Martial Bonneteau : un quasi-quinquagénaire, parfait clone époux, clone parent, clone employé… Sauf que notre clone modèle en a marre de cette identité factice qui ne lui convient pas. Il a besoin d'air, d'une petite touche d'originalité dans un quotidien terne : il vit aux côtés de Madame depuis 24 ans, monstrueuse masse adipeuse qui laisse sa libido en berne, d'enfants indifférents, d'un patron qui l'exploite jusqu'à la lie. En ce beau matin de printemps, suite à une énième nuit d'insomnie, l'insubordination s'infiltre insidieusement dans l'esprit de Martial : la révolte gronde, jusqu'à la « mort du clone »…
Pierre Bordage est l'un de mes auteurs favoris, dans le champ de la science-fiction ou fantasy (j'ai ainsi beaucoup aimé les « Griots célestes », «
Les Fables de l'Humpur », « Wang », et bien d'autres). J'ai donc été particulièrement ravie lorsque j'ai appris que j'allais recevoir «
Mort d'un clone » grâce à l'opération Masse Critique orchestrée par Babelio.
Le livre était accompagné d'un résumé du roman et d'une mise en garde stimulante pour le lecteur : « C'est le premier roman de littérature générale de
Pierre Bordage, et il va fortement surprendre. » Effectivement.
Dès le début,
Pierre Bordage annonce la couleur, celle de la satire mordante et féroce. L'humour cinglant, qui peut étonner sous la plume d'un tel auteur, est tout simplement jubilatoire. Cette histoire de clone (clown ?) provoque l'hilarité du lecteur qui se repaît de la révolte de Martial : défi à l'autorité (Madame l'épouse, Monsieur Albert, le Père-Patron), à soi-même, notamment sur le plan sexuel, qui amène à bien des découvertes et des crises… conjugales.
Puis vient le 15ème chapitre (aux deux-tiers du roman), et son revirement de style. le
Pierre Bordage – science-fiction, fantasy – ressurgit : au cours de son « stage de recentrage » dans une luxueuse demeure bourguignonne, Martial connaît des expériences quelque peu surnaturelles : balades énigmatiques dans une forêt hantée, climat dérégulé, communion avec la nature… L'écriture de l'auteur devient plus poétique, des émotions plus nuancées apparaissent, Martial semble un peu plus (ou un peu moins) humain qu'auparavant. Et soudain, il semble aimer, d'un amour démesuré que sait si bien retranscrire
Pierre Bordage, une femme énigmatique, la fameuse « psy-quelque-chose » tournée en dérision auparavant.
Ce n'est pas tant le style propre de chaque partie qui m'a dérangée, que le fossé démesuré que nous invite à franchir
Pierre Bordage, une fois tournée la page 193. Jusque là, l'humour était féroce. A présent, on entre dans un univers onirique, où s'affrontent réel et surnaturel dans une écriture un peu plus poétique. Quelque chose de bancal ou de peu crédible m'est apparu. J'aurais préféré que l'auteur garde un style uniforme (celui du début) tout du long. La fin m'a déçue, me semblant assez naïve.
Un roman de littérature générale un peu décevant à la fin, mais une plume mordante, inédite chez cet auteur, qui m'invite à noter 4 étoiles. Un grand merci à Babelio et aux Editions Au diable vauvert pour ce bon moment de lecture !