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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
°°° Rentrée littéraire #34 °°°

Les trois chapitres ( « les jumelles disparues », « cartes », « lignes de coeur » ) sont éblouissants, convoquant l'esprit de la grande Toni Morrison avec une voix d'auteur douce et compatissante pour les failles de ses héroïnes, embrassant avec fermeté et acuité toute la complexité de la quête d'identité et de la transmission brutale du racisme, mais aussi des merveilles de l'amour.

Dès les premières lignes, on est embarqué dans cette saga familiale multigénérationnelle. Superbe idée que d'inscrire la lignée des soeurs jumelles Vignes dans la ville fictive de Mallard ( Louisiane ), un lieu exclusif pour les Noirs à la peau claire qui pourtant, n'a pas sauvé leur père ( la tragédie initiale, il a été atrocement lynché sous leurs yeux ), n'a pas sauvé leur mère, déclassée, obligée de faire des ménages pour des Blancs ), annonçant une vie restreinte pour les jumelles alors que Stella rêve d'études universitaires scientifiques et Desiree de théâtre. Elles s'enfuient à 16 ans pour New-Orleans jusque ce que Stella abandonne sa soeur, définitivement.

La construction, alternant passé, présent, permet d'embrasser toutes les problématiques du prix à payer pour être soi-même, chacune négociant le présent tout en repoussant le passé. C'est absolument passionnant , très addictif aussi, de découvrir pas à pas les conséquences imprévues de choix forts qui changent la vie, on mesure parfaitement ce que Desiree et Stella ont perdu en fuyant, ce qu'elles ont gagné, ce qui reste, et ces blessures du passé qui ne disparaissent jamais.

J'ai été moins convaincue par la deuxième moitié qui est plus centrée sur les filles des jumelles, deux cousines du même âge, des opposés polaires ( Kennedy la blonde superficielle et gâtée, Jude la très noire timide et pragmatique ). L'ajout de personnages comme le petit-ami de Jude, s'il permet d'ouvrir sur une autre quête d'identité que celle de la couleur de peau, surcharge le discours. Surtout, j'ai trouvé les personnages finalement très linéaires, chacun dans le rôle que l'auteure leur a distribué et n'en bougeant pas.

Mais il y a Stella. Si celui de Jude est le plus attachant ( magnifiques passages sur son enfance difficile de noire à peau très noire dans une ville d'Afro-américains à peau très claire qui exhibe leur blancheur avec une arrogance dingue ) , celui de Stella est captivant. C'est celle qui ose la transgression ultime au temps de la ségrégation : se faire passer pour une blanche. Cette thématique du « passage racial » est abordée de façon très originale : que se passe-t-il si le personnage usurpateur n'est jamais découvert et ne se repent jamais ? Une scène est notamment très marquante, douloureuse : le cri de Stella qui s'oppose violemment à l'arrivée d'une famille noire dans son quartier blanc huppé, de peur que son mensonge ne soit révélé et qu'on ne découvre qu'elle n'est pas celle qu'elle prétend. A force de se dire blanche, elle l'est comme devenue.

Malgré quelques réserves qui nuance l'accueil dithyrambique de la plupart des lecteurs, ce roman est très fort et excelle à évoquer les silences, les secrets de famille tout en abordant avec justesse l'identité afro-américaine explorée sous de multiples perspectives.
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Quand à seize ans Desiree et Stella Vignes quittent Mallard, un trou perdu de Louisiane où les habitants noirs à la peau claire pourraient passer pour des blancs, c'est Desiree qui étouffant et rêvant d'une autre vie a entraîné Stella. Mais les jumelles, loin d'avoir les mêmes aspirations, ne tardent pas à se séparer pour des destins opposés, pourtant pavés des mêmes difficultés. Parce qu'il faut très longtemps pour devenir quelqu'un d'autre, et que le prix à payer de vivre dans un monde qui n'est pas fait pour vous est la solitude.

Un roman magnifique où il est question de quête d'identité et de couleur de peau dans une Amérique encore très ségrégationniste. de quête d'identité sexuelle aussi. Des domaines, nous suggère Brit Bennett, où il importe de ne pas juger ceux qui choisissent la fuite, le mensonge, ou le travestissement — un chemin à coup sûr douloureux, qu'ils empruntent sans plaisir, mais qui leur est indispensable pour exister.

" On croit qu'être unique, ça fait de soi quelqu'un d'exceptionnel. Non, ça fait juste quelqu'un de seul. Ce qui est exceptionnel, c'est d'être reconnu et accepté. "
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Après avoir lu les dernières pages de ce roman que j'ai trouvé éblouissant, L'autre moitié de soi, refermant le livre je me suis demandé quel était le véritable thème qui portait le récit. Je me le demande encore, non pas que j'ai été perdu dans l'histoire, au contraire, il y a ici quelque chose de fluide, le lecteur que j'ai été a été emporté sans difficulté dans la narration. C'est peut-être la richesse du récit, les trajectoires des personnages, les angles morts de l'histoire, tout un ensemble d'enchevêtrements qui fait qu'on ne peut et qu'on ne doit surtout pas résumer ce roman comme un énième livre sur la ségrégation raciale vécue aux États-Unis.
Oui c'est l'histoire d'une certaine Amérique au travers de trois générations ; la ségrégation, le racisme ordinaire, sont bien sûr au coeur de cette fresque, thèmes cependant traités parfois avec une acuité fabuleuse. Mais c'est bien autre chose aussi...
L'auteure, Brit Bennett, a visiblement un don d'écriture, un talent aussi pour raconter une histoire, nous la transmettre, peindre des personnages, nous tenir en haleine comme s'il s'agissait d'une histoire qui touche nos propres vies, une histoire familiale par exemple.
En vous écrivant ces premières lignes, il me revient l'incipit qui ouvre le fabuleux roman de Tolstoï, Anna Karénine : « Les familles heureuses se ressemblent toutes ; les familles malheureuses sont malheureuses chacune à leur façon. »
Nous traversons ici les décennies, entre 1954 et 1986, c'est assez précis, nous traversons l'Amérique de cette période, d'Est en Ouest, ou plus précisément, du Sud à l'Est. Trois générations d'une même famille viennent à nous et nous découvrons des bonheurs, des fugues, des failles, des secrets, des transgressions, des rendez-vous manqués. Si nous avions un jour la possibilité de mettre bout à bout tous les rendez-vous manqués de nos existences, quel vide sidéral cela ferait.
Le propos narratif pourrait au premier abord paraître cousu de fils blancs, non crédible. Quoi ?! Mais la vie, la vraie vie, je parle de celle en dehors des livres, n'est-elle pas elle aussi cousue de fils blancs ? Nos propres histoires familiales, s'agissant de la part émergée de l'iceberg que nous connaissons, ne sont-elles pas elles aussi cousues de fils blancs ? Quant à l'histoire des États-unis, n'en parlons pas...
L'improbable qui surgit dans ces pages est peut-être seulement un bras d'honneur qui vient contredire la vérité statistique.
« Probable ne signifiait pas certain. Improbable ne signifiait pas impossible. »
En même temps, ce sont les digressions qui font la force d'une histoire, qui font le sel de nos existences.
Voici deux soeurs jumelles, Stella et Desiree, qui sont nées et ont grandi dans une ville de Louisiane, Mallard, qui un jour disparaîtra de toutes les cartes... Cette ville n'est pas la seule chose qui disparaît dans ce roman. Appartenant à la communauté afro-américaine, Stella et Desiree sont cependant blanches de peau, comme les membres de leurs familles, comme tant d'autres habitants là-bas...
Elles se ressemblent comme le sont deux soeurs jumelles, avec toutes les différences que peuvent présenter deux soeurs jumelles dans leur caractère, leur rêve de vie, leur manière de se jeter, se laisser happer par leur destin, ou pas d'ailleurs...
Déjà à la naissance, une différence à peine perceptible va les différencier, l'auteure s'interroge et se demande peut-être si ce n'était pas là toute l'explication à cette histoire... Écoutez un peu...
« Elle s'était toujours sentie plus âgée, même si c'était seulement de quelques minutes. Qui sait ce qui s'était passé pendant ces sept minutes où elles avaient été séparées ? Peut-être avaient-elles vécu une vie entière qui les avait placées chacune sur une voie différente. Qui leur avait révélé qui elles pouvaient être. »
Un jour, justement elles disparaissent... L'une d'elle, Desiree, reviendra aussi mystérieusement qu'elle avait disparu avec sa fille encore petite, Jude. Desiree, reviendra douloureusement de son expérience de quelques années hors du cocon maternel...
Quant à Stella, son expérience est totalement sidérante... Transgresser, passer dans l'envers du décor, passer du côté noir au côté blanc, elle blanche de peau déjà, tentant l'expérience de devenir blanche de coeur, ou du moins peut-être seulement blanche socialement, appartenant désormais à une autre communauté, avec des codes différents... Nous sommes dans l'Amérique des années soixante...
Stella semble avoir disparu à jamais de l'autre côté de ce paysage insoupçonné...
Se laisser guider par le coeur, être dictée par ses émotions, la décision de quitter une ville, une famille, des êtres chers, ou d'autres qui sont des prédateurs.
Devenir invisible, l'envie de renaître peut-être ailleurs, autrement...
Comment continuer à vivre dans le mensonge durant tant d'années... ?
Jouer la comédie, ne montrer aux gens que ce qu'on veut ou qu'on peut dévoiler.
Tout se passe pour Stella comme une comédie si bien apprise. Jusqu'au jour où un grain de sable, on peut dire les choses comme cela, un grain de sable qui ressemble à des voisins qui viennent s'installer en face de la maison dans ce quartier tranquille où la vie est si bien réglée, une vie lisse, terne, blanche... Un couple de voisins noirs, elle s'appelle Loretta Walker, elle est pleine de vie, elle boit du Chardonnay blanc, invite des amies à jouer au whist, bavarder, rire ; le sol ordinaire sous les pieds de Stella semble brusquement se fissurer... Comme ces pages sont emplies d'émotions ! On ne peut plus les lâcher. Oui les pages se sont alors fissurées sous mes doigts.
Les failles des personnages sont autant de lieux où laisser nos pas trébucher.
L'autre moitié de soi est avant une histoire de personnages à la recherche de leur identité...
Le départ de Loretta Walker, l'obligation pour son couple de déménager, ce fut pour Stella comme perdre sa soeur une seconde fois... Et nous, des pages qui tremblent sous nos yeux agacés par les larmes...
L'autre moitié de soi est une histoire de sororité et de chagrin...
Et puis voici les souvenirs qui s'effritent, une mère qui perd peu à peu la mémoire, confond celle qui est partie avec celle qui est revenue, qui est là encore. Au fond, est-ce si important ? Qui protège l'autre ? Les mères, les enfants ? Justement, les enfants de Desiree et Stella ici sont de magnifiques personnages aussi, Jude, Kennedy, cousines sans le savoir...
Plus tard, l'une d'elle reconnaîtra la petite soeur sur la photo qui tirait sur la jupe de son autre soeur pour lui demander de s'assagir , c'était la photo d'un enterrement... Ce livre est empli de quelques coeurs éperdus en quête d'un album de photos familial.
Livre du détournement, de la dissimulation, du pas de côté...
S'il fallait en définitive résumer en deux ou trois mots le thème de roman, je vous répondrais qu'il s'agit d'amour. Voilà, vous voyez, un seul mot m'a suffi...
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Desiree et Stella sont deux jumelles noires.
Nées dans une petite bourgade, Mallard, peuplée de personnes noires, à une époque où les noirs st les blancs ne se mélangent pas.
C'est un drame familial (le père, tué par des Blancs, pour d'obscures raisons) qui est à l'origine de leur histoire. Adolescentes, elles fugueront ensemble à la Nouvelle Orléans.

Mais c'est là que leur destin va bifurquer.
Desiree la plus sage en apparence, restera parmi les siens, épousera un homme très noir et aura une fille avec lui – Jude. Battue par ce mari violent, elle le quittera sur un coup de tête, pour rejoindre Mallard et retrouver sa mère, ainsi que le chasseur de primes, embauché par son mari pour la retrouver, mais lui-même amoureux de Desiree dans le passé, qui deviendra son compagnon et un père de remplacement pour Jude.
Quant à Stella, elle réussit, parce que sa couleur de peau le lui permet, à se faire passer pour une blanche. Et vivre une vie de blanche, épouser son patron, un riche business man, et même avoir une fille totalement blanche, prénommée Kennedy.

De la couleur de peau il est vraiment question dans tout ce roman trépidant, où l'on suit tour à tour l'histoire de Desiree qui revient à la maison, puis Jude jeune adulte fuyant sa mère et sa grand-mère, puis la quête de Desiree pour retrouver sa soeur – en vain.

Peut-on vivre en permanence sur un mensonge ? Ce roman pose bien sûr la question de l'identité.
Stella devra en permanence user de duplicité, nier avoir une famille (elle prétend qu'ils sont tous morts dans un accident) et jouer tous les codes des « White mens and womens » de cette époque.
L'un des moments les plus savoureux de ce récit, c'est lorsque la famille Sanders, composée de Stella, Blake son mari et Kennedy sa fille, résident dans un luxueux quartier peuplé de blancs uniquement. Mais o scandale ! un couple de riches noirs projette de s'y installer. La réponse des blancs ne tarde pas : ils doivent s'allier pour qu'un tel évènement n'arrive pas, et Stella, qui n'a qu'une seule peur – être reconnue par « les siens » - doit donner des gages et hurler au scandale à l'unisson.
Pourtant lorsque le couple, accompagné d'une petite fille de l'âge de Kennedy, s'installent en face de chez les Sanders, Stella sera très tentée de faire connaissance avec eux.
« Vous me faîtes penser à ma soeur jumelle », dit-elle-même à la jeune mère, alors qu'elle sirote un cocktail chez sa voisine, ce que ne peut comprendre son interlocutrice, qui ne voit pas de rapport entre cette blanche bien installée dans sa caste, et elle-même qui a réussi à se hisser à ce niveau grâce à l'argent gagné par son mari acteur de série.
Mais le drame n'est jamais loin, et le couple de noirs devra fléchir devant la violence du rejet des voisins blancs.

Brit Bennett maîtrise son sujet. Elle sait sans doute de quoi elle parle, et les passages sur une chronique de la haine ordinaire sont savoureux.
Le salut viendra de la nouvelle génération. Les deux « cousines » feront connaissance, l'une sachant à quoi se tenir (Jude) tandis que l'autre ne peut croire à une histoire aussi incroyable (sa mère ne serait pas la femme blanche bourgeoise qu'elle fait semblant d'être). Pourtant les problèmes d'identité se reporteront sur Kennedy, qui n'aura de cesse de chercher qui elle est, trouvera un répit lorsqu'elle endossera le rôle d'un personnage sur scène, ou quand elle voyagera de ville en ville, incapable de se fixer quelque part.

L'autrice nous donnera le loisir d'assister à une scène de retrouvailles entre les deux soeurs, retrouvant dans leur village natal pour un instant leur complicité d'enfance, mais ce ne sera que de courte durée, et Stella retournera à son rôle de blanche, abandonnant définitivement son passé à jamais.
Un grand roman contemporain, sans manichéisme, et une excellente chronique de l'Amérique des dernières années, avant la prise de conscience – enfin ! – que « black lives matter ».
Les vies noires comptent, et « l'autre moitié de soi » en est une excellente illustration. Un livre qui compte, sans aucun doute.

Lien : https://versionlibreorg.blog..
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La sortie en poche de ce roman fortement plébiscité à sa sortie (jusqu'à Mr Barak Obama himself) aura été l'occasion de m'y plonger, de prendre plaisir à la fluidité du texte, et d'en ressortir avec un avis mitigé oscillant fortement vers le +.

J'ai trouvé formidable le pitch de départ avec l'invention d'une communauté de Noirs blancs, duquel deux soeurs jumelles s'éloignent dans des directions opposées : ce terreau tient ses promesses quant à la richesse qu'il contient sur les questions d'identité, sur ce qui relie le êtres à leurs racines et ce qu'il en coûte de couper ou au contraire s'enchaîner à ces liens. Les sujets du racisme et de la ségrégation sont traités parfois de manière convenue, souvent avec beaucoup de justesse, et les quatre personnages principaux (les jumelles et leurs filles) forment à elles quatre un tableau riche et subtil de ces questions complexes.

J'ai été un peu moins convaincue par la forme, qui et dans la structure narrative et dans le ton se démarque finalement assez peu de ce qui se retrouve souvent dans la jeune génération d'auteurs américains, à savoir une approche chorale, des personnages très attachants mais plus monolithiques que véritablement fouillés, autour d'une intrigue en aller-retours émaillée de quelques magnifiques scènes en point d'orgue. Je m'attendais à quelque chose de plus mature, de moins convenu dans l'écriture, que je n'ai pas trouvé.
Cela reste tout de même une lecture marquante peuplée de personnages que l'on garde avec soi après l'avoir achevée.

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Quelque part en Louisiane se trouve une petite ville appelée Mallard (elle n'existe pas sur les cartes). La totalité des habitants à force de métissage est devenue presque blanche et refuse avec véhémence l'installation d'un couple noir dans la ville.
Des jumelles sont nées là, noires à la peau blanche. Leur adolescence les poussera à s'enfuir pour voir plus grand, elles se sépareront assez vite et se perdront de vue.
L'une assurera loin de Mallard sa qualité de "blanche" bec et ongles, quitte à mentir et surtout à la famille huppée qu'elle a créee. L'autre y reviendra avec une petite fille noire.
La vie bien sur ne manque pas de surprises, et c'est un roman.
le thème est donc: peut -on échapper à son identité, noire en particulier.
Y sont traités , l'hérédité, le racisme, la gémellité .
C'est un beau roman , ambitieux,qui traite d'un sujet épineux . Ecriture simple et facile à lire.
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L'autre moitié de soi, la partie cachée, enfouie ou juste oubliée, celle qui vivote à nos côtés, fait ses apparitions de temps à autre, nous rappelle à l'ordre ou que l'on a complètement ensevelie et que l'on essaie de tenir comme telle. Nous avons tous, plus ou moins, cette autre facette en nous, celle qu'on ne montre pas, celle qui ressent mais s'efface pour la bienséance, son propre confort ou autre. Un jumeau, une jumelle peut aussi être une autre part de nous-même. Mais la gémellité n'empêche pas à chacun, chacune de tracer sa route. Des personnalités différentes, des sensibilités opposées et des chemins qui se séparent in fine. Une personnalité ça se construit parfois de toutes pièces. L'importance du regard des autres, l'apparat peut jouer son rôle dans la création d'un nouveau soi. On oublie qui on a été, qui on est, ce que l'on a fait. On se dore le blason pour mieux s'intégrer et être accepté, conforme au regard des autres...Il y a des transformations qui marquent.

"L'autre moitié de soi" est un grand roman sur la filiation, l'identité, ici afro-américaine, la réalisation de soi et la difficulté de trouver sa place au sein de la société que l'on soit noir ou blanc, transgenre, d'une classe sociale aisée ou pauvre ... et aborde de nombreux thèmes : racisme, discrimination sociale, violences conjugales ...
Un livre dense, aux personnages fouillés et à l'écriture captivante. Difficile de lâcher ce livre une fois commencé ! Un très bon moment de lecture, qui soulève des réflexions. Qui est-on vraiment ? Comment être soi-même, se réaliser, trouver sa place sans être pour autant dans l'imposture ?
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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L'Amérique face à ses vieux démons de racisme.

Cette nation qui s'est construite sur l'égalité de ses colons n'en finira jamais de se fracturer entre Blancs et Noirs, étrangement incapable de s'affranchir du concept pernicieux et obsolète de hiérarchie raciale (la notion de race ne s'appliquant plus aujourd'hui que pour désigner les espèces animales).

Dans l'Amérique post esclavagiste du 20e siècle, la couleur de peau stigmatise encore pour longtemps et les multiples déclinaisons de pigmentation ont produit ce qu'on appelait dans le Vieux Sud, des «passés blancs», dans un contexte de secrets, de dissimulations et de peur d'être découverts. Sans compter les surprises des conséquences génétiques dans les générations suivantes.

Brit Bennett nous raconte ce fait social dans les années 60 et suivantes, en opposant deux jumelles afro-américaines si claires de peau que le doute est possible. Deux trajectoires de vie choisies qui imposent une séparation douloureuse et une génération suivante impactée.

Au racisme ordinaire, elle associe d'autres communautés confrontées au rejet et à la stigmatisation, dans les années 70 si revendicatrices de justice et d'égalité, ainsi qu'en montée en puissance des communautés LGBT.

Un roman très attachant par la qualité du travail des personnages et par une vision éclairante de la lutte des droits civiques de la société américaine.
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Désirée et Stella, deux soeurs jumelles, de race noire mais très claires de peau, fuguent à la Nouvelle Orléans pour échapper à la pauvreté et à leur condition. Plus tard, Stella poussera la transgression jusqu'à se faire passer pour une femme blanche, elle rompra alors avec sa famille, ses origines, son passé. Elle s'isole dans sa tour d'Ivoire, a peur de fréquenter des noirs qui devineraient ses origines ou d 'être reconnue et rattraper par son passé . Sa fille Kennedy est blonde aux yeux bleus. Sa soeur, Désirée a eu une fille, June qui a hérité de la couleur de peau très foncée de son père . June a du mal à s' accepter, complexée par sa peau foncée. Elle est amoureuse de Reese, une fille trans qui subit un traitement pour devenir un garçon.
Tout au long du roman, à travers l' histoire des jumelles puis de leurs filles, se pose le problème de l'identité, des origines, des racines., de l'acceptation de soi par soi-même et les autres, du regard de la société. Les personnages du roman veulent changer de couleur de peau, de milieu social, de sexe. Brit Bennett construit son roman sans porter de jugement de valeur sur les choix des différents protagonistes
L'auteure, à travers l'histoire de ses personnages, pose les problèmes suivants , l'identité d'une personne est-elle celle dont elle hérite à la naissance ou celle qu'elle se construit et qui peut être diamétralement opposée ? Peut on fuir ses origines et ses racines toute sa vie ?
Brit Bennett, jeune écrivaine afro américaine de trente ans, dont le roman précédent "le coeur battant de nos mères"a remporté un franc succès, pose dans son dernier roman le problème de la couleur de la peau et du racisme dans l'Amérique de Trump qui est de plus en plus déchirée et fracturée par ce sujet. B. Bennett s'érige en digne héritière de Toni Morrison pour écrire sur l'Amérique noire.
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La Louisiane et ses descendants de planteurs et d'esclaves.
Un lieu à part, introuvable sur une carte, nié.
Une communauté noire où la peau s'est blanchie de plus en plus au cours des années.
Un métissage qui rêve des avantages de la peau blanche, l'idéal de Beauté.

Deux jumelles reliées comme le peut être la gémellité.
Puis le départ de la communauté, le rêve d'une autre vie et deux jumelles au parcours séparé jusqu'à l'ignorance de l'une par l'autre.

L'autre intégrée, mariée chez les « Blancs », mère d'une petite blonde à qui elle enseigne : « on ne joue pas avec les négros ».
Une vie d'angoisse, de crainte et si l'usurpation était découverte?

La soeur oubliée retourne au bercail et ramène une fille d'un noir d'ébène, la communauté n'apprécie pas…

La lecture est papitante et touche les notions d'identité depuis le racisme, les relations sociales jusqu'à l'identité sexuelle. La place accordée aux gens de couleur fait froid dans le dos…

Elle livre en un panorama assez complet toute la complexité ressentie par une partie de la communauté noire américaine.

Un livre interpellant qui, à travers le prisme de cette histoire singulière, montre que l'humanité a encore du chemin à faire…
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