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« Dix ans plus tard, il ne souffrait plus, il avait construit des causes, des conséquences, des paysages hypothétiques entiers, qui s'étaient déployés à l'échelle du monde qu'il avait arpenté depuis, et qui avaient fini par se réduire, se résorber, ne tenant plus qu'en un constat, Elle était partie car elle était partie. »
Le texte est dur, intense, chargé d'une émotion que les mots et la langue livrent précisément, dans une construction complexe et exigeante qui se lit posément, la tête toute à lecture, en quête d'un sens riche et profond. L'histoire est celle d'un couple, peu ordinaire, un homme amoureux, une femme passionnée, une trame emmêlée dans la folie, celle d'Amélia, qui se dessine peu à peu et dont l'issue se dévoile dès le premier paragraphe. Sur fonds des séquelles de la guerre de Bosnie, d'un monde insensé, de solitude et désamour, d'enfance et de maternité, d'espoirs et de résignations, l'amour se fait et se défait, ravage et décime, balaie la raison, détruit ce qui aurait pu être. C'est la nuit, l'ombre, l'obscurité qui avance, pas et pas, et recouvre le monde et ses peurs, les angoisses et les refus de conformité ; ce monde fou qui déraille à coup de guerre, de bombes et de violences. Ce roman à la fois sombre et lumineux, pudique et audacieux, d'une grande vivacité, aux mots choisis et à la langue inégalable ne peut incontestablement laisser indifférent.
« Rester lui-même, rester celui avec lequel il pouvait vivre, devenait une épreuve, un supplice. »
Une belle lecture.


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Installe-toi quelque part. Confortablement, au calme. Dans un endroit où tu pourras rester plusieurs heures, peut-être même toute la nuit. Rends-toi disponible. Absolument. Sinon, tu passeras à côté. Parce que ce que tu vas lire, L'avancée de la nuit de Jakuta Alikavazovic, tu ne l'as jamais lu avant. Et il est très probable que tu ne retombes pas de sitôt sur un tel roman. Accroche toi un peu aussi ; ce roman est insaisissable. Il s'échappe en permanence, t'échappe très souvent. Mais sache que si toutes ces conditions sont réunies, il se pourrait bien qu'il t'emporte, te hante et laisse dans ton coeur une petite griffure. Minuscule, infime, mais bien réelle.

Ne t'arrête pas au résumé de la quatrième de couverture. Il ne dit rien de ce que dit vraiment ce livre, cette sublime histoire d'amour, de trahison, d'abandon et d'épuisement. Il ne fait qu'évoquer les premières pages : la rencontre et le début de l'histoire de Paul - étudiant le jour et veilleur dans un hôtel la nuit - et d'Amélia, riche héritière qui y occupe une chambre à l'année. Ils s'aiment d'un amour intense et magnifique, libre et érudit. Subitement cependant, Amélia part pour Sarajevo, sur les traces de sa mère disparue.

L'avancée de la nuit, c'est d'abord des personnages uniques et magnifiques, ils sont de ceux qui « portent » le roman du début à la fin. Il y a Amélia cette « splendeur, à l'esprit vif, à l'imagination ardente, le genre qui allongé dans l'herbe paraissait le prolongement de l'herbe, et plus encore /…/ paraissait l'intelligence de l'herbe, son génie ». Paul lui, n'est qu'amour ; pour elle, pour le monde, pour Albers, pour Louise. Mais cet amour est à double tranchant. L'abandon d'Amélia lui ouvre les portes du monde, un monde dangereux et terrifiant, un monde dont il cherche à tous prix à être l'étranger. Et si l'on voit Louise comme la lumière du roman, Anton Albers, est indéniablement le silex (ou l'interrupteur, c'est selon). Cette dernière enseigne à l'université où Paul et Amélia partage le même banc. « Elle avait une parole claire et obscure, qui n'appartenait qu'à elle, c'était plutôt comme de regarder quelqu'un prédire l'avenir, oui, c'était plutôt comme ces émissions où l'on voyait quelque magicienne, voyante ou mentaliste entrer en contact avec l'esprit des morts, sauf qu'Albers semblait en connexion directe avec l'Occident à venir, avec le futur du capitalisme et de l'industrie, quand ces gens à qui Paul pensait en l'écoutant étaient tous, sans exception, des imposteurs. L'intitulé du semestre portait sur « La ville de demain » mais jusqu'à présent elle n'avait, semblait-il, parlé que de la peur ».

Car si l'avancée de la nuit est présentée partout comme une sublime histoire d'amour, c'est d'abord, selon moi, un roman sur la peur, sur les peurs, toutes catégories confondues. Il y a dans ce livre une terreur sourde, celle qui réside dans le coeur de ceux qui, trop de fois, ont été abandonnés ou oubliés. Elle est larvée dans le coeur d'Amélia, comme elle l'était dans celui de sa mère. Malgré tous ses efforts de petite fille, jamais elle ne trouva d'issues de secours, de petits tunnels par lesquels elle aurait pu échapper « à l'ennui mortel d'une enfance sans enfants ». Cette terreur sourde la rend folle, mauvaise et distante, aveugle au monde – trop voyante peut-être -, froide, incapable d'aimer pense-t-on. Elle fait d'elle cette femme incapable de vivre ailleurs qu'en zone de guerre, comme l'était sa mère partie rejoindre Sarajevo durant le siège. Incapable de vivre tout court.

La peur de Paul, c'est cette nuit qui avance et encombre. Cette nuit qui tue parce qu'on ne la laisse plus exister. Cette nuit emplie de sons et de lumières, témoins lumineux de ses angoisses montantes.

Elle est pourtant somptueuse cette histoire d'amour, terrifiante de force et de renoncement, puissante et engluée dans des peurs intestine. Il fut un temps cependant où ils s'aimaient sans se détruire, et ces pages là (on les déguste au début et à la fin de l'ouvrage), on a envie de les faire lire à tous les jeunes amoureux ! A tous les vieux aussi ; parce que jamais le tumulte des sentiments n'a été aussi richement décrit, aussi simplement également. Leurs coeurs battaient puissamment. Contre le monde, contre l'époque. Un amour de résistants.

Acroche-toi disais-je au début de cette chronique ! Car l'écriture de Jakuta Alikavazovic est singulière. Elle est touffue et heurtée, terriblement libre des contingences, mais parfois complexe aussi.

Laisse-toi porter un court instant, emporté par cette langue blessée, qu'elle te rappelle à l'ordre, te perd et te noies, t'incite à rester aux aguets. Concentré. Sans doute est-ce le seul moyen de dire ce qui est dit dans ce roman avec cette puissance, cette folie, cet amour inconditionnel ? du moins ne l'imagine-t-on pas autrement une fois L'avancée de la nuit refermée. Alors saisit-en ! Laisse toi porter par cet amour somptueux, transporter par les vagues de la chute de la Yougoslavie, laisse-toi ravager par cette souffrance indicible, laisse ton coeur s'imprimer d'une petite marque invisible pour les yeux, mais définitivement salvatrice pour l'âme.
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= Un roman hautement psychologique=

Loin des romans d'amour et érotiques, ce roman d'amour est d'une pure délicatesse. Telle une plume se frayant un chemin à travers deux êtres humains totalement différents.
‘‘Le temps passait. Ils s'aimaient. Paul voulait tout d'Amélia, son esprit, son corps, la chaleur qu'il dégageait et que l'on sentait même à quelques centimètres de distance, et si l'on se concentrait sur ce rayonnement, si on l'éprouvait avec attention, il valait pour un contact.''

L'autrice utilise avec délicatesse les mots sans faire dans la demi-mesure. Une valse lente de la vie et des sentiments, le tout dans la pudeur, mais sans les non-dits.

Au-delà de l'histoire d'amour entre Paul et Amélia, il va être question de la rencontre de deux personnes de catégorie sociale opposée. Paul est issu d'un milieu modeste tandis qu'Amélia est une riche héritière. Elle dont la réputation sulfureuse à l'université ne va pas impressionner Paul. Il verra en elle ce que les autres ne voient pas !

Des personnages bien travaillés par l'autrice.
Elle fera au travers de ses mots et ses descriptions, plonger le lecteur au plus profond de l'esprit, de l'être des personnages.
Description psychologique très réaliste, comme des mots que l'on ne s'est jamais autorisés à dire tout haut lorsque nous-mêmes étions jeunes et qui nous ramènent à nous même !

L'autrice abordera aussi la guerre d'ex-Yougoslavie. Description des villes en ruines qui se reconstruisent. Portant le lecteur à la réflexion et le sensibilisant à cette étape.

Intrinsèquement, la question de l'éducation, ou le faite que notre éducation, notre façon de vivre enfant impacte ce que jeune adulte puis adulte nous deviendrons, sera largement abordé dans la deuxième partie du roman.

Magnifique, très intelligent, un roman qui m'a plongé dans un univers réaliste dont j'en ressors avec des questionnements personnels.
Mon premier roman de cette autrice et certainement pas le dernier.

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Paul est un jeune étudiant de la deuxième génération d'immigrés qui a trouvé sa place en étudiant l'architecture. Pour payer ses études il est gardien de nuit dans un hôtel où il rencontre Amélia, une jeune étudiante, riche, qui y vit à l'année . Une idylle naît de cette rencontre ainsi qu'une fille Louise.
Cette histoire très simple est en réalité caution pour nous parler de la filiation, de la ville et de la peur qu'elle peut engendrer, du déracinement des êtres, de la recherche de soi.
J'ai eu beaucoup de difficulté pour "entrer" dans ce livre, failli l'abandonner et vers les pages 40, je me suis laissée traîner par ces personnages et envoûter par les idées émises.
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Livre imbuvable
On ne sait jamais si c'est du rêve ou de la réalité on se perd0 dans les méandres du récit
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Le titre correspond bien au livre ! L'on y parle de femmes. de recherche de mère. de mal de mère…D'amour difficile à comprendre. de guerre, de drône, de sable, etc…D'amour d'un père pour sa fille, qui veut la protéger de tout, de trop ! C'est la partie du livre que ‘ai préféré. Pour le reste, il y a trop de mots, d'histoires. C'est épuisant ! HS
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Superbe roman sur la nuit et la peur, la politique et ses prospections, L'avancée de la nuit décrit le drame d'un couple destructeur. Dans une langue d'une dense perfection, avec une rare intelligence, Alikavazovic interroge les souvenirs qui nous constituent, les discours qui nous délitent.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Jakuta Alikavazovic parvient à capter l'insalissable d'un être. Amélia revient tel un fantôme dans la vie de Paul et toute une nuit permet alors à cet esprit de revivre dans le coeur, le corps de l'homme. le temps du présent devient celui du souvenir et d'une profonde émotion. Paul ne semble avoir vraiment existé que grâce à Amélia, par une compétition intellectuelle  au commencement, par une amitié atypique et par un amour passionné. Cette histoire et cette femme nous sont racontés par un narrateur omniscient, évitant de donner ce rôle à Paul et d'en faire une sorte d'amoureux transi et aveuglé. Il l'est pourtant mais par intermittence. Paul apprend à vivre, là où Amélia flotte beaucoup plus. Malgré cela, l'autrice met en scène de manière intelligible et sensorielle ces deux êtres. Elle nous donne des clés avec des images fantasmagoriques. Les chambres d'hôtel, lieux sinistres et de rêveries, hantent tout le roman. Elles accueillent autant l'amour que le début des guerres. Elles sont marquées par le passage furtif et le temps long. Jakuta Alikavazovic réunit les nuances de la vie dans cette relation et l'histoire respective de chacun. Paul est un ignorant, souffrant de sa pauvreté, de sa dépendance à l'argent et animé par une soif de savoirs. Amélia n'a semble-t-il jamais appris à vivre. Elle fut un objet d'apprentissage au lieu d'être un enfant. Ils ne se ressemblent pas et ne se complètent pas non plus. Leur chemin se sont croisés et l'émotion de cette rencontre est palpable et captivante. Cette histoire d'amour – car il ne s'agit que de cela, d'un amour tellement puissant, tellement unique qu'il n'aura pas de succession – met à l'épreuve le temps et la mémoire. Aucun des deux ne peut oublier et le souvenir de cette intensité relationnelle hante alors tous les lieux. Là encore, le talent de la romancière se trouve dans sa manière de mettre en scène les lieux. Ils deviennent les traces de cette histoire. Ils en portent les marques, donnant une dimension immense à cette histoire. Explorant l'amour, la perte de soi pour l'autre, Jakuta Alikavazovic atteint lentement les peurs profondes des personnages, vis-à-vis de la guerre ou de toute forme de violence. Chaque parole, chaque mouvement de corps, chaque geste de lâcheté témoignent de la beauté de cet amour si intense, si unique et si destructeur.
Lien : https://tourneurdepages.word..
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Impossible d'entrer dans ce style d'écriture, malgré les efforts fournis
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Paul et Amélia se rencontrent dans l'hôtel dans lequel Paul travaille la nuit. Très vite ils vont avoir une liaison passionnelle. Mais Amélia est une femme à la dérive, qui a un passé trouble, à Sarajevo… et personne ne peut la posséder. Elle va disparaître du jour au lendemain. Revenir, tomber enceinte, abandonner son enfant à Paul et repartir… Les années passent…
Ce roman s'installe pendant une vingtaine d'années durant lesquelles on va se rapprocher de Paul et de sa fille, qu'il élève seul, on va assister à sa prodigieuse ascension dans une agence de sécurité et à son obsession à protéger Louise d'elle-même.
Mais Louise va faire comme sa mère qu'elle n'a jamais connue, elle va partir à son tour, et rien ne pourra la retenir.

Voilà un livre qui divise. C'est vrai qu'il faut un peu s'accrocher, mais l'effort est récompensé. Pour moi ce roman est le plus original des trois de la sélection, l'auteure a une vraie voix (sans doute mon goût pour la difficulté). Certes les phrases sont longues… mais fluides, poétiques, et la trame philosophique (plaidoyer pour la nuit) qui se déploie au fil du texte est fine. de plus, l'auteure sait très bien où elle va (malgré les apparences), il y un vrai travail derrière et j'y ai été très sensible. Ce roman est le roman d'un amour qui ne veut pas renoncer à lui-même. Et la fin est belle, malgré tout !
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