Citations de Thomas Bronnec (92)
On a tous le droit au respect de l'intimité.
Ici, à Bercy, dans les banques, on ne parle que d'argent. L'argent, tout le temps. On parle valeur, on oublie les valeurs.
Les choses s'annoncent mal, sans doute, mais cela aurait pu être pire. Il n'aime pas se demander ce qu'il aurait dû faire différemment. Les regrets, c'est pour les faibles.
Il y en a toujours quelques-uns qui viennent équipés de leurs jumelles et qui s'installent le plus près possible du palais pour scruter les fenêtres et s'efforcer d'apercevoir un membre de la cour qui s'affaire dans son bureau.
Ouvrir les jardins au peuple, c'était l'une de ses grandes idées. Parfois il descend saluer les badauds, contraint par leur présence et un reste de préséance. Ils viennent jusque chez lui et il resterait cloîtré à l'intérieur comme s'il était assiégé ? Leur voyeurisme et leurs insultes, il peut les supporter. Mais leur saleté, leur égoïsme…
Toute la vérité apparaissait dans sa lumière crue, pour qui savait lire entre les lignes. Si, dans sa version finale, le rapport conservait le même esprit, et s'il tombait entre les mains des médias, il pouvait se révéler dévastateur. Il y avait là tous les ingrédients d'un nouveau scandale politique.
Un homme de l'ombre, que le grand public n'apprendrait jamais à connaître, mais qui serait derrière chacune des décisions d'une femme qu'on voyait, et qu'on continuerait à voir, chaque jour sur les chaînes d'information en continu, dans les matinales des radios, sur les sites web, dans les pages des magazines.
Au royaume des organigrammes les symboles pesaient lourd, et il était le meilleur pour les manier.
Elle avait quarante-six ans et, plus que la ménopause avec laquelle il allait falloir apprendre à cohabiter, c'était sa vue qui la faisait vraiment entrer dans un autre âge. Elle qui avait toujours eu une vision parfaite supportait mal le brouillard qui s'installait quand elle attrapait un livre – même si, des livres, elle n'avait guère l'occasion d'en parcourir depuis qu'elle avait été nommée.
Quand le président l'avait appelée pour lui proposer les Finances, elle avait d'abord cru à une plaisanterie. Elle lui avait demandé en riant : « Pourquoi moi ? J'ai fait des études littéraires ! — Tu sais faire des additions et des soustractions, non ? La technique, ça s'apprend, avait répondu le président. Tu bûcheras la nuit pendant deux mois et tu seras au niveau.
L'histoire aussi d'une femme qui n'avait jamais cessé d'affirmer son indépendance d'esprit autant que son indépendance financière. Elle s'était mariée avec un entrepreneur qui l'avait toujours soutenue dans le combat pour l'égalité hommes-femmes. L'histoire enfin d'une politique pour qui la fin justifiait les moyens et à qui l'opinion pardonnait ses écarts avec la bienséance autant qu'avec le droit. C'est pour cela qu'elle était populaire.
Elle n'arrivait pas à lui en vouloir. Pire, elle trouvait presque émouvante cette incontinence liée au bonheur de la retrouver et n'arrivait pas à y voir l'un des effets de la vieillesse sur ce compagnon de la première heure, témoin silencieux de son ascension politique depuis près de quatorze ans, gravée dans le marbre de l'opinion par la grâce du storytelling imaginé par ses communicants.
je les comprends aussi, les Viets. Qu' est-ce qu ' on leur apporte, dis-moi ? La liberté ? Laquelle ? On les oblige à quitter leurs maisons, leurs villages, on leur parle comme à des animaux, on brûle leurs terre et on bute leurs compatriotes. Si des types comme nous venaient en Californie et faisaient le quart de ce que, nous, on fait ici, tu crois qu' on les accueillerait avec des fleurs ? (p52)