Je viens de terminer le formidable «
Les luminaires » d'
Eleanor Catton.
Comme toujours à la fin de la lecture d'un grand roman, une sensation de vide qui m'envahit, j'ai retardé les dernières pages parce que je savais que l'univers allait me manquer.
Je ne m'étais pas trompé.
Un roman fleuve (près de 1000 pages quand même!) une écriture précise, envoutante. Un peu comme « la disparition » de Perrec était un exercice basé sur la difficulté, difficulté ou plutôt contrainte, qui engendre la liberté, Eleanor a bâti son roman en suivant la course des planètes et des étoiles, style thème astrologique.
Je ne suis pourtant pas amateur d'astrologie !
Mille pages qui tiennent en haleine « an astrological murder mystery » (roman policier astrologique) comme elle le décrit. Polar, certes, mais à la sauce Victorienne, une écriture d'une virtuosité rare, contant le destin d'une vingtaine de personnages, pendant la ruée vers l'or des années 1860 en Nouvelle-Zélande. Tout au long de la lecture je pensais à Dickens (le Dickens qui m'a tant fait rêver dans mon adolescence) au
Stevenson de «
L'île au trésor », m'attendant à voir surgir à chaque page un pirate à la jambe de bois, à certains
Conan Doyle et son
Sherlock Holmes (pour l'époque à laquelle se situe le roman, certes, mais aussi pour le côté « élémentaire, mon cher Watson »), bref polar mais polar d'aventure tel qu'il s'écrivait au xixe siècle, mêlé d'une bonne dose de mystère. !
Mille pages de destins croisés, de petites touches qui font partie d'un immense puzzle haut en couleurs.
Une recherche esthétique aussi de la part d'Eleanor qui cherche à coller au plus près à l'époque à laquelle l'action se déroule, avec ses mots tombés en désuétude, ses tournures de phrase surannées mais si belles. Dans quel autre roman liriez-vous ces mots peu usités (voire même carrément inconnus) comme « réduire à quia », « stipendier », « impéritie », « entre le zist et le zest », « pertinacité », « apophtème », « écolâtre »...Au passage, coup de chapeau aussi à la traduction, excellente.
Mille pages dont on ne peut abandonner la lecture.
Ca peut faire peur, mille pages, mais si vous lisez ces lignes, je vous recommande vraiment de vous y plonger et de vous laisser porter, de vous laisser dévorer, vous aussi.
Un roman qui a valu à sa toute jeune auteure quelques prix prestigieux (et mérités) dont le fameux Man Booker Prize.
«
Les luminaires »
Eleanor Catton chez
Buchet Chastel
3 juil. 2019 à 16:21