Des fleurs.
Rouges et roses.
Violettes et jaunes.
Un parterre multicolore éclaboussé de lumière. J’y tourbillonne, et des pétales voltigent autour de moi. Je perds l’équilibre, tombe dans un tapis odorant et doux.
il est entré, avec sa fausse douceur, son sourire d'ogre et son air mauvais. J'ai détesté la manière dont il a pris maman par la taille pour l'embrasser. J'ai détesté son baiser sur ma joue. J'ai détesté ses regards, ses questions. Je me sentais mal à l'aise avec lui.
Il lui suffit d'une pensée pour voir par leurs yeux et se projeter en elles pour nous suivre.
Je n'aime pas Malco. Il me fait peur. Il est osseux, velu, avec de grandes mains, des doigts larges aux bouts carrés, des sourcils broussailleux, une peau blafarde, des iris charbonneux et une voix râpeuse, toujours menaçante, même quand il s'efforce de paraître gentil.
Du gris avec des nuances : gris-blanc, gris clair, gris souris, gris-noir. Du gris quand même, fade et froid.
Il y avait maman et moi, le dessin, les livres. On vivait dans notre bulle, hors du monde. Cela me suffisait.
J'examine attentivement la peinture: c'est une fille du feu, dont les mèches rouges s'élèvent vers le ciel crépusculaire. Autour d'elle, des personnages figés dans une écorce gris-vert. En légende, les noms de l'œuvre et de sa créatrice: La Llamada. Remedios Varo.
Llamada, je ne sais pas ce que cela signifie, mais cela sonne comme lumière.
Le jour se léve, remplaçant l'obscurité par une infinité de gris.
Grise ma peau.
Gris, mon ours en peluche.
Gris, le roman posé sur ma table de chevet.
Gris, la chaise, le bureau, la boîte à bijoux et les étagères.
Et dans la pénombre d'un recoin, de l'autre côté de la porte peut-être, quelque chose m'espionne, prêt à m'engloutir.