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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
S'il peut se lire indépendamment, ce récit s'inscrit dans la continuité Des jours sans fin, dont on retrouve les protagonistes, Thomas McNulty, John Cole et Winona, leur fille adoptive rescapée du massacre de sa famille sioux, trimant pour joindre les deux bouts dans la ferme de leur ami Lige Magan, dans l'Ouest du Tennessee. Eux qui, en ces lendemains de guerre de Sécession, n'aspirent qu'à vivre enfin en toute tranquillité, doivent se défendre quotidiennement contre la violence. Quand ils ne sont pas assaillis par les pilleurs, ce sont Winona, puis Tennyson, l'un des deux esclaves affranchis qu'ils emploient, qui sont sauvagement attaqués par des inconnus. Mais, alors que l'amertume des anciens Confédérés ne cesse de bouillonner, multipliant les troubles, la petite communauté peut-elle seulement compter sur les autorités pour faire toute la lumière sur ces agressions et pour obtenir justice ?


Comme à son habitude, Sebastian Barry excelle à nous faire ressentir son histoire. Caractérisés au plus fin de leurs attitudes, de leurs émotions et de leur langage, ses personnages prennent vie au point que l'on croirait les voir et les entendre, et l'on ressort de la narration avec l'illusion d'avoir soi-même, le temps de cette lecture, vécu à leurs côtés. Si action et aventure sont bien sûr encore au rendez-vous de ce western, elles se fondent dans une évocation historique particulièrement suggestive de cette Amérique de 1870 encore à feu et à sang, où règnent la faim, la violence et la peur. Entre bandits de grand chemin et rebelles sécessionnistes encore en campagne, meurtres, passages à tabac et incendies criminels entretiennent un sentiment de menace larvée et de paix bien fragile, tandis que le début de reprise en main du Sud par les démocrates conservateurs ne laisse augurer rien de bon, ni pour les Indiens traités comme des animaux, ni pour les Noirs que leurs droits tout neufs ne protègent aucunement des tabassages en règle dès qu'ils risquent un pied en ville.


Centrée cette fois sur Winona, la narration adopte le point de vue doublement meurtri d'une jeune Indienne en passe de devenir femme. Sa douloureuse émancipation dans un imbroglio où s'affrontent désir de justice et vengeance aiguise chez elle une lucidité acérée que le souvenir de la tendresse maternelle et le soutien indéfectible de sa drôle de famille d'adoption vont néanmoins préserver du désespoir et de la haine. A travers elle se pose toute la question de l'identité amérindienne dans la nouvelle Amérique suprémaciste blanche. Si la guerre de Sécession et la défaite des Confédérés avaient alors ouvert quelques espoirs, certes rapidement douchés, pour le sort des Noirs dans l'Union, combats et massacres se poursuivraient encore longtemps à l'encontre des Amérindiens. Pour les survivants comme Winona, se construire est une terrible gageure que leurs descendants peinent encore à réussir aujourd'hui.


Après la violence des guerres et de leurs tueries, ce nouvel opus enchaîne sur une autre forme de brutalité : celle des persécutions racistes qui n'ont pas fini d'agiter l'Amérique. Qu'il s'agisse de la jeune indienne Winona, ou de la vieille esclave noire affranchie Rosalee, la même tendresse envahit peu à peu le lecteur, en même temps emporté par le rythme incessant de ce très immersif western.

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Si les lecteurs de Des Jours sans fin ont déjà fait connaissance avec Winona, la jeune indienne Lakota dont la famille a été décimée quelques années plus tôt, les nouveaux lecteurs de Sébastien Barry ne resteront pas sur leur faim et pourront savourer cette histoire où l'héroïne vit dans une ferme près de Paris, Tennessee, auprès d'une famille pas comme les autres. La jeune fille a mérité par son intelligence d'accéder à un emploi près d'un avocat et malgré ses origines indiennes, est convoitée par Jas Jonski qui voudrait en faire son épouse. Jusqu'au jour où un drame éclate…

Quelques années après la guerre de Sécession, les esclaves ont été affranchis et pour beaucoup cette liberté retrouvée ne signifie pas la disparition des obstacles et des malheurs. Mais les peaux-rouges sont encore plus mal lotis dans cette échelle de valeur inique : même la loi ne s'applique pas à leur cas. Autrement dit pas question de demander réparations pour les outrages ou les injustices subies.

Sebastian Barry dépeint avec beaucoup d'empathie le sort de cette population traitée avec cruauté et dépossédée de ses droits, de ses terres et souvent anéantie par des combats inégaux.

On aime aussi les étapes de la lunaison qui ponctuent les chapitres, qui restitue au coeur de la narration un peu de l'âme de la civilisation détruite.

On aime cette jeune fille courageuse, et maligne, qui tente de se défendre malgré sa cause perdue d'avance, consciente de l'opprobre qui lui a été jetée.

Belle découverte et je remercie Babelio et les éditions Joelle Losfeld.

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C'est tout près de Paris, Tennessee, dans la ferme de Lige Magan, que se sont installés John Cole et son compagnon, Thomas McNulty. À leurs côtés, la jeune Winona, adoptée par John, seule survivante de sa tribu lakota, ainsi que deux esclaves affranchis, Rosalee et son frère Tennyson. Parce que son père a tenu à l'éduquer correctement et lui enseigner non seulement les lettres mais aussi les chiffres, la jeune fille travaille pour l'avocat Briscoe, un ami de Lige. Une vie paisible jusqu'au jour où un certain Jas Jonski, qui travaille à l'épicerie, lui fait la cour, allant jusqu'à lui demander de l'épouser, même si John n'y semble pas favorable. La tension s'installe dès lors que Winona est agressée...

Si la guerre de Sécession est bel et bien finie, ce sont d'autres guerres que se livrent les hommes dans les années 1870. Racisme (aussi bien envers les Indiens que les Noirs qui n'ont aucun droit), violence, lynchage... Aussi, lorsque Winona se fait agresser violemment, John Cole et Thomas McNulty n'ont d'autre choix que de se faire justice, sans se douter des malheureuses conséquences. Si Thomas McNulty était le narrateur « Des jours sans fin », c'est ici Winona, à tout juste 17 ans, qui prend la parole pour nous raconter son histoire, celle de sa famille adoptive, sa place qu'elle peine à trouver dans une société encore raciste mais aussi l'ambiance pesante, sinon violente, qui règne dans le Tennessee avec l'émergence du KKK. Empreint de sensibilité, ce roman initiatique et profondément humain explore, tout en finesse, la complexité d'un pays en devenir. Sebastian Barry en saisit aussi bien la beauté que l'horreur. Ses personnages, si magnifiquement dépeints, témoignent d'une force, d'un amour et d'une tendresse incroyables.

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Répercutions de la toute fraîchement achevée guerre de Sécession du côté du Tennessee où beaucoup ont encore la défaite coincée en travers de la gorge et le remède au bout du fusil. C'est dans cette région échauffée où la loi et l'ordre sont des concepts chimériques qu'on retrouve John Cole et Thomas McNulty, héros et, pour ce dernier, narrateur des Jours sans Fin.
Ayant pris un peu de bouteille mais toujours aussi amoureux, ces deux-là vivent maintenant, en compagnie de deux esclaves affranchis, dans la ferme d'un compagnon-soldat de fortune du temps où, sous l'uniforme yankee, ils avaient fait la guerre aux rebs, aux bandits de grands chemins et aux Indiens, récupérant dans la foulée la petite Ojanjintka, jeune Lakota de son état, que leur troupe venait de rendre orpheline après un massacre aussi sanglant que révoltant de gratuité.
Ojanjintka renommée Winona Cole et fille adoptive de ce couple atypique prend les commandes de ces Milliers de Lunes pour faire entendre sa voix, son traumatisme et ses souvenirs qui peinent souvent à faire surface au milieu des rudes conditions d'une exploitation de tabac dans une contrée où le racisme et les préjugés relèguent les Indiens si bas dans l'échelle humaine qu'ils n'y apparaissent même plus.
On peut leur faire tout ce qu'on veut à ces peaux-rouges et Winona va en faire les frais, battue et violée sans que personne ne s'en émeuve et n'ait encore moins l'idée d'en appeler à la justice de toute façon inexistante pour certaines ethnies.
Alors quand sa famille adoptive décide d'essayer de la venger, elle ignore encore qu'elle va déchaîner contre elle l'enfer de l'imbécilité ségrégationniste.

D'une écriture toujours élégante, Sebastian Barry nous livre une suite Des Jours sans Fin dans la même veine brutalement poétique. Ne nous épargnant rien des injustices et méfaits commis sur les « sauvages » au nom de la race blanche, Barry met une fois de plus son lyrisme au service de la cruauté et de la bêtise humaines qu'il entend bien dénoncer à travers l'attachante Winona car, qu'importe l'époque à laquelle son roman se situe, si certaines choses ont évolué juridiquement parlant, les mentalités racistes et patriarcales, elles, se gardent bien souvent de suivre le mouvement.
Malgré tout moins ambitieux et accrocheur que le premier opus, pas question pour autant de bouder Des Milliers de Lunes et si Sebastian Barry s'attèle par hasard à jouer les prolongations avec un troisième tome, j'en serai avec enthousiasme.
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Coïncidence, alors que je venais d'entamer la lecture de « Des jours sans fin » de Sébastian Barry, j'ai gagné la suite qui vient juste d'être publiée grâce à une Opération Masse Critique de Babelio ! C'est dire que j'étais ravie ! Encore merci à Babelio et aux Editions Joelle Losfeld pour l'envoi de » Des milliers de lunes ».
Winona, c'est la petite indienne rescapée des massacres et recueillie par John Cole et Thomas McNulty. C'est ce dernier qui était le narrateur de « Des jours sans fin » et qui nous a permis de découvrir cette petite fille si attachante.
Dans la suite, c'est Winona qui prend la plume et elle est à présent une jeune fille.
C'est à travers la suite de son histoire que nous pouvons mesurer la terrible réalité du statut des indiens à l'époque de la fin de la guerre de Sécession. Ils n'ont absolument aucun droit, encore moins que les noirs et survire à cette époque au milieu de blancs dans l'état du Tennessee, qui est, ne l'oublions pas l'état qui a vu naître le tristement célèbre klu-klux-klan, est un défi quotidien.
Car oui, Winona a beau être capable de travailler chez un avocat du coin et s'occuper de sa comptabilité, elle ne compte pour rien et quand elle va se faire agresser personne, à part son entourage ne va s'émouvoir et chercher à l'aider.
Une histoire dominée par la personnalité de cette jeune fille qui est aussi en quête de vérité et d'identité avec comme décor le style si particulier de Sébastian Barry.
J'ai vraiment apprécié ces retrouvailles avec Winona et son entourage…..

Challenge Mauvais Genres 2021
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Un western sans John Wayne, est-ce encore un western ? Réponse : c'est encore mieux que ça !
Après la Guerre de Sécession, Winona, jeune survivante de la tribu des Lakotas, a été recueillie par un couple d'Unionistes qui ont veillé à lui dispenser une éducation éclairée. Vers l'âge de 17 ans, elle se fait méchamment agresser (mais par qui ?), et vu qu'elle n'est qu'une Indienne -et donc pas considérée comme une citoyenne des Etats Unis, puisque "impossible à civiliser"-, la loi ne peut rien pour elle. Qu'à cela ne tienne, nécessité n'a pas de loi non plus quand on s'appelle Winona et qu'on recherche la vérité.
Attention, on n'est pas dans une histoire de vengeance, c'est beaucoup plus subtil que cela. Et le Tennessee des années 1870 est encore plus terrible que le Texas de John Wayne : misère, violence, racisme y règnent. Pourtant, ce roman n'a rien de plombant ; au contraire, il est d'une légèreté exquise grâce à l'écriture éthérée de Sebastian Barry, d'une grande douceur, même quand il raconte des choses affreuses. Faisant preuve d'une maîtrise impressionnante, il réussit parfaitement à insuffler de la poésie, de la fantaisie, de l'amour et de la lumière, dans un genre habituellement testostéroné, et sans rien lui enlever de sa rudesse, ni sombrer dans la mièvrerie.
J'ai beaucoup aimé Winona, toujours prompte à enfiler son pantalon, à dégainer son couteau et à enfourcher son mulet pour partir dans des aventures qui la dépassent, à la fois naïve et maligne, la tête remplie de rêves dorés où sa guerrière de mère lui apparaît, et observant son époque avec discernement : "Les hommes blancs ne connaissent pas de belles histoires, ils n'ont que des histoires terribles dont ils aimeraient qu'elles soient différentes." Elle m'a plu, cette gamine ancrée dans la Nature, errant parmi les esprits de son peuple décimé, et cependant épanouie au sein de sa drôle de famille d'adoption. Et d'ailleurs, j'ai adoré ces hommes qui veillent affectueusement sur elle (et qui étaient les sujets du précédent roman de Barry, "Des jours sans fin", que je n'ai pas lu, mais que j'ai hâte de me procurer).
C'est donc un roman envoutant, tout en finesse et délicatesse, que je vous invite à découvrir à votre tour (même en imaginant John Wayne dans le rôle de l'avocat Briscoe !).

Je remercie vivement Babelio et les Editions Joëlle Losfeld pour ce bel envoi.
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Cela faisait longtemps que j'avais coché Des jours sans fin parmi les livres qu'il me fallait lire. Et finalement, ma découverte de Sebastian Barry aura débuté avec Des milliers de lunes, traduit par Laetitia Devaux. Pas vraiment grave puisque même en se suivant, ils peuvent être lus indépendamment.

Si la guerre de Sécession est bien terminée, ses traces sont encore bien présentes dans les ex-bastions confédérés, où l'affranchissement des noirs est davantage dans les textes que dans les faits, et où les Indiens restent des sous-citoyens que la loi ne protège de rien.

Réfugiée à Paris dans le Tennessee, la jeune Winona - indienne Iakota séparée des siens et adoptée par John et Thomas qui partagent un peu de leur amour marginal avec elle - participe aux travaux de la ferme Magan. Avec Tennyson et sa soeur Rosalee, jeunes noirs affranchis, ils tentent de survivre en attendant des jours meilleurs, sans trop se faire remarquer.

C'est sans compter sur Jas Jonski, amoureux éconduit de Winona dont la frustration va déclencher le drame et conduire à un enchaînement de vengeance d'autant plus aveugle qu'elle fera remonter tous les relents raciaux de la défaite non digérée.

Des Milliers de lunes est une belle réussite, flirtant constamment entre l'émotion, le drame, l'histoire et le western sans jamais se perdre entre ces genres, dans un équilibre dû à la seule écriture sensible de Barry.

Et parallèlement, Barry creuse le portrait de son héroïne en pleine interrogation sur ses racines, son peuple et son identité. Et donc forcément sur sa place : là-bas où l'on a concédé quelques terres aux Iakotas mais où elle n'a plus de repères, ou ici, un endroit où nul ne l'attend.

C'est à la fois touchant, parfois un peu candide, mais assurément beau et suffisamment émouvant pour donner envie de lire le précédent, comme un jour la suite qui ne manquera pas de venir !
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Elle, c'est Winona. Vous la connaissez peut-être déjà si vous avez lu Des jours sans fin. En ce qui me concerne, c'est la première fois que je croise son chemin. Sa voix est tout empreinte des âmes indiennes qui flottent au plus profond de son être. Elle associe les évènements qu'elle nous confie à de jolies manifestations de la nature : des années qui défilent comme des chevaux galopant dans des prairies infinies, des larmes qui tombent comme une pluie de printemps ou un sourire à l'image d'un soleil qui ne se couche pas.
Elle sait que toutes celles qui l'entouraient, sa mère, sa soeur, ses tantes et ses cousines ont été massacrées alors qu'elle avait six ou sept ans. Les hommes aussi. Mais de cette atrocité elle ne veut se souvenir.
Secourue dans son enfance par John Cole et son compagnon Thomas McNulty, elle vit avec eux à la ferme de Lige Magan qui les emploie aux côtés de Tennyson et de Rosalee, sa soeur, esclaves affranchis après la guerre de Sécession. Ensemble, aidés par les mulets qui hersent la terre, ils cultivent le tabac. Maintenant, c'est-à-dire une petite dizaine d'années après ce conflit, elle dit avoir sûrement dix-sept ans, ou un peu moins, qui peut fixer le jour de sa naissance ? Personne. Ce qui est sûr, c'est qu'elle est née par une nuit de lune du cerf.
Assez loin de la ville de Paris, dans le Tennessee, Winona tente de vivre le plus discrètement possible. Être indienne lui ôte tous les droits, si ce n'est celui d'être battue, humiliée, piétinée sans que quiconque n'y trouve à redire. de justice il n'en est guère, elle est là pour les Blancs, très rarement pour les Noirs et légalement inexistante pour les Indiens. Frapper ou tuer un Indien n'est pas un crime alors lorsqu'une agression profane le corps de Winona, elle se défend de se souvenir, une fois de plus, de cet acte abominable. Ne pas se souvenir, c'est peut-être faire preuve de courage pour continuer à vivre. C'est aussi éviter que ceux qui tiennent à elle la vengent, en lieu et place d'application d'une loi qui n'est pas destinée à cette non-citoyenne. Donc un fléchissement de la mémoire indispensable. Emplir plutôt sa tête de moments heureux, savourer tous les gestes de Thomas et John pour son bien-être et sa protection, se sentir une personne aimée.
Dans ce comté du Tennessee, la succession des gouverneurs et leurs tendances plus ou moins racistes fait tanguer l'équilibre bien fragile obtenu pour les Noirs qui sont encore des proies pour les rebelles ne digérant toujours pas le fait d'avoir perdu leurs esclaves. Lorsque Tennyson est à son tour victime d'un lynchage, Winona s'arme de sa petite force pour agir seule et quêter elle-même une justice pour ces deux agressions « Et faire ça non par folie aveugle, mais parce que ma mère m'avait appris à chasser la peur et à avoir un courage de mille lunes. »

Cette ambiance de Western dans lequel Winona se déplace avec un poignard et un mini revolver à crosse de nacre, a ses fermiers, son chérif, son avocat, son forgeron.C'est le décor qui va servir à montrer l'opposition entre le microcosme de la ferme de Lige et l'absurdité des préjugés, des certitudes, du racisme. On y verra s'opposer l'amour à la haine, la gentillesse à la méchanceté.
Sebastian Barry campe admirablement les lieux, à commencer par la ferme de Lige Magan perçue comme un refuge abritant la vulnérabilité de ce petit groupe. Blancs, Noirs et Indiens sont ici des individus qui représentent quelque chose et qui devraient entrer dans les rouages du mot justice pour être défendus. Ici, il n'y a que des êtres humains respectés pour ce qu'ils sont :
- Rosalee, l'ancienne esclave, la mère nourricière, sa précieuse douceur qui se penche sur le corps meurtri de Winona puis sur celui de son frère quelques temps après.
- Tennyson, ses vieilles chansons qui illuminent les soirées de la maisonnée puis s'éteignent avec sa voix après son agression.
- Thomas McNulty qui sort parfois sa robe et se lance dans une danse effrénée.
- Winona qui apporte sa fraîcheur, sa jeunesse, son travail. Elle se souvient de la valeur des siens si grande dans la communauté indienne et moins que poussière pour ce peuple blanc. C'est ainsi que pour John et Thomas, elle est un trésor alors que pour la ville elle n'est Rien. Près d'elle, c'est la richesse « des hommes bons comme des femmes. »

Deux agressions vont-elles réduire à néant cet équilibre ? L'amour et le respect entre ces personnages vont-ils leur survivre lorsque le besoin de vengeance ou de justice (la frontière est si ténue) rôde tout autour de la ferme ?

Les dialogues m'ont un peu étonnée car tous les personnages, et ce sans exception, avalent plus ou moins les mots, un fait retranscrit par de nombreuses apostrophes. Cela donne une connotation rurale qui s'oppose à la richesse de la narration. Toutefois, j'ai vraiment apprécié ce roman qui est un plaidoyer pour la tolérance et le respect de chacun, un cri de justice pour chaque être humain. Je lirais bien les débuts de Winona dans Des jours sans fin pour retrouver ce dépaysement d'une terre lointaine pleine d'inégalités et ces personnages attachants qui s'efforcent d'y vivre malgré l'hostilité de leurs voisins et de lois si défavorables face à leur couleur ou leur provenance.
Merci aux Editions Joëlle Losfeld et à Babelio pour cette belle découverte.
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La ferme de Lige Magan est devenue le foyer de Winona après qu'elle eût échappé au massacre de sa famille.
La guerre de Sécession terminée depuis quelques années, les jours s'écoulent paisiblement à Paris, petite ville du Tennessee. La fillette y grandit avec John Cole, son père adoptif et son compagnon Thomas McNulty.
winona, enfant intelligente apprend facilement l'anglais, persuadée que cette langue la sauvera du mépris et des coups.
« En tant que jeune indienne, je me sentais le devoir de m'exprimer comme une impératrice, sinon, j'aurais été battue chaque fois que je me rendrais en ville. »
Cela ne l'empêchera pas d'être violemment agressée, ce qui bouleversera sa vie et celle de sa famille.
En ouvrant ce livre, j'ignorais que j'allais retrouver de vieilles connaissances, croisées dans le magnifique « Des jours sans fin » précédent roman de Sebastian Barry.
Peu à peu, avec le secours de la quatrième de couverture, j'ai retrouvé l'émotion éprouvée à la lecture du précédent opus.
Sebastian Barry réussit à nouveau à nous immerger dans un récit sur la recherche de l'identité, la mémoire, le sens de la vie et du pardon.
A travers le portrait d'une jeune fille déterminée et courageuse, nous découvrons les injustices auxquelles est confronté la communauté des Indiens lakotas, même si les mentalités sont censées avoir changé.
Un roman à la fois dur et lumineux servi par une écriture addictive, imagée, souvent poétique.
Je remercie Babelio et les Editions Joëlle Losfeld pour leur confiance.

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Des milliers de lune est la suite Des jours sans fin publié en 2018.
Sébastian Barry retrouve son personnage de Winona Cole, jeune indienne lakota au lendemain de la guerre de Sécession. Elle vit à Paris, petite ville du Tennessee.
Bien qu'il s'agisse d'une histoire à part entière, Sebastian Barry revient en quelques occasions sur les traces de son précédent roman et cela pertube un tantinet la lecture quand on a pas lu le précédent roman Des jours sans fin.
Cela fait que la lecture du début du roman m'a paru un peu difficile. Difficulté à intégrer les personnages et leur passé. J'ai avancé dans le roman d'une cinquantaine de page et je suis reparti à zéro. La deuxième lecture s'est avéré immédiatement plus simple avec une meilleure compréhension.
Winona est une jeune indienne lakota, orpheline . Elle est originaire du Wyoming.
Au début du roman, elle vit dans une ferme dans le Tennessee , élevé par son père adoptif John Cole et son compagnon d'armes Thomas McNulty.
Tous les trois travaillent dans la ferme de Lige Magan avec l'aide de deux esclaves affranchis: Tennyson Bouguereau et sa soeur Rosalee.
La guerre de Sécession vient de prendre fin mais l'état du Tennessee reste déchiré. A la limite entre le Nord et le Sud, Nordistes et Sudistes sont toujours prompts à relancer la guerre civile.
Dans ce contexte, Winona, John Cole est consorts essayent de rester le plus possible à l'écart de toutes ces vicissitudes.
Malgré tout, Winona et Tennyson seront attaqués par des inconnus.
L'intérêt du roman de Sébastian Barry est qu'il interroge l'identité. Il faudrait dire les multiples identités.
Cette époque charnière de la fin de la guerre de Sécession est propice à cette réflexion multiple.
Identité indienne. Identité noire. Identité politique. Identité sexuelle.
Sébastian Barry à travers son récit, et à travers Winona, nous transmets un vibrant message de tolérance, de recherche de soi.
En ses années 1860, un indien ou une indienne n'estt rien. Un indien ou une indienne n'a pas d'âme.
Les esclaves noirs commencent à découvrir la liberté.
Les États Unis bafouillent leur démocratie et Lincoln installe difficilement l'abolition de l'esclavage.
Les amours homosexuels sont des tares.
Il faudra des milliers de lunes pour apaiser ses tensions. Ces milliers de lunes, siège de notre mémoire, de la transmission.
Le récit de Sébastian Barry est graphiquement scandé par la pleine lune, les croissants de lune et la nouvelle lune.
Cette graphie modèle le temps du roman et l'intègre dans la durée, que ce soit le passé, le présent ou le futur.
Le cycle de la lune est millénaire comme les âmes les traditions lakotas .
" Que le monde soit un lieu étrange et perdu n'était pas la question. Qu'il n'y ait aucun endroit sur terre sans danger, c'était la decouvrte de chaque instant. Que des âmes m'aiment et que des coeurs veillent sur moi était une évidente vérité " ( page 237 ) .
Merci à la Masse Critique privilégiée de Babelio et aux Éditions Joëlle Losfeld pour l'envoi de ce roman.
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