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Citations de Stéphanie Kalfon (118)


Stéphanie Kalfon
• Son rire, c’est une flute enchantée, c’est Mozart.
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• Je me demande souvent par où passent les correspondances psychologiques qui travaillent à l’intérieur des relations humaines, les travaillent à la manière de l’humidité dans le bois.
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Un jour, un passant me dit :
- Je sais ce que vous vivez, ça porte un nom, il s’agit d’un deuil. Un deuil blanc.
- Blanc ?
- Oui, c’est quand la personne qu’on a perdue n’est pas morte, elle existe encore, mais on ne la retrouvera jamais.
Blanc. Cette pensée me jette dans le vide.
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A la maison, jour après jour, l’atmosphère familiale s’épaissit et se leste d’un supplément gravité sans chantilly. Ce que nous avons le plus en commun ce n’est plus un foyer, mais d’avoir perdu le sens de l’humour. Nous vivons beige.
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Les familles sont fragiles je trouve, comme les châteaux de cartes. Il suffit que quelques neurones cessent de jouer leur rôle miroir pour que la familiarité qui nous lie aux autres s’évanouisse. J’ai cru que c’était la nuit qui avait englouti ma fille, mais cette nuit avait eu lieu en moi. Mon cœur était juste, mais mon cerveau avait faux.
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Je suis professeure de peinture aux Beaux-Arts de Paris, j’ai l’œil, je sais identifier mon enfant comme un artiste reconnaît les différences entre le tableau qu’il a peint et celui qui a été parfaitement recopié par un faussaire. Les anomalies, les erreurs du copiste, aussi subtiles soient-elles, sautent aux yeux du peintre car il est lié à son œuvre par une inaliénable familiarité.
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Nos mains se rencontrent, elle me remercie, n’empêche, aucun contact, nos peaux sont silencieuses, entre ma fille et moi ce n’est qu’un rien qui passe. Je suis déçue. Quand j’essaye de comprendre, j’achoppe sur une fourche logique : ou bien j’ai un sérieux problème, ou bien nos retrouvailles sont ratées. Je bute, oui, mais mon cerveau trouve une sortie et s’ouvre malgré moi vers une troisième voie d’explication : si je ne ressens rien, c’est parce que ce retour est une fiction. Contrairement aux apparences, je n’ai pas retrouvé ma fille !
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Incipit :
J’ai perdu ma fille Nina la nuit du neuf novembre deux mille vingt-deux, date de son anniversaire. Pour ses huit ans, Paul et moi l’avions emmenée dans une fête foraine. Les stands étaient dressés sur le parking d’un hypermarché en périphérie de la ville. A l’époque se trouvait un chantier en contrebas et d’imposants travaux. Je me souviens des grues au long cou, d’une forêt immobile, de la joie de Nina quand elle a aperçu la Grande Roue. « Ce qu’elle a grandi, la petite ! » a dit Paul. Avant la naissance de ma fille, je ne connaissais pas la taille de mes rêves, je veux dire, leurs dimensions réelles. Grâce à sa présence, j’ai pu mesurer leurs étroitesses, leurs immensités et, parfois aussi, leurs inaccomplis. Nina tient entre ses mains mes forces vives : pour elle, je peux dépasser l’impensable.
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D'où vient cette lenteur? Cette lente heure qu'on ne passe plus ensemble, qu'on ne depassera pas [...] Il est quelle heure? Nocturne.
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Le souvenir qui lui reste, c’est l’absence de certitude d’avoir été seulement aimée. Un manque de souvenirs. Le souvenir d’un manque.
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Elle ne dit jamais bonjour la mère de Kate, elle s’écarte en faisant un geste devant son visage comme si l’autre était nauséabond. Puis elle crache sa toux derrière sa main et reste plantée là dans l’entrée. Elle attend que son nouveau mari lui enlève son manteau, comme si elle était trop précieuse pour le faire elle-même, « parce que je n’ai pas dormi » dit-elle d’un ton toujours accusateur de sorte qu’en face chacun se sente un peu coupable. Voilà, c’est fait. En moins de temps qu’il ne le faut pour enlever son écharpe, elle vient de pulvériser tout plaisir de vivre. L’espace commun est devenu un cimetière, tout le monde étouffe sauf elle qui est bien guillerette maintenant « eh bien vous en faites une tête, qu’est-ce que vous avez ? » dit-elle, joyeuse. Elle est comme ça la mère de Kate… tellement désagréable que lorsqu’on l’est en retour elle ne s’en rend même pas compte.
Il faut dire qu’elle a un allié de taille : son second mari. Discret à souhait, regard effacé, sourire plat comme un filet d’air tiède. Son corps est aussi épais que le liseré d’une porte bien fermée sur un couloir éteint. Derrière cette porte, combien d’abnégations, de couleuvres avalées cul sec, de caprices, de violences, et pourtant… et pourtant il y trouve son compte. Oui, on dirait qu’en prenant toutes les places, sa femme le dispense d’exister. Elle l’en décharge et il l’aime pour ça. Il l’aime pour la mort qu’elle trimballe, pour chaque mot infesté d’amertume qu’elle prononce et par où elle étrangle et piétine les heureux. Sa femme tue, et il se tait. Elle enjambe les cadavres, et lui, il ramasse les corps.
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INCIPIT
Elle m’a appelée plusieurs fois pendant les vacances. En vérité, elle voulait savoir si le sordide était déjà entré dans ma vie, ou si elle aurait une chance de me le dire elle-même. Elle tenait à me l’annoncer en face. Elle et moi. Mère et fille. Seule à seule. Me convoquer, choisir précisément le lieu, le moment et la manière, choisir ses mots, l’heure, sa tenue vestimentaire. C’était sa mise en scène, la fabrication précise et implacable de son mensonge. «Tu sais, les vacances, c’est fait pour tout couper, profite bien alors, au revoir!»
De nous deux, ma mère est la seule à savoir que mon amoureux est mort. Elle croit qu’en ne le disant pas, ça changera quelque chose au réel. Comme si elle avait tout pouvoir sur le monde, qu’elle dictait à la réalité comment se comporter. Plus tard, elle répétera en pleurant: «Je voulais que tu passes de bonnes vacances. Je voulais te protéger. J’en étais malade, j’en ai parlé à tout le monde. On avait tellement peur que tu l’apprennes. On était tous d’accord.» En attendant, au même moment sur terre, il mourait à cause d’une bombe terroriste, un boulon propulsé dans la tête au niveau de la tempe. La planète entière était au courant. Sauf moi.
Tous les journaux parlaient de sa mort. Il était devenu un simple prénom, «Jeff», désormais réduit par les titres à une familiarité de circonstance. Devenu un fait divers qui divertit, un décès sur qui l’indécence de chacun avait sa petite opinion… mourir si jeune, c’est pas de chance, et puis cette guerre, on n’est pas à l’abri, personne n’est à l’abri, ce garçon est un symbole! Alors lui et sa mort défilent en continu sur les chaînes de télévision. Mais répéter ne ressuscite pas, au contraire, ça banalise. Ici une pleine page, là un encart, un entrefilet, puis au fil du temps: une brève. Brièveté de la vie. Rapatrié enterré passé décomposé. Au même moment, ma mère m’appelle en continu et demande: «J’espère que tu t’amuses bien ma chérie, profite, c’est les vacances!» et elle raccroche. Ma tristesse, ignorant tout, attend sagement à la marge des papiers du soir, dans la blancheur de toutes les absences.
Ma mère vient me chercher à l’aéroport. Le supplice commence par les embouteillages qui gonflent dans mon cœur périphérique l’intérieur sans confort d’un cercueil à venir. Elle a préparé au millimètre le scénario morbide où elle se donne le premier rôle. Au début, forcer de trop son sourire. Juste assez pour alerter mais ne rien dire. Il s’agit de m’affoler en silence, de préférence. Il faut que je pressente, oui, pas encore que je sache. Pas ici. Non. Trop tôt. Pas dans la voiture. Pour l’instant, c’est elle qui veut tout savoir « alors raconte, comment c’était Marbella? Il n’a pas fait trop chaud? Ce que t’as bronzé, t’es toute belle! Et la ville c’était bien? Vous avez visité un peu?». Moi, je dois tenir mon rôle: rester bien assise à la place du mort, et divertir en faisant de ma vie une gazette. Être son clown et son oxygène, comme d’habitude. Il faut parler, parler, c’est épuisant, mais pas seulement. Pour elle, l’aimer c’est la déchiffrer. Si bien qu’elle se tourne vers moi pour exhiber dans son regard un presque rien indexé au contraire du sourire. Voici le stigmate, l’indice, le signal. Je suis sommée de remarquer la contradiction de son visage, cette mauvaise conscience flirtant avec le sentiment du devoir accompli. Le voir ce remords, oui, comme on remarque une nouvelle ride dont on ne dit rien, bien entendu, par convenance. Aimer c’est convenir, non?…
Or pour être convenables, on doit être pareilles. Elle croit pouvoir ressentir à ma place, imaginer penser aimer à ma place. Lui dissembler est une menace. Je dois la contempler et être d’accord, ça va sans dire, surtout sans dire. En un mot: être son synonyme. Voilà le sens de ma vie.
Elle gare la voiture dans le parking, insiste pour prendre ma petite valise à roulettes, «mais enfin, c’est trop lourd, laisse-moi faire» et on rejoint l’appartement. Elle défait son manteau d’une manière agitée mais très lente, comme elle en a le secret. Je réalise soudain qu’elle a fait en sorte qu’il n’y ait personne d’autre qu’elle, moi et le silence. Nous trois. Pas de père, ni de beau-père, pas de témoin. Tout est en place pour transformer mon drame en traumatisme, par l’alchimie d’une recette dont elle seule connaît les disproportions.
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Car les fantômes sont les silences qui nous peuplent et nous dépeuplent. Ils sont invisibles et sonores, comme des demi-soupirs. Ils sont une absence, un manque, un raté, le bruit au loin du froissement d'un déni. Ils sont ce qu'on attend. Ici une personne, là-bas un retour. On attend des excuses, une réparation, la fin d'un mensonge, la sortie d'un chagrin. Certains attendent que la vie recommence, ou de tomber amoureux, que la souffrance finisse, un peu plus de respect, un changement infime, un réchauffement, un pardon, un sourire, un geste.

Mais tout ce qu'on attend d'impossible nous maintient impuissants.

Être malheureux, c'est attendre un fantôme.
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[Jeff] partira somnambule, groggy et heureux, en traînant dans sa tête un vers de René Char : "Impose ta chance, serre ton bonheur et va vers ton risque. À te regarder, ils s'habitueront." La poésie n'a jamais protégé de la mort.
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On n'envie jamais les gens tristes. On les remarque. On s'assied loin. Parfois on se rapproche pour mesurer les kilomètres d'immunité qui nous tiennent à l'abri les un des autres, et puis on repart chez soi. Les gens tristes, c'est comme les timides: ils vous donnent tout et vous prennent tels que vous êtes. Ils sourient souvent, possible oui, possible. Ils sont familiers trop vite, mais quand il y a du monde il se tiennent à carreau. les gens tristes ils sont enthousiastes d'un rien parce qu'ils s'ennuient de tout. S'ils parlent trop longtemps leur densité s'aggrave, et ainsi vont leurs idées noires. Les gens tristes sont peuplés de cimetières, mais ils ont peur de la mort. Il y a dans le fond de leur âme quelqu'un de perdu qui ne reviendra pas. Et qui rapetisse. Heureusement, les naissent et se ressemblent.
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Quand ces deux-là se sont rencontrés, rien ne présageait qu'ils s'entendent. Ils étaient trop similaires, trop arrogants, hypersensibles. Pourtant, leurs liens furent profonds, ambigus, graves, en un mot: existentiels. Il y avait de l'admiration, possible oui, possible, un grand respect, un étonnement, un malaise, de l'humour et surtout, une tendresse. Une grande tendresse, comme deux frères pleins d'orgueil mais incapables de se fâcher très longtemps, sinon pour le plaisir de se revoir. Ce qu'ils attendaient de la musique les rapprochait. Ils étaient de la même facture et tous deux voulaient marquer l'histoire.
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En attendant, il faut être ici avec eux, sans pause, c'est épuisant. On ne peut jamais disparaître tranquillement, se réfugier dans l'intime, non, il faut participer. Etre un homme, une femme, un citoyen, une personnalité ou un parvenu qu'importe, il faut être, et de préférence pliable, rangeable, étiquetable. Alors Satie se force. Mais il ronge son absence comme un frein, il la reporte, la mâchouille et quand il n'en peut plus, il pique une colère sur tous les prétextes possible, histoire de créer un endroit imperméable où les autres n'ont plus du tout envie de venir le chercher. Sauve qui peut le monde ! Pour les colères, Satie était le meilleur, le Maestro. C'était son art de vivre, sa signature de vie pourrait-on dire.
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Il y a une couleur Satie. Le gris. Et un mystère Satie: sa chambre finale, à Arcueil, rue Cauchy. Un lieu apocalyptique, comme l'envers de sa vie. Un lieu pour soi, à soi, qui nous dit l'état de son âme. Et qui fait sa légende. Lorsque ses amis ont ouvert la porte de cette chambre, le jour de sa mort, ils ne s'en sont pas remis. Ils ont manqué d'air. Là-dedans, c'était le vrac à l'état pur. Le chaos. Les coulisses d'un homme libre et musical, né pour créer et non pour vivre.
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