Les Gastronomes de l'extrême se sont invités dans la revue de presse de Frédéric Vion dans l'émission Télématin le samedi 31 octobre 2015.
"Parce qu'un père, normalement, c'est une figure d'autorité plutôt bienveillante, protectrice..
Alors quand elle se transforme en monstre d'oppression,en une force permanente qui , de haut en bas, vous appuie sur la tête, vous écrase, vous empêche de respirer, et tout ça quand vous n'avez pas dix ans, ça laisse des traces.
On se sent comme un gibier dans une forêt , jamais en repos, le sommeil léger , -------prêt à fuir-------ou bien à lutter----- puisque dans mon cas le Gibier était bien décidé à ne pas se laisser Egorger.."
Depuis que j'avais cinq ou six ans j'adorais Tintin - ce défenseur de la veuve et de l'orphelin devait m'inspirer - mais je n'arrivais pas à lire ses albums autrement qu'en les apprenant par cœur. Cette frénésie était motivée par une peur épouvantable: j'avais l'impression, sans doute justifiée, que ma vie en dépendait, que je ne pourrais sortir de mon milieu et de mon enfance ratée que grâce à la réussite scolaire, qui allait me permettre de remplir au maximum mon bagage de survie. Ne pas dépendre de mon père, de ma famille, de mon milieu, ça ne pouvait passer que par là, je ne voyais pas d'autre issue, j'avais donc intérêt à ne pas me louper.
Et puis un jour, donc, enfin ! Il est mort. C'était la Toussaint, ma mère rentra un soir, le visage décomposé, et nous annonça: "Papa ne reviendra plus de l'hôpital." Je ne sais pas si elle fut choquée de notre réaction, ou même si elle l'avait envisagée. Ni mon frère ni moi ne parûmes ennuyés. Mon frère, qui avait sept ans, ne dis rien. Moi, j'en avais presque onze. Ma réaction fut: "Ah, super, alors on va avoir un chat ?"
En 1900, quand des ouvriers font une grève un peu dure, la troupe tirait dans le tas. Il y a parfois des dizaines de morts, femmes et enfants compris, et tous les journaux ne s'en émeuvent pas. En 1900, dans une famille française, le père a presque tout pouvoir sur sa femme, ses enfants, et sur les domestiques éventuels. On parle alors de la "puissance paternelle", et il faut du courage pour la défier.
Parce qu'un père, normalement, c'est une figure d'autorité plutôt bienveillante, protectrice. Alors quand
elle se transforme en un monstre d'oppression, en une force permanente qui, de haut en bas, vous appuie sur la tête, vous écrase, vous empêche de respirer, et tout ça quand vous n'avez pas dix ans, ça laisse des traces.
à l'extérieur, personne pourtant n'a jamais imaginé ce qu'il se passait dedans, et mon père jouissait
dans le quartier d'une bonne réputation.
je crois pouvoir dire qu'à cause de mon père j'ai vécu les dix premières années de ma vie sous l'empire d'une sorte de Gestapo.
En rentrant du travail, elle trouva mon père assis à califourchon sur une chaise au milieu du couloir de
l'entrée, avec le relevé dans une main et un rictus de triomphe mauvais.
Je me souviens avoir un jour, dans la salle de bains, assister à une scène particulièrement violente de mon père à l'égard de ma mère. j'ai alors couru vers le salon, ou se trouvait un gros cendrier en marbre
qui devait peser de kilos. Je suis revenu à la salle de bains, où mon père était toujours «occupé » sur ma
mère, et je lui ai jeté le cendrier dans les genoux. Il hurla, je me suis pris une raclée, mais j'étais content.
Un jour ma mère ira trouver le commissaire, et lui expliquera la situation : mon père nous menace, elle, mon frère et moi, avec son arme de service. Il a déjà braqué son pistolet sur la tempe de mon jeune frère, bébé, qui n'avait pas un an.