AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
4,19

sur 185 notes
5
19 avis
4
16 avis
3
5 avis
2
0 avis
1
0 avis

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Il y a quelques mois, j'ai suivi une formation. Théoriquement, c'était une formation professionnelle mais elle s'est révélée bien plus que ça, une semaine de réflexion sur et pour moi.

Dans la bibliographie de cette formation se trouvait ‘Libres d'obéir'. Théoriquement, c'était un livre sur la filiation entre le nazisme et le management moderne. Pas courant, me direz-vous ?

Le livre s'est révélé encore plus que ça : une brillante étude historique de la ‘Menschenführung' vue par les nazis, couplée à une mise en cause implicite du monde économique moderne.

Le titre ‘Libres d'obéir' est tout à fait révélateur du propos : si l'Allemagne nazie a bafoué la liberté de nombreux individus (ainsi que leur vie) et mis toute la doctrine entre les mains du ‘Führer', elle prônait pourtant, pour la réalisation de la doctrine, l'autonomie de moyens à tous les échelons.

Ainsi, les individus n'avaient pas leur mot à dire sur la politique, l'antisémitisme ou la guerre. En ce sens, ils devaient ‘obéir'.
Mais, une fois l'objectif fixé, ils disposaient d'un grand champ d'actions sur les moyens de le réaliser. D'où la liberté (illusoire).

La description du système d'organisation imaginé par les théoriciens nazis est très intéressante, aux antipodes de ce que j'imaginais. La présence de ces théoriciens nazis dans les instances économiques et éducatives de l'Allemagne des Années 1950 à 1990 est glaçante.

Le parallèle avec le management moderne l'est également. Si les finalités n'y sont évidemment pas les mêmes que celles du Reich, les salariés et managers y sont pour autant tout aussi 'libres d'obéir'.

En effet, les objectifs stratégiques leur viennent toujours d'en haut et ne font pas l'objet de discussions. Ils ont en revanche la (pseudo-) liberté que leur confèrent l'agilité, la délégation de moyens ou le management par objectifs.

En un sens, le management nazi était beaucoup plus libre que je l'imaginais… et le management moderne beaucoup moins ! C'est donc un livre passionnant qui m'a appris des choses et fait réfléchir à des concepts.
Commenter  J’apprécie          275
J'ai connu et l'auteur et le livre par une émission sur une télévision indépendante, dont j'avais reçu la video. Quelle étrange impression. L'auteur m'a semblé plus clair et plus percutant à l'oral qu'à l'écrit. L'essai me paraît plus confus que son interview d'une heure. Mais le propos reste très intéressant. Et je suis fort contente d'avoir découvert et le livre et surtout ce professeur de la Sorbonne dont j'irai certainement approfondir l'oeuvre.
Commenter  J’apprécie          240
L'expansion rapide du territoire du IIIe Reich a posé un problème à l'administration nazie (bon, en vrai, ça a surtout posé des problèmes aux populations locales, mais laissons cet aspect de côté dans cette critique) : en effet, le nombre de fonctionnaires et de cadres n'augmente pas en proportion des conquêtes. Il faut donc faire toujours plus avec des ressources humaines qui ne changent pas.

L'auteur montre comment a émergé une pensée du management directement dérivée des idées nazies. Paradoxalement, elle ne se reposait pas sur une hiérarchie stricte, comme on pourrait s'y attendre dans un système autocratique, mais au contraire sur une décentralisation extrême. Tout d'abord en s'inspirant du mythe de la « liberté du Germain », en opposition à une application tatillonne et (surtout) judéo-romaine de la loi. Ensuite, en favorisant la compétition, censée sélectionner les meilleurs éléments : l'auteur montre qu'il n'était pas rare que plusieurs agences aient des missions similaires, celle apportant la meilleure solution étant automatiquement justifiée dans toutes ses actions. Enfin, en abolissant le conflit de classe patron-travailleur : chacun doit être convaincu du bien-fondé de sa mission et doit faire le maximum pour servir le système. À ce titre, il doit prendre en charge lui-même la santé physique et mentale de ses travailleurs, afin de s'assurer qu'ils soient correctement reposés et prêts à donner toute leur énergie.

On se retrouve au final avec un système dans lequel toute la pression retombe sur les éléments à la base : leurs objectifs sont fixés, sans la possibilité de les modifier ou de les déclarer irréalisables, mais ils sont « libres » de choisir la meilleure manière de les atteindre. Un objectif non-atteint sera donc toujours de leur faute, jamais de celle du supérieur : il fallait être plus souple, plus efficace, plus malin.

Ce système a survécu au régime nazi : beaucoup de cadres se sont en effet recyclés dans le civil, dont des écoles de management, car, après tout, le régime était un modèle d'efficacité. C'est là où le propos du livre devient ambigu : l'auteur montre que le passé nazi de certains professeurs a été dévoilé, que leurs principes de management ont finalement été écartés, … et pourtant, on ressort du livre avec l'idée que toutes les entreprises, encore aujourd'hui, s'inspirent d'idées nazies pour gérer leur personnel ; idée qui m'est restée également après avoir entendu des interviews de l'auteur. J'aurais préféré que l'auteur approfondisse ce sujet, ou qu'il s'en tienne au cadre strictement historique, car il me semble trop grave que pour être abordé uniquement par quelques suggestions éparpillées dans plusieurs chapitres.
Commenter  J’apprécie          220
Ce court et brillant essai dont on parle beaucoup ces derniers mois s'ouvre sur le genre d'observation sémantique qui me ravit : alors que la plus grande partie du discours nazi nous paraît aujourd'hui (encore pour longtemps ?) monstrueusement étrangère, les productions conceptuelles et intellectuelles concernant l'organisation du travail et de l'administration résonnent dans nos oreilles contemporaines avec une familiarité inquiétante : surtout lorsqu'il est question du modèle de la « délégation de responsabilité » et du « management par objectifs » et plus généralement de la méfiance envers la réglementation et le pouvoir centralisé. La thèse du livre est que nos théories actuelles sur le management sont non seulement les héritières directes de la pensée et de la pratique nazies – peut-être davantage que du taylorisme si vitupéré, devrait-on ajouter – mais qu'elles se sont imposées en Occident à partir de l'après-guerre sans solution de continuité avec le IIIe Reich, par le truchement d'un certain nombre de personnalités dont la reconversion professionnelle en RFA s'est opéré avec la plus grande facilité, sans heurt ni reniements, et même grâce à un soutien trans-continental allant de pair avec une influence de même amplitude. Thèse hardie, excellemment démontrée.
Il faut d'abord se départir de l'idée que l'administration nazie ait opéré conformément à la tradition prussienne, comme un rouage de parfaite transmission (juridique) d'ordres provenant de la hiérarchie : les nazis se sont trouvés très vite dans l'obligation d'administrer un territoire immense avec les contraintes de l'économie de guerre, dans l'urgence concernant l'allocation des ressources (nourriture, énergie, matières premières pour l'industrie) et avec le minimum d'hommes (la majorité étant combattants) ; et par ailleurs dans une structure administrative massivement purgée des opposants politiques et « raciaux » (Chap. I : « Penser l'administration du Grand Reich »).
Mais idéologiquement aussi, le nazisme se caractérisait par son antipathie pour le droit (une invention judaïque), et pour l'État (une création de l'Empire romain déclinant), l'essence originaire des Germains se fondant au contraire sur la « liberté germanique », sur la « communauté » d'un peuple homogène racialement et dans sa volonté profonde (fût-elle inconsciente), une fois celui-ci « assaini » de ses éléments décadents et aliènes. Concrètement, le pouvoir nazi était une « polycratie » de personnalités fortement rivales entre elles et dans leurs tentatives d'anticiper, par la radicalité, les désirs du « Führer », à travers une pléthore d'« agences » ad hoc dotées de « missions » et d'« objectifs » spécifiques (Chap. II : « Faut-il en finir avec l'État ? »).
Évidemment, le concept de « liberté germanique » est une fiction perverse : fiction dans la mesure où elle présuppose cette « homogénéité » sociale et la communauté d'aspirations à l'intérieur de la Volksgemeinshaft (on notera la double polysémie de Volk – peuple ou bien race – et de Gemeinshaft – communauté humaine ou bien d'opinions) en gommant les antagonismes de classe ; perverse car, la verticalité du pouvoir étant conservée et même exacerbée, se précise le sens du titre : la liberté se réduit à l'état d'être « libres d'obéir » (Chap. III : « La "Liberté germanique").
L'on aperçoit que ces principes posent une analogie entre le gouvernement de société et l'organisation du travail : les objectifs étant établis au sommet de la pyramide du pouvoir, il ne reste aux échelons intermédiaires, aux cadres, que la « liberté » de trouver le moyen de les réaliser de façon autonome et sous leur responsabilité, contrairement à la vision individualiste du libéralisme et au « despotisme oriental » du bolchevisme ; par ailleurs l'eugénisme permet aux nazis de se débarrasser des « êtres non performants », « asociaux » et autres « entités indignes de vivre » : « le triptyque procréer-combattre-régner résume la mission historique et la vocation biologique du Germain » (p. 67) (Chap. IV : « Manager et ménager la "ressource humaine").
Nous sommes à la moitié du livre : il est temps de passer à la postérité du nazisme, et l'auteur choisit le parcours le plus emblématique, celui de Reinhard Höhn, docteur en droit, ayant gravi rapidement tous les échelons du cursus honorum de la SS jusqu'au grade de Oberführer (Général), passant sans encombre ni changement d'identité l'après-guerre, avec juste une « parenthèse naturopathe » de quelques années, puis profitant pleinement du réseau de ses « alte Kameraden » pour être propulsé d'abord dans un « think tank » industriel qui réfléchit aux méthodes de gestion des ressources humaines les plus modernes, enfin à la fondation d'une Akademie für Führungskräfte, grande école de management, l'équivalent de notre INSEAD (inagurée un an plus tard), sur le modèle de la Harvard Business School avec laquelle elle entretiendra toujours des rapports de dialogue (Chap. V : « De la SS au management : L'Akademie für Führungskräfte de Reinhard Höhn »).
Notre protagoniste Höhn a une passion : l'histoire militaire. Avec une étude de 1952 sur Scharnhorst, réformateur de l'armée prussienne après la défaite d'Iéna par Napoléon, il esquisse par analogie explicite son théorème sur les réformes nécessaires à son pays dans l'immédiat, avec cette optique pluridisciplinaire qui peut s'appliquer également à l'armée qu'à l'administration qu'à l'entreprise : une tactique du « cas particulier », « par mission » : Auftragstaktik, de « l'action plutôt que de la réflexion », une « stratégie de l'élasticité » (lire : flexibilité!) (Chap. VI : « L'art de la guerre (économique) »).
Le chapitre suivant démontre comment cet enseignement est particulièrement bien reçu en RFA des années du miracle économique, et comment des centaines de milliers de cadres sont envoyés se former à son école (Chap. VII : La méthode de Bad Harzburg : la liberté d'obéir, l'obligation de réussir »).
La biographie de Höhn se termine tout de même par un relatif déclin à la fin des années 70, alors qu'il a confortablement atteint l'âge de la retraite, mais qu'il montre une énergie inépuisable dans sa production scientifique. Son passé nazi commence à être inconfortable (le chancelier Willy Brandt était quand même un ancien résistant...), mais peut-être aussi parce que des nouveautés sur le plan des méthodes managériales, plus américaines, mais qui ne contredisent en rien les principes du modèle de la « délégation de responsabilité » ni le « management par objectifs » semblent plus aptes à surmonter les crises pétrolières et la fin du boom économique : pourtant les grandes entreprises allemandes (comme Aldi) semblent avoir parfaitement intégré ses enseignements, voire en avoir retenu le côté le plus radical et pervers : les contrôles et les délais (Chap. VIII : « Le crépuscule d'un dieu »).
L'Épilogue s'ouvre sur une analogie entre la carrière de Höhn et celle de « notre » Maurice Papon ; ensuite le rôle « dogmatique » du management est analysé dans notre société actuelle, sous le prisme de la « modernité réactionnaire » que nous vivons actuellement – et non seulement l'Allemagne de la reconstruction - ; enfin la problématique classique en philosophie politique qu'est celle de la liberté est évoquée à l'époque des « mastodontes organisationnels » mais aussi des remises en cause radicales du modèle économique productiviste qui sont les nôtres.


Cit. :

1. « Outre cette réjouissante perspective, celle du changement d'état, de la promotion, de l'avancement social, outre une politique fiscale et sociale avantageuse, il faut également administrer aux travailleurs allemands un baume qui adoucit l'effort, qui leur procure du plaisir, voire de la "joie", à travailler. le modèle, ici, est italien et, plus précisément, fasciste. C'est à l'exemple du "Dopolavoro" péninsulaire qu'est créée la "Force par la joie", l'organisation Kraft durch Freude, que l'on peut définir comme un immense comité d'entreprise à l'échelle du Reich tout entier. » (pp. 72-73)

2. « Les réflexions sur l'organisation du travail, sur l'optimisation des facteurs de production, sur la société productive la plus efficiente ont été nombreuses et intenses sous le IIIe Reich, non seulement parce qu'elles répondaient à des questions urgentes, sinon vitales, mais aussi parce que se trouvait en Allemagne une élite de jeunes universitaires qui alliaient volontiers savoir et action, réflexion savante et technocratie, et qui ont trouvé, pour quelques dizaines d'entre eux, un lieu naturel dans le service de renseignement (SD) de la SS, les autres se répartissant dans la myriade d'institutions et d'agences créées ad hoc sous le gouvernement nazi, quand ils ne profitaient pas tout simplement de la bonne aubaine offerte par la purge politique et raciale de l'Université, qui, en licenciant le tiers des effectifs de professeurs, d'assistants et de chercheurs, a libéré des milliers de postes dès le 7 avril 1933. » (p. 77)

3. « [La culture politique] de la RFA a accueilli avec faveur le management de Bad Harzburg, qui était parfaitement compatible avec elle : l'ordo-libéralisme se voulait une liberté encadrée, l'économie sociale de marché visait à l'intégration des masses par la participation et la cogestion, pour éviter la lutte des classes et le glissement vers le "bolchevisme". Höhn n'a jamais abandonné son cadre conceptuel de référence, à la fois principe et idéal – celui de la communauté, fermée de préférence. C'est, de fait, une communauté de carrières, d'intuitions et de culture qui, après 1949, a "reconstruit" les fondements de la production économique, de l'État et de l'armée. Les cadres d'après-guerre avaient tous fourbi leurs premières armes sous le IIIe Reich, et nombre d'entre eux étaient issus du SD de la SS. La transition personnelle – celle des carrières – et conceptuelle – celle des idées – ne fut généralement pas si malaisée : la "liberté germanique" devenait la liberté tout court, "l'effort d'armement" se muait en reconstruction et l'ennemi "judéo-bolchevique" n'était plus que benoîtement soviétique. Reinhard Höhn aura été, avant comme après 1945, l'homme de son temps. » (pp. 123-124)

4. « Être rentable / performant / productif (leistungsfähig) et s'affirmer (sich durchsetzen) dans un univers concurrentiel (Wettbewerb) pour triompher (siegen) dans le combat pour la vie (Lebenskampf) : ces vocables typiques de la pensée nazie furent les siens après 1945, comme ils sont trop souvent les nôtres aujourd'hui. Les nazis ne les ont pas inventés – ils sont hérités du darwinisme social militaire, économique et eugéniste de l'Occident des années 1850-1930 – mais ils les ont incarnés et illustrés d'une manière qui devrait nous conduire à réfléchir sur ce que nous sommes, pensons et faisons. » (p. 135)
Commenter  J’apprécie          150
Cet essai montre comment les juristes nazis, recrutés dans le vivier des universitaires formés pendant la République de Weimar, ont été à la pointe des réflexions sur l'organisation du travail, le management qui ont été appliqués par les plus grandes entreprises allemandes en RFA pendant la période du "miracle économique".
Reinhard Höhn, ancien membre du parti nazi qui termine la guerre avec le grade de général, a fondé l'Académie de Bad Harzburg qui a formé des centaines de milliers de cadres et possède encore un site qui dispense des formations en ligne.
Ce modèle de "management par délégation de responsabilité" repose sur le consentement, une part de liberté, non dans la définition des objectifs mais dans leur réalisation. Cette doctrine est l'adaptation à l'économie de la doctrine politique, militaire qui a prévalu durant le IIIe Reich. Afin de diluer la responsabilité des chefs, le Reich encourageait les initiatives locales, multipliait les agences (organisation Todt, Plan de quatre Ans) afin de créer une concurrence et une émulation parmi les "forces vives" de la "communauté" (de race).
On lit dans les écrits des juristes nazis des mots comme élasticité qui font étrangement penser à la flexibilité qui abonde dans le vocable managérial actuel.
Précisons que l'auteur ne dit pas que les nazis ont inventé le management. le management préexiste au nazisme. Mais ils ont élaboré une doctrine qui prend racine dans le darwinisme social qui est l'un des piliers du nazisme (la vie est une lutte, un combat à mort) et qui imprègne une bonne partie des techniques de management actuelles.
Un livre stimulant et excellemment écrit !
Commenter  J’apprécie          100
Dans cet intéressant (et érudit) essai, Johann Chapoutot nous fait découvrir non pas les origines d'un certain management moderne (il rappelle que ses racines sont plus anciennes), mais sa mise en application par le 3ème Reich, ainsi que l'histoire de sa conceptualisation par Reinhard Höhn, personnage principal de cet ouvrage.

Höhn, après avoir prêté sa plume et ses idées au régime nazi, a su rebondir de façon brillante après la guerre, tout en conservant son fonds de commerce, à savoir une forte capacité à penser et théoriser le management, ou plutôt un type de management, capacité qu'il exploitera avec grand succès dans une école qui formera durant plusieurs décennies de nombreux cadres à ses idées, non sans avoir entièrement expurgé ces dernières de concepts et ajouts plus vraiment à la mode après 1945.

C'est cette continuité que Chapoutot met en lumière de façon intéressante, bien qu'un peu fouillis à mon goût, dans les 90 premiers pourcents du livre, avant de se livrer ensuite à une charge sur les effets pervers de ce type management (que l'on pourrait qualifier "d'horizontal" pour simplifier). de ma propre expérience, cette critique finale tape juste et je ne peux que saluer cette dénonciation. le format du livre l'autorise puisqu'il n'est pas ici question d'une étude historique, bien que le début de l'ouvrage en soit une.

Chapoutot se garde toutefois clairement de dire (il s'en défend de manière explicite) que le management d'aujourd'hui est une forme de nazisme !

Au final et malgré quelques termes très pointus, ce livre reste facile à lire, et nous éclaire avec lucidité sur un sujet plutôt inattendu. Belle lecture donc à mon sens.
Commenter  J’apprécie          70
Essai très intéressant d'un paradoxe à première vue inimaginable : le nazisme comme chantre de la délégation et de la liberté ! A première vue seulement car l'auteur nous fait vite et bien comprendre qu'un modèle participatif a bien du servir le III ème Reich et qu'il ne s'atteint pas, seulement, par une autorité pure.

L'idée générale du Reich fut de supprimer la lutte des classes en bâtissant une communauté de race, bien homogène comme le sait. Pour ce faire, les cadres, de l'armée à l'entreprise, donnaient les fins, fixaient les objectifs, mais pas les moyens d'y parvenir qui revenaient aux laborieux qui mettaient en oeuvre, avec anxiété mais aussi avec liberté, ce qu'ils considéraient comme les meilleurs moyens. Belle explication d'un paradigme participatif à des desseins inimaginables. Bien agréable lecture.
Commenter  J’apprécie          70
Tout est dans le titre, inutile de résumer ce livre qui a d'ailleurs pas mal fait parler de lui. le résultat des recherches de Chapoutot est éclairant, partant d'une analyse lexicale pour aller de plus en plus loin dans les rouages du système nazi et de sa gestion des hommes, pardon, ressources humaines. On retrouve en effet de nombreux points communs avec la soupe habituellement servie, avec quelques variantes certes, mais l'idée d'un rapport déshumanisé et en même temps d'une relégation des responsabilités à ceux qui sont en bas de la hiérarchie sont bien présentes et furieusement d'actualités, vous en conviendrez. L'ouvrage dérive ensuite sur la personne de Reinhard Höhn qui est paradigmatique du management nazillon.
Un bon ouvrage donc, même si l'on peut en ressortir avec un goût de "trop peu". Cela donne envie d'aller voir les autres travaux de l'auteur.
Bémol tout de même : 16€ pour un format poche, on se fait plaisir chez Gallimard.
Commenter  J’apprécie          30
Excellent ouvrage, tant historiquement, que sociologiquement, pour comprendre comment les moyens, mis au service du mal, ont été optimisé pour une productivité maximale. (Je conseille la lecture d'un ouvrage très complémentaire "Comment Hitler a acheté les allemands" de Gotz Aly)
Une mise en perspective intéressante de l'assassinat de Hans Martin Shleier par la Fraction Armée Rouge en 1977. Si les moyens violents utilisés sont inexcusables, on comprend mieux qu'une minorité se soit révoltée contre une société qui a promu de nombreux dignitaires, voir criminels de guerre nazis.
Sur le plan management, raison professionnelle de mon achat, une réflexion très intéressante sur la délégation, du modèle très descendant à l'entreprise libérée.
Commenter  J’apprécie          30
L'entreprise bureaucratique ou technocratique, issue de la révolution industrielle, a produit l'élévation du niveau de vie que nous connaissons. Aujourd'hui cependant elle questionne : perte de sens, excès de financiarisation, stress, burn ou bore out, désengagement, déshumanisation sont devenus ses attributs. Différents acteurs de l'entreprise ou du monde académique prônent une rupture face à ces errements : plus d'autonomie, plus de management participatif, moins de règles, processus, reportings pour utiliser le jargon managériales actuel ! N'est-ce pas cependant remettre au goût du jour de vieilles recettes nazies du management ? N'est ce pas appeler le diable pour soigner le mal ? Convoquer un juriste allemand qui finit la guerre avec le grade de général SS reconverti en fondateur d'une école de management ? On pourrait le croire à lire ce stupéfiant essai sur Reinhard Höhn, penseur du management nazi. Lecture fascinante d'un essai historique stimulant sur une des pages les moins connues de l'époque nazie par un des meilleurs spécialistes de l'époque. Malheureusement, la partie finale où se construit la comparaison entre les théories de R.Höhn et les problèmes du management contemporain ( qui mérite une sérieuse critique) est plutôt faible. Les chercheurs contemporains en la matière ont mieux à dire (PY Gomez ou M.Detchessahar en F ou L.Taskin en B, par exemple). Mais cet essai doit cependant figurer dans la liste des lectures chaleureusement recommandées pour tous ceux que les RH, le management, le leadership ou le développement des organisations intéresse !
Commenter  J’apprécie          30





Lecteurs (582) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (5 - essais )

Roland Barthes : "Fragments d'un discours **** "

amoureux
positiviste
philosophique

20 questions
853 lecteurs ont répondu
Thèmes : essai , essai de société , essai philosophique , essai documentCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..