— « Mon bon Jeannot, aime-moi seulement, »
Reprit la Fée ; « il n’est point de tendresses
Et de baisers et de bonnes caresses,
Que je ne fasse à mon fidèle amant.
Aime-moi bien, puisque je suis jolie,
Aime-moi bien aussi pour ma bonté.
Je suis liée à cet arbre enchanté :
Romps, en m’aimant, le charme qui me lié ».
COMMENT LA FÉE ARBIANNE AVAIT DEUX AMANTS
La Fée Arbianne avait deux talismans :
Un Casque d’or qui rendait invisible,
Et, d’autre part, une Épée invincible.
Arbianne avait de même deux amants.
Si je l’en blâme, au moins que l’on m’accorde,
Au lieu d’aller se creuser le cerveau,
Qu’en avoir trois chez nous n’est pas nouveau,
Et qu’aux beaux luths, il n’est point qu’une corde.
Son choix ne fut ni bas ni hasardeux :
Tous deux étaient fils de Roi, dit le conte.
Elle donna l’Épée à l’un pour compte,
Le Casque à l’autre, et les aima tous deux.
— De garde au pied de sa tour d’émeraude,
L’un de l’Épée allait tout pourfendant,
Monstre, dragon, harpie et prétendant,
Et la gardait, en se gardant de fraude.
L’autre invisible allait surprendre ainsi
La Fée à point en son bain d’eau de rose,
Et, comme on dit, ce ne fut point en prose
Qu’il lui conta son amoureux souci.
Ne tardez pas, quand l’heure heureuse sonne,
Gentils amants. Aimez-vous sans façon.
Le bel Amour n’a besoin de leçon,
Le bel Amour ne consulte personne