Avec la participation des autrices Caroline Lamarche, Stéphanie Leclerc et des auteurs-illustrateurs Simon Bournel-Bosson, Thomas Lavachery.
Et la classe de 4èmeA du collège Saint-Michel, Guéméné-Penfao (44).
Un grand merci à la professeure Claire Blet.
Avec la participation de Cécile Ribault Caillol pour Kibookin.fr
Avec le soutien de Wallonie-Bruxelles International et du Centre Wallonie-Bruxelles Paris.
Avec la séquence La Tête dans les images
Salah Elmour, Sauvage, texte de Layla Zarqa, trad. de l'arabe Nada Issa, le port a jauni
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J'ai remarqué que les morts ne se contentent pas d'être enterrés et oubliés. Ils continuent d'exister. Nous vivons avec les morts autant qu'avec les vivants. Tout le monde le sait mais préfère l'ignorer. C'est pourtant une vérité assez incontestable. Allumez la radio, regardez la télévision, ouvrez un livre: les morts appartiennent à notre quotidien. Chanteurs morts, acteurs morts, écrivains et poètes morts inlassablement continuent de s'adresser à nous. Anonymes mais non moins présents sont les morts familiaux, tous ces ancêtres décédés dont nous conservons quelque part - dans le salon, au cimetière, dans notre patrimoine génétique - une trace : une photo, un objet intime, une pierre tombale marquée d'un nom, des yeux bleus, un trait de caractère...
Les morts sont là, partout, toujours. Ils nous accompagnent. Ils nous parlent. Et sans même y prêter attention, nous les entendons, nous les écoutons, nous recevons leurs messages.
-Tu écris quoi?
-Je m'amuse à réfléchir sur ma position actuelle sur l'état de mon coeur, dans cette époque de ma vie.
Le jour suivant, il perdit une dent et trouva un billet de 5 euros sous son oreiller. Et le jourd'après encore, il se passa quelque chose. Douleurs, joies, ennuis, jeux, chaque jour apportait son lot de vie, chaque nuit un rêve chassait l'autre. C'est ainsi que le temps empoussière quil les minéralise, en fait des statues qu'il recouvre d'un drap et repousse aux confins des greniers de la mémoire. Le message du cerf finit par disparaître parmi les dizaines et les centaines d'autres messages que le petit garçon recevait continuellement de l'univers, cette multitude de bouteilles à la mer qui venaient s'échouer sur les rivages de sa conscience, et que parfois il ouvrait, parfois non. Il oublia, n'y repensa plus jamais.
Ma mère et moi avons été heureux ensemble jusqu'à ce que j'aie dix ans. Entre nous deux l'amour coulait de source. Après ça a été plus difficile, je ne sais pas pourquoi. Quand j'ai grandi, elle m'a moins aimé. Elle a dit de plus en plus souvent que je tournais mal. C'est plus facile de dire que les enfants tournent mal. D'ailleurs, c'est peut-être vrai. Quand on les aime moins, les enfants tournent mal."
Moi, je n'étais pas amoureuse d'Alexandre, alors je n'ai pas pris latin, et je n'étais pas amoureuse de Ludo, alors je n'ai pas fait de théâtre. Moi, je n'ai pris aucune option facultative, et ma seule activité extrascolaire depuis des années, c'est la natation. Et il n'y a rien à en déduire sur ma vie amoureuse : aucun beau gosse ne vient barboter avec moi dans le grand bassin.
Il ne faut pas se laisser atteindre par le chaos du monde. Il existera toujours.
- Écoute, mec, je ne sais pas ce que tu cherches, et je ne te demande pas de me le dire. Sans doute que c'est important pour toi. Mais peut-être que tu cherches quelque chose que tu as déjà. Quelque chose qui est ici. Dans le présent, dans le futur, dans nos gestes de tous les jours, dans les gens qu'on aime bien et puis dans tout le reste.
Et peut-être que le passé mérite juste de rester dans ces cartons. Qu'est-ce que tu en penses?

- TU CROIS VRAIMENT QU'ON A BESOIN DE ça
EN CE MOMENT ?
Je comprenais ce qu'elle voulait dire. En même temps, on pouvait aussi en discuter calmement. Pas la peine de s'énerver. Je ne me sentais même pas ivre. Juste léger et bienheureux. Était-ce un mal étant donné les circonstances ? Je ne croyais pas, non. Je ne savais pas trop comment engager la conversation sur un mode plus serein. Il valait mieux attendre qu'elle se calme.
- BIZARRE ! vociférait ma mère. GOTHIQUE ! DIABÉTIQUE ! ET MAINTENANT ALCOOLIQUE ! UN SACRÉ BOULET, HEIN !
Heureusement qu'elle ne m'avait pas vu fumer.
- Je sais, je sais, ai-je bafouillé sur un ton que je voulais conciliant. Je sais que l'alcool c'est pas bien. Mais d'abord, je ne suis pas saoul, et ensuite je me sens bien. C'est sûr que les alcooliques ont tort. Ils boivent trop. Il faudrait peut-être leur dire d'envisager l'alcool pas comme un loisir, tu sais, avec les bars, la musique, la fête, tout ça, mais comme... (j'ai réfléchi afin de bien préciser ma pensée), mais comme un médicament (j'étais fier de ma trouvaille) ! Parce que ça détend vachement quand même. Je me sens bien. Si bien si tu savais. Par exemple tu gueules et ça me fait rien. Je ne suis pas stressé ou tendu, rien. Toi aussi tu devrais boire quelque chose. ça te détendrait.
J'étais bavard, bavard, bavard. Je ne pouvais pas m'arrêter de parler. Ma mère fulminait.
Il ne faut pas se laisser atteindre par le chaos du monde. Il existera toujours. Mais le bonheur aussi existera toujours. Il faut juste le vouloir. Et y travailler. Pour qu'il dure.
- Ça dénote quand même une certaine pauvreté de pensée, ces onomatopées, ces approximations...
-Ouais...
Il se trompait. Ma pensée allait bien. Si je parlais mal, c'était parce que je parlais le langage du monde tel que je le connaissais, et si je parlais mal à lui précisément, c'était parce qu'il me parlait peu, et que je ne voyais pas pourquoi j'aurais fait des efforts pour lui faire plaisir.