C'est une gentille gamine, elle m'apporte beaucoup, me donne de son temps et de sa présence. Pour ma part, je prends grand plaisir à l'écouter, à lui parler. Elle met du soleil dans ma vie, elle m'aide à comprendre comment va le monde aujourd'hui et, mieux encore, elle m'y rattache, je retrouve grâce à elle le sentiment d'en faire partie. (p.59)
Le destin est un danseur étoile qui fait des entrechats sur la pointe des si,voilà ce qui m'apparaît après réflexion et que j'ai omis de dire à Milush.
On ne cesse jamais de se soucier de l’image que l’on offre aux autres. Comment me voit-elle, la petite mignonne ? Comment me voient-ils, les chauffeurs du bus, que voient-ils ? Un vieux bonhomme si seul, si désaffecté qu’il n’a pas d’autres ressources que de s’asseoir là, sur le banc de l’abribus, et d’attendre celui ou celle qui viendra pour faire un brin de causette. Ils s’en remettent à leurs yeux, ils emportent la vision d’une enveloppe usée, d’un corps qui s’appuie sur une canne pour avancer, ils s’en contentent, ils ne cherchent pas au-delà. Ils se fient à ce qu’ils voient, ils ignorent qu’au-dedans le cœur continue à trépigner dans sa petite cage, qu’il refuse de se laisser museler, qu’il mène sa sarabande et n’accorde jamais de repos. Ils sont jeunes, pas de blâme, ils ne peuvent imaginer que le cœur ne vieillit pas, qu’il exige toujours, s’embrase toujours.
Le jour où Mme Hennequin consentira à lui adresser plus de trois mots en passant, il pleuvra des jambons de Westphalie et les ânes se mettront à pondre des œufs.
Les premières phrases : Tous les jours je vais m'asseoir sur le banc qu'ils ont installé dans l'abribus où les usagers de la ligne 15 viennent attendre le bus qui les emmènera en ville. Je ne fais pas partie de ces usagers car je n'ai nulle part où aller et donc aucune raison de prendre le bus. Pour ce qui me concerne, disons plutôt que je suis quelque peu usagé, un vieux loup solitaire qui n'a désormais d'autre distraction que de se poser là et d'espérer échanger quelques mots avec celle ou celui qui viendra prendre place près de lui, sur le banc.
On n'a pas touché à la génoise de Géraldine, ma mère et moi on n'est pas très friandes de pâtisserie. Le lendemain, le gâteau a fait une chute mortelle dans le conduit du vide-ordures.
Je n'ai pas de père. Où il est très loin. Ou il est très mort. Mais avant de partir ou de mourir, il m'a nommée Milush. Pour cela je le remercie : grâce à lui je ne m'appelle pas Sidonie.
Et qu'adviendra-t-il de nous si par chance nous sortons d'ici délestés de quelques kilos de masse adipeuse ? Serons-nous enfin exemptés de l'horreur de grossir, du malheur de souffrir, de l'horreur, du malheur ?
Seigneur, délivrez-nous du lard !
La vieille maison assoupie depuis plus d'un demi-siècle résonnait de ses rires, de la course de ses pas dans les étages, la bâtisse tout entière s'ébrouait, revivait. Pendant huit jours, ce fut la fête que la gamine m'avait promise, ce fut, à chaque instant, l'invention de la joie.
Ma mère raffole de Paris autant que moi de la mayonnaise et peut-être davantage.