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Citations sur Le Chuchoteur (412)

"La mort surtout si elle est violente, exerce une drôle de fascination sur les vivants. Devant un cadavre, nous sommes tous curieux. La mort est une dame très séduisante."
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Pendant des années, elle avait été en analyse, sans résultat. Elle avait changé plusieurs fois de thérapeute et elle aurait continué à l'infini si l'un deux - le plus cynique, et elle lui en serait éternellement reconnaissante - ne lui avait pas dit clairement : "La douleur n'existe pas. Comme toute la gamme des émotions humaines, du reste. C'est juste une question de chimie. L'amour n'est qu'une question d'endorphines. Avec une piqûre de Pentothal, je peux vous d"ébarrasser de toute exigence affective. Nous ne sommes que de la chair."
Elle s'était enfin sentie soulagée. Satisfaite, non, mais soulagée, oui ! Elle ne pouvait rien y faire : son corps était entré en "protection", comme cela arrive à certains appareils électroniques quand il y a surcharge et qu'ils doivent protéger leurs propres circuits. Ce psy lui avait également dit que, à un moment de leur existence, certaines personnes ressentent beaucoup de douleur, trop, beaucoup plus que ce qu'un être humain peut tolérer sur l'ensemble de sa vie. Alors, soit ils cessent de vivre, soit ils s'habituent.
Mila ne savait pas si elle pouvait considérer qu'elle s'était habituée, mais en tout cas elle était devenue ce qu'elle était. Une chasseuse d'enfants disparus. Trouver un remède à la souffrance des autres compensait ce qu'elle n'avait jamais vécu. Sa malédiction était devenue son talent.
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En revenant, Rosa fit exprès de précéder Mila de quelques pas, histoire de bien marquer la distance qu'il y avait entre elles. A un autre moment, Mila aurait réagi à la provocation. Mais là elle faisait partie d'une équipe, et elle devait en respecter les règles, si elle voulait mener son travail à bien.
Elle se promit de lui régler son compte plus tard.
Cependant, tout en formulant cette pensée, elle se rendit compte qu'elle tenait pour sûr qu'il y aurait une fin. Que, d'une manière ou d'une autre, cette horreur ferait un jour partie du passé.
C'est inhérent à la nature humaine, pensa-t-elle. La vie continue. Les morts osnt enterrés, et avec le temps tout est métabolisé. Il ne resterait qu'un vague mémento dans leur âme, relique d'un inévitable processus d'autoconservation.
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Mila savait que plus de la moitié des gens qui disparaissent reviennent et racontent une histoire. Certains n'ont rien à raconter, ils reprennent leur vie d'avant. D'autres ont moins de chance, il ne reste plus d'eux qu'un corps muet. Et puis, il y a ceux dont on ne saura jamais rien.
Parmi ceux-là, il y a toujours un enfant.
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Mila pensait que chacun de nous a un chemin. Un chemin qui nous mène chez nous, vers nos proches, les gens à qui nous sommes le plus liés. D'habitude, c'est toujours le même chemin, on l'apprend dès l'enfance et on le suit pour la vie. Mais il arrive que ce chemin se brise, qu'il reprenne ailleurs. Ou bien, après avoir suivi un parcours sinueux, il revient au point de rupture. Ou encore, il reste comme suspendu.
Mais parfois, il se perd dans l'obscurité.
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Les enfants ne voient pas la mort. Parce que leur vie dure une journée, du réveil au coucher.
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Goran avait accroché dans sa salle de cours une photo en noir et blanc d'un enfant. Un petit homme dodu et sans défense. Ses étudiants le voyaient et finissaient par se prendre d'affection pour cette image. Quand - plus ou moins en milieu du semestre - quelqu'un avait le courage de lui demander de qui il s'agissait, il les mettait au défi de deviner. Les réponses étaient variées et pleines de fantaisie. Et il s'amusait de leurs expressions quand il leur révélait que cet enfant était Adolf Hitler. Après la guerre, le chef nazi était devenu un monstre dans l'imaginaire collectif, et pendant des années les nations qui étaient sorties victorieuses du conflit s'étaient opposées à toute autre vision. Ainsi, personne ne connaissait les photos d'enfance du Führer. Un monstre ne pouvait pas avoir été un enfant, il ne pouvait pas avoir ressenti autre chose que de la haine, avoir vécu une existence similaire à tant d'autres enfants de son âge, qui étaient par la suite devenus ses victimes
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Mila pensa à nouveau à la fillette numéro 6.Pour elle,personne encore ne pleurait.Elle aurait droit aux larmes,comme toutes le autres.La souffrance a un rôle.Elle sert à recomposer les liens entre les choses des vivants et celles des morts.C'est un langage qui remplace la parole.Qui change les termes du problème.C'était ça ,que faisaient les parents de l'autre côté de la vitre.Reconstruire minutieusement ,avec la douleur,un morceau de cette existence qui n'etait plus.En entremêlant leurs souvenirs fragiles ,en tissant les fils blancs du passé avec ceux,tout fins,du présent.

Devant certains crimes atroces ,le trouble n'est qu'un masque.C'est quelque chose que Goran Gavila avait appris très vite.La mort,surtout si elle est violente ,exerce une drôle de fascination sur les vivants.Devant un cadavre,nous sommes tous curieux.La mort est une dame très séduisante

Ils franchirent la porte du bureau tous ensemble.Boris s'attarda pour ferler la porte,puis les retrouva immobiles dans le couloir ,comme hypnotisés.Il ne comprit pas ce qu'il se passait avant d'apercevoir,entre leurs epaules,le corp étendu par terre.Sarah Rosa hurla.Mila se tourna ,parce qu'elle ne pouvait plus regarder.Stern fit le signe de croix.Gavila ne put dire un mot.
Caroline,la cinquième.
Cette fois,le cadavre de la fillette était pour eux.
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Le grand papillon l’emportait, se fiant à sa mémoire pour se déplacer dans la nuit. Il faisait vibrer ses larges ailes poussiéreuses, évitant les pièges des montagnes, aussi calmes que des géants endormis épaule contre épaule.
Au-dessus d’eux, un ciel de velours. En des sous, le bois. Très dense.
Le pilote se tourna vers le passager et indiqua devant lui un énorme trou blanc au sol, semblable au cratère lumineux d’un volcan.
L’hélicoptère vira dans cette direction.
Ils atterrirent au bout de sept minutes sur l’accotement de la nationale. La route était fermée et la zone occupée par la police. Un homme en costume bleu vint accueillir le passager jusque sous les hélices, retenant avec peine sa cravate.
– Bienvenue, professeur, nous vous attendions, dit- il à haute voix pour couvrir le bruit des rotors.
Goran Gavila ne répondit pas.
L’agent spécial Stern continua :
– Venez, je vous expliquerai en chemin.
Ils s’engagèrent sur un sentier accidenté, laissant derrière eux le bruit de l’hélicoptère qui reprenait de l’altitude, aspiré par le ciel d’encre.
La brume glissait comme un suaire, dévoilant le profil des collines. Autour, les parfums mélangés du bois étaient adoucis par l’humidité de la nuit qui remontait le long des vêtements, glissait froidement sur la peau.
– Cela n’a pas été simple, je vous assure : il faut que vous voyiez de vos propres yeux.
L’agent Stern précédait Goran de quelques pas, en se frayant un chemin parmi les arbustes, tout en lui parlant sans le regarder.
– Tout a commencé ce matin, vers onze heures. Deux jeunes garçons parcourent le sentier avec leur chien. Ils entrent dans le bois, escaladent la col line et débouchent dans la clairière. Le chien est un labrador et, vous savez, ils aiment creuser, ces chiens- là… Bref, l’animal devient comme fou parce qu’il a flairé quelque chose. Il creuse un trou. Et voilà qu’apparaît le premier. Goran se concentrait pour le suivre, tandis qu’ils s’enfonçaient dans la végétation de plus en plus touffue le long de la pente progressivement plus raide. Il remarqua que le pantalon de Stern était légèrement déchiré à la hauteur du genou, signe qu’il avait déjà fait le trajet plusieurs fois cette nuit- là.
– Évidemment, les jeunes garçons s’enfuient immédiatement et préviennent la police locale, continua l’agent. Ils arrivent, examinent les lieux, les reliefs, ils cherchent des indices. Bref : la routine. Puis quelqu’un a l’idée de continuer à creuser, pour voir s’il y a autre chose… et voilà que le deuxième apparaît ! Là, ils nous ont appelés : on est ici depuis trois heures du matin. Nous ne savons pas encore combien il y en a, là- dessous. Voilà, nous sommes arrivés…
Devant eux s’ouvrit une petite clairière éclairée par des projecteurs – la gorge de feu du volcan. Soudain, les parfums du bois s’évanouirent et tous deux furent assaillis par une odeur âcre caractéristique. Goran leva la tête, se laissant envahir : acide phénique.
Et il vit.
Un cercle de petites fosses. Et une trentaine d’hommes en combinaison blanche qui creusaient dans cette lumière halogène et martienne, munis de petites pelles et de pinceaux pour enlever délicatement la terre. Certains passaient l’herbe au crible, d’autres photographiaient et cataloguaient chaque pièce avec soin. Leurs gestes étaient précis, calibrés, hypnotiques, enveloppés dans un silence sacré, violé de temps à autre par les petites explosions des flashes.
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"Nous les appelons "monstres" parce que nous les sentons loin de nous, et donc nous les voulons "différents", disait Goran dans ses séminaires. Au contraire, ils nous ressemblent en tout et pour tout. Mais nous préférons balayer l'idée qu'un de nos semblables est capable de telles atrocités. En partie pour absoudre notre nature. Les anthropologues appellent ça la "dépersonnalisation du coupable", et cela constitue souvent le principal obstacle à l'identification d'un tueur en série. Car un homme a des points faibles et peut être capturé. Pas un monstre".
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