qui, qui répond à qui, ou combien de discussions sont menées en même temps. Le rendu sur scène est sans doute bien plus convaincant.
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Dès 1996, Sarah Kane s’interrogeait sur les liens entre sexualité et pouvoir. Elle livre dans cette pièce une critique politique acerbe qui fait écho au mouvement #metoo apparu 10 à 20 ans plus tard.
Elle questionne la masculinité qui ne s’épanoui que dans les extrêmes et bascule d’une sexualité sans visage à la violence la plus crue.
Une pièce sans concessions pour public averti.
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Manque :
Manque est, à mon sens, beaucoup plus une expérience théâtrale qu'une lecture. Cette lecture devrait se faire à haute voix et à quatre voix, ce qui serait déjà du théâtre. Quant aux metteurs en scène, ils doivent se régaler d'une oeuvre aussi libre. Ma note mitigée ne reflète que mon ressenti de lecture, seule et à voix basse (je l'ai lu à la bibliothèque !).
Entre les quatre voix de cette pièce, on distingue des monologues enchâssés dans des dialogues, des dialogues de sourds, des dialogues où les répliques sont distendues par d'autres dialogues, de vraies discussions. Et puis des monologues, parce que la solitude est la caractéristique première de ces personnages parlant. Quatre fils disjoints qui se nouent, s'emmêlent, se détachent, en aspirant à être coupés, mais pas seuls. La mort est un autre thème majeur de la pièce comme un fil rouge et une fin inéluctable. Entre la solitude et la mort, le besoin d'amour, le besoin d'un ou d'une autre et puis le désespoir.
La poésie du texte est surtout dans le rythme. Il s'agit de lire la pièce ni trop lentement, ni trop vite, d'entrer en résonance avec ses phrases pulsées (parfois ce rythme se rompt à la faveur d'un monologue ou d'une pause).
A l'issue de ma lecture, je me suis posée deux questions. 1. Pourquoi la pièce s'arrête ? Je n'ai pas ressenti dans le texte l'avènement d'une "chute". Pourquoi pas deux pages plus tôt ou deux pages plus tard ? 2. Les mots sont-ils interchangeables, sont-ils si importants ? Sarah Kane aurait-elle pu écrire la même pièce (exactement la même) en changeant les répliques des personnages ? Dit autrement, un metteur en scène peut-il inverser ou modifier les répliques des personnages sans que le sens de la pièce en soit changé ?
Sarah Kane propose en tout cas un théâtre étonnant qui le grandit en tant qu'expression artistique. Il faut que je vois jouer cette pièce et dans plusieurs mises en scène si possible !
L'amour de Phèdre :
Dans L'Amour de Phèdre, Sarah Kane sublime les caractères des héros antiques Phèdre et Hippolyte en les dépouillant de leurs attributs antiques. L'époque moderne permet à Phèdre d'accomplir sexuellement son amour pour son beau-fils Hippolyte. Ce dernier est ici un prince misanthrope qui s'ennuie de ne pas être son père.
Bien que Phèdre meurt tôt, conformément plus à Euripide qu'à Sénèque, ses actes - l'initiative de l'acte sexuel avec Hippolyte, le suicide et l'accusation - font d'elle avec cette version le personnage le plus tragique (dans les versions antérieures Hippolyte lui dispute ce rôle - il reste cependant ici le personnage central). Son sacrifice et surtout son accusation sont des actes d'amour envers Hippolyte. Celui-ci les comprend et les acceptent car ils lui apportent ce dont il avait besoin pour sortir de l'ennui de sa vie.
Sarah Kane introduit une fille de Phèdre, Strophe, qui symétrise le drame et banalise l'inceste dans cette famille royale. L'autrice introduit aussi d'autres rôles annexes, et Thésée lui-même n'est que l'instrument final du destin d'Hippolyte. Cependant cette dernière scène (complètement gore) du supplice d'Hippolyte ne m'a pas convaincue. de même, j'ai trouvé la pièce trop courte (ce qui est renforcé par le fait que Phèdre meurt vite). Une confrontation entre Thésée et Hippolyte (voire entre Thésée et Strophe avnat la fin) m'a vraiment manqué pour apprécier pleinement cette version ultra-moderne.
Par sa violence et la crudité du texte, Sarah Kane humanise définitivement les personnages du mythe et lui donne une force actuelle sans référence antique.
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