Elle s'ennuyait beaucoup et, puisque personne dans sa famille ne lui manifestait de la tendresse, elle sombrait dans une espèce de mélancolie pitoyable où elle cernait son être. Sacrifiée et lasse, elle était une petite chose déposée par l'erreur ou la malédiction sur la monotonie quotidienne d'une vie étroite.
J’en étais arrivée à souhaiter l’amnésie, ou brûler mes souvenirs les uns après les autres, ou alors les rassembler tel un tas de bois mort, les ficeler avec un fil transparent, ou mieux les envelopper d’une toile d’araignée, et m’en débarrasser sur la place du marché. Les vendre pour un peu d’oubli, pour un peu de paix et de silence. Si personne n’en veut, les abandonner comme des bagages égarés.
« La violence de mon pays est aussi dans ces yeux fermés, dans ces regards détournés, dans ces silences faits plus de résignation que d’indifférence. »
La rupture avec le passé n’était pas facile. Alors elle inventait ces espaces blancs où d’une main elle lançait des images folles et de l’autre les habillait du goût de la vie, celle dont elle rêvait.
Je dis que je l’habite mais à bien réfléchir c’est la solitude, avec ses effrois, ses silences pesants et ses vides envahissants, qui m’a élu comme territoire, comme demeure paisible où le bonheur a le goût de la mort.
Ô mes compagnons, notre histoire n’est qu’à son début, et déjà le vertige des mots me racle la peau et assèche ma langue. Je n’ai plus de salive et mes os sont fatigués. Nous sommes tous victimes de notre folie enfouie dans les tranchées du désir qu’il ne faut surtout pas nommer. Méfions-nous de convoquer les ombres confuses de l’ange, celui qui porte deux visages et qui habite nos fantaisies. Visage du soleil immobile. Visage de la lune meurtrière. L’ange bascule de l’un à l’autre selon la vie que nous dansons sur un fil invisible.
Ce sont les histoires qui viennent à moi, m’habitent et me transforment. J’ai besoin de les sortir de mon corps pour libérer des cases trop chargées et recevoir de nouvelles histoires.
La nuit il dormait sur la terrasse et s’entretenait avec les astres.
Il voulait vaincre le temps. Je pense qu’il a réussi les derniers moments de sa vie, quand il a atteint le haut degré de la contemplation. Je crois qu’il a connu la volupté née de cette béatitude acquise face au ciel étoilé.
Ce n’est plus moi qui traverse la nuit… c’est elle qui m’entraîne dans ses limbes
Je ne suis pas amour, mais citadelle imprenable, mirage en décomposition.