AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Sergio Salma (164)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Animal lecteur, tome 6 : Un best-seller sin..

Ce tome fait suite à Animal lecteur, tome 5 : C'était mieux avant ! (2014) qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant, mais ce serait dommage de s'en priver. Il s'agit donc du sixième tome d'une série humoristique, constituant une compilation de gags en 1 bande verticale, chaque page comprenant 1 bande. Il se présente sous un format original : demi A4 vertical, avec des bandes verticales (par opposition à l'habitude des strips qui se présentent sous la forme d'une bande dans laquelle les cases se suivent à l'horizontal). Il est initialement paru en 2016, écrit par Sergio Salma, dessiné par Libon. Ce tome comprend 92 strips.



Dans son magasin BD Boutik, le libraire Bernard Ledoux est en train de monter une pile avec les exemplaires du dernier Blake & Mortimer en se disant qu'il n'aurait jamais imaginé que cette série allait sauver le chiffre d'affaires de son magasin. Il est très surpris par l'arrivée de l'objet promotionnel associé. Pour répondre à la demande d'un jeune client, le libraire recherche sur son logiciel s'il existe une version chti de Titeuf. Bernard discute avec un client âgé, abonné au Journal de Spirou depuis le premier numéro en avril 1938. En 1938, deux héros emblématiques sont apparus : Spirou et Superman. Entre deux clients, le libraire s'imagine en marionnette de Guignol, frappé par le gourdin de la crise. Monsieur Ducolrède est un monsieur sérieux, avec un métier sérieux dans une société sérieuse, abonné à un journal sérieux. Mais pendant les vacances le journal sérieux se lâche en offrant à ses lecteurs un supplément BD. Bernard Ledoux réfléchit au paradoxe du décalage entre la période de l'été propice aux lectures plaisir, et à l'absence de nouveauté pendant cette même période. Un client demande si Raoul Cauvin c'est bien : le libraire se lance dans un passage en revue de toutes ses séries.



Au vingt-et-unième siècle, toute la planète est accaparée par internet. Toute ? Non une seule librairie résiste encore et toujours à l'envahisseur. Début décembre, le libraire a mis en place un grand stock de Fouette Man, dans l'ombre de Saint Nicolas, parce que les méchants ça se vend bien. Pour ses bonnes résolutions, Bernard Ledoux a décidé de mieux maîtriser ses émotions face aux demandes impossibles des clients, à commencer par savoir s'il livre. Le libraire se voit bien en Astérix résistant à l'envahisseur César qui représente la crise. Bernard est tout fou devant son poste de télévision à regarder un match de foot, à la grande surprise de son fils. Il imagine ensuite où va arriver Lucky Luke à force de s'en aller vers l'ouest à la fin de chacun de des albums. Il se lance ensuite dans le moyen de distinguer Boule de Bill, de savoir qui est le chien et qui est l'enfant. L'employé du libraire reçoit un appel de son patron, mais ça coupe tout de suite. Deux enfants regardent la vitrine de BD Boutik, en notant l'influence de la télé sur la BD. Bernard Ledoux est en train de pointer du doigt les défauts d'amazon par rapport au contact direct avec un libraire quand le facteur vient lui apporter un colis. Une fois n'est pas coutume : le libraire va acheter un livre dans une librairie spécialisée et il demande des renseignements à son collègue. Un client est en train de regarder les différentes BD dans les bacs, et le libraire ne sait pas trop s'il doit proposer son aide pour le guider, ou respecter le fait qu'il fait du lèche-vitrine par lui-même.



Après la surprise du format traditionnel du tome précédent, les auteurs reviennent au format habituel de leur série : un demi A4 avec des gags en format vertical. Le libraire est toujours aussi sympathique et motivé pour exercer sa profession qui avoisine le sacerdoce. De temps à autre, il ne parvient pas à conserver son flegme et il s'énerve du comportement d'un client, d'une exigence idiote, du volume de BD à déplacer chaque semaine. Son apparence est toujours aussi sympathique avec l'exagération caricaturale du dessinateur : gros nez très allongé, lunettes basses avec les yeux regardant par au-dessus, bras très épais avec le coude presque pas marqué, gros doigts, visage très expressif, tenue inchangeable avec un jean, un tee-shirt jaune, une chemise rouge à manche courte toujours ouverte. Les autres personnages sont également croqués avec une belle expressivité : le jeune employé avec les cheveux qui lui cachent les yeux (seul personnage récurrent), le fiston portrait craché de son père, le frère du libraire en costume-cravate, et les clients variés de 7 à 77 ans, plus ou moins intéressés, plus ou moins exigeants (souvent plus que moins).



Outre le format très particulier, l'horizon d'attente du lecteur comprend des références BD, des piles de cartons de BD à déplacer chaque semaine, des observations sur l'industrie de la BD, et des gags visuels. Salma & Libon ne déçoivent pas. Oui, c'est vrai que voir citer des séries BD connues ou moins connues permet d'établir que Bernard Ledoux est un libraire spécialisé, et ça crée une connivence avec le lecteur de BD. En outre ces références sont accessibles à la plupart des lecteurs : Blake & Mortimer, Spirou, Superman, Lucky Luke, Marsupilami. Il est même vraisemblable que le lecteur occasionnel se reconnaîtra dans le gag sur la difficulté de se souvenir qui est Boule et qui est Bill (page 17). Il appréciera également l'opposition ou plutôt le rapprochement entre la souris de Walt Disney (Mickey) et celle d'Art Spiegelman (Maus). Le degré de connivence augmente d'un cran quand le libraire est confronté à un client qui en sait réellement plus que lui, ou quand est évoqué la signification du mot Spirou en wallon. Le scénariste développe un gag autour de la diversité des œuvres de Raoul Cauvin, auteur qu'il admire, en citant ses principales séries : Les femmes en blanc, les tuniques bleues, Cédric, Les psys, Pierre Tombal. Le ballet des cartons de nouveautés et d'invendus reprend avec 6 gags : pages 9, 38, 49, 54, 59, 67, ce qui ne fait pas beaucoup sur un total de 92. À chaque fois, Salma trouve un autre angle pour considérer cette tâche inéluctable : la reprise des nouveautés en septembre en décalage avec la disponibilité des lecteurs en été, les périodes de creux (janvier, avril, juillet, octobre) permettant d'affiner les retours d'invendus, la force physique acquise avec la pratique de l'exercice de port de cartons de BD, l'incrédulité du livreur de voir que le libraire parvient à caser les nouveautés chaque semaine, l'énergie nécessaire pour faire face à 500 nouveautés par mois, la solution trouvée pour gérer les nouveautés qui ne trouvent pas leur place dans l'espace de la librairie.



Étant un maillon de la chaîne du livre (très beau gag visuel dans un dessin en pleine page, p.77), le libraire subit en direct le mode de fonctionnement de cette industrie et les contraintes qui s'imposent à lui, parfois en dépit du bon sens. Ainsi, les gags ont pour objet ou abordent de manière indirecte la concurrence de la vente en ligne avec la disponibilité presque infinie de tous les titres, la déclinaison d'un personnage en une véritable franchise multimédia donnant à son tour à d'autres versions BD du même personnage, le volume hallucinant de nouveautés annuelles (environ 5.000 BD par an, tout genre confondu), les produits dérivés comme les figurines ou les objets de collection, les différentes versions d'un BD (basique, augmentée, noir & blanc), la recherche de petits plus produits pour le client, le paradoxe du tome 1 d'une nouvelle série (les lecteurs ayant tendance à attendre le tome 2 pour être sûrs que la suite paraîtra bien), la part financière qui revient à un auteur sur la vente d'une BD… En arrière-plan, le libraire doit suivre ou accompagner d'autres évolutions plus profondes de la société comme les efforts pour moins consommer d'énergie, ou l'évolution à la baisse des revenus qui incite au licenciement des employés. Impossible de résister à la comparaison du libraire et de sa librairie, à un petit village irréductible résistant contre la dématérialisation.



Le lecteur retrouve donc tout ce qu'il attend de la série, les auteurs sachant regarder d'autres facettes de thèmes déjà abordés, et se pencher sur de nouveaux. Les auteurs réalisent aussi bien des gags racontés en plan fixe, généralement sur le libraire, qu'avec une prise de vue qui évolue d'une case à l'autre, Libon prenant soin de rappeler discrètement ou dans le détail, le décor en arrière-plan. Chaque gag fonctionne grâce à la dimension comique de l'expressivité exagérée des personnages. De temps à autre, un gag repose plus sur la narration visuelle : la loupe sur la librairie comme la loupe sur le village gaulois d'Astérix, Lucky Luke s'éloignant vers e soleil couchant, le libraire hurlant dans une pièce insonorisé pour évacuer sa frustration, le libraire enchaîné à un carton plein, la scène d'action irrésistible du libraire changeant le rouleau de sa caisse en étant chronométré par son employé, et bien sûr monsieur et madame couché au lit, l'un lisant Mickey, l'autre Maus, sans aucun mot ou texte. De temps à autre, le lecteur prend conscience d'une prise de recul encore plus importante que ce soit l'être humain dépassé par la quantité de produits à sa disposition (le libraire se fait aider par son fils pour se faire une idée sur les mangas, il tente l'oreillette pour être guidé en temps réel sur les conseils à délivrer aux clients), ou le cumul des années qui fait que l'enthousiasme enfantin cède progressivement la place aux critiques systématiques chez les adultes, ou encore le concept très intelligent de l'Udersatz.



S'il a lu les tomes précédents, le lecteur revient pour avoir plus de la même chose, mais avec des gags neufs. Il est comblé : Libon est en très grande forme pour animer ses personnages d'une vitalité humoristique, et l'inspiration de Sergio Salma ne se tarit pas.
Commenter  J’apprécie          90
Animal lecteur, tome 3 : On peut pas tout l..

3ème volet des histoires de ce libraire spécialisé dans la bande dessinée. C’est vrai, c’est un peu private joke, il faut suivre une peu ce qui se fait dans le monde de l’édition de bandes dessinées, mais c’est vraiment drôle. Moi, j’ai bien ri.
Commenter  J’apprécie          90
Mandarine - Une semaine sur deux, tome 1

Les parents de Mandarine se séparent et la petite fille voit son équilibre s'effondrer. Elle va devoir apprendre à vivre différemment, l'occasion, peut-être, de redécouvrir ses parents.



Nouvelle série jeunesse, "Mandarine" parle de famille divorcée, du fait d'avoir deux maisons mais aussi d'amitié et de différence de choix de vie. C'est une jolie entrée en matière pour cette série prometteuse qui dédramatise la séparation parentale et aborde des sujets variés tout en subtilité.
Commenter  J’apprécie          80
Animal lecteur, tome 2 : Il sort quand ?

Ma réaction vis a vis de ce livre ressemble beaucoup à sa couverture : les lecteurs de BD scotchés à la vitrine de la librairie pour acheter enfin le nouveau volume tant attendu. Moi c'est à mon retour de la médiathèque que parfois, je ne peux pas me retenir de me jeter sur certaines BD, et c'est le cas avec celle ci.

Pourtant c'est assez répétitif, et il faudrait que je ne lise que quelques pages chaque jour, pour bien apprécier. Mais c'est plus fort que moi, je ne peux pas me retenir de dévorer le livre en une seule lecture.

Alors comme pour le tome un, parfois je me suis reconnu, parfois beaucoup moins. J'ai souris, j'ai gloussé, j'ai levé les aux ciels, et il me tarde mon prochain passage à la médiathèque pour emprunter le tome suivant.
Commenter  J’apprécie          80
Animal lecteur, Tome 1 : Ca va cartonner !

C'est le titre qui a retenu mon attention "animal lecteur"... je trouvais que ça me définissait assez bien.

J'ai d'abord été assez surprise par le format de l'objet : C'est presque la taille d'un demi-livre, qui aurait été coupé dans le sens de la longueur.

Et dès les premières planches, mini déception : ça ne parle que de lecteurs de BD (manga, comics, etc).

Mais finalement, l'ensemble est plutôt très amusant, et souvent assez vrai... malheureusement, je ne suis qu'une "jeune" lectrice de BD aussi je ne me reconnais pas forcément dans certaines situations... mais globalement, je pense que le propos peut être étendu à tous les lecteurs (de livres avec ou sans images).

A suivre donc avec grand plaisir

Commenter  J’apprécie          80
Animal lecteur, Tome 1 : Ca va cartonner !

Même si je ne lis pas que des BD, il faut bien reconnaître que dans notre famille, le genre est très bien représenter : les plusieurs centaines de BD de Papy, les collections des Pestouilles qui ne cessent de grandir, celles de mon homme qui se complétent, les miennes aussi et c'est sans compter mes manga. Donc on peut dire que nous sommes des serials lecteurs, collectionneurs Etc. En bref, des fous !

Oui, mais il semblerait bien que nous sommes pas les seuls dans ce cas sinon pourquoi créer une série comme celle-ci ? Initialement publiée dans Spirou, c'est comme souvent devenu une saga en version album. Le public a été trouvé.



Graphiquement, j'ai retrouvé un peu la patte de Sergio Salma, mais c'est surtout son humour imparable que j'ai apprécié. Sa façon bien à lui de nous raconter en peu de bulles et de cases beaucoup de choses.

Je me suis reconnue dans certains portraits et les autres membres de ma famille serial lecteurs aussi (oui, on se refile aussi nos lectures ! Au moins ça alimente nos discussions car on a beau être en prime des geeks, on n'oublie pas de beaucoup se parler).



Belle compilation des strips, qui donne envie de lire les tomes suivants. Pari gagné donc pour l'auteur (mais aussi l'éditeur) et plaisir à venir pour le lecteur (dans les prochains tomes).
Lien : http://espace-temps-libre.bl..
Commenter  J’apprécie          80
Animal lecteur, tome 7 : On ferme !

Non, mais je peux vous le commander.

-

Ce tome fait suite à Animal lecteur, tome 6 : Un best-seller sinon rien (2016) qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant, mais ce serait dommage de s'en priver. Il s'agit donc du septième, et malheureusement du dernier tome d'une série humoristique, constituant une compilation de gags en 1 bande verticale, chaque page comprenant 1 bande. Il se présente sous un format original : demi A4 vertical, avec des bandes verticales (par opposition à l'habitude des strips qui se présentent sous la forme d'une bande dans laquelle les cases se suivent à l'horizontal). Il est initialement paru en 2018, écrit par Sergio Salma, dessiné par Libon (Ivan Terlecki). Ce tome comprend 92 strips.



Deux clients de la libraire spécialisée BD Boutik, discute pour savoir si Batman est vraiment un superhéros ou non, sachant qu'il n'a pas vraiment de superpouvoir… sauf peut-être un. C'est la nouvelle année et Bernard Dolcevita participe à une soirée costumée, mais elle lui rappelle un peu trop le boulot du fait du thème retenu. Qui aurait cru dans les années 1950 qu'il y aurait un jour des écoles portant le nom d'André Franquin ou de René Goscinny ? Y aura-t-il un jour un établissement Lara Croft ou super Mario ? Faut-il accéder à l'attente du public ou respecter la pureté de la vision des créateurs originels ? Pour ou contre la reprise de séries de BD comme Astérix, Spirou et les autres ? Le monde de l'édition publie de magnifiques volumes patrimoniaux de BD, attirant une clientèle âgée et nostalgique dans la boutique. Le représentant d'une nouvelle maison d'édition de BD vient placer ses produits à BD Boutik, traitant du sujet foot sous toutes ses formes, depuis des BD pour chaque segment du lectorat, jusqu'au présentoir en forme de cage de foot. Bertrand Dolvevita est attablé dans un restaurant avec sa femme et son fils et passe en revue les séries de BD reprises et les créateurs les ayant reprises : Lucky Luke, Astérix, Corto Maltese, Blake & Mortimer, Spirou.



Un client vient de passer en caisse et, avant de s'en aller, il remercie le libraire pour ses précieux conseils. Assis à son bureau, le libraire reçoit les clients et ils lui exposent leurs souhaits : de beaux paysages avec le souffle de l'aventure, rôle important des enfants, du soleil et des nanas, etc. Tout en rangeant les arrivées, le libraire constate que les collectionneurs sont gâtés et que les éditeurs pensent bien à eux : rééditions soignées, intégrales, souvent de bons gros volumes au prix défiant toute concurrence… Il en faut de l'énergie pour produire une bande dessinée : des usines d'impression, les poids-lourds des transporteurs, l'huile de coude du libraire : quel bilan pour la planète ? Quel est le rapport entre une liste d'animaux en voie de disparition et un libraire ? Quelquefois, un client prend le temps de parler au libraire : celui-ci évoque le fait que la bande dessinée lui a sauvé la vie, quand on l'envoyait dans la maison de son oncle, isolée de tout, mais abritant une belle collection de bandes dessinées. Un client prend une bande dessinée, un classique, tout en faisant observer que la nostalgie constitue un bon bizness.



Septième tome : le lecteur vient chercher ce qu'il apprécie dans la série. Son horizon d'attente comprend les conseils du bon libraire, les clients aux demandes impossibles et considérant que c'était mieux avant, et bien sûr des nouveautés, sans oublier le format vertical. Les auteurs ont conservé cette disposition très originale de strip en vertical, en format demi A4, tout en hauteur. De temps à autre, la conception du gag met à profit à ce déroulement de haut en bas. Par exemple, le mouvement du rideau de fer sur la couverture s'effectue de haut en bas. Ce format met plus en évidence la continuité dans le déplacement des personnages, lors des plans fixes, ces derniers représentant plus de 50% des prises de vue. En outre, cela permet de singulariser chaque strip en lui consacrant une page entière, avec une reliure résistante, ce qui n'aurait pas été le cas s'ils avaient été à l'horizontale, avec une reliure beaucoup plus petite.



Il est toujours agréable de retrouver Bernard Dolcevita, toujours aussi débonnaire, bienveillant et attentionné avec les clients, agréable en famille, et souffrant d'un mal de dos chronique. Libon n'a rien changé à sa manière de représenter le bon libraire : un gros nez un embonpoint prononcé, des bras énormes et des pieds vraiment très plats. Cette forme exagérée rend le personnage très parlant avec ses lunettes sous les yeux, ses expressions de visage appuyées pour un effet comique, son corps plutôt souple et alerte, fort sollicité pour déplacer les cartons de marchandise, et les piles de bandes dessinées. Les autres personnages sont représentés dans le même registre graphique, avec des yeux souvent en bille de lot, et des morphologies différentes, plus longilignes, ou des marques de l'âge plus appuyées pour les plus âgées. Ces caractéristiques visuelles permettent à la fois de montrer des adultes dans leur apparence, et de faire ressortir leur comportement parfois de gamin ou des réactions infantiles. L'empathie ressentie par le lecteur n'en est que plus forte, et il sourit bien volontiers avec eux, soit de leurs réparties comiques, soit de leurs malheurs, tout en éprouvant de la compassion pour eux.



Le lecteur espère également voir d'autres facettes de la vie de libraire et de l'industrie de la bande dessinée, mises en avant. Les auteurs reprennent des thèmes habituels : la reprise d'anciennes séries, les vieux lecteurs, la surproduction, la mise au pilon, avec des dessins évoquant ceux des tomes précédents, créant une continuité visuelle, comme le comptoir, la caisse enregistreuse, la tenue vestimentaire souvent identique du libraire, les cartons empilés sur le diable, l'usine de mise eu pilon. Certains éléments visuels sont récurrents de tome en tome, d'autres n'apparaissent pas dans tous. Ils développent également de nouveaux thèmes avec de nouvelles situations visuelles : le restaurant, l'usine d'impression, le bureau du PDG de l'usine de mise au pilon, la pharmacie, le cinéma, le déplacement en scooter, le camion poubelle, etc. Le scénariste aborde de nouveaux territoires comme la culture vidéoludique, le plan marketing pour la mise en place d'une collection, le coût écologique de la production d'une bande dessinée, la livraison à domicile… Bien évidemment, le lecteur retrouve la culture BD, cette dimension qui fait qu'il se sent entre amis, les auteurs évoquant nominativement ou visuellement Batman, Gaston Lagaffe, Astérix, Corto Maltese, Spirou & Spip, Tintin (!!!), Lucky Luke, Garfield, Krazy Kat, Félix le chat, le chat de Geluck, Buck Danny, Dan Cooper, Tanguy & Laverdure, Les Tours de Bois Maury, Les vieux fourneaux, Seuls, Zombiellénium, Tamara (avec un commentaire très touchant pour cette dernière).



Mais arrivé dans le dernier tiers de l'ouvrage, un thème domine les autres : celui de la crise, celui de la fermeture de la boutique. Il l'a peut-être déjà constaté en consultant la dernière de couverture qui indique dans la rubrique À paraître : plus rien la série est finie, si vous aviez été plus nombreux à acheter les albums on aurait volontiers continué. Il y a un signe avant-coureur en page 15 quand le libraire est classé dans les espèces en voie de disparition. Il y en a un deuxième en page 41 avec la mention que les finances de BD Boutik ne sont pas au mieux. Page 69, Bernard Dolcevita annonce à sa caisse enregistreuse qu'il faut qu'il lui fasse un aveu avant de fermer boutique : ça y est, c'est dit. En lisant ces gags en recueil plutôt que dans le journal de Spirou, cela donne l'impression que les auteurs savaient qu'ils allaient mettre un terme à leur série et développe ce thème comme à la fois une réalité au premier degré (l'équilibre fragile d'une librairie spécialisée) et une métaphore de la clôture de la série. Il est donc question de déstockage, de prix cassés, de raréfaction des clients, de libraire se reconvertissant en éditeur, de perte de la motivation. Les gags font toujours mouche, mais comporte une forme de résignation qui n'est pas loin de l'amertume. Les auteurs n'ont rien perdu de leur verve et ils bouclent même de manière visuelle cette thématique : le pot de départ se fait avec des personnages de bande dessiné, à l'instar de la fête du nouvel an.



De plus, le lecteur observe que certains gags se répondent à plusieurs pages d'intervalles, non pas en reprenant un même thème développé différemment, mais avec un éclairage différent. Par exemple en page 12, le libraire se transforme en agence de voyage, conseillant les clients, alors qu'en page 82 sa vie est devenue une pièce de théâtre, dans un registre différent pour chaque moment, passant ainsi de la tragédie au boulevard. En page 44, Bernard Dolcevita évoque l'accélération du cycle de vie d'une bande dessinée, avec un client. Le contraste est total avec le délai qui s'est écoulé entre la parution de deux tomes successifs d'une série BD (5 ans entre le tome 3 et le tome 4 de Zombillénium, d'Arthur de Pins). Régulièrement, les auteurs surprennent le lecteur avec une réflexion pénétrante sur la relation à la bande dessinée, comme l'évolution de ce qu'il y trouve en prenant de l'âge, en page 64, de l'émerveillement devant les dessins sans pouvoir lire les phylactères, jusqu'à sa dimension politique ou son importance artistique en atteignant une certaine compréhension.



Les séries ne sont pas éternelles, et les auteurs peuvent avoir envie de passer à autre chose, ou être contraints de passer à une autre création. Le lecteur de bande dessinée est forcément ému à l'idée de la fermeture d'une libraire spécialisée BD, et l'arrêt d'une série qu'il a suivie pendant plusieurs tomes. Il est conscient de la chance de bénéficier de ce septième tome, d'auteurs qui parlent sa langue, qui lui parlent de sa passion avec justesse, humour et émotion.
Commenter  J’apprécie          70
Animal lecteur, tome 6 : Un best-seller sin..

Voilà j'ai tout lu ce que ma médiathèque proposait sur cette série. Et ce 6ème tome m'a fait beaucoup de bien : c'était un petit divertissement au milieu de lectures un peu arides que je m'impose en ce moment.... et étrangement, même si ça reste toujours un peu répétitif, je m'amuse encore à ces lectures.

Commenter  J’apprécie          70
Animal lecteur, tome 3 : On peut pas tout l..

Et hop, voici le 3ème tome, avalé comme les deux premiers : telle une affamée en une seule fois : c'est toujours aussi efficace.

Alors j'ai aussi dans cette lecture découvert quelques subtilité du langage du lecteur de BD, en autre quand il parle d'une lecture segmentée en petit épisode. Une notion qui m'a beaucoup amusée, parce qu'il m'arrive de faire ce genre de remarque dans mes critiques mais pas du tout avec la même arrière pensée....

Aussi, je tiens à préciser que lorsque je dit qu'il est préférable de ne pas lire une BD en une seule fois, cela ne signifie pas - pour moi - qu'il s'agisse d'une lecture de chiottes !..
Commenter  J’apprécie          70
Marcinelle 1956

En Belgique, le Bois du Cazier est indissociable de cette phrase terrible "tutti cadaveri" qui scella la catastrophe de mars 56. Dans ce superbe album graphique en noir et blanc, Sergio Salma entreprend de nous relater la vie des immigrés italiens employés au fond de la mine et les jours qui précédèrent cette date funeste.



Il nous présente Pietro, mineur de fond, rêvant d'un quotidien meilleur; il mêle vie familiale, rejet, amour et nostalgie dans un dessin superbe et émouvant. Une ambiance et une époque magnifiquement rendues !
Commenter  J’apprécie          70
Marcinelle 1956

Intelligent et sensible.



Une tragédie comme celle du bois du Cazier à Marcinelle, en 1956, c'est loin historiquement, et géographiquement. Des tragédies dans les mines, il y en a beaucoup. Celle de Marcinelle, voici plus de 50 ans, n'a jamais quitté les consciences belges (et encore moins celle de la région "du centre", comme on l'appelle).



262 morts, à la suite d'une manoeuvre maladroite. Mais qui sonne quand même comme la chronique d'une catastrophe annoncée. Même si l'auteur ne prend pas cette voie, facile, vers les patrons pourris et avides au gain.



Sergio Salma nous livre une oeuvre intelligente, ai-je dit. Car il choisit de recadrer le tout dans un contexte plus large (tout en restant au niveau des individus): le Plan charbon de van Acker au lendemain de la seconde guerre mondiale. L'immigration massive d'Italiens qui sont appelés "macaroni", moqués, insultés, et qui trouvent en Belgique une seconde patrie. C'est l'histoire de deux frères, fictive et pourtant si "réelle". Un se trouve bien en Belgique, Pietro, l'autre rêve de l'Italie, d'où les tantes envoient du fromage et du saucisson.



C'est la Belgique, pluvieuse et froide, et les charbonnages, noirs et impitoyables.



Récit intelligent car on retrace l'année 1956 à travers Pietro et son rapport au monde, aux autres, à la mine, et à la famille, aux femmes aussi.



Sensible car pudique. Car humain. Pietro, on l'aime pour ses faiblesses et ses doutes. On ne s'appesantit pas sur la mort et le désastre. Il se lit dans ces visages simplement croqués, dans les postures de gens simples, directs, déracinés. Même l'histoire d'amour, cette séduction maladroite pleine de non-dits et d'incompréhension entre Pietro et une jeune blonde, est très puissante et tendre à la fois.



C'est par ailleurs très bien documenté. La salle des pendus, les wagons, la vie quotidienne dans la mine, les chevaux, etc. tout est d'un réalisme de bon aloi. Les gueules noires, la vie au fond du trou... Les quelques discussions entre frères sur l'Italie, la place en Belgique, etc. c'est aussi très bien rendu.



A une époque où l'immigration est honnie, haïe, où l'on crache à la tête de l'immigré, il est bon de se plonger dans un bout de son passé.



Une belle réussite, idéalement suivie d'un court dossier pédagogique bien vu. Mention particulière pour les affiches de l'époque, encourageant la production de charbon, exhortant les travailleurs qui oeuvrent pour le bien commun...
Commenter  J’apprécie          60
Marcinelle 1956

Je ne vais pas répéter la quatrième de couverture. Juste ajouter que la construction du roman graphique commence et se termine le 8 août 1956, par l’accident et par les tentatives de sauvetage, début et fin qui enserrent les sept premiers mois de 1956, pour montrer le quotidien de Pietro Bellofiore et de sa famille. Ce personnage de Pietro est vraiment intéressant : Italien d’origine, et bien entouré par toute sa « smala » (femme et fiston, frère, copains du même village en Italie), il se démarque des autres parce qu’il n’a aucune envie de retourner dans son pays natal. « Mon pays c’est celui qui me donne à manger » proclame-t-il. Aussi, plutôt que d’économiser pour rentrer et s’acheter quelque chose au pays, il s’offre une Vespa, pour ne plus pédaler douloureusement avant et après des journées à la mine épuisantes. C’est la Vespa qui lui donne l’occasion de rencontrer Françoise, fille d’un colon belge au Congo. Une rencontre qui répond sans doute au désir inconscient d’intégration de Pietro. Comme l’explique Sergio Salma à la fin du livre, les difficultés de compréhension entre la Belge et l’immigré italien sont une sorte de métaphore du malentendu entre l’ouvrier italien du fond et le belge en surface, qui a provoqué la catastrophe le 8 août au matin.



Au delà de ce personnage de fiction et de l’aspect romancé (pas lourd du tout), c’est le travail des mineurs de fond qui est montré, leurs conditions de travail, le racisme envers les « Macaronis » dont l’Italie a été contente de se débarrasser contre des tonnes de charbon et que la Belgique a attirés avec des promesses dignes de l’Eldorado pour mener la « bataille du charbon », déclarée priorité nationale après la seconde guerre mondiale. Mais les premiers temps en Belgique n’ont pas été aussi roses que les affiches de propagande qui les recrutaient en Italie, loin s’en faut. Par exemple, les ouvriers italiens ont d’abord été logés dans des baraquements qui avaient servi pour les prisonniers de guerre allemands… (Ceci dit, j’ai vu un reportage à Manoppello, un petit village italien qui a perdu vingt-huit ressortissants dans la catastrophe, et dont les descendants des victimes disent que l’Italie n’a rien fait pour eux à ce moment-là, ce sont les Belges qui se sont bougés pour eux – vous me direz, on leur devait bien ça…). A travers le personnage de Françoise, c’est aussi la Belgique des années 1950 qui est évoquée, le contraste avec les ouvriers, le colonialisme.



J’ai beaucoup aimé le traitement graphique de cette histoire par Sergio Salma : un dessin en noir et blanc très clair, réaliste évidemment mais aussi très sensible, un découpage judicieux, et surtout de nombreuses pages sans paroles qui montrent la routine, la pénibilité du travail, les heures passées au fond, à 975 ou 1035 mètres sous terre, sans remonter en surface, des jours et des jours où la solidarité entre mineurs n’est pas un vain mot. Un dossier en fin d’ouvrage rappelle les enjeux de la bataille du charbon, l’immigration italienne, les jours et les jours d’attente qui ont suivi la catastrophe avant que les sauveteurs puissent enfin remonter les corps des 262 victimes, dont 139 Italiens. On peut essayer de s’imaginer les galeries où le feu a pu se propager rapidement grâce à la ventilation permanente et se nourrir du bois qui étançonnait les tailles, la fumée toxique, le noir complet dans lequel ont été plongés les mineurs, les tentatives de sauvetage avec des moyens dérisoires face à l’ampleur du drame. Seules 13 personnes ont pu sortir vivantes du brasier, le jour même ou le lendemain. Le dernier corps a été remonté au jour en décembre… 1957.



Un sujet social et un ouvrage de mémoire poignant, indispensable.
Lien : http://desmotsetdesnotes.wor..
Commenter  J’apprécie          60
Nathalie, tome 1 : Mon premier tour du monde

Nous faisons connaissance avec une petite fille fan de géographie et de voyages.



Maman dépressive, papa au boulot, elle s'invente des histoires plus drôles les unes que les autres avec son petit frère qui est le "cobaye" de ses expériences.
Commenter  J’apprécie          60
Mademoiselle Louise, Tome 1 : Un papa cadeau

J'ai adoré cette bd extraordinaire qui montre que tous les cadeaux du monde ne peuvent remplacer la présence d'un papa!
Lien : http://www.edilivre.com/la-v..
Commenter  J’apprécie          60
Marcinelle 1956

Un accident mortel dans les mines de Marcinelle.

Une plongée dans la vie d'homme et de famille des mineurs d'origine Italienne.
Commenter  J’apprécie          61
Animal lecteur, tome 3 : On peut pas tout l..

Qui est Animal Lecteur ?? Il est juste à côté du sommaire lorsque vous lisez le magazine Spirou.



Ce sont les histoires courtes d'un libraire de BD. Ces rêves, ces cauchemars, le client exigeant, la cliente indécise, l'amateur, le collectionneur....

On se demande presque s'il n'y a pas du vécue !!



Vous ne voyez toujours pas ?? C'est dommage.

Maintenant qu'il est édité en album (3 tomes) vous n'avez plus d'excuses ;-)
Commenter  J’apprécie          60
Animal lecteur, Tome 1 : Ca va cartonner !

Je ne suis pas réellement fan des bd d'humour avec des strips. Généralement, cela ne m'interresse guère. Le format de celle-ci est plutôt original et invite à la lecture. Par ailleurs, du même auteur, j'avais grandement apprécié son Jacques le petit lézard géant.



Là, on retrouve le même humour assez fin avec ses chutes plutôt marrante. J'ai passé un agréable moment à cette lecture légère et c'est ce qui compte finalement pour une bd de divertissement.



Le fan de bd est analysé sous toutes ses coutures. Il y a beaucoup de vrai dans ces situations racontées. La qualité est au rendez-vous et perdure même dans le second tome.



Il n'y a pas ce sentiment de répétition que l'on rencontre souvent dans ce genre. C'est alors une bonne surprise.
Commenter  J’apprécie          50
Bagdad ko

Le début des années 2000 fut marqué par les attentats du Word Trade Center et par la vengeance de l'Amérique à l'égard de l'Irak. Tout le monde a entendu parler du fameux mythe des armes de destruction massive ayant abouti à l'envahissement de ce pays pour du pétrole et accessoirement pour la destitution de son dictateur.



C'est vrai que cela paraît maintenant loin les années George W. Bush. On se focalise actuellement sur Donald Trump tout en oubliant la guerre coûteuse en vie humaine mené par l'un de ses prédécesseurs qui a sans doute fait plus de mal au monde. Cette bd permet sans doute de restituer les choses à ce niveau même si l'actualité est un peu datée.



J'ai bien aimé les différents gags même si c'est parfois assez cynique avec les dures réalité de la guerre. On voit également comment les journalistes ont été manipulé par le pouvoir politique. Les GI ne seront pas non plus épargnés car certains d'entre eux étaient tout de même assez limité d'esprit malgré le courage dont ils ont fait preuve.
Commenter  J’apprécie          50
Animal lecteur, tome 3 : On peut pas tout l..

Ce tome fait suite à Animal lecteur, tome 2 : Il sort quand ? (2011) qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant, mais ce serait dommage de s'en priver. Il s'agit donc du troisième tome d'une série humoristique, constituant une compilation de gags en 1 bande verticale, chaque page comprenant 1 bande. Il se présente sous un format original : demi A4 vertical, avec des bandes verticales (par opposition à l'habitude des strips qui se présentent sous la forme d'une bande dans laquelle les cases se suivent à l'horizontal). Il est initialement paru en 2012, écrit par Sergio Salma, dessiné par Libon. Ce tome comprend 92 strips. Comme l'annonce le sticker sur la couverture, il commence par une introduction de Jean van Hamme, scénariste de séries comme Thorgal, Largo Winch, Les maîtres de l'orge, XIII. Comme le laisse le supposer la mention citant son nom, c'est le geste qui compte, car elle tient en 2 lignes.



Le personnage récurrent de ces strips est le Libraire. Son nom a été prononcé dans le tome précédent : Bernard Doux, libraire à BD Boutik. Il travaille souvent seul, parfois avec un employé ou avec un stagiaire. Il reçoit régulièrement de nouveaux arrivages, et il doit gérer le retour des invendus. Bien sûr il voit défiler différents types de lecteurs, pas forcément assez à son goût, mais parfois trop d'un certain type. Il donne des conseils de lecture. Il oriente le client vers une bande dessinée correspondant à ses désidératas. Il prend lui-même conseil auprès des représentants des maisons d'édition. Il doit faire face aux évolutions du métier, que ce soit les rééditions en intégrale, les séries dérivées, ou les produits sous licence.



Dans les premiers gags, il commence par utiliser l'avis négatif d'un père outragé par la vulgarité d'une BD, pour le transformer en argument de vente pour un lecteur avide de récits épicés. Il doit ensuite donner le change auprès d'un client pour lui faire l'article sur une bande dessinée qu'il n'a pas lue. Il est confronté au comportement d'un enfant venant prendre une bande dessinée et l'emmenant sans payer, comme il peut le faire avec un fichier sur internet. Il doit gérer le relationnel avec des publics aussi divers que les diffuseurs, les éditeurs, les distributeurs, le banquier et les clients. Il se laisse déborder par l'arrivage pléthorique des bandes dessinées à mettre en place en novembre en prévision des fêtes de fin d'année. Il accueille un client ayant décroché de la bande dessinée il y a 40 ans, et qui retrouve exactement les mêmes titres en rayon. Il essaye de soutenir un éditeur prenant conscience de la surproduction actuelle, de l'ordre de 5.000 titres par an. Etc.



En entamant ce troisième tome, le lecteur se demande s'il est vraiment possible que les auteurs se renouvellent assez pour éviter de se répéter, ou même une forme de routine autour des mêmes thèmes, centrés sur le nombre ingérable de nouveautés, les clients qui ne savent pas ce qu'ils veulent (ou qui le savent trop bien) et les trucs et astuces pour fourguer sa camelote. Il s'agit d'ailleurs d'un a priori assez paradoxal, parce que dans le même temps, il espère bien retrouver ces thèmes mettant en scène Bernard Doux, pour un effet de familiarité rassurante et réconfortante. Effectivement le pauvre libraire est envahi par les cartons de nouveautés en novembre, les auteurs mettant littéralement en scène un embouteillage de cartons devant la devanture de BD Boutik. Effectivement, les clients vont de l'individu entré par erreur et tenant un discours équivoque (il se plaint des effets de la vieillesse, et il cherchait en fait une pharmacie), à l'expert qui sait distinguer les manhwas des mangas, et les tebeo des stripverhalen. Pour autant, même avec ces thèmes déjà abordés, le lecteur ne ressent de redite, car Libon & Salma ont acquis assez de confiance en eux-mêmes pour s'aventurer sur le terrain du registre de comique absurde. Par exemple, Libon représente les cartons disposés comme dans un embouteillage ne pouvant plus avancer, et s'invectivant les uns les autres comme des automobilistes énervés. Pour pouvoir fourguer sa camelote, le Libraire se retrouve à jouer du violon à un client, ou encore grimé comme un clown, et même en train de faire du trapèze.



Au fil des 92 gags, le lecteur se rend compte que les auteurs abordent un nombre conséquent de sujets, et qu'ils sont diversifiés. Il ne s'agit pas uniquement de voir un client venir demander quelque chose d'impossible ou le Libraire essayer de faire acheter une bande dessinée improbable ou d'un intérêt limité. Ils abordent des sujets aussi divers et variés que les critères relatifs de la qualité d'une lecture en fonction de la personnalité du lecteur; la répétition des arguments de vente par des personnes qui n'ont pas lu un ouvrage, la génération du tout gratuit (= génération internet), la caractère indémodable des valeurs sûres (Tilleux, Franquin, Macherot, Alix & Lefranc, Blake & Mortimer), l'accélération des phénomènes de mode (une nouveauté chassée par une autre dans la journée), la précarisation des auteurs de BD, la starification (saint van Hamme priez pour nous), le décalage qu'il peut y avoir entre une œuvre et son auteur, la compulsion consumériste, les liseuses électroniques, la gadgetisation de la BD reléguée au stade de cadeau promotionnel, la quadrature du cercle pour un éditeur de BD tout public, les dédicaces en boutique, les études de marché. Les auteurs n'hésitent pas à évoquer des plaisirs rendus étrangement coupables (comme la lecture de BD aux toilettes), ou l'universalité thématique des Schtroumpfs.



Arrivé à la fin du quatre-vingt douzième gag, le lecteur garde à l'esprit les thématiques récurrentes, sans avoir l'impression qu'elles aient été matraquées ou utilisées jusqu'à l'écœurement, avec plutôt une impression (justifiée) de diversité. Par la force des choses, il s'est retrouvé dans le comportement de plusieurs clients, généralement différents en fonction de son âge. Il peut même porter un regard réflexif sur son positionnement, suivant qu'il reste avide de nouveautés et convaincu qu'il reste des continents entiers (de la BD) à explorer et que chaque semaine apporte son lot de découvertes, ou qu'il estime avoir fait le tour de la question et que 99% de la production n'est que redite, généralement de qualité inférieure. Il en arrive ainsi à se positionner entre ces 2 extrêmes. Il se reconnaît aussi dans l''attitude de l'acheteur potentiel en boutique, ne sachant pas quoi acheter face à la profusion de produits, ou au contraire allant droit au but. Il ne peut que sourire devant quelques comportements compulsifs, comme la soif de voir arriver le tome suivant d'une série. À chaque fois, Libon & Selma se montrent pertinents et incisifs, poussant la logique jusqu'au bout. C'est ainsi qu'un lecteur tient, dans ses mains, le tome 11 de la série Le curé des étoiles, le jour même de sa sortie et qu'il demande au Libraire quand sort le tome 12. Ils savent également inverser le point de vue, avec un auteur produisant à une vitesse prodigieuse, ce qui permet au Libraire de répondre à un autre client que le tome suivant devrait arriver en boutique d'ici une heure ou deux.



Comme dans le tome précédent, le lecteur a la bonne surprise de découvrir que malgré le format très contraint d'un gag en 4 ou 5 cases superposées verticalement, les auteurs réussissent à introduire de la variété visuelle. Libon continue de représenter les personnages de manière caricaturale, à commencer par le gros nez du libraire, mais les autres personnages ont également un nez déformé, et souvent avec des yeux plus gros que la normale et tout ronds. L'artiste peut ainsi exagérer les expressions du visage pour des effets comiques. Les personnages sont souvent représentés en plan taille, avec une réelle expressivité, soulignée par le mouvement de leurs mains ou de leurs bras, et l'inclinaison de leur tête. Libon représente également des personnages en pied en train de se déplacer, d'accomplir un mouvement, de manipuler un objet, et assez régulièrement en train d'interagir avec un accessoire ou un élément du décor. Il ne se produit donc pas d'effet de lassitude qu'il pourrait y a voir avec des personnages évoluant sur une scène avec uniquement un décor en toile de fond, avec lequel ils n'interagiraient pas.



En outre, Libon & Salma ont conçu plusieurs gags visuels, une demi-douzaine, qui attestent de leur capacité à raconter une blague avec une chute, sans l'aide de mot, ou avec une unique précision ou une unique réplique. Ils prennent soin de raconter chaque histoire autrement qu'avec seulement une suite de têtes en train de parler. Bien évidemment la majeure partie des gags (57 sur 92) se déroule dans le décor de la librairie BD Boutik. Mais au gré de leur fantaisie, les auteurs savent aussi emmener le lecteur dans la chambre d'un mourant, sur la scène d'un théâtre, dans une église, dans un monastère au moyen-âge, sur les créneaux d'un château fort, sur un banc dans un parc public, devant la vitrine de BD Boutik, dans un désert de western, etc. Ils évoquent aussi le temps d'une case Gaston Lagaffe, en un hommage sincère et émouvant à Franquin, avec Gaston s'étant aménagé un repère douillet au milieu des livres des archives du journal.



Le lecteur ressort de la lecture de troisième tome avec le sourire aux lèvres, l'impression d'avoir lu une vraie bande dessinée, le plaisir d'avoir exploré des thèmes évoquant sa passion nourris de la propre passion des auteurs, réconforté par la force de la vocation de Bernard Doux même quand il vante les mérites d'une bande dessinée qu'il n'a pas lue, ou quand il fait preuve de démagogie éhontée pour caser ses produits. Il ne peut qu'être sensible aux critiques adressées aux liseuses électroniques, surtout s'il est lui-même resté attaché au papier. Il s'est reconnu à moult reprises dans le comportement de tel ou tel client, avec quelques tendances obsessionnelles dans la pratique de sa passion pour la BD. Il constate que Libon & Salma font en sorte de ne pas rester en milieu confiné en situant une partie des gags en dehors de la librairie spécialisée, et en évoquant d'autres acteurs de l'industrie de la bande dessinée, les auteurs bien sûr, mais aussi les diffuseurs, les éditeurs, les distributeurs et les représentants. Bien sûr, il cautionne entièrement leur jugement de valeur sur le fait qu'acheter une BD en grande surface, c'est le mal. Enfin, il se demande s'il ne va pas lui aussi aller brûler un cierge en évoquant saint Van Hamme.
Commenter  J’apprécie          50
Nathalie, tome 4 : Le monde est petit!

Un très bon cru de la série, avec le tonton gaffeur qui n'est pas toujours au mieux de sa forme, et Nathalie qui fait pis que pendre avec son petit frère, jusqu'à le peindre en bleu (schtroumpf) pour essayer de faire rire sa mère !
Commenter  J’apprécie          50




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Auteurs proches de Sergio Salma
Lecteurs de Sergio Salma (537)Voir plus

Quiz Voir plus

Chanson pour un homme !

De Guesh Patti ♪ ♫ .... , .... Oh ! Tiens-le bien Baisers salés salis Tombés le long du lit de l'inédit Il aime à la folie Au ralenti je soulève les interdits Oh ! ♪ ♫

Eugène
Etienne
Arsène

10 questions
81 lecteurs ont répondu
Thèmes : chansonCréer un quiz sur cet auteur

{* *}