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Citations de Thierry Paquot (60)


Personne ne s’étonne de trouver un(e) philosophe dans un amphithéâtre ou une bibliothèque. Pas plus du reste que de l’entendre s’exprimer à la radio ou à la télévision sur « la violence », « la peur », « le bonheur », « le bien », « le foot », « l’obésité », « la mort », Facebook , ou d’autres sujets dignes du baccalauréat. Certains d’entre eux se sont même spécialisés en philosophie du droit, de la technique, des médias, de la bioéthique, du don d’organe, que sais-je encore ! Mais pour la ville, les banlieues, l’urbain, vous repasserez ! Dans les banlieues qui rencontrent-nous ? Des sauvageons, des rappeurs, des tagueurs, et bien sûr des banlieusards, selon un large éventail de types socio-générationnels, mais point de philosophe ! Pourtant on nous raconte que la philosophie est fille de la ville, que c’est à l’ombre de la stoa (le « portique » en grec, d’où le « stoïcisme » qui désigne l’école des philosophes qui se retrouvaient à cet endroit) que des hommes, plutôt jeunes, discutaient entre eux, et que ces échanges d’idées et de raisonnements constituaient leur corpus philosophique également constitué de dialogues.
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Exister, c'est se lever.
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Le médiéviste Jacques Le Goff explique comment l'Eglise, qui avait imposé son temps liturgique à l'ensemble des sociétés médiévales en le rythmant au son des cloches (le clocher est une invention des VIe et VIIe siècles), va, à partir du XIIe siècle, être concurrencée par le « temps des marchands », temps laïc, temps du travail « salarié », temps urbain par excellence. Il insiste sur un fait, pas assez étudié : à son avis le « glissement significatif de l'heure dite de la none, heure de la pause et du repas dans le haut Moyen Age où elle se situait aux alentours de quatorze heures, s'opère vers le moment de midi. Sur le chantier urbain naît ainsi au XIVe siècle une nouvelle entité de mesure concrète du temps : la demi-journée ».

1090 - [p. 32]
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Thierry Paquot
« “Habiter” est un verbe qui impressionne, qui dit plus qu’il ne contient, qui se prend pour une corne d’abondance, s’ouvre telle la boîte de Pandore, se charge de tous les désirs clandestins que le vaste monde adopte comme possibles.
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Les Pays-Bas, de leur côté, se trouvent par endroits au-dessous du niveau de la mer, entraînant de récurrents affrontements contre la montée des eaux qui laissent parfois certains territoires totalement inondés. Le calendrier des catastrophes égrène ses dates funestes : 1170, 1219, 1251, 1277, 1282, 1337, 1395, 1421, 1530, 1809, 1825... Chacun connaît la blague selon laquelle Dieu a créé le monde et les Hollandais la Hollande. Elle possède sa vérité : les Hollandais ont dû apprendre à dompter les eaux en inventant des systèmes de retenue, des canaux, des polders, des constructions sur pilotis, des maisons flottantes... Les Hollandais sont aussi les premiers à prendre au sérieux les effets du réchauffement climatiques sur la montée des eaux, en conséquence de quoi ils déplacent des maisons, des hôtels et des équipements de bord de mer sur des sites mieux protégés et interdisent toute construction à proximité du rivage.
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De la même manière que certains promoteurs ont ambitionné (et continuent de le faire) d'édifier le plus haut gratte-ciel, des architectes ont rêvé de construire la barre la plus longue : la Caravelle de Jean Dubuisson, à Villeneuve-la-Garenne, s'étend sur 385 mètres ; la cité du Haut-du-Lièvre de Bernard Zehrfuss, à Nancy, 700 mètres (en deux morceaux, le "Cèdre bleu" fait 400 mètres et le "Tilleul argenté" 300).
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Personne ne regrette qu'un Jean-Paul Sartre ou un Michel Foucault pourtant engagés pour la légalisation de l'avortement ou pour une amélioration des conditions carcérales,ne se soient jamais prononcés sur les grands ensembles, l'architecture autoritaire de tel tribunal et l'urbanisme indécent de bien des quartiers de villes ou de villages. Pourtant, les técis sont remplies d'hommes et de femmes qui philosophent. Avec leurs mots à eux, ils parlent de leur vie, de leurs difficultés et aussi de leurs plaisirs et surtout de leurs espérances. Un philosophe y trouverait du grain à moudre, non ? Partout où l'existence est en jeu, c'est-à-dire en question, le philosophe est requis. La philosophie, ne l'oublions pas, est une activité et non pas une action. Elle exige une écoute, une interprétation, une proposition. Prenons, par exemple, un philosophe qui réside en banlieue. Celle-ci devient son « terrain » - au sens de l’anthropologue qui mène une enquête en un lieu précis parmi une population particulière - , et lui apporte la matière première brute de sa réflexion. Tout s’impose à lui sous forme de questionnement : Qu’est-ce qu’habiter en un territoire déconsidérée ? Pourquoi la ségrégation se manifeste-elle à la plus ouvertement qu’ailleurs ? En quoi une population est-elle stigmatisées par son habitat, son adresse, son voisinage ? Comment un adolescent vit son passage à l’âge adulte alors meme qu’aucune promesse de futur ne lui est faite ? Vous me direz, ces questions se posent à chacun, n’importe où. Certes, mais elles ne sont ni hors-sol, ni désincarnées. Il s’agit d’Ahmed ou de Sophie, de Kevin ou de Charlie qui loge dans le bâtiment B, appartement 7236 de la cité « Le Clos joli » à Aulnay-sous-Bois, à Bobigny ou dans les quartiers déshérités aux confins du Havre, de Lyon ou au coeur même de Marseille.
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Une ville, par définition, est composite, sensorielle, rythmique ; elle ne peut se résumer à un plan-masse et une grille d'équipements, chacun d'eux rapporté à un ratio valable en tout temps et en tous lieux. C'est cela le paradoxe du "grand ensemble" : il est conçu pour le bonheur d'habitants-abstraits par des décideurs qui ne connaissent pas ces habitants-en-vrai et qui s'étonnent de leur ingratitude, du moins ce qu'ils jugent comme tel. Le "grand ensemble" dépossède tout résident de son art d'habiter et lui impose avec la remise des clés de son appartement un mode d'emploi normé et normalisateur. C'est "grand", oui cela ne fait aucun doute. Mais "ensemble" ? Non, pas "ensemble", plutôt "identique".
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Dans un livre d'histoire progressiste de la ville productiviste, ces "objets" auraient été célébrés, encensés. Or il convient d'entreprendre une géohistoire critique environnementale qui contrebalance, éclaire, corrige, dénonce, revisite et réécrit l'histoire dominante, convenue, bardée de certitudes, qui figure dans la plupart des ouvrages et continue à être imperturbablement enseignée. Nous voyons ça et là des signes de cette tendance qui, je l'espère, ne fait qu'émerger et va enfler au point de balayer ce qu'elle dénonce. En ce qui concerne l'urbanisation des territoires et des populations ("l'urbanisation des moeurs"), le logement, les villes, les modes de vie et les pratiques des citadins, tout reste à faire. Cela devient d'autant plus urgent que l'imitation qui affecte le milieu des professionnels de l'urbanisme et de l'architecture et des élus politiques - et parfois même des habitants - répand à l'échelle planétaire des modèles qui uniformisent les architectures, homogénéisent les manières de penser et de faire les milieux habités et nient toute réflexion critique. Or nous avons besoin d'expérimentations nouvelles pour rompre avec ces modèles du "toujours plus", devenus profondément antagoniques à ceux du "toujours mieux".
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Habiter, c'est d'abord investir un lieu, se l'approprier. Aux dimensions purement métriques d'un volume bâti, se joignent les dimensions affectives qui construisent le vécu des habitants : c'est l'usage qui qualifie l'espace, et non l'inverse.
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Après l'aliénation par le travail industriel, si bien décrite et analysée par Marx, l'aliénation par la consommation, explorée et dénoncée par Günther Anders, Herbert Marcuse, Jean Baudrillard, ou encore Henri Lefebvre ou Bernard Charbonneau, l'aliénation par les les technologies, dont les mécanismes ont été révélés par Lewis Mumford, Jacques Elul ou André Gorz, l'aliénation du corps de chacun, dorénavant confisqué par l'idéologie de l'"homme augmenté", que diagnostiquent Michel Foucault, Ivan Illich, Barbara Duden, ou Jean-pierre Dupuy, il nous faut nous préoccuper de l'aliénation spatio-temporelle. La biopolitique à l'oeuvre, en effet, ne s'emploie pas seulement à contrôler les territoires (logement, commerce, loisir, travail, etc.), elle cherche aussi à définir les emplois du temps (organisation du travail, rythmes du quotidien, absence de "temps morts", valorisation de la seule vitesse comme mesure du progrès et de l'excellence, etc.).
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Nous vivions déjà dans un monde où le pouvoir financier était dominé par les géants de la technologie qui avaient amassé une telle richesse qu'elle était comparable à un âge d'or. Opérant dans des nuages post-politiques loin du contrôle démocratique ( à part les représentations théâtrales occasionnelles pour nous assurer qu'ils n'ont rien à cacher), ils avaient une vision d'une société en réseau, où la mondialisation ne consistait pas à nous faire voyager à travers le monde, mais à faire venir le monde jusqu'à nous au cœur de nos maisons. Ce n'est pas une coïncidence si des entreprises comme Amazon et Facebook sont les plus à même de profiter de cette crise. Nous n'avons désormais d'autres choix que de vivre des vies virtuelles.
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Le meilleur ami de l'homme est le livre. Toujours disponible, de jour comme de nuit, d'humeur égale, ayant toujours une nouvelle histoire à raconter, un bon mot à prononcer, une référence à indiquer. Il est là, discret, debout sur une étagère ou allongé sur une table. Il ouvre ses pages sans fausse pudibonderie, heureux d'être caressé, manipulé, apprécié. Il n'aime pas trop qu'on le prête, car il a ses habitudes, ses horaires et ses voisins de rayonnages ou de piles branlantes, mais il sait que son propriétaire est si content de le partager avec un autre lecteur qu'il accepte de bonne grâce de changer de mains. Le livre est si fidèle que, de retour d'une escapade chez un étudiant ou un collègue, il n'ose confier à son propriétaire qu'il est resté abandonné dans une vieille sacoche ou a été hâtivement feuilleté dans les toilettes. Bref, qu'il est bien content d'être de retour dans une maison amie. Une maison amie des lettres, de l'encre et du papier. De tous les caractères, en quelque sorte... (p. 212)
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Thierry Paquot
Plus j’y pense, plus il faut mettre des pluriels partout.

Conférence "La ville poétique", ENSASE.
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Comme les grands ensembles, les centres commerciaux, les gratte-ciel et les gated-communities, les "grands projets" favorisent irrémédiablement l'enfermement et l'assujettissement.
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Tout musée des arts et métiers, disait encore Paul Virgilio, devrait comporter des salles dédiées aux erreurs, dérapages, pertes et autres incidents produits par toute nouvelle technologie. La société technicienne commence seulement depuis quelques décennies, et encore très marginalement, à intégrer le risque, la précaution et la responsabilité dans ses raisonnements, alors qu'ils sont enchâssés dans chaque progrès et qu'ils doivent en accompagner et en réorienter les évolutions. De même, des auteurs "oubliés", plus ou moins volontairement, réapparaissent dans les rayonnages des librairies et dans les notes de bas de page, subitement auréolés de la qualité des "pionniers" ou de "précurseurs". Mais tout cela ne suffit pas pour produire une autre manière de penser ensemble le "progrès" et ses "accidents".
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Paul Virilio rêvait d'une "université du désastre" qui recenserait et expliciterait les "accidents" propres à chaque type de "progrès".
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En effet, le touriste massifié est un habitué du confort, il vérifie tout à partir de son cellulaire, mini-ordinateur, qu'il consulte en permanence et par lequel il communique à ses réseaux qui l'informent en temps réel de ce qu'il doit voir, faire, manger, visiter tout en lui indiquant ses droits au cas où son voyagiste ne respecterait pas le contrat. Ce touriste massifié se met lui-même sous surveillance pour surveiller l'organisation...
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Si, comme je le suggère, l'urbanisme est le moment occidental de l'urbanisation planétaire, alors son règne se termine et ses derniers feux (projet du "Grand Paris", clusters, aérogares, centres commerciaux, gratte-ciel, etc.) viennent d'être allumés par ses ultimes thuriféraires. Déjà percent d'autres façons de faire, non pas de la ville, mais de l'urbanisation avec, sans et contre les villes. J'y reviendrai. Cette mise en question permanente d'un savoir-faire, sans toujours un savoir sur le faire - ici l'urbanisme, mais aussi l'architecture, le paysage, la conception-lumière, l'art urbain, etc. - exige de collecter des données produites par des champs disciplinaires différents, ce qui annonce, là encore, la fin de la domination disciplinaire et la pratique de l'indisciplinarité, le croisement des informations, l'expérimentation, l'enquête, la confrontation, le débat...
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Tout ouvrage possède, avoué ou non, un mode d'emploi, qui peut être, selon Paul Valéry, modifié ou détourné par le lecteur...
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