Walter SCOTT Le plus grand romantique anglais ? (France III Nationale, 1962)
Un extrait de lémission « Analyse Spectrale de lOccident », par Serge Jouhet, diffusée le 16 décembre 1962 sur France III Nationale. Un entretien avec Michel Drucker.
Oh! Quelle inextricable toile nous tissons, lorsque nous commençons à nous exercer au mensonge.
-- Mon honnête ami, dit le prieur, si le tintement de tes clochettes n'avait pas étourdi ton entendement, tu pourrais savoir que "Clericus clericum non decimat"; ce qui veut dire que nous, hommes d'Eglise, ne consumons pas les ressources hospitalières les uns des autres, mais préférons demander cela aux laïcs, leur donnant ainsi une occasion de servir Dieu en honorant et en secourant ses serviteurs désignés.
-- Il est vrai, répondit Wamba, que moi, n'étant qu'un âne, je suis cependant honoré de porter les clochettes tout comme la mule de votre Révérence; il n'empêche que je croyais que la charité de notre Mère l'Eglise et de ses serviteurs pourrait, comme on dit de la charité bien ordonnée, commencer par soi-même.
Nous ne sommes que deux, mais à malin malin et demi.
La musique nous cause un double plaisir, une sensation mêlée de surprise, quand la personne qui l’exécute n’est pas visible à nos yeux. Elle nous rappelle alors le concert d’oiseaux cachés parmi les feuilles du bocage.
(...)...pourquoi le chien peut suivre à la piste les pas de l’homme, tandis que l’homme, cet animal plus noble, n’est pas en état de suivre les traces du chien.
—Il arrive souvent, répondit Louis avec beaucoup de gravité, que ceux qui sont doués de la science prophétique n'ont pas le pouvoir de prévoir les événements qui les intéressent personnellement.
—Avec la permission de Votre Majesté, c'est comme si l'on disait qu'un homme ne peut voir son bras à la lumière d'une chandelle qu'il tient à la main, et qui lui montre tous les autres objets de l'appartement.
—La lumière qui lui montre le visage des autres ne peut lui faire apercevoir le sien, et cet exemple est ce qui prouve le mieux ce que je disais.
Si tu lis les Écritures, dit la Juive, et les vies des saints, seulement pour justifier ton libertinage et ta débauche, ton crime est le même que celui de l'homme qui extrait du poison des plantes les plus salubres et les plus utiles.
— Par Dieu et par saint Denis, si vous ne payez pas la rançon supérieure, je vous pendrai par les pieds aux barreaux de fer de ces fenêtres, jusqu'à ce que les milans et les corneilles vous aient réduits en squelettes ! A vous de parler, chiens de Saxons, que proposez-vous en échange de vos misérables vies ? Que dites-vous, l'homme de Rotherwood ?
— Moi, pas un liard, répondit le pauvre Wamba, et pour ce qui est de pendre par les pieds, j'ai le cerveau à l'envers, à ce qu'on dit, depuis toujours, depuis le premier bonnet de bébé qu'on a attaché sur ma tête ; donc, me mettre la tête en bas pourrait par aventure le remettre en place.

Les convives étaient placés à une table qui pliait sous le poids des mets. De nombreux cuisiniers, qui suivaient le prince dans ses voyages et qui avaient mis en oeuvre toute leur science pour multiplier les formes sous lesquelles les provisions ordinaires étaient servies, avaient réussi, presque aussi bien que nos professeurs actuels dans l’art culinaire, à les rendre complètement méconnaissables à la vue.
Outre les produits indiqués, il y avait là une foule de friandises venues de l’étranger, et une grande quantité de pâtisseries de luxe, ainsi que des pains et des gâteaux savoureux employés seulement sur les tables de la haute noblesse. Des vins exquis, tant indigènes qu’étrangers, mettaient le comble au luxe du festin.
Mais, bien qu’adonnés au luxe, les seigneurs, en général, n’étaient pas d’une race intempérante. En se livrant aux plaisirs de la table, ils recherchaient la délicatesse et évitaient les excès, et avaient l’habitude de reprocher l’ivrognerie et la gloutonnerie aux Saxons vaincus, comme des vices inhérents à leur basse condition.
Sous les prétextes les plus futiles et les plus déraisonnables, ainsi que sur les accusations les plus absurdes et les plus vaines, [les Juifs] et leurs biens étaient abandonnés à tous les caprices de la fureur populaire ; car les Normands, les Saxons, les Danois et les Bretons, si hostiles qu’ils fussent les uns aux autres, rivalisaient de férocité envers une nation que chacun se faisait un devoir de haïr, de vilipender, de mépriser, de piller et de persécuter. Les rois de la race normande, et les seigneurs indépendants qui les imitaient dans tous leurs actes de tyrannie, maintenaient contre cette nation sacrifiée une persécution permanente et intéressée.