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Quoi de plus indiqué, pour finir l'année dans le bonheur, que cette nouvelle, piochée dans « Les Diaboliques » parfaitement incorrecte et immorale.
Au Jardin des plantes, un médecin, dont Barbey d'Aurevilly décrit longuement l'athéisme et le cynisme contemple en compagnie du narrateur une panthère de velours noire, « magnifique échantillon des redoutables productions de son pays…forme idéale de beauté souple, de force terrible au repos, de dédain impassible et royal ».
L'autre panthère, vêtue celle-là d'une longue robe de satin noir, puissante, impérieuse, inquiétante par sa puissance animale, apparait, au bras d'un homme bien connu du docteur. « La femme, l'inconnue, était comme une panthère humaine, dressée devant la panthère animale qu'elle éclipsait. »
Et qu'elle domine, malgré les barreaux.
La bête sent ce pouvoir, baisse la tête, ferme les yeux, fascinée.
Mais notre héroïne ne se satisfait pas de ce triomphe, elle passe le bras dans la cage, fouette avec son gant le museau de l'animal » qui arrache… le gant, pas le bras, avec une soudaineté et une violence inouïe « la formidable bête outragée avait rouvert des yeux affreusement dilatés, et ses naseaux vibraient encore… »
Cette scène d'ouverture donne le ton, d'abord de l'amour fou du couple, et de leur crime impuni, longuement médité, ne leur suscitant aucun remords, dont nous allons prendre connaissance grâce au médecin.
Ils s'affrontent au fleuret, ces deux amants, et se jouent de la femme (puisque Serlon est marié) qu'ils empoisonnent : mais, et là réside tout le génie de Barbey d'Aurevilly : l'épouse abusée préfère le silence, pour « tenir son rang de noble » et ne veut pas se venger.
Je meurs, dit-elle, et eux sont dans les bras l'un de l'autre, heureux et délivrés de moi.
Car « ces deux êtres, immuablement beaux malgré le temps, immuablement heureux malgré leur crime, puissants, passionnés, absorbés en eux », continueront à partager leur bonheur.
le vice puni, et la vertu récompensée ? foutaises, semble dire Barbey d'Aurevilly, (même s'il s'en défend, bien évidemment) en comparaison avec la passion entière, durable, miraculeuse et sans une ombre, de ces « deux animaux de la même espèce. »
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Le Jardin des Plantes, une panthère noire dans sa cage et, devant elle, de l'autre côté des barreaux, un couple d'amoureux un peu androgynes et diaboliquement assortis. Deux observateurs, de loin, regardent la scène...

La femme, toute en noir, svelte, souple - féline !- frappe de son gant le mufle de la bête fauve...qui réagit, furieuse, et le lui arrache. Échange de regards, duel de sauvageries. « Panthère contre panthère ».

Un des observateurs, médecin, raconte alors à l'autre l'histoire ce couple fascinant et hors norme, qu'il a reconnu et fréquenté. Ce sont deux assassins impunis, deux grands fauves solaires et noirs lâchés dans la ville. Deux amants soudés par la passion et le crime. Et insolemment heureux.

Le Bonheur dans le crime est un bijou, -oui, un vrai « diamant noir »- sans conteste la plus belle nouvelle des Diaboliques- qui installe son pouvoir de captation dès les premières lignes.

La langue est belle, ciselée, choisie, pleine de ces élégances un peu décadentes qui font la marque des dandys comme Barbey.

Les personnages sont magnifiques, amoraux, agis par la violence de leur passion, aimantés invinciblement l'un par l'autre, mus par un désir qu'aiguillonne d'abord le feu de la joute dans la salle d'escrime -Hauteclaire Stassin est fille d'un maître d'escrime et joue du fleuret comme un homme- et bientôt le plaisir même de la transgression, le goût de la provocation et du scandale.

Rien ne les arrête : ni la décence, ni la limite imposée par l'époque à leur sexe ou à leur état- elle est femme et roturière, lui est noble et marié- ni la morale, ni la religion , ni la maladie, ni la mort…Ni le regard des pauvres mortels insipides qu'ils toisent du haut de leur amour.

Ni celui, vert et or, de la panthère noire du Jardin des Plantes…

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Le Bonheur est dans le crime est l'une des sept nouvelles du recueil Les Diaboliques (1874) qui valut à son auteur d'être accusé « d'outrage à la morale publique et aux bonnes moeurs ». Barbey qui est un catholique fervent affirme dans sa préface qu'il offre ses Diaboliques pour susciter l'horreur de leur comportement, et faire ainsi ,dit-il, une oeuvre chrétienne.
Cette nouvelle en particulier contient une histoire parfaitement immorale résumée dans le titre. Les deux criminels en effet n'éprouvent aucun remords et se moquent bien de l'opinion des autres. « C'est par cet air-là [de bonheur absolu] qu'ils ont toujours répondu victorieusement à tout, à l'abandon, aux mauvais propos, aux mépris de l'opinion indignée » Celui qui raconte leur histoire, c'est le Docteur Torty. Il fait part de sa stupefaction au narrateur qu'il a rencontré au Jardin des plantes. le couple d'assassins est devant eux, face à la cage de la panthère noire. « ces deux êtres, immuablement beaux, malgré le temps, immuablement heureux malgré leur crime, puissants, passionnés, absorbés en eux, passant aussi superbement dans la vie que dans ce jardin ».Torty est un dandy, athée, cynique, qui prend plaisir à raconter cette histoire diabolique au narrateur anonyme tout en s'en offusquant. C' est un personnage bien ambigu, témoin, voyeur et non dénonciateur. Quant au couple criminel, je vous laisse le plaisir diabolique de le découvrir, pervers que vous êtes...
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Je voudrais commencer ce petit avis par une déclaration.
Une déclaration d'amour à la langue française.

J'aime son vocabulaire riche qui permet de s'exprimer de façon précise et avec tellement de nuances ; j'aime ses noms, ses verbes, ses adjectifs qui, bien utilisés, permettent de construire à l'infini des phrases enchanteresses.
J'aime ses conjugaisons, ses modes et ses temps qui nous offrent une incroyable palette : non, le subjonctif n'est pas ringard, même à l'imparfait ; non, le passé simple n'est pas un temps inutile !
Les différentes formes verbales me réjouissent par leur sonorité et leur beauté.

Ce petit préambule pour dire que j'ai adoré la langue que Barbey d'Aurevilly a utilisée pour raconter son histoire.
On savait écrire au dix-neuvième siècle. Mazette, quel plaisir de lecture !

L'histoire semble a priori peu originale : un couple d'amants et une épouse encombrante. Une personne de trop.
Sur ce sujet usé jusqu'à la corde, l'auteur a pourtant réussi à faire du nouveau. Il adjoint au trio un médecin narrateur qui se retrouve moralement impliqué, et...
Et, rien du tout !
Vous ne pensiez tout de même pas que j'allais tout vous dévoiler, non ?
En tout cas, Barbey d'Aurevilly a tellement bien réussi que son texte a choqué à l'époque de sa parution par l'immoralité des personnages et la complaisance de l'auteur.

"Dans ce temps délicieux, quand on raconte une histoire vraie, c'est à croire que le Diable a dicté..." peut-on lire en exergue.
Si vous voulez vous lancer, vous voilà prévenus : cette nouvelle est réellement diabolique !
Mais elle est divinement bien écrite. Alors, plus d'hésitations : vous y trouverez peut-être votre bonheur... même sans crime.
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Comme c'est agréable de retrouver cette langue magnifique du XIXe siècle ! Un vrai régal de mots rares, de tournures désuètes, de subjonctifs.... le tout sur une histoire tellement moderne qu'elle a dû choquer à l'époque !
Un couple heureux, qui s'aime toujours après tant d'années de vie commune. Et caché, un secret, un meurtre...
Difficile de trop dévoiler l'intrigue de cette nouvelle qui a un côté cynique ou diabolique. Un vrai régal !
Je découvrais Barbey dAurevilly avec ce texte. Je pense bien continuer la découverte de son oeuvre !
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Lu dans l'édition France Loisirs « courts romans et autres nouvelles » de 2004. Nous voici plongés dans une petite ville de Normandie au milieu du XIXe siècle. Une histoire d'adultère et de meurtre qui nous tient en haleine jusqu'au bout. L'intrigue prend son temps pour se dévoiler, racontée par l'intermédiaire d'un médecin, témoin de l'aventure. Questionnement autour du bien et du mal. L'amour peut-il s'accomplir dans le meurtre ? Les personnages sont puissants, l'écriture précise.
Barbey d'Aurevilly reste un grand maître de l'intrigue sociale.
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Le bonheur dans le crime, une nouvelle de Jules Barbey d'Aurevilly délicieusement diabolique…

A Paris, au détour d'une promenade au Jardin des Plantes, le docteur Torty accompagné du narrateur, replonge dans ses souvenirs, ranimés par une rencontre furtive avec un couple des plus remarquables, de par leur beauté et l'amour manifeste qu'ils se portent mutuellement. Il entreprend alors de raconter à son compagnon du jour l'histoire du comte Serlon de Savigny et de son épouse HauteClaire Stassin.
Cette dernière, fille d'un maître d'armes reconnu, a pris la succession de ce dernier à son décès dans la région de V., en Normandie. Fine lame, elle enseigne son art et fait ainsi la rencontre du comte, devenant rapidement sa maîtresse. Celui-ci étant marié, la situation devient de plus en plus intenable pour les amoureux fusionnels. Ils élaborent alors un plan machiavélique pour pouvoir rester ensemble...et demeurer heureux.

La réflexion ou le questionnement qui sous-tend cette nouvelle et qui fit scandale à l'époque de sa parution est la suivante : peut-on savourer son bonheur en ayant commis le pire des crimes ? le couple Savigny, dorénavant officiel, dévoile en effet son amour sans remords,et ce, en toute félicité ; au grand dam du docteur Torty qui n' ignore point les détails les plus intimes de l'affaire, mais aussi en totale abstraction de la forte désapprobation de leur entourage.
L'amour, aussi puissant soit-il, peut-il justifier la transgression ultime ? Et que dire des contradicteurs, du docteur Torty lui-même, qui voit sa curiosité plus forte que tout à observer ce couple dans la progression de son histoire et dans son évolution vers l'indicible, sans réellement condamner ni surtout contrecarrer…Où se situe la « moralité » ?

Une longue nouvelle bien savoureuse...
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Ah ça c'est ce que l'on peut appeler une belle histoire d'amour !
C'est complètement immoral et ce n'est pas par hasard que cette nouvelle est extraite du recueil "Les diaboliques" de Jules Barbey d'Aurevilly.
Il y a effectivement un petit diable qui se balade au-dessus des têtes dans "Le bonheur dans le crime".
C'est l'histoire d'un crime parfait chez les aristocrates, milieu dans lequel les valeurs mènent à préférer la mort au déshonneur. Et cela pour que l'amour d'un couple amoureux triomphe en dehors des conventions.
Malheureusement, on retrouve le principal défaut de Jules Barbey d'Aurevilly. Il est tellement misogyne que ça gâche le plaisir de lecture. Il est vraiment dommage de lire certains propos alors que j'ai apprécié l'intrigue, par exemple "toutes les filles que le diable avait mis sur son chemin" ou "Et elle était là-dessous d'une beauté pleine de réserve, et d'une noblesse d'yeux baissés, qui prouvait qu'elles font bien tout ce qu'elles veulent de leurs satanés corps, ces couleuvres de femelles, quand elles ont le plus petit intérêt à cela..."
Pour lui, il est bien évident que c'est la femme qui agit pour tuer sa rivale... couleuvres de femelles !
On pourrait en rire tellement c'est caricatural mais ce n'est pas vraiment drôle.


Challenge Coeur d'artichaut 2022
Challenge Riquiqui 2022
Challenge XIXème siècle 2022
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"Le bonheur dans le crime", est une nouvelle de Jules Barbey d'Aurevilly. C'est avec elle que je découvre cet auteur.
Elle me donne plutôt envie d'en découvrir plus. Elle m'a en effet, plu, en tous points ; je m'y suis plongé aisément, et avec plaisir ; le style d'écriture, est très plaisant ; je trouve que le début de la nouvelle, aiguise la curiosité, sur les deux personnages qu'il met en scène, qui sont introduits de manière très surprenante ; la fin, est plutôt réussie et interroge sur les conséquences d'un crime, sur les individus qui le commettent : ceux-ci se font-ils toujours poursuivre par leur crime ?... Est-ce qu'un meurtrier, se fait inévitablement poursuivre par les remords ?...
Le personnage d'Hauteclaire, est assez fascinant, très fort, mystérieux et impénétrable.
Barbey d'Aurevilly sait imposer un rythme, qui pourra sembler lent à certains, mais qui, pour moi, permet de faire progresser l'intrigue, comme il faut, en conservant ce côté mystérieux qui reste tout au long de l'intrigue et ces personnages impénétrables.
L'écriture est vraiment très belle, typique du XIXème siècle, avec ce langage qui semble aujourd'hui daté, mais qui, sous la plume des auteurs de ce temps, semble si naturel et est si beau et si approprié pour conter de beaux récits, comme cette nouvelle...
En bref, c'est une très belle nouvelle qui, pour ma part, m'a bien plu.
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Librio publie à part l'une des meilleures Diaboliques de Barbey. C'est l'histoire (tellement rare) d'un crime parfait, à la perfection duquel l'orgueil de la victime contribue : c'est dire que, dans une perspective catholique, tout le monde est fautif et damné ici. Mais la perspective catholique n'est qu'une des clés de lecture du texte : la foi de Barbey ressemble plus à une posture littéraire, esthétique anti-moderne qu'à une réelle et profonde conversion, elle lui est un instrument de mesure et de satire des bêtises progressistes de son époque. Dans "Le Bonheur dans le crime", il les prend toutes à rebrousse-poil : le crime est impuni, le bonheur des héros est complet, ses héros féminins sont l'antithèse des rêveries morales de Michelet sur la Femme, et le bien ne triomphe pas du mal général et universel. En cela, Barbey fait en prose ce que Baudelaire, qu'il admirait, faisait en vers : montrer la beauté du mal, et tourner le dos avec mépris aux utopies du Bien, en quoi il demeure aussi choquant aujourd'hui.
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