Est ce une lettre, envoyée à sa meilleure amie partie aux Etats Unis parce qu'elle n'acceptait pas les jeux malsains de sa belle famille , et l'intrusion d'une nouvelle épouse, plus jeune, bien plus jeune qu'elle ?Non.
Comment peut on raconter dans une lettre ce drame à celle qui l'a vécu ? Non, ce n'est pas du tout une lettre, ni courte, ni longue, c'est un récit.
L'héroïne, celle qui, supposons le, écrit une lettre à cette absente, nous raconte en fait à nous : le fait qu'après vingt cinq ans d'amour, son mari, aussi, s'est fait piéger par une amie de sa fille. Cela il y a 5 ans.
Bon, entre la polygamie séculaire des femmes des campagnes du Sénégal, et d'Afrique en général, qui s'entraidaient aux champs, qui avaient chacune « un jour »de visite du mari dans leur lit et chacune une case, qui élevaient leurs enfants ensemble, même si souvent les jalousies éclataient au grand jour, coutume séculaire et compréhensible vu les conditions difficiles de vie, entre donc cette polygamie et la polygamie vécue par les citadines de Dakar en 1979, ayant étudié, travaillant au dehors, trouvant un beau jour qu' une petite s'est adjugé le mari, il y a une vraie différence.
Lorsque ce mari abandonne la femme et les 12 enfants, pour vivre avec cette petite, que cette petite porte beau avec ses robes couteuses et ses voitures, et que de plus la légitime continue à financer les dépenses communes de son « couple » qui pourtant n'existe plus, lorsqu'elle se rend compte de l'argent dépensé pour l'autre, lorsqu'en plus elle doit partager l'héritage en part inégales, pas besoin de le préciser, nous serions les premiers à applaudir au divorce, comme l'a fait sa meilleure amie à laquelle elle « écrit », et comme ses enfants le lui conseillent.
Eh bien, non, et si ce livre a été considéré comme le drapeau du féminisme, là, je ne vois pas. S'il s'est « imposé comme une voix incontournable de la littérature africaine », je ne saisis pas non plus.
Quant au rejet de la polygamie, c'est comme si on demandait aux femmes d'aujourd'hui si elles ne voyaient pas d'inconvénient à ce que leur mari entretienne des jeunettes avec leur argent, parce que c'est d'argent dont il s'agit, pas des plaisirs partagés.
Donc, s'élever contre la polygamie ainsi que
Mariama Ba nous la présente, paraît un peu enfantin. Car elle ne part pas, son héroïne, elle partage le deuil avec celle qui lui a capté son mari, comme une bécasse elle a même peur de se faire complètement plumer, et elle paye durant le deuil sa belle famille et celle de l'autre, elle paye, avec des phrases d'un autre monde « le meilleur d'une femme, c'est la propreté », donc, nous sommes tous d'accord, elle n'a rien à se reprocher, elle a nettoyé la maison, reçu la famille large de son mari, elle continue à élever ses enfants dont le dernier a 5 ans. Elle vit en réalité sans mari, mais ne pouvant se remarier. Bien sûr, mais il y a pire, dit elle : des maris alcooliques, violents, joueurs, et on peut aussi avoir une jambe de bois…..
Et puis j'ai relevé quelques incohérences dans une même phrase, peut être due à mon ignorance des coutumes de l'islam : son mari doit être inhumé dans le seul tissu permis, 7 mètres de percale blanche… puis ils le recouvrent de pagnes riches et sombres.
Elle refuse les propositions du frère du mari « mort et bien mort » dit elle, (comme si on pouvait être à moitié mort, mais passons) : « Ma maison ne sera jamais pour toi l'oasis convoitée »… et ajoute : « tu seras ici dans la propreté et le luxe, dans l'abondance et le calme. » Drôle de manière d'évincer un prétendant qui en veut à son argent.
Donc ceci n'est pas une lettre, n'est pas un pamphlet contre la polygamie, ni non plus une image un peu moderne de la femme libérée, c'est selon moi une réflexion sur les finances d'un couple, aggravé lorsque les vieilles coutumes machistes sont mélangées à la société de consommation. C'est de l'argent dont parle
Mariama Ba.
Ce livre a été écrit presque 20 ans après l'indépendance, alors que le Sénégal n'était pas une colonie, mais une partie de la France, envoyant des intellectuels à l'Assemblée nationale( Blaise Diagne,
Senghor)pays développé certainement , avec des écoles et des Universités crées 3 ans avant l'indépendance en 1960. En cherchant « polygamie au Sénégal », je vois que beaucoup d'intellectuelles choisissent, ou acceptent, d'être seconde épouse, bien sûr, comme ça on n'a pas à se mettre aux fourneaux chaque jour, on partage les assauts si assauts il y a ( permettez moi de douter, car toute cette sarabande repose sur la surpuissance des hommes. Bon, d'accord., je ne vais pas m'en plaindre.
Pour rester dans un climat positif, disons quand même que le seul intérêt d'«
une si longue lettre » est d'être un des premiers à être écrit par une femme africaine. Et puis
Mariama Ba a, elle, divorcé 2 fois, ouf !