AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Tatiana Tibuleac (44)


De mon temps, les crayons étaient tendres et les enfants, au contraire, avaient des os durs et encaissaient beaucoup.
Commenter  J’apprécie          112
Si je retire de la liste ceux qui ont fait des études supérieures, puis ceux dont la mère s’est coltiné un demi-cochon et des kilos de beurre, afin de les faire réformer, les couards et les petits malins, les pacifistes et les repentis, et les témoins de qui sait quel saint, qui resterait-il pour combattre dans une guerre ?
Commenter  J’apprécie          20
Elle m’avait surprise un jour avec un livre qui racontait l’histoire d’une princesse qui s’était couchée sur un petit pois et qui n’avait pas pu dormir à cause de lui. "C’est avec des conneries comme ça que tu perds ton temps ?", m’avait-elle demandé.
Commenter  J’apprécie          20
Ma maladie avait une dénomination en seize lettres. Celle de la maladie de Jim n’en avait que dix ; et Kalo n’avait même pas de maladie, tout au plus une espèce d’affection post-traumatique.

(pp. 18-19)
Commenter  J’apprécie          30
Maman s’habillait de façon encore plus ridicule. Elle était encore plus laide. Elle avait des pantalons, des corsages et des dessous encore plus immondes que toute l’usine, les employées et les crustacés puants réunis.

(p. 10)
Commenter  J’apprécie          30
Je lui ai demandé s’il savait ce qu’il ferait après sa tante, avant que nous partions pour Amsterdam, mais il m’a dit qu’il ne ferait rien. Comme nous tous, d’ailleurs. Les riens ne feront rien.

(p. 8)
Commenter  J’apprécie          30
De plus, le dernier jour d’école, nos professeurs auraient ri de n’importe quoi, rien que de nous voir partir.

(p. 8)
Commenter  J’apprécie          30
Qu’est-ce qu’elle nourrit en nous, la littérature, pourquoi on lit, toujours assoiffés, pourquoi on écrit, inassouvis à jamais, quand les mythes ont déjà tout dit, quand les anciens ou les modernes ont déjà tout écrit ? Puisque tôt ou tard les gens subissent les mêmes épreuves et se posent les mêmes questions, les histoires à raconter sont rarement originales, pense la jeune écrivaine, sommée de formuler sa vision de la littérature après le succès rapide de son premier roman. La littérature est l’art du comment, écrire repose sur la beauté des questions en train d’être appréhendées et non pas sur la sagesse des réponses.

(pp. 4-5)
Commenter  J’apprécie          30
Tatiana Tibuleac
Enfin anonyme au cœur d’une ville [Paris] où tout un chacun rêve de célébrité, cela a libéré ma plume.
Commenter  J’apprécie          40
Elle est cruelle, abrupte, intraitable. Tatiana Țîbuleac n’a pas de pitié. Elle malmène ses personnages, les roule dans la farine, les manipule, elle nous manipule, nous, lecteurs de chair et de sang, prêts à recevoir chez nous, en intimité, ce taré d’Aleksy et son incroyable histoire d’amour-haine pour une mère aux yeux verts.

(Préface de Cristina Hermeziu, p. 3)
Commenter  J’apprécie          30
J’ai collé mon visage sur sa poitrine, et, entre le deuxième et le troisième bouton, là où sa veste s’était légèrement ouverte, un parfum blanc, jeune, tel une nuée de sucre, a jailli. L’odeur des fêtes, ai-je pensé.
Commenter  J’apprécie          357
En trois heures, le linge que nous mettions dehors encore vaporeux devenait dur comme du verre. Ce sont les robes qui gelaient les premières. Celles de Tamara Pavlovna, longues et plissées, se transformaient en accordéon. Les miennes, courtes et en couleurs, se figeaient dans des positions ridicules, comme si quelqu’un avait dessiné des fils de fer sans tête. Les jupes devenaient des triangles, les chaussettes des serpents, les culottes des mouettes. Plusieurs hivers de suite, j’ai porté un sarafane rouge, en laine de mouton. Il était difficile à essorer, et je le portais dehors encore dégoulinant. Le gel le faisait vite se contracter, et le sarafane transpirait alors de milliers de gouttelettes qui étincelaient comme des diamants. Je les détachais avec mes ongles et les déposais dans le creux de ma main. Mon premier trésor.
Commenter  J’apprécie          410
Que je regarde autour de moi, et que je voie de la beauté, moi aussi ! Cette lumière tamisée. Ce ciel aux étoiles en fuite. Des immeubles, des immeubles, des immeubles. Aucun n’a plus de quatre étages. Aucun ne dépasse quatre fenêtres en largeur. Sa poche a de la fourrure, mes ongles deviennent feu. Par les fenêtres, on distingue des gens de petite taille qui vivent bien. Des milliers de carrés avec une flamme au milieu. Les uns à côté des autres, les uns au-dessus des autres. Ceux d’en bas tiennent les autres par les épaules. Ceux d’en bas sont costauds.
Commenter  J’apprécie          360
Je nais la nuit, j’ai sept ans. Elle me prendrait bien dans les bras, me dit-elle, mais elle a les mains occupées. Une lampe bleue, attachée à un arbre avec un câble, éclaire de haut. Elle se balance. Je tourne la tête en arrière et je la vois mieux : elle est ronde, comme un pain entier. Nous passons les portes de la ville comme on entrerait dans un ventre de pierre.
(Incipit)
Commenter  J’apprécie          315
Tatiana Tibuleac
Anniversaire sur un fil

Pour fêter notre jour,
nous avons partagé la maison comme un gâteau.
Ici nous travaillerons,
ici nous mangerons,
ici nous dormirons,
ici nous resterons seuls,
à tour de rôle,
pour nous rappeler les années
où nous partagions le même lit.

Les enfants n’en meurent pas
je dis à ma mère pour la rassurer.
Tu dois faire attention, je lui dis,
tu es âgée,
tu habites loin.
Ma mère mange des pommes,
elle a une robe neuve,
sa solitude est vieille.
Je ne sais pas de quoi meurent les enfants,
elle me répond. Les miens sont morts par erreur.
Nous vivons sur une marge d’erreur.

(traduction du roumain par Radu Bata)
Commenter  J’apprécie          420
Tatiana Tibuleac
Tout ce qui reste

Encore un peu et je finirai cette carte
des villes où je ne suis pas allée,
des rues où je n’ai pas tenu ta main
par peur de chiens
ou d’autres choses
(mêmes mains, même peur, qu’est-ce que ça change, tu aurais dit)
et nous serions allés plus loin,
toujours plus loin.

Cette carte petite, inutile,
(comme tout ce que j’ai jamais fait, tu aurais dit)
un poumon criblé,
un champ de coquelicots métalliques.
Une aiguille rouge pour chaque jour raté,
Une frontière noire pour chaque non-vérité.
Toutes ces années où je ne t’ai pas vu,
je t’ai montré le monde.

(traduction du roumain par Radu Bata)
Commenter  J’apprécie          60
Tatiana Tibuleac
Une journée ordinaire

(J’ai appris comment on peut se construire une identité
non seulement de ce que tu as
amis surtout de ce qu’on t’a volé)

Les enfants dessinent des familles unies
qui fêtent Noël au mois de mars.
Une playlist avec des contes de fées,
un karaoké avec des cantiques,
les pixels aveuglants du Christ
par-dessus la dinde de Jamie
et nos orgueils sous sédatifs.
Nous suivons le troupeau, chacun comme il peut,
moi – le foie grossi, toi – le cœur aminci,
nous bêlons heureux, les sabots brillants.
Nous ne sommes pas tombés cette fois non plus.
Tendresse à prix réduit pour le Black Friday,
de l’humus,
des plans
et des bougies (au cas où).
À la fenêtre noire de l’écran,
grand-mère attend ses neveux comme à une porte.
Nous ne craignons plus les dépenses.
Pendant les fêtes, les morts s’enterrent tout seuls.

(traduction du roumain par Radu Bata)
Commenter  J’apprécie          50
Je cherchais à comprendre pourquoi tous ces événements s’étaient déroulés comme ils s’étaient déroulés. Je me suis demandé si cet été passé avec maman faisait partie d’un plan plus vaste et, si oui, lequel. J’avais du mal à croire que ce fût un plan de Dieu – c’est-à-dire du Dieu polonais, je n’en connaissais pas d’autre –, le même qui avait perdu Mika comme on perd une paire de gants, qui avait rendu grand-mère aveugle et qui avait affecté à maman un cancer enragé. Mais, d’un autre côté, je crois que cela a été notre été.
Commenter  J’apprécie          50
Maman savait depuis le printemps qu’elle avait un cancer et nous étions déjà en juillet. Les médecins lui ont laissé entre trois et cinq mois d’espérance de vie, et l’ont incitée à signer une décharge indiquant qu’elle refusait tout traitement. Maman n’a pas signé, mais elle est partie sur une idée fixe, mourir en France, qui était le plus beau pays du monde. Il ne lui restait qu’à me convaincre de l’accompagner, mais cela, vous le savez déjà.
Commenter  J’apprécie          30
Elle m’a demandé si je voulais du pop-corn ; j’en voulais. Et de la bière ? Et de la bière. C’était notre petit déjeuner préféré – certes malsain, mais qui se souciait de santé dans notre cas ? Un corps rongé par le cancer et un cerveau malade. Cet été-là, nous nous sommes autodétruits plus que toutes les autres années mais nous n’avons jamais été aussi pleins de vie.  Maman ressemblait à une plante d’intérieur qu’on avait sortie sur le balcon. Moi, à un criminel lobotomisé. En fin de compte, nous avions fini par être une famille.
Commenter  J’apprécie          50



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Tatiana Tibuleac (49)Voir plus

Quiz Voir plus

Politique et littérature

Les Romantiques français, dans leur jeunesse, étaient plutôt réactionnaires et monarchistes. Quel est celui qui a connu une évolution qui l’a conduit à être élu sénateur siégeant plutôt à gauche ?

Stendhal
Chateaubriand
Hugo
Mérimée

11 questions
272 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}