Faut-il que
Christiane Baroche les eût bien connus ses personnages pour rapporter aussi sensiblement dans son livre, "
les feux du large", leurs moindres pensées, leurs plus secrètes émotions.
Faut-il que sa plume ait été bien taillée pour que l'encre de sa littérature en rende si justement toute l'humanité.
Ce livre est magnifique.
Il a d'ailleurs été distingué, en 1975, par le prix Drakkar.
Ce livre est un recueil de nouvelles maritimes, où le style est émotion.
Dès le premier récit, "Entrée de port", qui augure déjà d'un grand livre, la mer pourtant déchaînée et tumultueuse, cède le pas à l'incompréhension d'un couple qui ne se comprend plus, qui peut-être en a fini avec l'amour.
Un peu plus loin, le recueil rejoint les "Eaux profondes", d'une saga, une saga en résumé, mais qui n'a de résumée que sa forme, les sentiments y étant restés arrimés entre les mots.
Sandre revient sur la terre de l'aïeul où Loup, son frère a fait sa vie avec Anne-Madeleine.
Loup est resté sur le domaine.
Sandre, lui, avait le goût du vent, du sel et des rivages qui s'éloignent ...
"Eaux profondes" est une très belle et très profonde nouvelle sur l'attachement à sa terre, sur l'envie d'ailleurs et sur l'amour des siens.
Même s'il fait quelques incursions dans la "Royale", l'univers principal du livre est la plaisance, et la région de la Rochelle.
Mais, malgré cela,
Christiane Baroche se glisse aisément dans l'uniforme de l'officier de marine, et en ressort des personnages plus vrais que nature.
Dans "L'éperonnage", les descriptions sont splendides, évocatrices d'une aventure banale en même temps qu'extraordinaire.
Un couple se déchire dans un silence assourdissant et insupportable pour David, le plus jeune des deux fils, avant que l'éperonnage de leur voilier par un chalutier ne vienne rebattre les cartes de ce sourd tumulte familial ...
L'écriture a ici une sensibilité toute féminine, faite d'intelligence et d'intuitivité.
Elle est fine, imaginative et perspicace.
Au final, le recueil comprend une dizaine de nouvelles, toutes aussi belles les une que les autres où le style ne cède rien au propos, à l'analyse fine qui y est faite de la complexe humanité des personnages.
Même, si l'ouvrage contient quelques légères longueurs, le plaisir de lecture ne s'en ressent pas, ce livre est celui d'une grande et belle plume.
Et, si par infortune, vous n'aviez pas à venir quelques beaux jours de congé propices au voyage, l'invitation vous est faite ici de découvrir "l'univers dans un fauteuil".
Sur les bords du Tarn, François Lorpéduse, un flâneur de week-end, arrive à Saint-E juste avant la nuit.
Du dernier café ouvert à l'hôtel des soeurs Tringle, François, écoutant, y a-t-il vraiment entendu ce qu'il écoutait ?
La galerie de personnages, présentée et décrite par
Christiane Baroche est savoureuse et originale.
"l'univers dans un fauteuil", la plus longue et dernière des nouvelles du recueil, est un petit moment de bonheur, de tendre et joyeuse lecture ...