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[SERVICE PRESSE]



Des milliers de lunes de Sebastian Barry

Je remercie la maison d'édition pour ce service presse papier.


Mon résumé :

Winona, une jeune indienne orpheline, a vu toute sa famille décimée durant la guerre de Sécession. Élevée dans une ferme par John Cole et Thomas McNully, avec deux esclaves affranchis, Tennyson et Rosalee, elle tente de réapprendre à vivre. La condition des hommes et des femmes de couleurs n'est pas des plus enviables et les agressions sont de plus en plus violentes.


Winona, de son vrai prénom lakota Ojinjintka, est la seule survivante du massacre de sa famille indienne. La guerre de Sécession fait alors rage et elle est recueillie par John Cole et Thomas McNully, deux anciens soldats. Élevée dans une ferme, en vase clos, elle se lie d'amitié avec l'épicier. Mais un jour, elle est agressée. Commence alors une vendetta qui va la mener au tribunal.


Mon ressenti final :

Je me suis profondément ennuyée en lisant ce livre.

Je pensais trouver dans ce roman, une belle histoire romanesque, avec pour histoire de fond, le racisme et la difficulté d'être une femme en 1800. A la place, j'ai trouvé un récit sans rythme, narratif et traînant en longueur.

Winona a vu sa famille se faire massacrer durant la guerre et elle est l'unique survivante. Elle n'en garde que peu de souvenirs, et l'auteur nous l'explique à de multiples reprises, si ce n'est à chaque chapitre. La fillette grandit entourée des deux anciens soldats et de deux esclaves affranchis, un frère et une soeur. A l'aube de sa vie d'adulte, elle découvre que malgré sa couleur de peau, qui attise de colère des habitants de la ville, elle peut attirer les garçons, comme Jas Jonski, l'épicier. Son agression, puis celle de son ami, va déclencher l'hostilité de la population. Winona, pourtant calme et sans histoire, va entamer une vengeance qui la mènera devant le tribunal.

L'idée aurait pu être intéressante si elle avait été narrée sous la forme d'une romance comme on en lit quotidiennement. Au lieu de cela, j'ai eu l'impression de me plonger dans un livre d'histoire, détaillant les années qui ont suivies la guerre de Sécession. le racisme y est omniprésent, la condition des femmes est plus que précaire, même si Winona travaille pour un avocat. Alors, j'ai bien cerné toute cette oppression, le rejet et la violence des actes comme des mots, mais écrit avec une platitude qui ennuie plus qu'elle n'entraîne. Je me suis mise à lutter pour m'obliger à tourner les pages et à ne pas stopper la lecture.

J'avoue humblement ne pas avoir réellement compris où voulait m'emmener l'auteur, dont j'ai eu l'impression que l'écriture me faisait tourner en rond, reprenant sans cesse les mêmes idées et nous répétant inlassablement les mêmes choses. Je me suis retrouvée embourbée dans des détails souvent inutiles et surtout très répétitifs.

L'auteur aura cependant réussi à me faire aimer le personnage principal, dont j'ai senti toute la peine du monde et toute la confusion qui la saisie après l'agression. Elle est perdue, brisée, et ses sentiments se mélangent à tel point qu'elle ne réfléchit plus de manière cohérente et que le drame se profile rapidement. A part cela, malheureusement, on m'a perdue durant la quasi totalité de ma lecture.

Je ne doute pas que le lecteur féru d'histoire et adepte d'anthropologie saura faire honneur à ce roman d'époque, dont la dureté de la vie est évoquée de manière claire.

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Winona est une sioux lakota dont tous les membres de la famille ont été massacrés. Par miracle elle réchappe à la tragédie et, recueillie par deux âmes charitables Thomas McNulty et John Cole, grandit pendant les années noires de la guerre de Sécession.
Le récit qu'elle nous livre est celui de l'injure, de la souillure, du mensonge et d'une immense violence. La société américaine de l'époque, en tout cas au Tennessee, se remet mal des affres de cette guerre sanglante qui a vu s'écharper Nord et Sud. Les affranchis errent sans travail, les anciens confédérés rêvent de refonder le vieux Sud et pendent qui est suffisamment faible pour chercher à se dresser. Ils sont l'âme du Tennessee et entendent bien le rester, pour le meilleur et pour le pire.

Si Sebastian Barry s'en était tenu à ce decorum pour animer son roman, il aurait livré une copie banale : on ne compte plus le nombre de bouquins qui expriment cette violence post guerre de Sécession. Il a choisi un angle plus personnel en orientant ses personnages vers des choix que nos sociétés modernes connaissent dorénavant bien, traitant l'homosexualité en toile de fond comme une raison supplémentaire pour un homme ou une femme de se cacher.
C'est ici que le bât blesse : ajouter un à un les motifs d'exclusion, c'est se fourvoyer en pensant que son message n'en deviendra que plus fort. A force d'ajouter des condiments à une sauce, elle ne prend plus.
Autant le pittoresque des personnages est un atout indéniable du roman, autant cette surenchère dans la caricature éloigne un peu du désir quasi documentaire , en tout cas dans une veine autobiographique - "Je suis Winona" en ouverture - qui semblait préexister à l'écriture de cette histoire. Témoigner pour toute une génération d'Indiens bafoués et méprisés n'entrainait pas forcément un glissement vers cette accumulation un peu premier degré.
De même, l'action du roman est étrangement diluée et si les interrogations de Winona légitiment ce temps, cette minutie dans son processus de réhabilitation, on peut s'étonner de voir expédier des pans plutôt essentiels à l'établissement de l'histoire : la rencontre avec Jas Jonski, la milice et son ombrageux capitaine.

il ressort de cette lecture une ambivalence : d'abord un plaisir net à parcourir ces pages tant le style est parfait, en terme de rythme, de langue, l'auteur maîtrise parfaitement son langage. Pour autant le propos est rendu lourdaud par une avalanche de poncifs, qui, s'ils se révèlent finalement plutôt positifs, nuisent un peu au témoignage poignant qu'aurait pu être ce roman.

(merci à babelio et aux éditions Joelle Losfeld pour l'envoi)
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Paris, Tennessee, deuxième moitié du 19ème siècle. Winona, jeune Indienne qui a assisté au massacre de toute sa famille, a été adoptée par John Cole et son compagnon Thomas McNulty. Elle grandit dans la ferme de Lige Magan où ils travaillent tous deux, avec deux esclaves affranchis, Rosalee et Tennyson Bouguereau. Winona est agressée et violée, mais le choc a effacé le souvenir de son agresseur. Un peu plus tard, Tennyson est lui aussi attaqué et grièvement blessé. On soupçonne un groupe de marginaux criminels que le colonel Purton, chargé de la justice, décide de disperser avec l'aide de la population.

Dans ces contrées rurales, alors que les blessures de la guerre de Sécession restent vivaces, il ne fait pas bon être indien ou noir. Tennyson et Winona l'apprennent à leurs dépens. La jeune fille, qui grandit au sein d'un couple peu ordinaire pour l'époque – Thomas McNulty a participé dans sa jeunesse à des spectacles, habillé en femme, et le proche entourage des deux hommes ne semble pas blâmer les liens qui les unissent – est avide d'une liberté que son père adoptif semble lui concéder volontiers. L'histoire est habilement construite, l'auteur sait tirer avec intelligence et finesse les conséquences progressives de chaque événement, tandis que se dessinent de nombreuses questions liées à l'humain : la question de l'identité et du devenir des populations indiennes, la ségrégation, mais aussi, de manière latente, l'homosexualité et la misogynie.

Merci aux éditions Joëlle Losfeld pour cette découverte.

Lien : http://usine-a-paroles.fr/le..
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Une plume magnifique pour une histoire déchirante qui nous confronte une fois encore au triste destin des Indiens à travers la voix toute en poésie d'une des leurs.

Pendant que certains tentent de se racheter, d'autres persistent et poursuivent l'extermination des Indiens et des esclaves affranchis.

Des milliers de lunes fait écho à Des jours sans fin que je vous invite fortement à découvrir également, vos lectures n'en seront que plus belles, il serait dommage de se priver de si belles histoires d'amour, même si ces pages d'Histoire qui hantent ces récits réveillent un passé douloureux que l'on aurait préféré ne jamais connaître même s'il est à des milliers de lunes de nous.

Petite Winona, je ne suis pas prête de t'oublier.
Chronique complète sur mon blog :➡️Lien ci-dessous
Lien : https://madosedencre.over-bl..
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Comparé à "Des jours sans fin", "Des milliers de lunes" est un peu en retrait sur le plan de l'impact qu'il produit, de l'ampleur du cadre.

Il y a ici en effet une unité de lieu plus resserrée, une montée en tension moins soulevée par le souffle de la grande histoire, une action moins spectaculaire et... des morts qui ne se comptent plus QUE par dizaines.
Et pourtant, si elles sont plus quotidiennes, la peur et la révolte que Sebastian Barry nous donne a ressentir sont bien les mêmes que dans la saga précédente : le camp de l'esclavage a perdu mais les vaincus ont recommencé à se croire tout permis, à peine conscients d'être devenus hors-la-loi quand ils passent à l'acte, qu'ils violent, tabassent ou pendent leurs victimes aux arbres.

Toujours aussi efficace, la traductrice se met au service de l'auteur et son phrasé fluide, énergique et poétique nous donne a ressentir une autre personnalité : celle de Winona, fille d'un chef sioux que John et Thomas ont soustraite au massacre de sa tribu auquel, il faut bien le reconnaître, ils ont contribué.

Comme ses deux pères adoptifs, Winona n'a que faire des conventions et si la voix de ses origines s'est cachée dans les arcanes de son inconscient, elle reste présente et se montre une énorme richesse, qui exsude jusque dans les mots que reçoit le lecteur.

La transgression qu'elle ose nous dire est comme une symétrie de celle qu'ont vécue si hardiment ses deux pères : c'est son amour pour une jeune indienne, son seul vrai bonheur tant les temps de ce temps-là sont difficiles...
Mais ce n'est pas de cette transgression que la loi des blancs l'accuse. C'est du meurtre de son prétendant, dont elle ne peut se souvenir si c'est lui qui l'a violée et battue quelques semaines avant d'être assassiné, tellement il l'avait fait boire le jour où il lui a déclaré sa flamme..

Ce prétendant qu'elle n'a pas tué.
Ca en tous cas, elle en est sûre !

Alors certes, je préfère quand même "Des jours sans fin" où tout est un peu une taille au dessus, que ce soit le cadre ou la geste ou le choc des mots. Mais "Des milliers de lunes" trouve sa place un peu comme une petite soeur hardie qui se cherche, après son aîné entré dans l"Histoire ...
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Une petite maison arc en ciel dans la prairie. Winona Cole, jeune orpheline indienne, vit auprès de ses deux papas John Cole et Thomas McCurlly, Lige Magann, un fermier bienveillant et Tennyson et Rosalee, deux esclaves affranchis depuis peu.
Une communauté, un havre de paix que la jeune fille imagine loin du monde violent qui les entoure.
Mais les Etats du Sud de l'Amérique cicatrise mal les blessures de la guerre de Sécession. Une région en plein chaos, des temps tellement dangereux que l application des lois y est presque impossible.
Lorsque Winona éconduit un amoureux elle ne peut imaginer l'engrenage de violence que cela va engendrer.
Comment arrêter la loi du plus fort dans ce coin reculé du Tennessee que l'avocat de la ville nomme le comté du Diable.
L histoire sera racontée par Winona, une voix de jeune adulte tout juste sorti de l enfance.
Un contraste terrible entre le regard juvénile mais volontaire de la jeune fille et la brutalité du monde.
Sebastian Barry, parfait historien et épatant romancier, trouve toujours le mot juste, dans ce récit d'apprentissage, pour nous raconter la difficile construction de la plus grande démocratie du monde.
" Des milliers de lunes" est la formidables suite " Des jours sans fin " qu'ici à Baz'art nous avions adoré.
Comment ! Vous n avez pas lu " Des jours sans fin " !!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Je tiens à remercier Masse Critique Babelio ainsi que Joelle Losfeld Éditions de m'avoir permis de découvrir ce roman en avant-première !

Elle s'appelle Ojinjintka (Rose en dialecte indien lakota) mais son père adoptif – Thomas McNulty (un irlandais de souche) qui ne parvenait pas à prononcer son prénom, lui a donné celui de sa cousine morte, Winona. Elle est la narratrice de sa propre histoire, vit à Paris (dans le Tennessee) avec ses deux pères adoptifs (John Cole est l'ami de Thomas McNulty) Ils vivent dans la ferme de Lige Magan et leurs « compagnons d'infortune » sont des noirs affranchis (Rosalie et son frère Tennyson Bourguereau)

La guerre de Sécession est terminée depuis peu, nous sommes dans les années 1870 … Winona est indienne, ce qui veut dire – aux yeux des blancs – qu'elle a encore moins de valeur que d'anciens esclaves ! Elle doit avoir dix-sept ans environ (Winona ne connait pas sa date de naissance) et Jas Jonbsky commence à lui faire une cour assidue ! John Cole n'est pas très emballé par leur prochain mariage, déplorant l'ignorance crasse du jeune homme, face à la supériorité intellectuelle de sa fille de coeur (qui a été éduquée sérieusement – et travaille pour un avocat … ) Toutefois, un drame survenu peu de temps avant la cérémonie viendra anéantir les projets de Winona et bouleverser à jamais son existence …

Sebastian Barry poursuit son récit, après un premier opus intitulé : « Un jour sans fin », nous offrant une intrigue à la fois poétique et cruelle, mettant à nu les souffrances profondes des victimes de la xenophobie et de l'homophobie, stigmatisation condamnable depuis la nuit des temps ! … Une analyse sans concession sur les préjugés raciaux et sociaux, un joli roman aussi touchant que révoltant, débordant d'humanité !
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Suite du livre primé " Jours sans fin " (2016) ; un personnage secondaire de ce livre est désormais le protagoniste principal. Winona est une jeune fille indigène Lakota, sauvée et adoptée lorsqu'elle était enfant par le militaire Thomas McNulty et son compagnon de vie John Cole. Nous sommes en 1870, la guerre civile est terminée et la famille, ainsi que deux anciens esclaves, Tennyson et Rosalee, se sont installés dans une ferme de tabac à Paris, dans le Tennessee. Winona est presque une adulte et prévoit d'épouser Jas Jonski, un commis d'épicerie polonais. Bien qu'elle vive dans une famille aimante, la société de l'après-guerre civile est extrêmement violente, notamment à l'encontre des Indiens et des anciens esclaves. Winona est violée et Tennyson est battu si violemment qu'il ne peut plus chanter ni parler. Winona cherche à se venger, se déguise en garçon et se lance dans un dangereux voyage, armée d'un fusil et d'un couteau. Elle est bientôt rejointe par Peg, une orpheline indienne, dont elle tombe amoureuse. Bien que les sentiments de Winona soient plus adaptés au XXIe siècle qu'au XIXe, il s'agit d'un roman parfois poétique et plein de sagesse. "Des milliers de lunes" peut être lu indépendamment du volume précédent.
Sebastian Barry est à mon humble avis un des meilleurs conteurs d'histoires d'Irlande depuis une vingtaine d'années maintenant, remportant toute une série de prix pour ses romans et ses pièces de théâtre. Presque tout ce qu'il écrit est lié à ce qui a précédé et découle des histoires qu'il a entendues de son père et de son grand-père, sur la guerre d'indépendance irlandaise qui a déchiré sa famille et sur les hommes qui sont partis en Amérique, suivant les traces d'autres membres de leur famille qui l'avaient fait des générations auparavant.
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« Des Milliers de Lunes » de Sebastian Barry, traduit par Laetitia Devaux (2021, Editions Joëlle Losfeld, 240 p.) reprend les thèmes de « Des Jours sans Fin » du même auteur et même traductrice (2018, Joelle Losfeld, 272 p.).
1870, c'est la guerre. Non pas dans l'Est de la France, mais dans le Tennessee, où des groupes font toujours sécession, même après la défaite de Gettysburg en 1863, puis de Richmond en 1864, et a reddition de Robert E. Lee au général Grant à Appomattox en 1965. Ces sudistes ne savent décidément pas admettre la victoire du camp de l'Union, même après la mort de plus de 600000 soldats, autant dans chaque camp. Et comble de malchance, la dernière reddition est celle du général Stand Watie, qui est en même temps chef cherokee et seul général amérindien de la guerre de Sécession. Qu'allait il faire dans cette galère ?
Donc le Tennessee où il y a deux armées qui s'affrontent. L'une, « Army of the Tennessee » est sous les ordres de Ulysse Grant, puis de William Tecumseh Sherman, et fait donc partie de l'Union. La seconde « Army of Tennesse » est avec les Conférés, sous la direction du Général Braxton Bragg, puis de Joseph Johnson. On retrouve tous ces noms dans diverses occasions, dont des noms de rues, aux USA et au Canada anglophone. Entre ces deux armées, les noirs et les indiens, dont quelques-uns ont été affranchis.
On retrouve donc Winona, la jeune orpheline indienne Lakota, qui a été adoptée pat John Cole et Thomas McNulty, les deux frères d'armes de « Des Jours sans fin ». Elle a maintenant dix-huit ans, et un caractère farouche, suite à ce qu'elle a vu et subie. Elle se déplace d'ailleurs avec un poignard et un petit revolver à crosse de nacre. On se souvient que John Cole avait « un curieux costume noir qui devait bien avoir trois cents ans, au vu de ses trous. Il était aéré à l'entrejambe, j'avais vite découvert, on aurait pu y glisser la main pour tâter sa virilité. Alors on s'efforçait de regarder ailleurs ». Là, apparemment, les regards ont été redirigés. La famille cultive le maïs et le tabac à la ferme de Lige Magan, près de Paris, Tennessee. Ils sont aidés par Tennyson Bouguereau et Rosalee, sa soeur, deux esclaves affranchis après la guerre.
Tout pourrait aller bien dans quasiment le meilleur des mondes pour tous ces gens, tous orphelins qui essayent de refaire une vie au calme. C'est cependant oublier que si l'affranchissement a eu lieu pour les esclaves, les indiens sont exclus de cette disposition. Winona n'a donc aucun droit, si ce n'est d'être battue et humiliée sans que cela ait de l'importance. La justice est là pour les Blancs, accessoirement pour les Noirs quand c'est flagrant, et absente pour les Indiens. Mieux vaut ne pas se souvenir de ces moments. « Même quand on a réchappé à un bain de sang et à un désastre, au bout du compte, il faut quand même apprendre à vivre. Il faut ouvrir les yeux, comprendre les choses, les faire pousser ou les acheter, selon les cas ».
Il faut reconnaître qu'elle a déjà vécu bien des évènements perturbants. Fille de « Celui qui Domptait les Chevaux », tuée par Lige Magan, le tireur d'élite de la troupe dans « Des jours sans fin ». Elle a assisté a massacre de toutes celles qui l'entouraient, sa mère, sa soeur, ses tantes et ses cousines alors qu'elle avait six ans. Elle n'oublie pas. On la retrouve plus tard, plus âgée et violée. D'ailleurs on ne sait pas bien quand elle est née. Ce qui est sûr, c'est qu'elle est née par une nuit de lune du cerf. Dans sa nouvelle famille elle assiste aussi au lynchage de Tennyson. « Faire ça non par folie aveugle, mais parce que ma mère m'avait appris à chasser la peur et à avoir un courage de mille lunes ».
Elle grandit ainsi, riche de cette ambiance familiale entre John et Thomas, et Tennyson et Rosalee. La richesse « des hommes bons comme des femmes ». En face, les prémices du Ku Klux Klan sous l'impulsion de Nathan Bedford Forrest, ancien général confédéré qui fédère et structure l'organisation en tant que « Grand Sorcier de l'Empire invisible ».
Cela commence en 1867 comme une « institution chevaleresque, humanitaire, miséricordieuse et patriotique », qui se donne comme « but sacré » le « maintien de la suprématie de la race blanche dans cette république ». Les théories du grand remplacement sont déjà à l'oeuvre sous un autre nom. Puis le mouvement passe à l'action violente. Ceci en réaction aux les lois « Jim Crow » issues des « Black Codes » promulguées à partir de 1877 alors que la nouvelle constitution des Etats favorisait les droits constitutionnels des Noirs après la guerre de Sécession. le 13eme amendement abolit l'esclavage (1865), le 14eme accorde la nationalité par le droit du sol (1868) et le 15eme garanti le droit de vote (1870). On sait ce qu'il en est plus d'un siècle plus tard. Entre temps, il a fallu le « Civil Rights Act », le« Voting Rights Act » et le « Civil Rights Act » entre 1964 et 1968. Mais l'extrême droite est toujours active dans les états du sud, qui revendiquent encore le drapeau des Confédérés.
C'est la période de calme qui précède la tempête. « Pendant un temps, tout avait paru aller mieux pour les esclaves. Ils avaient déposé leurs outils dans les fermes où ils ne désiraient plus travailler. Ils avaient obtenu le droit de vote, les hommes en tout cas. Ils pouvaient soutenir le regard d'un Blanc et lui parler aussi droit que le tir d'une flèche. Ça avait duré un temps. Maintenant, tout allait en sens inverse ». En effet Winona trouve du travail auprès d'un homme de loi Jas Jonski. de par son intelligence elle plait, au point que Jas veut l'épouser. « Je savais qu'il ne me voyait pas comme une chienne d'Indienne. Il savait qui j'étais. Qui nous étions. Des âmes bonnes qui attendaient la lueur d'une aube qui ne surgirait jamais mais des âmes néanmoins ». C'est oublier le racisme ambiant qui fracasse les belles manières.
Heureusement sa sagesse d'indienne, et son entourage, dont Rosalee « une sainte noire » l'aident à se reconstruire. « Il faut ouvrir les yeux, comprendre les choses, les faire pousser ou les acheter, selon les cas ».

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Ce roman, qui peut se lire indépendamment mais a mon avis c'est pas une bonne idée, fait suite à Des jours sans fin, superbe histoire qui nous parlait de John Cole et Thomas McNulty, tour à tour soldats puis artistes travestis sur scène, compagnons de route et amants.

Peu après la guerre de sécession, Winona Cole nous raconte. Elle est lakota et orpheline. Elle a été sauvée par Thomas McNulty lors du massacre de son peuple, puis adoptée par lui et son compagnon, John Cole. Elle nous parle de la tristesse, du vide, du manque de sa famille, elle l'enfant dont on a détruit les racines. Elle nous dit que dans l'Amérique de ce temps-là, un noir n'était rien, mais un indien encore moins que ça. Elle nous dit aussi l'amour de ses deux pères. J'ai immédiatement été saisie par la beauté de l'écriture.

Un monde dans lequel survivre est un combat quotidien, car si Thomas McNulty est un immigrant irlandais, John Cole, l'amour de sa vie, a du sang indien, et ils sont les pères d'une indienne. Deux esclaves affranchis vivent sous leur toit, frère et soeur. Une famille totalement hors-normes donc.

Winona parle de ce monde implacable, peuplé d'hommes brutaux, et de ce que beaucoup de prédateurs se permettent de faire aux femmes. Cet acte immonde de domination depuis la nuit des temps. Mais aussi de l'injustice faite aux noirs, aux indiens, aux femmes encore et toujours. Un sentiment d'errance de beaucoup d'hommes qui étaient soldats pendant la guerre de sécession, qui ne savent plus quoi faire de leur violence et qui l'exercent à tort et à travers. La guerre était abominable, l'après guerre est une autre forme d'horreur, où la fureur et l'insécurité règnent.

Après l'agression de Winona, dont elle a tout oublié, puis de Tennyson l'esclave affranchi, tous espèrent réparation, même l'avocat Briscoe pour qui Winona travaille. Pourtant ils savent que les noirs sont peu de chose aux yeux du monde, et les indien même pas des citoyens.

J'ai adoré cette histoire qui a fait faire du yoyo à mon coeur à la toute fin, et l'a fait rager tout le long. Car il y a là toute l'injustice du monde envers certaines catégories de personnes, et la noirceur de l'âme humaine s'étale au grand jour. Heureusement il y a aussi infiniment d'amour et d'abnégation.

Mais voilà que j'ai envie de relire Des jours sans fin car ma lecture de celui-ci date de plusieurs années.
Lien : https://mechantdobby.over-bl..
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