Ce roman nous raconte les aventures de 6 stagiaires - Ophélie, Arthur, Alix, Hugues, Vincent et Enissa - au sein de la convoitée Pyxis, entreprise spécialisée dans l'édition de mangas et de jeux vidéos. Plus particulièrement, ce sont à travers les points de vue d'Ophélie et d'Arthur que l'on découvre toute cette équipe de jeunes stagiaires pour le moins clichés. Entre autres:
- Ophélie est une provinciale fraîchement débarquée à Paris, élève modèle, pleine de principes, qui va finir par se laisser corrompre par la vie parisienne;
- Arthur est un riche parisien, représentant de cette jeunesse dorée qui fréquente des écoles de commerce hors de prix et qui pensent que tout leur est dû et permis;
- Alix est une otaku - comprendre qu'elle passe beaucoup de son temps à lire des mangas ou jouer à des jeux vidéos liés à la culture japonaise - et est donc considérée par certains comme étrange voire excentrique;
- Enissa est une bimbo écervelée, qui aime porter des vêtements hors de prix et qui ne pense qu'à draguer.
Pourtant, au fur et à mesure de l'histoire,
les stagiaires prennent une dimension plus profonde alors qu'on leur découvre des blessures en rapport à leur condition ou personnalité. Cela les rend finalement un peu plus humains et plus attachants si bien que j'ai moi-même fini par m'inquiéter pour Ophélie et sa recherche d'appartement, me moquer gentiment d'Enissa, détester puis avoir pitié d'Arthur; je me suis retrouvée en Alix et j'ai vu en Hugues un ami sincère.
Alors des personnages plus attachants oui, mais pas forcément moins stéréotypés. Et c'est parfois là que le bas blesse: je garde finalement de ce livre l'image d'une jeunesse dissolue qui ne pense qu'à la fête, l'alcool, la drogue et j'en passe.
le pire aura été cette remarque d'Ophélie à Alix lorsque cette dernière avoue ne jamais avoir consommé de drogue et boire rarement: "La première fois ? Même pas un joint, rien ? [...] Cela dit, si sa vie était jusqu'ici une série de chats et de forums de discussion, ceci explique cela : le virtuel n'offre pas toutes les expériences de vie, loin de là." Mais d'où vient cette idée que chaque jeune avec un semblant de vie s'est forcément drogué un jour ? Que lorsque l'on sort tant soit peu en soirée, on finit forcement par consommer de la drogue un jour ou l'autre ? Et surtout, en quoi être passionné par les nouvelles technologies, jeux vidéos, mangas, etc. signifie forcement que l'on vit dans un monde virtuel ? Alors est-ce que Samantha Bailly utilise cette remarque d'Ophélie pour nous faire réfléchir sur les stéréotypes qui collent généralement à la peau des jeunes, ou est-ce que cela reflète en partie sa vision des choses ?
Quoi qu'il en soit, ces jeunes adultes sont bel et bien confrontés à des problèmes d'actualité: la difficulté de trouver un stage tout d'abord, mais surtout un stage dans une entreprise qui ne va pas exploiter ses stagiaires, de trouver sa place au sein d'un groupe établi, la complexité de trouver un logement sur Paris avec un faible revenu, etc. Et puis il y a aussi cette hypocrisie de certaines entreprises qui poussent leurs stagiaires à donner le meilleur d'eux-même en faisant miroiter un contrat qu'ils n'offriront jamais. Au final, avec
Les Stagiaires,
Samantha Bailly ne nous livre pas qu'une simple histoire, elle nous pousse à réfléchir sur des situations bien réelles, et parfois même, sur nous même.