Dans un désordre d'émotions, Severo s'emporta autant qu'il douta. Il essayait d'avoir des manières douces, de délicates impulsions, mais il entendait le coeur de Serena cogner dans sa poitrine et sa ferveur le faisait s'emballer.
Cette peau vierge brûlait la sienne. La tiédeur de sa nuque répandait une odeur suave de noisette. Tous ces mois de complicité, de quêtes à deux, de confidences sous le couvert des bois, avaient fait naître en lui des envies fauves. A présent, elle était là devant lui, rendue au suc de son corps.
Elle considérait qu'une femme cultivée ne pouvait pas être soumise et ne cherchait pas tant à briller qu'à affirmer sa liberté.
Elle ne lisait pas ce qu'elle voulait, mais ce qu'elle trouvait. Comme souvent les livres lui parvenaient sans couverture, elle ne sut jamais qui était l'auteur de ce roman bouleversant d'une jeune femme qui rêvait à l'inaccessible. Et comme les dernières pages étaient arrachées, elle n'eut pas à pleurer la mort d'Emma Bovary ni l'idée qu'on puisse se suicider par amour.
Le second poussa le rideau et entra dans une pièce au plafond bas. Pour avancer, il dut s'ouvrir le passage à la machette. Toute sorte de fleurs tropicales poussaient à travers les écoutilles. Une verdure épaisse avait envahie les poutres. Des feuillages entouraient les armoires en citronnier et des meubles lourds, verts de fougères, craquaient vaguement dans l'ombre.
L'avantage d'être pauvre, c'est qu'on peut toujours s'enrichir.
(P 39)
Son cerveau n'était plus qu'un vieux coffre plein de poussière et d'oubli, dont il avait perdu la clé.
Le jour se leva sur un navire naufragé, planté sur la cime des arbres, au milieu de la forêt.C'était un trois-mâts de dix-huit canons, à voiles carrées dont la poupe s'était enfoncée dans un manguier à plusieurs mètres de hauteur. A tribord, des fruits pendaient entre les cordages. A bâbord, d'épaisses broussailles recouvraient la coque.
La canne à sucre, c'st comme l'espoir, [...]. Il faut la brûler pour qu'elle repousse avec plus de force.
... elle dut admettre que le destin lui préparait une épreuve difficile et que, pour aimer cet homme, il lui faudrait un courage humanitaire.
Quand ses forces l’abandonnaient, les soirs de fatigue, il devenait son propre ennemi. Il fixait la ligne de l’horizon comme un pendu regarde sa corde.