AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

3.88/5 (sur 78 notes)

Nationalité : Japon
Né(e) le : 06/10/1960
Biographie :

Shun Medoruma (目取真俊) est un des plus importants écrivains contemporains originaires d'Okinawa.

Il a reçu le prix Akutagawa en 1997 pour sa nouvelle « Une goutte d'eau »(Suiteki).

Les thèmes centraux dans l’œuvre de Medoruma sont l'occupation japonaise et la suppression de la culture et de la langue d'Okinawa, ainsi que la présence de soldats américains sur les îles de l'archipel.

Il a également auteur d'un roman basé sur le scénario qu'il avait écrit pour un film (Fuon, 2004, réalisé par Higashi Yôichi).

Source : Wikipédia
Ajouter des informations
Bibliographie de Shun Medoruma   (3)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (26) Voir plus Ajouter une citation
Il pensa d'abord qu'il y voyait mal. Il ne distinguait pas le corps du jeune homme sur le sable, à la place, il y avait comme une grosse masse noire. Puis il s'aperçut que cette forme en longueur, sombre et bombée, frémissait de manière imperceptible en produisant un bruit sec de frottements. Il observa avec attention cette présence au milieu de la pénombre. Soudain, il sentit sa gorge se serrer, comme prise dans les griffes acérées d'un oiseau. Les yeux écarquillés, il venait de saisir l'image d'une multitude de bestioles grouillantes, gonflant comme un amas d'écume. La masse noire n'était autre que le cadavre sur lequel s'étaient agglutinés des crabes. Au milieu des frottements de leurs carapaces humides, de leurs pattes rigides et poilues, Seikichi eut l'impression de les entendre mâcher la chair du jeune homme.
Commenter  J’apprécie          290
Portés par le souffle venant du large, les pleurs du vent se répandaient dans le trou ouvert au fond de la poitrine de Seikichi. Le vacarme des vagues grandissait. Mais les pleurs du vent ne disparaissaient pas.
Commenter  J’apprécie          120
C'étaient les vestiges de l'ancien ossuaire en plein air dont même les vieillards du village ignoraient de quelle période il pouvait bien dater. Quand on y déposait le corps d'un mort, les oiseaux, crabes, ligies des rivages, et puis la brise marine se chargeaient de le transformer en un beau squelette blanc, disaient avec nostalgie les anciens en plissant les yeux comme pour apercevoir au loin ce passé. Akira imagina des squelettes étincelants, à moitié enfouis dans le sable blanc. Ne serait-ce qu'une seule fois, il brûlait d'envie de voir l'endroit de ses propres yeux.
Commenter  J’apprécie          70
La patronne et les autres filles ont tout de suite rappliqué, elles m'ont taquinée, tu t'es trouvé un bon gars, va falloir vite de servir de tes fesses, pas seulement causer, pour ne pas le laisser filer.
Commenter  J’apprécie          80
- Tu as de la chance, lui lança le médecin militaire sur un ton ironique. Tu as eu du pot de tomber pile sur une branche de pin. Sinon, tu serais sans doute mort sur le coup.
Fujii passa plusieurs semaines dans un état de semi-conscience. Outre plusieurs fractures aux bras et aux jambes, sa moelle épinière était touchée, il devait garder une immobilité absolue. Les agents de la police militaire venus enquêter lui apprirent que, selon les déclarations de Kanô, il était tombé par accident. Fujii, sans infirmer ni confirmer, s'enfermait dans un mutisme complet.
De toute évidence, on le soupçonnait de s'être jeté de la falaise pour fuir les attaques kamikazes. Une fois son traitement terminé, il ne pourrait pas échapper à des interrogatoires sévères avant de passer devant un tribunal militaire, mais cela laissait Fujii totalement indifférent. Il dormait plus de la moitié de la journée et, le visage toujours impassible, même face au traitement brutal des médecins, il gardait les yeux fixés sur le plafond souillé. Vers la mi-juillet, il fut transféré dans un hôpital de la ville.
- Vous risquez de rester en partie paralysé.
C'est ce que lui dit, en guise d'adieu, comme si c'était un souhait, le médecin qui s'était occupé de lui, avec un regard froid et un air supérieur.
Les agents de la police militaire étaient venus régulièrement l'interroger mais, les yeux dans le vide, Fujii avait continué à garder serrées ses lèvres desséchées.
Peu après, le Japon perdit la guerre.
Commenter  J’apprécie          60
Akira et sa bande avaient les yeux rivés sur la forme blanche qu'on apercevait dans l'espace obscur. Comme si quelqu'un l'avait délibérément posé là, un crâne se trouvait à l'entrée de l'ossuaire, bien en équilibre. Ses orbites noires fixaient la mer vers le lointain.
A la surface de l'eau, calme jusque-là, se dessina une infime ondulation. En passant au-dessus d'un banc de petits poissons remontant l'estuaire, la houle scintilla légèrement. Des oiseaux diaphanes s'envolèrent, les fines feuilles des filaos se balancèrent lentement et, au milieu du chant des cigales qui résonnait au loin, on entendit comme le son triste d'une flûte.
Akira et ses copains retinrent leur souffle, les yeux fixés sur la forme blanche. Le son provenait du crâne. Un murmure, "Uutôto, Uutôto...", qui ne sortait d'aucune bouche. Le bruit du vent, aigu puis grave, suivit comme une luciole l'étroit chemin obscur au pied de la falaise, traversa le tympan des enfants qui tendaient l'oreille puis descendit jusqu'au fond de leur poitrine avant d'aller se dissoudre dans l'eau froide accumulée au creux d'un vieil arbre.
Commenter  J’apprécie          50
Quand je ferme les yeux, ce qui me revient en mémoire, c'est l'odeur de la pluie en été
Commenter  J’apprécie          71
Quand je ferme les yeux, ce qui me revient en mémoire, c’est l’odeur de la pluie en été. Les gouttes d’eau qui tombaient sur le bitume brûlant s’évaporaient en une brume dansante. A l’abri de la pluie sous l’auvent de l’épicerie du village, ma mère debout derrière moi, sa main posée sur mon épaule, le petit garçon que j’étais regardait l’image vacillante du chemin que nous allions prendre. La pluie et les rayons de soleil perçaient la fine couche de nuages. Les plants de canne à sucre chancelaient sous les gouttes et le chemin goudronné s’étirait au milieu comme un cours d’eau sombre.
Commenter  J’apprécie          50
Tel un serpent se faufilant au milieu des arbres et des bosquets, le vent venait lécher son corps trempé de sueur. Fujii s'allongea sur le dos, sur un lit d'herbes aux pointes aiguës érigées vers le ciel, et regarda les éclairs qui, par intermittence, soulignaient la forme des nuages amoncelés au-dessus de lui. Comme des êtres vivants dont la croissance aurait été accélérée par l'absorption de l'énergie et des particules provenant de la multitude d'humains qui mouraient chaque jour.
Moi aussi les nuages m'avaleront.
Commenter  J’apprécie          40
Un claquement sonore a soudain fendu l'air. Des dizaines de hérons, d'aigrettes et de pluviers s'envolèrent, s'égaillant en tous sens. Nous sommes restés immobiles, regardant les pluviers raser l'eau en piaillant et la nuée de hérons s'éloigner dans le ciel d'un bleu moins intense. Les hérons se sont posés dans un bois de pins et d'acacias sur l'autre rive, à quelques dizaines de mètres, on aurait dit des fleurs de datura qui s'ouvraient.
Commenter  J’apprécie          42

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Shun Medoruma (99)Voir plus

¤¤

{* *}