Elle se rendit compte que, dans le secret de son cœur, elle avait toujours eu la conviction que leurs chemins se croiseraient encore - même brièvement. Comme si cette certitude était en elle depuis le premier jour. Il y avait un homme qu’elle aimerait, qu’elle perdrait puis retrouverait ! C’était bien l’amour qui s’était éveillé en elle sur ce quai si lointain. Elle n’avait pas pu le reconnaître alors, mais elle ne l’avait jamais oublié.
Croyant fermement au dicton : « Qui aime bien châtie bien » et fortifiée dans sa conviction que l’oisiveté est la mère de tous les vices, elle dirigeait l’orphelinat avec une discipline de fer, cependant que, pour le bien des enfants, elle combattait l’ignorance, l’immoralité, la misère et la maladie. Elle n’avait pas de temps à perdre en pitié et compassion : être sensible, c’était être faible.
A force de lire des livres, Lisa avait acquis l’art de s’exprimer avec aisance. Ceci ne l’empêchait pas de dire parfois des choses incohérentes.
Il était bien inutile de vanter ses qualités : honnête, travailleuse ou consciencieuse, peu importait car rien de tout cela ne résistait à l’épreuve lorsque ce genre de filles rencontraient un homme : le peu de bon sens qu’elles possédaient s’envolait comme un oiseau hors de sa cage.
Elle était de ces jeunes filles qui n’ont pas besoin d’artifices pour mettre naturellement en valeur leur silhouette, leur grâce et leur sensualité.