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Ce petit recueil (1997) est constitué de deux nouvelles simples et belles. le Cheminot a valu à son auteur le prix Naoki. Elles sont toutes les deux très intéressantes, très denses et pleine d'humanité. Une vie toute tracée et un comportement égoïste ont conduit les protagonistes à une solitude désespérante. Ce sont les morts (fantômes du passé, lettre posthume) qui les aident à se remettre en question.

1.Le Cheminot :
Une ligne de chemin de fer autrefois glorieuse va disparaître d'une région minière du Hokkaido . L'autorail à traction KH 12 effectue l'un de ses derniers voyages à travers les champs enneigés. Il attire les flashs des passagers de l'express touristique qui le dépasse. Ils le voient comme un trésor national. le jeune mécanicien auxiliaire n'en revient pas qu'une telle vieillerie soit restée aussi longtemps en service. Senji le chef de la gare centrale de Biyoro qui l'accompagne élude ses interrogations pudiquement. Sato Otomatsu son ami de toujours, le modeste chef de gare de la petite station d'Horomai prend sa retraite ce jour-là. Et l'année suivante ce sera son tour. Otomatsu s'est toujours entièrement dévoué à son travail. Les deux anciens se retrouvent à la gare d'Horumai pour fêter l'an nouveau. Seiji tente de réconforter maladroitement son ami. Ils boivent du saké froid, en silence devant un poêle à mazout. Seiji a prévu de se recaser dans une galerie marchande. Otomatsu songe à sa petite fille disparue qui aurait eu dix-sept ans. A minuit Otomatsu est tiré du sommeil par une voix douce, il voit une petite fille avec un foulard rouge, accoudée au guichet...
Cette nouvelle qui mêle réalisme et onirisme poétique est très émouvante. Elle raconte l'histoire d'un homme modeste jusqu'alors farouchement dévoué à son travail dans la plus pure tradition japonaise. Il lui a tout sacrifié. La retraite a sonné. Il est seul dans un monde matérialiste qu'il ne comprend pas. C'est aussi une belle histoire d'amitié, pudique.

2. La lettre d'amour :
Goro, proche de la quarantaine, est le gérant d'un video-club clandestin spécialisé dans le porno dans un quartier chaud de Tokyo. Parfois il passe la nuit en prison. Mais il y gagne, il a même droit à une prime de risque sur son salaire. On comprend que Goro rend quelques menus services à la mafia. Un jour, un policier lui annonce que sa femme est morte. C'est à peine si Goro se souvient de cette immigrée clandestine qu'il a épousée sur le papier, à la demande d'un de ses « amis » de la mafia…
Cette nouvelle réaliste plus noire que la précédente est très réussie également.
Les nouvelles sont précédées d'une préface qu'il est préférable de lire à la fin.
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Deux beaux récits de Jirô Asada, le cheminot et la lettre d'amour. Ils ont pour points communs un héros masculin de condition simple, rattrapé son passé, par la nostalgie, par le deuil d'une femme.

Dans le cheminot, le vieux cheminot Otomatsu vit ses derniers jours de travail avant la retraite. Il conduit sa motrice KH 12, un simple autorail diesel, véritable trésor culturel qui circule sur une toute petite ligne de la campagne japonaise du rude Hokkaido. Il échange quelques souvenirs avec son collègue et vieil ami Senji, qui prendra sa retraite l'année prochaine, et dont le fils Hideo est cadre des chemins de fer à Sapporo. Ils nous donnent à voir la désertification progressive de la campagne, la fermeture des dernières mines dans la région, du dernier commerce de ces petites gares de Biyoro, Horomai…Otomatsu est un homme modeste et pudique qui n'a vécu que pour son métier de cheminot, et ça il en est fier…d'autant que sans doute il lui a permis de tenir dans la dignité jusqu'ici, alors même que nous découvrons qu'il s'est efforcé d'enfouir en lui de terribles failles et souffrances. Il est veuf, et avait aussi perdu sa fille Yukiko à l'âge de deux mois. L'imminence de la retraite, le soir flou d'un ciel neigeux, le visage d'une gentille petite fille et une poupée oubliée sur une chaise de la petite gare vont provoquer un sorte de choc émotionnel, une plongée dans un rêve éveillé où les souvenirs, les fantômes du passé vont submerger le vieux cheminot et rouvrir en lui une plaie béante alors que son équilibre psychologique ne tenait certainement que grâce à sa passion pour la vie du rail…

Dans la lettre d'amour, Goro Takano est un gérant de club vidéo de Tokyo qui vient de ressortir de tôle pour trafic de vidéos pornos et qui fricote avec des yakuzas, son « patron » Satake et un jeune dénommé Satoshi. Ce dernier devra jouer son neveu pour déjouer les soupçons de la police, dans une mission qui va le conduire à l'hôpital de Chiba pour reconnaître le corps d'une femme chinoise décédée, qui n'est autre qu'Haku-ran (Kan Pai Ran en chinois), sa femme. Goro ne l'avait pourtant jamais vue, il s'agissait d'un mariage blanc, pour cette chinoise qui en avait besoin pour obtenir papiers et argent, sachant que Satake avait évidemment prélevé l'essentiel du bénéfice financier du service rendu à travers cet arrangement. Si la situation n'émeut pas Goro dans un premier temps, son ressenti va peu à peu évoluer. Il y a cette première lettre écrite par cette femme mais jamais envoyée, pour, toujours, le remercier, louer sa gentillesse…Il comprend qu'elle s'était fait un film sur lui, l'imaginant dans des termes positifs. Il commence, lentement, à gamberger, et cet effet s'accentue à la morgue : car contre toute attente, cette femme encore jeune, qui n'avait d'autre choix que de se prostituer, morte prématurément d'une maladie sexuellement transmissible ou d'une surconsommation chronique de médicaments qui lui auront bousillé le foie, était plutôt jolie…Et puis manifestement, la police est bien au courant du trafic qui a eu lieu, mais a décidé de fermer les yeux...Dès lors, d'heure en heure, il regrette de ne pas avoir connu cette femme, de ne pas avoir vécu à ses côtés, d'autant que la dernière lettre qu'elle avait écrite de son lit d'hôpital ne fait que confirmer qu'elle n'a cessé de l'imaginer, de penser à son mari inconnu et de lui témoigner sa reconnaissance. Il ramènera chez lui l'urne funéraire en sanglots…

Il y a beaucoup de sensibilité et de finesse dans ces deux histoires simples, qui touchent au coeur parce qu'elles mettent en exergue les regrets, le temps qui passe et les occasions manquées, les failles en chacun de nous et une part de culpabilité qui peut parfois être ressentie dans la perte d'un être cher. Des sujets universels. Finalement, s'il fallait choisir, j'ai préféré la moins connu, la lettre d'amour. J'ai lu quelque part sur une autre critique que l'histoire n'était pas crédible. Elle l'est tout à fait, au contraire : les mariages blancs ne sont pas si rares évidemment, et on peut raisonnablement penser qu'il y a encore quelques années, voire même aujourd'hui, certaines pauvres chinoises, coréennes et autres philippines pouvaient être mariées à des japonais, du moins exploitées pour enrichir des mafias. Il en va ainsi de la nature humaine et de la noirceur du monde...L'auteur n'hésite pas à égratigner la complaisance des autorités de son pays pour ces trafics, un certain racisme anti-chinois qui demeure chez beaucoup de japonais.

Asada a trouvé un ton formidablement juste aux lettres de Kan Pai Ran, dans leur maladresse d'écriture d'étrangère, leur naïveté, leur simplicité, leur franchise…Criantes de vérité, elles suscitent l'émotion naturellement, sans accentuer cet effet artificiellement.

C'est la marque d'un très bon écrivain, qui n'a pas une très grande notoriété en France mais est sans doute un des écrivains vivants les plus populaires au Japon.
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Un court livre qui rassemble deux nouvelles :

Le cheminot, d'abord où l'on fait la connaissance d'un vieux chef de gare qui se souvient du décès de sa fille, il y a 17 ans. C'est une nouvelle pleine de nostalgie mais qui m'a beaucoup touché. Il évoque ses souvenirs avec beaucoup de pudeur.

Lettre d'amour, parle aussi de la mort. Goro est un petit vaurien, qui a fait un mariage blanc pour se faire un peu d'argent, alors qu'il a passé quelques jours a poste de police, pour un délit, on lui apprend que sa femme et morte. Il l'avait complètement oublié et pourtant il va lui être difficile de faire son deuil.

Un recueil qui m'a beaucoup plu, avec deux nouvelles très belles. L'écriture de l'auteur apporte une touche supplémentaire.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Dans cet ouvrage, vous trouverez deux nouvelles d'Asada Jirô.

La première nouvelle relate les derniers jours d'un chef de gare prêt à prendre sa retraite. En cette veille de réveillon, tous ses souvenirs refont surface, et le fantôme d'une petite fille surgit du passé pour accompagner ce vieil homme.

La deuxième nouvelle s'intitule "La Lettre d'amour". Ici, nous pénétrons dans le monde des Yakuza. Un homme découvre pour la toute première fois sa femme après son décès prématuré. Il l'avait épousé pour de l'argent. Elle lui a laissé une troublante lettre d'amour.

Les deux nouvelles sont bouleversantes, chacune à leur manière, elles mettent le point sur des émotions face aux situations de la vie. le chef de gare éprouve des regrets à la veille de prendre sa retraite, il se demande s'il n'aurait pas été préférable qu'il s'occupe davantage de sa famille. Et dans la deuxième nouvelle, l'homme qui découvre cette inconnue qui est pourtant sa femme est également en proie aux regrets.

Il s'agit là des deux textes les plus connus d'Asada Jirô et qui ont rencontré un vif succès auprès des lecteurs.
L'attachement des japonais à leur système ferroviaire est peut-être l'une des explications à ce succès.
Mais je pense également que l'écriture et l'histoire racontée nous procure de fortes émotions à la lecture des deux nouvelles.

Je suis contente d'avoir pu trouver ce petit ouvrage dans les rayonnages d'une bibliothèque scolaire (lycée). Même si je sais qu'il n'est pas souvent emprunté, il assure une diversité non-négligeable dans le choix des livres.
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Petit recueil de 132 pages,intitulé : Yukiko, précédemment paru sous le titre : le cheminot aux Éditions : Picquier.Celui-ci est en Picquier poche.
Deux nouvelles :
--Le cheminot
--La lettre d'amour.
Tout est dans la simplicité : le chef de gare prend sa retraite avant la fermeture de la ligne de chemin de fer,celle - ci n'étant plus rentable
C'est un monde qui s'enfuit,de la mélancolie ,du regret dans les dialogues de ce cheminot.Le tout dans une ambiance hivernale neigeuse,toute blanche,feutrée et ouatée
Une grande douceur ressentie à la lecture de cette nouvelle,malgré une fin brutale.
2ème nouvelle: La lettre d'amour
Radicalement opposée car il y a beaucoup de noirceur et de violence: nous sommes dans un milieu mafieux,notre " héros sortant de prison ,se voit convoquer au commissariat car il vient de perdre sa femme ! Interloqué ,finalement il se souvient d'avoir contracté contre une coquette somme ,un mariage blanc ,avec une jeune chinoise.Mais il ne l'a jamais vue.
Il doit aller identifier le corps ,et là " Les digues sautent" ,son coéquipier un jeune voyou qu'il fait passer pour son fils ,ne comprend pas sa réaction .
Devant le visage de cette jeune femme ,belle,à la morgue, il pleure à chaudes larmes.
Avant de mourir cette jeune femme lui a écrit une magnifique lettre d'amour,et l'ayant lue ,il regrette amèrement de ne pas l'avoir réellement épousée,et de lui avoir infligé cette vie de prostituée car elle devait rembourser la somme qu'il avait perçu.
De ces deux nouvelles très différentes le regret y est présent mais du regret malgré tout teinté d'espoir .
A méditer. ⭐⭐⭐


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Les amas de neige s'amoncellent le long de la vieille voie ferrée qui ne mène nulle part en Hokkaïdo, à destination d'un coin perdu dans les montagnes, désaffecté comme le sera sous peu cette ligne de chemin de fer. A bord du dernier autorail à traction diesel de type KH12, Sato Otomatsu voit le jour de sa retraite arrivé. Une vie à travailler pour les chemins de fer de l'Hokkaïdo s'achève lors de ce dernier voyage, en bout de ligne. Seul dans la gare déserte, il restera plongé dans les souvenirs de sa vie avant qu'une petite fille vienne le voir, puis une seconde plus âgée... Ces visites l'attristent encore plus, tant elles lui font remémorer sa propre fille morte à l'âge de 2 mois, alors que son métier lui a procuré tant de fierté et de joie...

« le cheminot » a tout au long de sa vie privilégié et honoré son métier, au détriment de sa vie familiale. Il n'a jamais fait le deuil de sa fille et ne cessera d'y penser à chaque entrée en gare. Jour après jour, il revoit sa femme lui donnant sur le quai le corps froid de sa fille chaudement enveloppé. Mais que pouvait-il faire alors qu'il était en service. Je l'ai longtemps cherché cette histoire. Je ne sais pourquoi, mais je sentais, avant même d'avoir ouvert le livre, qu'elle pouvait me bouleverser et m'émouvoir, même si la nouvelle est un peu courte... J'aurais bien aimé passer encore quelques pages à sillonner les montagnes enneigées de l'Hokkaïdo à bord de cette vieille diesel, bannissant la rapidité d'un Shinkansen sans âme...

On laisse de côté les fantômes de Yuki-ko et la neige blanche de la gare désaffectée, pour la province de Chiba avec « La lettre d'amour ». Seconde nouvelle, aussi courte que la première mais tout aussi émouvante.

Goro est un petit malfrat, pas vraiment méchant mais qui trafique un peu avec la mafia locale pour gagner un peu d'argent. Sortant à peine de prison, la police lui apprend la mort de sa femme... ? ? ? Goro avait oublié simplement qu'un jour il avait été marié, du moins avait-il seulement signé le contrat de mariage sans même voir sa promise, une prostituée chinoise « importée » par son yakusa de patron, et pour qui ce papier signifiait un emploi tranquille dans la petite province de Chiba. Sur place, il découvre que « sa femme » l'aimait tendrement et lui avait écrit une lettre d'amour... Ainsi, Goro va devoir faire le deuil d'une femme qu'il ignorait tout jusqu'à sa mort. Ce deuil l'éprouvera plus que prévu, et le verra même fondre en larme comme le lecteur attentif et ému que je suis. Snif... Snif...
Lien : http://leranchsansnom.free.fr/
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Ce petit livre est composé de deux nouvelles, qui traitent du deuil, de la perte, de la rencontre avec des mondes perdus.


Quelque part en Hokkaido au bout du monde, dans un endroit neigeux et glacial, la première nouvelle, LE CHEMINOT, raconte les retrouvailles d'un chef de gare, avec sa fille décédée, Yukiko, morte en bas âge.
Tout ce qui était resté enfoui en lui revient alors à la surface, et ensemble ils traversent tous les âges qu'auraient eu Yukiko. Un miracle alors si une personne perdue revient se manifester.

Cette nouvelle nous enveloppe de solitude et de tristesse, j'ai regretté qu'elle ne soit pas un plus long récit. Il a manqué pour me toucher, quelques passages, entre le père et le fantôme de Yukiko. C'était bien trop rapide pour que je m'en imprègne, en revanche, l'atmosphère glacial était bien présente pendant toute ma lecture.

La seconde nouvelle s'intitule LETTRE D'AMOUR. C'est une escroquerie, triste, terne et révoltante sur fond d'immigration clandestine et de trafic de chair humaine qui se métamorphose en une histoire d'amour pure et merveilleuse et impossible entre deux personnes qui ne se connaissent pas.

J'ai trouvé cette nouvelle efficace et poignante. Un caïd qui se retrouve face à lui-même quand il se rend compte de la vie désespérante à laquelle a dû faire face cette personne dont il a découvert les lettres…
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La première histoire narre le dernier jour de travail d'un vieux chef de gare. Un des aspects traditionnels de la littérature japonaise est l'irruption de fantôme dans la réalité. Ici, lors de cette dernière nuit, le vieil homme va se retrouver confronté au fantôme de sa fille décédée durant son enfance. Pas de frissons ni de terreur ici mais plutôt une sérénité apaisée qui permet de trouver un sens aux questions que le chef de gare s'est longtemps posé. C'est écrit avec beaucoup de douceur et de retenue. Une belle histoire mélancolique.

Dans la seconde nouvelle, on suit les pas d'un jeune homme fraîchement sorti de prison. Il trafique plus ou moins avec les yakuzas sans être un véritable criminel. Il apprend alors la mort de sa femme, une jeune fille étrangère amenée au Japon par la mafia comme prostituée et qu'on lui a fait épouser moyennant finances. Pourtant en découvrant le corps de la jeune femme et la lettre d'adieu qu'elle lui a écrit, il tombe amoureux de la morte qu'il n'avait jamais vu auparavant. J'ai trouvé que ce récit,par son manque de crédibilité, était nettement moins prenant que la première nouvelle.
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Lorsque je suis tombée sur ce titre il y'a de cela quelques temps, j'étais déjà amoureuse du titre, de la couverture, du nom de l'auteur, de la quatrième de couverture. Mais j'ai toujours un doute lorsqu'il s'agit de lire des nouvelles : j'ai toujours une minuscule appréhension. Et je ne sais pas pourquoi. Elle n'a pas lieu d'être, cette appréhension. Car au final, lorsque je m'engage dans la lecture de nouvelles je suis très, très rarement déçue. Et preuve en est, ces deux nouvelles d'Asada Jirô sont particulièrement savoureuses et imaginatives.

Je ne m'attendais d'ailleurs pas à ressentir un tel bouleversement émotionnel en 79 pages. A la lecture de la première nouvelle intitulée 'Le Cheminot', je me suis retrouvée au beau milieu du Japon, dans une gare. Quelque chose de métaphorique ? Oui, mais plus que cela. L'auteur nous livre l'histoire de la vie banale d'un cheminot proche de la retraite, veuf, et dont la fille est morte il y'a très longtemps. Proche d'une chronique sociale de moeurs à la russe comme chez Dostojevski ou Gogol mais dans un décor épuré, sobre, modeste, mais non dénué de symboles, Asada Jirô apporte des éléments fantastiques, des petites touches de magie, des fantômes apparaissent, brièvement, et des phrases comme ça, vous sautent aux yeux et au coeur :

"Non, moi, je ne suis qu'un cheminot. Pour un malheur personnel, je n'ai pas le droit de pleurer."

Et puis, cette nouvelle, si elle aurait pu se vautrer dans le pathos, dérive doucement vers la mélancolie, les nuits d'hiver. Une larme se pose forcément sur la joue du lecteur. J'ai relu deux fois la fin de la nouvelle parce que je ne m'y attendais pas, à cette fin douce et brutale à la fois.

Quant à la seconde nouvelle, 'Une Lettre d'amour', je ne l'ai pas moins appréciée, je l'ai trouvée très belle, de nouveau sur une question de société difficile à exprimer dans une si courte prose. J'ai été très émue par une simple lettre, quelques mots posés là, comme ça.

De ces deux nouvelles on peut dire deux choses : l'auteur a la capacité, en deux textes, de nous emporter, de nous faire vibrer d'émotions, avec de la poésie, des fantômes, des coeurs tendres, et puis surtout, il a l'incroyable talent de nous décrire le Japon d'une façon si belle, minimaliste, et poétique, que vous ne tarderez pas à crier au chef d'oeuvre de la littérature japonaise !
Lien : http://www.unefrancaisedansl..
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Tout d'abord, je voudrais dire à quel point j'apprécie le travail de la maison d'édition Picquier, qui publie toujours des auteurs gagnant à être connus dans une traduction de qualité supérieure. Encore une fois, j'ai découvert avec le cheminot un excellent auteur, Asada Jirô. ( voilà pour le moment promotion, passons au texte, si vous le voulez bien )

Ces deux nouvelles mettent le personnage principal en crise existentielle par un événement, l'arrêt de la ligne de chemin de fer vieillotte sur laquelle le cheminot a travaillé toute sa vie, la découverte par le personnage de la lettre d'amour de la mort de sa femme, une immigrée chinoise avec qui il a contracté un mariage blanc. Ces bouleversements amènent les personnages à une introspection, le cheminot étant hanté par la vision fantasmée d'une enfant à des âges différents figurant sa fille morte prématurément, mort dont il se sent responsable, ayant fait passer son de voir de cheminot en premier. Dans Love letter, l'homme se prend d'affection pour cette femme qu'il n'a jamais connu, et est de plus en plus dévasté par un sentiment de culpabilité envers cette prostituée morte dans l'indifférence générale.

Vous me direz que ces thèmes sont répandus. Il est vrai, mais ce qui l'est moins est de les traiter avec un ton pathétique mais sobre. Pas de grandes effusions , comme souvent dans la littérature japonaise les personnages évoluent par touches constantes, presque insensiblement. C'est ce dépouillement qui donne cette force au récit. Cela ne veut pas dire que le récit est austère, point du tout, je ne veux pas vous faire fuir ! C'est seulement une littérature intelligente, sans esbroufe.

Je me permet un avis plus personnel, j'ai préféré le récit Love letter, parce que je trouve qu'il y a une dimension supplémentaire. le personnage principal semble se rendre compte que par indifférence, appât du gain, il a accepté de se marier avec une femme, jouant le rôle de maillon dans la chaîne qui exploite ces prostituées chinoises clandestines. C'est un beau récit qui nous exhorte à lutter contre l'indifférence, et la fin est une belle porte vers un peu d'espoir ....
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