Roman dont le titre qui questionne, signifie la période de flux nul, de latence entre marée montante et descendante, et qui pourrait se résumer en une quête de vérité sur soi et une famille rigide qui s'embourbe dans un scandale sexuel.
Antoine est un adolescent qui se pose peu de questions, entre un père peu communicatif, autoritaire, et une mère préoccupée par son apparence qu'elle voudrait exemplaire, via son engagement dans les activités de sa ville, sa participation à la messe, ses tenues… Milieu inculte, sans références, petit bourgeois, aux ambitions broyées. La mère notamment, avantagée par son physique, a toujours rêvé d'être une actrice, alors qu'elle était notoirement dépourvue de talent.
Antoine n'est pas épanoui, et se réfugie autant qu'il peut dans la famille de son ami Nicolas, caractérisée par son ouverture, sa tolérance, sa décontraction.
La mère d'Antoine se retrouve tout de même collaboratrice du maire de la ville (en banlieue, à 50 km de Paris), avec une fonction “arrangée“ dans les affaires scolaires. le bruit court qu'elle est aussi la maîtresse de cet homme influent, par ailleurs sénateur et ministre délégué.
Et là, un scandale éclate : le maire, connu pour avoir les mains baladeuses et la drague en seconde nature, a organisé après une inauguration, une “party“ avec sa collaboratrice et deux jeunes femmes, deux paumées, en recherche d'emplois ou de promotion, personnes peu équilibrées, d'origine maghrébine. Jeux sexuels impliquant ces personnes, consentements conditionnés à des promesses, probablement humiliations, etc.
Tous les détails sont révélés lorsque ces deux femmes portent plainte, mais trois mois après les faits, et selon des “mauvaises langues“, poussées par des intrigants, adversaires politiques du maire.
Commence alors une période de calvaire pour Antoine, son jeune frère Camille, et pour Laetitia, la fille du maire, en état de rébellion totale, de révolte éruptive contre son père. Pour ces adolescents, le chemin de croix s'exprime partout, notamment au collège et au lycée. La condamnation est unanime, sévère, injuste, mais implacable: piques, regards soupçonneux, allusions. Antoine ne sait plus vraiment contre qui s'insurger : ses parents méritent-ils pareille opprobre ? Son frère Camille n'exagère-t-il pas sa souffrance ? Laetitia n'abuse-t-elle pas de son aura, de son autorité ?
Antoine souffre d'ingénuité, d'indécision, d'attachement morbide à cette situation, avec des liens familiaux, moraux, intellectuels, qui l'entravent jusque des mois et des années après les faits. Après avoir suivi Laetitia lors d'une fugue en Bretagne, il finit par s'y retrouver seul, y vivre d'expédients, de petits boulots, jusqu'à apprendre la mort accidentelle du maire dix ans après les faits, et à se rendre à ses obsèques, comme pour renouer avec un passé pourtant révolu.
Olivier Adam pose les mêmes questions, celles qui taraudent sans cesse le narrateur Antoine sur près de 300 pages. Et c'est ce qu'on peut reprocher à ce livre, ce “remplissage“ qui donne l'impression qu'on n'avance pas, qu'on patine, que les figures, pour artistiques qu'elles soient, se répètent à l'infini. Impression, plus que réalité, heureusement.
Le sujet des agressions sexuelles se meut à l'étroit, dans le sociétal, les médias, la littérature. Laissant ses victimes sur le bas-côté, il ne dresse aucun piédestal à ceux pris sur le fait, même s'ils obtiennent un non lieu, ni aux proches qu'interrogent notamment les doubles vies qu'ils n'ont pas soupçonnées, et jamais vraiment comprises.