Paul et Ana sont sur le point de se marier. Pour la cérémonie, cette dernière convie Joseph, un ancien ami d'enfance de son futur époux, pensant lui faire une merveilleuse surprise. Mais la présence de Joseph va provoquer chez Paul un grand bouleversement émotionnel, faisant resurgir une multitude de souvenirs enfouis. Particulièrement ceux de l'été 1983.
Nous allons vivre l'histoire à travers Paul, alternant entre son existence actuelle et ses souvenirs d'enfance. Issu d'un milieu bourgeois, avec un père dentiste, Paul n'a pourtant pas eu la vie facile. C'est un garçon qui a clairement manqué de tendresse, pris en étau dans une famille dysfonctionnelle, avec des parents qui ne s'aimaient pas, ou plus. Des parents qui se sont mariés trop jeunes, un peu par obligation, la mère étant tombée enceinte. Son père Charles préfère fuir la maison et trouver du réconfort auprès de ses maîtresses, tandis que sa mère Blanche, malheureuse, a tendance à se réfugier dans l'alcool. Une conjoncture qui n'est pas sans conséquence pour Paul, qui porte l'insidieux fardeau de la culpabilité. La culpabilité d'être né, d'être celui qui a brisé les rêves de la jeunesse.
Paul est un garçon un peu à part, qui aime la musique et danser. Il n'a pas vraiment d'amis, d'autant qu'il bégaie, ce qui n'arrange pas les choses. Jusqu'au jour où il va rencontrer Joseph, un adolescent qui mène, avec sa mère, une existence peu commune. Joseph a cette liberté de pensée et d'agir qui fait tant défaut à Paul et qui impose le respect. Il est la bouffée d'air qui lui manquait dans son monde étouffant. Deux âmes qui se reconnaissent et se comprennent. Ensemble, ils vont partager des moments forts, des expériences nouvelles, vivre les premiers émois de l'adolescence, et le drame qui les désunira.
Il ne faut pas oublier que nous revivons le passé à travers les souvenirs de Paul, aujourd'hui âgé d'une trentaine d'années, et dont le regard est désormais modelé par l'expérience de la vie. Si j'ai ressenti une empathie quasi immédiate pour l'adolescent, l'adulte m'a paru plutôt distant, un peu égoïste, comme exempt de tout sentiment ou presque. Mais, une fois Joseph retrouvé, on ressent toute la passion qui l'anime, la vie qui l'envahit à nouveau.
On suit le fil de ces réminiscences, qui vont le conduire à s'interroger, à faire son introspection. L'indifférence des parents, le poids du conformisme, le harcèlement des camarades, la violence des mots et des actes sont autant de sujets qui nous touchent et nous révoltent. Sous un éclairage nouveau, certains évènements révèlent un manque de communication, qui conduit à des jugements trop hâtifs, et les répercussions tragiques qui en découlent. Par ailleurs, j'ai aimé les personnages, finement ciselés, et lesquels, par leur imperfection terriblement humaine, m'ont profondément touchée.
Avec une plume délicate,
Sophie de Baere nous plonge dans un récit fort, poignant, non dénué d'une certaine violence. J'ai beaucoup aimé suivre le cheminement de Paul, qui va tenter d'enfin déployer ses ailes pour prendre son envol.
Mon avis sur la version audio :
Le comédien
Bernard Gabay prête sa voix à la version Audiolib, interprétant à la perfection ce récit raconté du point de vue de Paul. J'apprécie beaucoup le timbre de
Bernard Gabay, que j'ai déjà eu l'occasion d'écouter dans «
Cinq cartes brûlées » de
Sophie Loubière, ou dans l'excellent roman «
La route » de
Cormac McCarthy. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai choisi d'écouter la version audio et je n'ai pas été déçue. Son interprétation du texte met en lumière toute la délicatesse de la plume de Sophie de Baere, et j'adore ! Il a cette diction calme et posée qui permet de s'imprégner pleinement de l'histoire et de laisser libre cours aux images qui nous viennent instinctivement. Une réussite !
Ma chronique détaillée est sur le blog.