Un western sans John Wayne, est-ce encore un western ? Réponse : c'est encore mieux que ça !
Après la Guerre de Sécession, Winona, jeune survivante de la tribu des Lakotas, a été recueillie par un couple d'Unionistes qui ont veillé à lui dispenser une éducation éclairée. Vers l'âge de 17 ans, elle se fait méchamment agresser (mais par qui ?), et vu qu'elle n'est qu'une Indienne -et donc pas considérée comme une citoyenne des Etats Unis, puisque "impossible à civiliser"-, la loi ne peut rien pour elle. Qu'à cela ne tienne, nécessité n'a pas de loi non plus quand on s'appelle Winona et qu'on recherche la vérité.
Attention, on n'est pas dans une histoire de vengeance, c'est beaucoup plus subtil que cela. Et le Tennessee des années 1870 est encore plus terrible que le Texas de John Wayne : misère, violence, racisme y règnent. Pourtant, ce roman n'a rien de plombant ; au contraire, il est d'une légèreté exquise grâce à l'écriture éthérée de
Sebastian Barry, d'une grande douceur, même quand il raconte des choses affreuses. Faisant preuve d'une maîtrise impressionnante, il réussit parfaitement à insuffler de la poésie, de la fantaisie, de l'amour et de la lumière, dans un genre habituellement testostéroné, et sans rien lui enlever de sa rudesse, ni sombrer dans la mièvrerie.
J'ai beaucoup aimé Winona, toujours prompte à enfiler son pantalon, à dégainer son couteau et à enfourcher son mulet pour partir dans des aventures qui la dépassent, à la fois naïve et maligne, la tête remplie de rêves dorés où sa guerrière de mère lui apparaît, et observant son époque avec discernement : "Les hommes blancs ne connaissent pas de belles histoires, ils n'ont que des histoires terribles dont ils aimeraient qu'elles soient différentes." Elle m'a plu, cette gamine ancrée dans la Nature, errant parmi les esprits de son peuple décimé, et cependant épanouie au sein de sa drôle de famille d'adoption. Et d'ailleurs, j'ai adoré ces hommes qui veillent affectueusement sur elle (et qui étaient les sujets du précédent roman de Barry, "
Des jours sans fin", que je n'ai pas lu, mais que j'ai hâte de me procurer).
C'est donc un roman envoutant, tout en finesse et délicatesse, que je vous invite à découvrir à votre tour (même en imaginant John Wayne dans le rôle de l'avocat Briscoe !).
Je remercie vivement Babelio et les Editions
Joëlle Losfeld pour ce bel envoi.