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Citations de Wilfried N`Sondé (184)


J'avais plié sous la brutalité avec laquelle on m'avait traité et m'étais tu, mais personne n'arriverait jamais à supprimer ma relation avec l'au-delà. J'avais la certitude que le fanatisme était une imposture, le doute qui parfois s'était immiscé dans le cœur même des apôtres était un passage essentiel qui avait revigoré leur ferveur. En pays Kongo, le divin m'avait été enseigné dans un bain d'amour d'où toute crainte était exclue, mes pairs avaient rarement évoqué l'enfer et le péché. Dieu devait symboliser la tendresse qui sécurise, console, laisse Ses enfants libres de façonner eux-mêmes leurs destin, et les aide à les réaliser à la lumière du Saint-Esprit. un vent de révolte me traversa le corps : jamais je n'accepterais un Seigneur du tonnerre, strict, qui punirait chaque écart ou désobéissance avec cruauté. La mort m'ouvrait les bras mais mon sacrifice ne serait pas vain. J'étais prêt à lutter, à rester debout au nom du calvaire des suppliciés de l'arbitraire, en souvenir des cendres fumantes des brûlées vives. Je gardais en moi les bruits de métal, les cliquetis sinistres des chaînes qui entravaient les membres prisonniers : enfants, femmes, hommes agonisant dans l'entrepont.
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À côté des corps en décomposition, le trépas se présentait aux malheureux détenus dans toute son horreur. Il s'agissait de les briser un peu plus, de dérégler durablement leurs cerveaux, de les contraindre à accepter les lambeaux d'existence que leurs geôliers daignaient leur accorder comme un bien précieux, et d'anéantir le courage des plus résistants en les poussant à supplier leurs tortionnaires de les libérer de la présence des morts. Les dresser à implorer. Transformer les bourreaux en maîtres, afin que dans l'horreur les otages apprennent à accepter leur condition.
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Wilfried N'Sondé
Dieu, sais-tu? Dieu s'est tu... Ils m'ont vendu.
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Elle [la maîtresse noire et le fils métis du capitaine du navire négrier que celui-ci vend pour "augmenter ses gains"] avait commis l'erreur doublier que l'esclavage était une gangrène qui nous menaçait tous, sa logique consistant à redéfinir la nature humaine à sa guise, pourvu que l'on puisse faire des êtres humains un commerce rentable.
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Tu peux partir l'ancêtre, je ne porte pas de colère, j'ai avec moi des diables et des esprits de grandes bontés, ne manque que la force de retrouver l'amour et la volonté de bâtir pour demain.
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Ils avaient choisi le Raïs Dali comme leur chef suprême de plein gré, et il resterait Dieu et Diable en personne tant qu'il jouirait de leur confiance. Je fus émerveillé par cette idée, nouvelle pour moi, d'une adhésion volontaire à l'autorité. Personne au pays des Bakongos n'avait eu son mot à dire sur la légitimité de ceux qui gouvernaient. Chez nous, le lignage d'un individu justifiait sa place dans la société, la concertation n'existait pas, encore moins la critique. La parole des détenteurs du pouvoir faisait office de loi. Mon univers s'était longtemps limité au Kongo, je me réjouis de me plonger dans un bain de diversité.

[NB : extrait de la description des us et coutumes sur le navire pirate où le narrateur a échoué bien malgré lui]
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Après cela, ils devinrent sourds au son de nos voix, la croix que nous vénérions commença à s'affirmer par la contrainte, forte de sa prétention de substituer aux masques rituels rendant hommage aux esprits anciens. Puis s'installa le règne sans partage de l'argent qui écrasa toute considération d'ordre moral ou spirituel, seuls importaient les produits de luxe, les armes à feu. La séquestration de masse dans des cales sombres comme celles du Vent Paraclet avant le passage vers l'autre côté de l'océan s'organisa méthodiquement, avec une précision effrayante. Et des chaînes de métal pour entraver le corps. Les sordides bijoux de la servitude ornèrent les cous et les chevilles, même de ceux qui s'étaient convertis au christianisme.
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Longtemps je me suis moi aussi persuadé que les étrangers étaient les premiers responsables des catastrophes et des terribles épreuves que subirent les Bakongos. J'ai réalisé bien plus tard que nos hypocrisies, le mépris du prochain, nos aveuglements et surtout notre incapacité à nous remettre en cause furent les sources de notre faillite. J'explore le passé, ce labyrinthe d'angles, de courbes, d'impasses et de caches secrètes, je l'arpente sans cesses. Mon coeur ressent une tendresse particulière pour les esclaves dissimulés dans les ombres de l'histoire du royaume Kongo. En plus des personnes offertes aux différents clans, la Bakongos soumettaient leurs ennemis, mais aussi ceux qu'ils qualifiaient de déviants, toutes celles et tous ceux à qui, pour une raison ou une autre, ils n'accordaient qu'une place de second rang. Et même s'ils ne construisaient ni cales à fond de navire, ni chaînes, ni fouets pour assujettir leurs corps, ils les dégradaient de leur qualité d'homme. Et c'était réellement en subalternes livrés à leur bon vouloir qu'ils les traitaient.
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Dans l'entrepont, des centaines de gorges emplie de désespoir râlaient en désordre, des lamentations incessantes. Les esclaves devenaient complètement déments, certains périssaient. Les matelots attendaient que les rangs soient suffisamment clairsemés pour évacuer les dépouilles. Allongés sur trois niveaux d'étagères avec des baquets destinés à leurs besoins, les vivants furent sciemment maintenus, parfois plusieurs jours, dans une horrible promiscuité avec les cadavres : un pas de plus dans la descente vers le sordide. À côté des corps en décomposition, le trépas se présentait aux malheureux détenus dans toute son horreur. Il s'agissait de les briser un peu plus, de dérégler durablement leurs cerveaux, de les contraindre à accepter les lambeaux d'existence que leurs geôliers daignaient leur accorder comme un bien précieux, et d'anéantir le courage des plus résistants en les poussant à supplier leurs tortionnaires de les libérer de la présence des morts. Les dresser à implorer. Transformer les bourreaux en maîtres, afin que dans l'horreur les otages apprennent à accepter leur condition.
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Mais ça sert à quoi l’argent si on s’ennuie à mourir dans le métier qu’on exerce jour après jour, sans joie et sans passion ?
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" Les contours de femmes, d'hommes et d'enfants nus, attachés les uns aux autres par le cou avec des fourches de bambous, progressant sous la trombe torride, se précisèrent.
Ils se déplaçaient laborieusement , les avant-bras recroquevillés contre la poitrine, les poings liés. Je m'attardai sur les mouvements de leurs pieds entravés par des liens qui donnaient à leur démarche une allure lourde de grande fatigue. Ils titubaient pour arriver à suivre la cadence imposée par les sentinelles armées. Je sursautai à chaque claquement de fouet sur leurs dos courbés....."
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Le présent reste un instant qui s'échappe, un point en mouvement continu, à la fois éphémère, minuscule et immense qui charrie avec lui tout le passé de l'univers.
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Quand les mots de l'ancêtre sonnaient fort dans ma petite poitrine, à m'en faire titiber, l'école c'est essentiel !
N'oublie jamais que tu n'est pas chez toi, le fardeau de l'étranger. Sois toujours meilleur que le blanc, autrement il te méprisera.
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Avec tendresse et une point de moquerie, Thérèse me demanda à plusieurs reprises s'il était possible que mes esprits défunts aient fait un si long voyage depuis ma terre africaine. Je lui répondis qu'après la mort, leur essence existait partout, dans toute matière inerte ou animée, dans le souffle du vent, dans les astres du ciel et surtout dans mes pensées. C'étaient eux qui avaient inventé le langage de mon amitié pour elle et nourri mon amour envers mes frères et sœurs humains.
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Ces très jeunes hommes [NB : les matelots] n'existaient que tant qu'ils savaient obéir et trembler sous les ordres, ils n'étaient au monde que pour exécuter ou mourir et n'avaient avec leur supérieurs d'autre relation que la soumission. Pareils aux esclaves qu'ils surveillaient, ils étaient considérés comme des insectes sous les pieds des officiers, tous réduits à l'état de vils ustensiles que les maîtres pouvaient briser à leur fantaisie.
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Les anciens m'accueillirent, me consolèrent puis me congédièrent avec tendresse. Dom Antonio Manuel vivait encore, j'existait en sursis, dans une parenthèse, encombré de chair, d'os et de sang, emprisonné dans les humeurs et l'inconstance des sentiments en attendant la libération, le passage aux espaces invisibles. Les ancêtres me dirent que j'avais l'âge des étoiles, que je me transformais sans cesse et ne disparaîtrais jamais.
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A l'heure de mon trépas, subsistait dans mon coeur un fort attachement à l'existence d'une passion d'amour entre les humains, celle qui transcende la vie sur terre en une expérience sublime.
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Le maître d'hier n'était plus qu'un détenu à la merci de ses geôliers, dépossédé de son destin, la mine déformée par un rictus d'épouvante, les yeux écarquillés espérant un miracle : le masque déshumanisé de la servitude.
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Après cela je fus encore plus déterminé : aucun ordre, ni divin ni humain, ne pouvait justifier une telle ignominie. Il fallait bien des laideurs, de terribles constructions et de véritables artifices pour contraindre les fruits de la création. Je jurai et promis aux esprits des anciens d'aller coûte que coûte au bout de ma mission : rester en vie, rejoindre la Ville Éternelle, m'asseoir aux côtés du Saint-Père, dénoncer et plaider la cause des esclaves, que tout cela cesse.
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Le temps ne va nulle part, il ne s’arrête pas. Le présent reste un instant qui s’échappe, un point en mouvement continu, à la fois éphémère, minuscule et immense qui charrie avec lui tout le passé de l’univers.
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