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EAN : 9782955908211
258 pages
Adamastor (11/12/2017)
4.56/5   16 notes
Résumé :
"Avant j’étais une vieille âme endolorie enfermée dans un corps d’enfant, dans une famille, dans une vie dont chaque contour me blessait toujours plus, jour après jour. En partant j’ai éclaté les parois de ma prison, la rage a guéri d’elle-même, je la sens encore palpiter parfois mais de manière tellement inoffensive, si vous saviez, ce n’est plus qu’une ombre de colère qui dort au fond de mes souvenirs. Avant je ne voyais que les murs, ils étaient hauts, ils étaien... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (15) Voir plus Ajouter une critique
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Voilà un bouquin qui commence sur les chapeaux de roues. Clarisse, 13 ans, est en crise perpétuelle. Elle insulte ses profs (ce qui nous vaudra une ou deux des meilleures scènes du bouquin) et semble haïr le monde entier avec la même application autodestructrice. Elle déteste aussi ses parents : il faut dire, à sa décharge, qu'ils sont – j'ai envie de dire "comme presque toujours", et je suis bien placé pour le savoir – largement responsables de son état. Son père, parce qu'il se fiche complètement de sa fille, bien trop occupé par ses frasques amoureuses et surtout sexuelles. Sa mère, parce qu'elle est dépassée par les évènements, et finalement faible. À vrai dire, il est plus difficile de lui en vouloir à elle qu'à lui, mais les enfants ne sont pas toujours très justes, n'est-ce pas ?
Un personnage passionnant – et tellement "vrai" – que cette Clarisse, car figurez-vous que pour couronner le tout, elle est EIP (intellectuellement précoce). On a envie de dire "pour son malheur" (et celui de son entourage), car cela lui permet d'avoir une grande acuité et une terrible clairvoyance sur les manquements de sa "communauté éducative"... À la fin du livre, on comprendra que cette particularité, malgré le drame qu'elle vient de vivre, va probablement lui sauver la vie en lui permettant de se soustraire à cet entourage délétère.
Question en creux : combien d'enfants, qui n'ont pas cette acuité, sont en train de mourir intérieurement, sans pouvoir se rebeller, à cause de la nullité de leur entourage ?
Autre constat en creux : si tous les enfants avaient les capacités et le caractère de Clarisse, ils ne tarderaient pas à foutre définitivement par terre notre système sociétal déjà moribond.
Hélas, je dois dire que j'ai beaucoup moins adhéré à la suite. Toute la partie "fugue au Portugal" m'a paru bien en dessous de la première. L'auteure aime beaucoup ce pays et le connaît bien, cela se voit... peut-être un peu trop. Moi-même passionné d'histoire, de géo, aimant beaucoup le voyage – et ayant visité plusieurs des lieux évoqués – j'ai eu plus d'une fois l'impression d'être en train de lire le guide du routard du Portugal. Cette impression est exacerbée par le choix narratif (première personne du singulier, on voit à travers les yeux de Clarisse). Autant ce choix passe crème en première partie et nous permet d'entrer en empathie totale avec la jeune fille, autant en milieu de livre il m'a éjecté de l'histoire car on sait que Clarisse, qui vient au Portugal pour la première fois, ne peut pas connaître tout cela, et on devine donc l'auteure derrière ces lignes. À certains moments, on a l'impression qu'elle en prend elle-même conscience, notamment quand Clarisse dit à Tony "qu'il va devenir prof comme sa mère".
Une alternative aurait été (à mon avis) de squeezer certains passages au profit de davantage d'introspection, ou de passer les informations davantage en dialogues... Ou même, de changer le point de vue et prendre celui de Tony – qui connaît le pays – pour les chapitres centraux. D'autant que lui aussi est un personnage riche et bien construit.
J'en ai fini pour les reproches, car quand revient le drame et l'inévitable retour à la réalité pour notre jeune héroïne, on retrouve illico les sensations du début et le livre coule jusqu'à son terme dans un feu d'artifice d'émotions.
Combien on la comprend, éprouvant même une jouissance jubilatoire, quand elle balance sans ménagement un verre dans la tête de sa nouvelle belle-mère !
Combien on partage son exaspération, quand toute la stupide communauté adulte se ligue en vertu de je ne sais quels principes éculés et irréfléchis, pour se refuser à lui dire ce qu'elle a le droit de savoir. Je l'ai toujours dit : on en crèvera, de prendre les enfants pour des imbéciles. En voici une illustration cruellement réaliste.
En résumé, si la partie centrale, à mon avis moins réussie, a empêché un avis totalement dithyrambique, j'ai quand même été très secoué par tout le reste. Jo Rouxinol est une grande peintre de l'âme humaine, et une fine observatrice des mœurs de ses contemporains. Son écriture est accessible sans être trop simple.
Un très beau livre, que je serais tenté d'offrir à pas mal de parents... et de profs (pourtant, j'en suis un moi-même, mais pas corporatiste pour un sou)... Mais je pense, hélas, qu'ils le prendraient mal.
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Jo Rouxinol a l'art de manier les sentiments, avec sa plume addictive et travaillée, elle nous entraine dans les méandres de l'âme humaine.

L'adolescence semble une période qu'elle affectionne particulièrement, puisque son personnage principal est une ado de 14 ans. Peut-être que le fait d'être professeur n'y est pas étranger… En tout cas, on sent chez l'auteur un don d'observation… le don de déceler les blessures… Certes, c'est une fiction, mai j'ai le sentiment de découvrir une réalité…

Un fond de vérité… Une vérité que l'on croit toucher du doigt, mais que l'auteur ne divulgue que peu à peu…

Clarisse va mal… Elle n'aime ni sa vie de collégienne, ni la vie qu'elle mène chez ses parents séparés… Une mère, que l'on devine dépassée, elle ne maitrise plus rien… Enfin, elle ne veut plus rien maitriser… Ce père, qui préfère laisser sa fille faire ce qu'elle veut, histoire d'avoir la paix, la semaine où elle vient chez lui…

Clarisse, n'est pas tendre avec eux, même lorsqu'elle nous parle d'eux, on sent une rage mal contenue… Mais, peu à peu l'auteur distille les informations et on comprend enfin pourquoi Clarisse a cette soif de vivre, cette soif d'amour, d'attention… Elle ferait n'importe quoi, pour que l'on s'intéresse à elle. A elle, en tant qu'individu, sans tenter de la faire rentrer dans un moule…

Lorsque j'ai terminé ma lecture, j'ai mis un moment à me remettre de mes émotions. L'auteur a réussi à m'émouvoir avec cette gamine qui va peu à peu s'ouvrir à la vie… Cette gamine qui crie sa rage…

L'auteur a l'art de poser les situations pour permettre au lecteur de s'approprier l'intrigue. Sans jugement, elle dépeint les sentiments qu'elle pose avec finesse. Elle aurait pu tomber dans la facilité et à travers Clarisse, juger ces parents toxiques, nombrilistes et qui ne savent pas écouter… Qui ne veulent pas écouter… Pourtant, elle ne juge pas… Elle expose… Et au lecteur de se faire son avis.

On ressort, un peu sonné, comme Clarisse, qui décide de tout plaquer tellement elle en a marre… Elle craque et décide de fuir… Fuir ce quotidien qui la tue à petit feu… Elle décide de fuir pour enfin vivre ce rêve qui la dévore… Elle va le vivre jusqu'au bout, jusqu'à ce que la réalité la rattrape et qu'elle s'éveille.

Ce rêve, lui permettra de grandir et enfin s'affranchir de son histoire… Une histoire tragique mais qui lui donnera la force de vivre…

Clarisse s'adresse au lecteur qui devient son allié, le témoin de sa fuite en avant… Surtout le témoin de sa renaissance…

Son langage est parfois cru, déstabilisant, mais j'ai trouvé qu'il y avait une certaine évolution, peu à peu il devient plus posé, à l'instar de Clarisse qui pose son fardeau. Sa rage disparaît, Clarisse s'épanouit et peut enfin comprendre d'où vient son malaise et ainsi s'expliquer son attitude et se comprendre…

Déjà avec « le temps des étoiles », l'auteur m'avait touché avec sa plume et cette lecture ne fait que confirmer son talent.

La vie n'est pas un long fleuve tranquille mais parfois la vie t'offre une porte de sortie… La fin est emprunte d'espoir.

Jo Rouxinol, oblige son lecteur à se poser et penser sa manière de voir les choses, qui ne sont jamais aussi tranchée que ce que l'on croit.

Je n'ai pas voulu rentrer dans les détails car il faut le lire pour le vivre ce bouquin! Et la trame est construite de manière telle que si tu dévoile un truc tout s'imbrique et prend son sens.
Lien : https://julitlesmots.wordpre..
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Clarisse est une jeune fille de treize ans.

L'adolescence, période difficile s'il en est. D'autant plus quand la cellule familiale n'est pas sécurisante, que les parents ont été défaillants dans la prime enfance, voire absents, pas forcément physiquement, mais dans leur attitude. Durant cette phase de la vie, on est habité par une soif de vivre, mais étouffé par les obligations qui nous pèsent, qu'on ne comprend pas toujours et auxquelles on souhaiterait échapper à tout prix. C'est un passage où l'on rêve sa vie et où l'on aimerait vivre ses rêves.

Bien sûr, à cet âge, on est persuadé que nos parents sont nuls, que personne ne peut nous comprendre. On oscille entre agacement et frustration, on voudrait, mais on ne peut pas. On se pense plus malin qu'on ne l'est dans toute notre naïveté, après tout, qui mieux que nous peut savoir ce dont on a besoin et où se trouve notre bonheur. On se sent seul et abandonné de son entourage, prêt à croire n'importe quel inconnu qui ferait mine de nous comprendre. Pour certains, c'est encore plus vrai que pour d'autres. Cette impression d'étouffer dans sa petite vie sans surprises, ou rien de bien ne semble pouvoir survenir donne parfois l'envie de prendre l'air, suivre une voie qu'on croit meilleure sans savoir vraiment où elle va nous conduire.

Quand on se sent à l'étroit dans sa vie, quoi de mieux que de prendre le large dans l'espoir d'agrandir son horizon ?
C'est l'âge où l'on se place facilement en opposition face à ses parents et tous les adultes qui nous entourent de près ou de loin. Si l'on ajoute à cela, une certaine solitude, l'absence de véritables amis, un caractère bien trempé qui nous permet d'exprimer, tel quel, tout ce qui nous passe par la tête avec le langage parfois cru de l'adolescence, les ennuis ne sont pas loin et peuvent revêtir divers aspects.

Quand, enfin la vie nous offre un moment de réconfort, quoi de plus normal que de vouloir le faire durer à tout prix, au mépris des risques et de la souffrance qu'on pourrait infliger à ceux qui malgré tout sont censés nous aimer. Que reste-t-il quand la réalité nous rattrape ?

J'ai beaucoup tremblé pour cette jeune fille paumée, empêtrée dans une vie trop étriquée pour elle et qui le temps d'un moment va pouvoir vivre son rêve. Sa fragilité est palpable, mais son désir de vivre est encore plus grand. Pendant cette parenthèse enchantée, elle croque la vie à pleines dents. J'ai appréhendé la fin de cette histoire, Jo a beaucoup joué avec mes émotions. Mais quand on pense toucher le fond, que nous reste-t-il ? Sombrer totalement, ou alors rebondir. Je vous propose de lire se livre pour connaître le destin de cette jeune fille qui ne m'a pas laissée indifférente.
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Je viens de refermer ce roman, je suis bouleversée, j'espère que je vais pouvoir vous retranscrire le mieux possible ce que j'ai pu ressentir pendant cette lecture. J'avais déjà découvert Jo Rouxinol avec le carnaval des illusions, j'avais été touchée par sa grande sensibilité, son style fluide, précis, son amour des mots. Ce second roman, que je lis d'elle, me conforte dans ce même sentiment.

Clarisse est une jeune ado de treize ans et demi, c'est une gamine pleine de colère et de rancoeur, une écorchée vive comme il est dit dans le résumé. Elle est éternellement en opposition avec ses professeurs, avec ses parents, c'est encore pire. Il faut dire que sa mère est une femme stressée et dépassée, et son père un homme plus que laxiste qui se fiche complètement de ce que peut faire sa fille. Ils ne s'occupent pas de Clarisse, et petit à petit sont complètement dépassés devant ses paroles et ses agissements. Elle se sent seule. Un jour, après une énième bêtise faite au collège, elle décide de fuguer. Elle part. Au début, elle doit rejoindre un garçon qu'elle a rencontré sur le net...il va s'avérer qu'il n'est pas celui qu'elle croyait...mais dans son malheur, elle va trouver une personne sur qui s'appuyer. Et ensemble, ils vont partir, quitter Paris pour rejoindre le Portugal. Va s'en suivre une fuite infernale, une sensation de liberté folle que Clarisse voudra garder le plus longtemps possible. Mais la vie et ses malheurs sauront la rattraper...

Dans le carnaval des illusions, Jo Rouxinol m'avait emmenée au Brésil. Cette fois ci, c'est au Portugal que j'ai voyagé avec Clarisse. J'ai retrouvé avec plaisir sa façon de décrire les paysages, les villes, les plages, les routes avec les parfums, les goûts, les habitants. Une immersion totale dans ce pays. de même, on retrouve une nouvelle fois le domaine de l'enseignement avec les différents problèmes que l'on connait surtout dans les grandes villes, l'impossibilité pour certains profs de se faire entendre et avoir de l'autorité, la délinquance. C'est un thème qui revient et l'auteure en parle toujours aussi bien.

Il est impossible de ne pas s'attacher à Clarisse. C'est pourtant, au début du roman, une fille ingérable, qu'on ne sait pas comment prendre sans se récolter une réflexion, mais elle reste pour autant fragile sous ses allures de grande dure. Et plus son histoire va passer, et plus on aime cette gamine. J'ai eu envie de la consoler, de la guider, de l'aider à se confier, car on devine vite qu'elle cache un fait qui s'est passé dans son enfance. Et ces sentiments qu'on a envers elle vont en augmentant au fil des pages pour atteindre son paroxysme à la fin. le personnage avec qui Clarisse fait sa fugue est aussi attachant...

La grande force de Jo Rouxinol est la manière tellement réaliste qu'elle met dans ses romans. On découvre au début Clarisse avec un parler d'adolescente difficile, avec des gros mots, des expressions type de ces jeunes en difficultés. Plus Clarisse se sent mieux dans ses baskets, plus elle se détend, et plus son vocabulaire change, s'adoucit pour révéler la véritable belle gamine qu'elle est au fond d'elle. Jo Rouxinol a su rendre Clarisse tellement réelle que j'avais presque envie de connaître son adresse pour aller la voir. Son histoire est bouleversante, elle va vivre des moments atroces, difficiles, à se demander comment elle va arriver à garder la santé et à se sortir debout de tout cela. Un très beau geste final lui permettra de continuer à aimer la vie malgré tout. Ça devient rare les romans qui me touchent, mais alors celui-ci...j'étais effondrée, j'ai versé ma larme, je me suis même exprimée à voix haute...j'étais tellement prise dans ce malström d'émotions que je n'arrivais pas à lever mes yeux de ma lecture.

Jo Rouxinol m'a touchée en plein coeur plein de fois le temps d'un livre. Après lecture, je comprends la couverture, avec cette fenêtre sur l'océan, comme au Portugal, et cette tête qui crie...terrible...Le titre prend lui aussi toute sa signification au fil de l'histoire, et surtout après cette phrase « Et alors il ne restera plus de nos rêves que des souvenirs lacérés. »....des rêves dévorés...le mot est fort mais si bien trouvé quand on sait ce qu'il va se passer dans la vie de Clarisse...L'auteure nous transmet de très beaux messages d'amour, d'espoir, de liberté avec un grand L, elle nous parle aussi de la délinquance, des déséquilibrés sexuels, de la maltraitance...et tout ceci avec beaucoup de justesse, sans en rajouter de trop.
La lecture se fait avidement, à cause de l'histoire mais aussi par sa construction, avec ces chapitres en italique qui reviennent sur l'enfance de la jeune fille et ses souvenirs...on comprendra plus tard leurs douloureuses significations...

Je ne vais pas oublier de sitôt Clarisse..oh non...mon coeur de maman a saigné me rappelant en même temps mon adolescence...
J'espère avoir pu vous faire passer à travers cette chronique tout ce que j'ai ressenti en lisant ce rêve dévoré. Je ne peux que vous conseiller ce très bon roman. Si vous ne connaissez pas encore Jo Rouxinol, n'hésitez pas à la découvrir. Pour ma part, il me reste un roman à lire d'elle, le temps des étoiles, j'ai envie de me plonger à nouveau dans l'univers de Jo Rouxinol, que je remercie énormément pour cette lecture intense.

Lien : http://marienel-lit.over-blo..
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Quand je rédige une chronique, j'ai l'habitude de la débuter en résumant un peu l'histoire. Pour une fois, j'ai envie de commencer par la fin de ma lecture. Ça arrive rarement, et jusqu'à présent, ou du moins lors des deux dernières années, mes larmes n'ont coulé qu'en lisant Amélie Antoine. « le rêve dévoré » inaugure donc l'exception à la règle. J'ai éteint ma liseuse, les yeux embués et mouillés, une boule au fond de la gorge. Parce que l'écriture de l'auteure est particulière. À la fois simple et très travaillée. Et surtout, Jo Rouxinol sait exactement retranscrire les émotions entre les lignes.

Revenons un peu en arrière, pour vous situer l'auteure si vous ne la connaissez pas. Jo Rouxinol est prof d'histoire et ses trois livres débutent dans un collège. Elle a déjà autopublié deux romans, dont vous trouverez mes chroniques sur le blog : « le Temps des étoiles » et « le Carnaval des Illusions ». L'un pose un regard moderne et accessible aux plus jeunes sur la Shoah quand l'autre aborde des sujets de société graves, profonds, et actuels. Sans jamais porter de jugement, Jo Rouxinol expose des situations, constate. Comme si elle photographiait simplement un moment, une période de vie, sous un angle nouveau, et laissait la liberté au lecteur de se faire sa propre opinion. « le Rêve dévoré » suit la même ligne directrice. Exposer. Ne pas juger.

Clarisse a treize ans et demi. Elle navigue entre le domicile de sa mère — ultra angoissée —, et celui de son père — ultra laxiste —. C'est une gamine de divorcés, au comportement difficile à la maison comme à l'école. Un jour, croulant sous le poids de la pression sociale qu'elle subit partout où elle va, l'adolescente déborde, et craque. Par pulsion, comme pour se libérer de tout ce qui l'emprisonne, elle éteint son téléphone portable, et part. La destination ? Un rêve, une illusion croisée sur Internet. Une chimère qui, rapidement, montre son horrible visage. Mais le destin est imperturbable. Clarisse trouve le chemin de son rêve par des voies secondaires. Et comme le titre l'indique, la jeune fille dévorera son rêve, jusqu'à la dernière miette. Jusqu'à ce qu'il ne reste plus que la réalité qui s'invite avec hargne et cruauté dans sa nouvelle vie.

Le roman est écrit à la première personne. le narrateur est le personnage principal, Clarisse. le lecteur devient le témoin des pensées et des émotions de l'adolescente, et pardonne bien volontiers les écarts de langage, utilisés ici comme vecteur d'émotion et non comme palliatif à un langage trop recherché. Il est d'ailleurs très intéressant — et il s'agit là, de mon point de vue, d'une preuve flagrante de l'intelligence de la plume de l'auteure — de voir le langage et le rythme du phrasé de Clarisse évoluer avec son humeur. Haché et parfois brut, vulgaire quand la jeune fille est pleine de rage, son flot de paroles devient plus doux et mature au fur et à mesure qu'elle s'apaise. Mais surtout, le choix d'une narration interne permet de comprendre, petit à petit, d'où viennent les angoisses et les besoins de liberté du personnage.

Je vous parle souvent, dans mes chroniques, de ma préférence aux romans anti-manichéens, qui démontrent que tout n'est pas tout noir ou tout blanc dans la vie. « le Rêve dévoré » en est un très bon exemple. La chute du livre, notamment, est remarquable en ce sens. Je tais les sujets principaux abordés dans le livre volontairement, afin de ne pas dévoiler les intrigues. Mais si je me laissais aller à discuter du contenu du roman, je crois que je pourrais y passer des heures tant l'histoire de Clarisse m'a emmenée loin à l'intérieur de moi-même.

Aussi, ce livre est une ode au Portugal. Je respire encore les odeurs qui s'échappent des mots qui décrivent les petits villages, les plages, les bateaux de pêcheurs, les falaises exposées aux vents. D'ailleurs, le nom du pays devient synonyme de liberté, d'espoir. Et à travers ses écrits on ressent tout l'attachement de l'auteure à ce territoire.

D'une problématique sociale complexe, Jo Rouxinol fait une histoire passionnante qui déborde d'émotions. Surtout, elle donne au lecteur l'occasion de remettre en question ses convictions afin d'appréhender d'un oeil nouveau certains thèmes.

Je crois que c'est la principale caractéristique des grands auteurs.
Lien : https://www.book.beltanesecr..
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
...La plupart d'entre eux ont un visage buriné,tanné par l'air marin,à la peau épaisse comme du vieux cuir desséché.Des rides profondes figent leurs traits dans l'expression qu'ils affichent le plus,les yeux plissés, le nez froncé, la bouche ouverte pour gueuler une consigne aussi bien qu'une blague,et il semble impossible de leur arracher cette grimace permanente sous peine de voir l'ensemble craquer comme un masque usé auquel on essaierait de faire prendre de nouveaux plis...
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J'entends rugir les mots depuis les profondeurs de ma rage, et c'est par des hurlements qu'ils quittent ce corps trop petit pour de si grandes émotions.
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(...) j'étais celle que l'on sommait de parler et de se taire, celle qui devait couvrir le responsable mais qui, complice, devenait plus fautive que le coupable lui-même.
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...Ses mots sont pour moi dénués de sens mais la musique de sa voix enrouée me porte,moi si légère face à ce chant qui dit le poids des ans...
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...Car comme les gitans, les pêcheurs du village vivent dans une liberté magnifique que, de l’extérieur,on qualifie de repli. Mais quel repli peut-il y avoir pour ceux qui voient le monde affranchi de ses limites géographiques et de ses barrières humaines?...
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