Je ne compte plus les livres que j'ai sélectionnés dans le cadre de cette Rentrée littéraire, une fois encore grâce à Lirtuel, la bibliothèque virtuelle belge francophone gratuite ! La couverture de ce livre est quelque peu intrigante ; par ailleurs, j'avais vu passer le livre sur Babelio (par contre, ne me demandez pas à quelle occasion : je n'en ai plus aucune idée !), si bien que je me suis décidée à m'y lancer.
Je ne savais pas trop à quoi m'attendre, d'autant plus que Livraddict l'a tour à tour classé en Fantastique puis en Thriller, à côté d'une catégorie Historique, qui est sans doute la plus (la seule ?) correcte. Babelio parle de roman gothique – je ne connais pas du tout le « genre », voyons donc…
On rencontre ainsi le jeune Baptiste Rivière, issu du peuple en ces années post-Révolution, dont on souligne les errements de la Terreur… alors que rien n'a fondamentalement changé, au final : les riches sont restés riches (du moins ceux qui n'ont pas fini sous la guillotine), et les pauvres continuent de trimer, même si tous s'appellent désormais « citoyen ». Baptiste a grandi dans la ville de Coutances, où il est fiancé, et se forme comme clerc de notaire. C'est ainsi que son patron l'envoie faire l'inventaire des biens de la baronne d'Escreuil, non loin du Mont-Saint-Michel : la baronne est probablement mourante, et souhaite ainsi une estimation aussi juste que possible de ses biens, récupérés après bien des péripéties, au moment de rédiger son testament.
Mais voilà : sitôt arrivé, Baptiste se heurte à l'hostilité apparente de l'intendant, un certain Langlois ; aux regards noirs de la femme de ce dernier ; à l'absence de sympathie du jardinier du château, le vieux Simon, et aux légères moqueries de la jeune femme de chambre, Séverine. En outre, on lui refuse systématiquement toute rencontre avec la baronne, sous prétexte de mauvaise santé de la vieille dame, ce qui, allié à l'imagination débordante du jeune homme et son goût évident pour la lecture (que de références plus ou moins érotiques vont alors être citées !), font de ce château un lieu fantasmagorique et potentiellement dangereux pour notre jeune héros trop sensible.
Il est vrai que cette histoire commence comme un conte fantastique, avec une vague ambiance qui tient peut-être au thriller, mêlée d'un aspect historique omniprésent… mais j'ai fini par m'y perdre ! C'est que, après les tâtonnements initiaux de Baptiste, qui durent quand même un moment, tout à coup on passe à une deuxième partie toujours vaguement inquiétante, mais qui change du tout au tout : en quelques chapitres très concentrés, Séverine va raconter à notre héros toute l'histoire de la baronne, du moins ce qu'elle en sait, par bribes entre deux ou trois nouvelles petites péripéties pour Baptiste – ce qui donne ainsi une saga hyper-concentrée au creux même de l'histoire, avec tant de personnages que j'ai fini par ne plus trop savoir qui était qui, et à m'ennuyer bien un peu à lire les aventures rocambolesques de la baronne – pleines de rebondissements, certes, mais pas forcément toujours hyper-intéressantes et, comme je disais, c'était tout à coup trop concentré alors que par ailleurs il n'arrivait toujours à rien, notre Baptiste !
Puis d'un seul coup, l'auteur prend un (nouveau) virage et, tout en nous dévoilant peu à peu la fameuse baronne, mais juste un peu, il se penche bien davantage sur le personnage de Baptiste, plus tant comme un jeune clerc de notaire quelque peu ingénu et impressionnable, mais réellement en tant que personne qui ose enfin regarder sa vérité en face. Si j'ai apprécié cette lente prise de conscience du jeune homme – qu'on voyait venir bien avant qu'il en soit fait la moindre mention un tant soit peu explicite ! -, je ne comprends toujours pas ce que ça venait faire dans l'histoire…
Les aventures de la baronne seule étaient déjà tellement ahurissantes, et auraient tellement gagné à être exposées de façon plus « diluée », quitte à prendre davantage de pages dans le roman, pour aboutir à un trompe-l'oeil vertigineux que je n'avais pas du tout vu venir (pour ça, le livre porte bien son titre !) ; à côté de ça, le personnage naïf d'un jeune clerc de notaire qui creuse les choses pour tout comprendre, oui c'était sympa, mais en rajouter en lui créant à lui aussi une histoire en trompe-l'oeil (en quelque sorte), je ne parviens pas à décider si c'était opportun, ou si c'est surfait…
Avec tout ça, l'écriture est sympathique et agréable à lire, mais les passages trop concentrés de la deuxième partie et la longue narration (via Séverine) de la vie passée de la baronne d'Escreuil, lui font perdre toute réelle fluidité. Tout cela me donne le sentiment de « tout ça pour ça », et qu'est-ce que l'auteur a-t-il donc réellement voulu dire ?
On notera aussi la présence de quelques planches dessinées en noir et blanc, à la fin de plusieurs chapitres, qui soulignent l'un ou l'autre passage desdits chapitres. C'est un dessin très expressif, peut-être un peu « à la Martine » (cela dit sans aucun dédain : j'aime beaucoup le trait de
Marcel Marlier !), et que j'aurais apprécié de voir en plus grand – mais pour le coup, j'ai lu ce livre emprunté sur mon (trop petit) téléphone, puisque le système Lirtuel est incompatible avec ma Kindle.
Bref, on retient l'ambiance entre fantasmagorie, peut-être thriller et ingénuité de notre héros qui prévaut au début, avant de se perdre dans un trop-plein de personnages dans une 2e partie trop concentrée, pour aboutir à encore tout autre chose, peut-être pas utile, si ce n'est que ça menait à un formidable trompe-l'oeil qui m'a complètement bluffée. Une lecture pas exceptionnelle, mais plutôt sympa.