Merci, d'abord, à Virginie pour m'avoir donné l'occasion de découvrir sa plume fluide et sa belle histoire ! Ça faisait longtemps que je voulais découvrir l'un de ses romans, et je suis ravie que ce soit chose faite, j'en lirai d'autres avec plaisir ! Cette histoire en particulier m'avait interpelée, car c'est toujours délicat, les pertes de mémoire, et ça fait couler beaucoup d'encre, puisque de nombreux auteurs traitent de ce sujet.
En ce qui concerne Page blanche, donc, je ne voudrais pas trop en dire, pour ne pas spoiler. Mais j'ai beaucoup aimé l'histoire, qui est originale et bien construite. Même si le résumé ne nous le laisse pas entendre, il y a plusieurs personnages dans ce roman, des patients, des soignants, leur famille. Je me suis particulièrement attachée aux deux médecins, et à Lou, forcément. J'ai eu plus de mal avec le personnage d'Helena, en revanche, car j'ai trouvé qu'elle changeait d'avis comme de chemise, elle m'a un peu agacée. Mais ça prouve que Virginie a su bien travailler ses personnages et leurs histoires personnelles, car on a des détails pour chacun d'eux, sans que cela n'alourdisse le récit, bien au contraire, ça l'étoffe.
Finalement, on panique avec Lou, on stresse avec Ethan, on s'accroche à François, celui qui garde la tête sur les épaules, on est touché par les patients amnésiques et par leurs tentatives de retrouver leurs souvenirs, et on s'agace avec Héléna, mais ça, je vous l'ai déjà dit!
J'ai beaucoup aimé la fin, ça m'aurait déçue que ça finisse autrement et j'ai eu un peu peur, je l'avoue. Bien joué, Virginie !
Mais n'hésitez pas à découvrir par vous-même cette belle histoire pour vous faire votre propre opinion : foncez !
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...en tout premier lieu, elle veut connaître ses propres goûts, car il lui semble que dire ce qu’elle aime, et ce qu’elle n’aime pas, lui est indispensable pour s’affirmer et montrer qu’elle existe. Par exemple, lorsqu’on lui propose des fruits, elle sent qu’elle adore ça, et en particulier le goût acidulé de l’abricot, son fruit préféré parmi ceux découverts à la cantine du Centre. Elle sait aussi qu’elle n’aime pas la viande rouge, ni les desserts trop sucrés. Mais il semble qu’il y a tant de choses à découvrir ! André lui a parlé de livres, et de films magnifiques, alors que Thomas écoute à longueur de journée de la musique, que diffuse un appareil ramené de chez lui, où il continue de ne pas vouloir dormir. Il faudra qu’elle lui redemande tout de même le nom de cet appareil, car elle n’arrive pas à le retenir, alors qu’elle mémorise sans effort tous les mots de vocabulaire médical, pourtant plus compliqués, d’après ce que disent les infirmiers.
— C’est très gentil, François, je suis touché. Mais ce n’est pas vrai, on est tous remplaçables, il y aura toujours un nouveau neurologue pour être meilleur que le précédent, et c’est bien comme ça.
— Mais ce Centre, c’est toi ! Tout le monde sait que c’est toi.
Oui, c’est son Centre. Sa création, son projet depuis tant d’années. Mais sans l’amour, il ne signifie plus rien. Il avait élaboré cette idée lorsqu’il était avec Jade, et c’était pour elle, pour l’impressionner, pour qu’elle le regarde comme le plus talentueux neurologue de son époque. Mais puisqu’elle est partie, il n’a plus de motivation, et l’envie retombe petit à petit, sans qu’il ne puisse rien y faire. Même les paroles de confiance de son ami n’y changent rien.
Trop d’espoir. Mais la déception fait partie de la thérapie ; le patient doit se rendre compte par lui-même de la profondeur de son amnésie, non pas pour le déprimer, mais pour passer le plus tôt possible à autre chose que l’obsession de retrouver la mémoire. Cela peut prendre des jours, des semaines, des mois, et c’est autant de temps de perdu, puisque bien souvent, la mémoire ne revient pas. Ou si elle revient, c’est sous forme de fragments seulement.
En attendant, elle va vivre sa peine et sa colère, c’est son droit. Il faudra user de tous les moyens pour les alléger, et l’aider à passer ce moment difficile.
Depuis qu’il est tout petit, il sait qu’il ne souhaite pas vivre sa vie dans la platitude et l’ordinaire. Lorsque ses parents lui demandaient ce qu’il voulait faire, à quatre ans, déjà, il ne disait pas qu’il serait un astronaute, il disait qu’il serait le meilleur astronaute, le meilleur joueur de poker, ou le meilleur footballer du monde. Puis vers ses dix ans, on lui avait expliqué que son grand-père, grand politicien, était atteint de la maladie de Parkinson. Il avait alors été témoin de la lente déchéance physique et mentale du héros de la famille, celui qui semblait le plus fort, le plus indestructible.
Il avait envie de soigner les maladies les plus sournoises, les plus difficiles à combattre, celles que l’on ne savait pas guérir, qui faisaient du mal à ceux qui en étaient victimes, mais aussi à leurs proches, pendant des mois, parfois des années. Soulager, aider à vivre mieux avec la maladie, voire se servir de la maladie pour transcender l’existence, par un travail psychologique de fond, voilà ce qui lui semblait déjà être sa vocation.