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sur 320 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Si vous voulez découvrir une Suisse romande profonde, vous êtes sur le bon bouquin et vous en aurez pour votre argent. le début de l'action se passe à Ropraz, en 1903.
Vous allez vivre du "Hard-Chessex", qui se déguste à pleines dents!
Ropraz est un village d'aspect tranquille à l'écart des grandes routes du canton de Vaud, ses habitants vivent un peu en autarcie alimentaire et intellectuelle. Mais, les histoires de famille, les incestes, les jalousies, font ici le bonheur des commérages, l'imagination et la diabolisation font bon ménage. Les vampires rodent la nuit. Les superstitions persistent dans ses parages et bien que protestants, les gens se signent devant certaines maisons et sur certains lieux!

Un jour , une jeune fille de vingt ans meurt de méningite. le lendemain de son enterrement, on découvre sa tombe ouverte avec son cercueil en partie dégagé. Un médecin arrive, on soulève le couvercle à moitié refermé, et là, l'indescriptible se dévoile devant les témoins de cette exhumation dont voici le compte rendu (accrochez-vous bien!):
« Cadavre violé. Traces de sperme, de salive, sur les cuisses dénudées de la victime. Et la mutilation la plus sanglante apparaît dans toute son horreur.
La main gauche coupée net, gît à côté de cadavres.
La poitrine, cisaillée à coups de couteau, est profondément charcutée. Les seins ont été découpés, mangés, mâchés, et recraché dans le ventre ouvert.
La tête aux trois quarts séparée de tronc, y a été enfoncée après que des morsures très repérables et visible ont été pratiquées en plusieurs endroits : le cou, les joues, l'attache de l'oreille.
Une jambe, la droite, et la cuisse droite elle aussi, sont hachées jusqu'au pli du sexe.
Le sexe a été découpé prélevé, mastiqué, mangé, on en retrouvera des restes recrachés, poils pubiens et cartilage, dans la haie dite du Crochet, à deux cents mètres au-dessus de la forge.
Les intestins pendent hors de la bière. le coeur a disparu.[…] »

Difficile de savoir si cette description sort de son imagination,cependant lorsqu'on ouvre un livre de Chessex, il est permis de s'attendre à tout.
Mais revenons à nos moutons car ce genre d'actes se répètera encore à deux reprises. Cette fois, toute la région est chamboulée. Et Chessex s'en donne à coeur joie, ne serais que cette scène où des enfants jouent au football avec un étrange ballon, en fait avec une tête de décapitée, et ce cris qui fuse soudain: "c'est Nadine!". Bref, je vous laisse découvrir une succession d'événements de plus en plus décalés. Pour preuve, cette rencontre improbable entre le présumé criminel, alors engagé à la légion étrangère, et le caporal suisse Frédéric Sauser, alias Blaise Cendrars, et qui serait ici, prétendument à l'origine du texte de "Moravagine": Chessex, le manipulateur, en plus du reste.
Et, sapristi, qu'il écrit bien, le bougre! Sournoisement le texte tourne au récit surréaliste, pour aboutir à une énorme farce au détriment d'un des monuments des plus chers aux français, tout ça avec le plus grand sérieux!.
Bref, et en quelques mots: Gore, iconoclaste, génial, avec un zeste d'humour, le tout badigeonné d'encre à l'acide sulfurique et de giclures de sperme…

Récit à lire d'un trait (à peine plus de cent pages), en choisissant un soir d'orage, avec, si possible des hululements de chouette, un volet qui grince au vent, un parquet qui craque, un éclair et les fusibles qui sautent juste à la fin de la page 110, histoire de traverser la maison dans le noir le plus total pour y retrouver son lit.

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Il me fallait un roman avec un vampire pour le challenge multi-défis… Je ne suis pas déçue : Jacques Chessex met en scène un vampire bien réel, qui a existé et qui a terrorisé le village de Ropraz et ses environs, là où habitait l'écrivain, justement. Si vous voulez des détails sur le fait divers, suivez ce lien : https://www.le-courrier.ch/sur-le-vampire-de-ropraz-et-environs/. Oui, mais bien qu'inspiré d'un fait divers réel, il s'agit vraiment d'un roman comme c'est mentionné sur la couverture. C'est dans la volontaire confusion entretenue entre roman et réalité que réside en partie la force de ce petit livre.
***
En 1903, Rosa Gilliéron, 20 ans, belle comme un coeur et vertueuse, forcément vertueuse, meurt d'une méningite foudroyante. Comme en plus elle appartient à une famille riche, c'est l'émoi, et tout le canton de Vaud ou presque se précipite à son enterrement. Deux jours plus tard, on retrouve la tombe profanée. On exhume le corps et on découvre horreur après horreur : le cadavre a été violé, la main gauche coupée, la tête mordue, mâchouillée à différents endroits, quasi détachée du corps et enfoncée dans le tronc, quant aux seins et au sexe, les outrages qu'ils sont subis vaudront au coupable son surnom dans les journaux dès le lendemain de l'horrible découverte. Ajoutons que le coeur a disparu. Les mêmes abominations se reproduiront sur les cadavres de deux autres femmes le mois suivant, dans cette même région du Haut-Joraz. On soupçonnera plusieurs hommes, souvent pour des motifs plus fallacieux les uns que les autres, et voilà qu'on surprend Charles-Augustin Favez, garçon de ferme, colosse alcoolique et simplet, « en train de s'exécuter sur une génisse entravée »… Son compte est bon malgré les doutes du psychiatre qui l'a rencontré…
***
Le vampire de Ropraz raconte d‘horribles événements et Jacques Chessex, avec son grand talent de conteur, nous fait partager la suspicion qui s'installe entre les villageois, la peur du lendemain, et même une certaine empathie envers « ce malheureux » vampire ou donné comme tel. le narrateur réveille les superstitions, fait revivre des pratiques catholiques disparues de ces contrées depuis des siècles, et réussit à nous entraîner encore plus loin dans les croyances populaires. Parce qu'enfin, cette dame blanche, visiteuse du vampire, est-elle bien réelle ou est-elle l'annonciatrice de la mort telle qu'on la rencontre dans les légendes ? En plus d'être magnifiquement écrit et malgré les sordides événements racontés, ce roman m'a parfois fait sourire : le regard que porte le narrateur sur les différents intervenants est plein d'un humour contenu auquel l'auteur laissera enfin libre cours ; le clin d'oeil à Cendrars et à Moravagine ainsi que la pirouette finale sont de vrais petits bijoux. Il y a des années que je ne m'étais pas replongée dans cet auteur (1934-2009). Un plaisir à redécouvrir…
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Le vampire de Ropraz

Et voilà un petit chef d'oeuvre de Jacques Chessex (prix Goncourt 1973) qui nous plonge dans la Suisse profonde du début du vingtième siècle.
Ca n'est pas la joie dans le village de Ropraz : Incestes, viols,
« commerce » avec les animaux et avec les cadavres déterrés.

Tout le monde est coupable, mais tout le monde cherche un bouc émissaire. Un pauvre gosse de 20 ans s'y colle parce qu'on l'a surpris en train de niquer une génisse. Il en a vu et « senti » beaucoup depuis qu'il est né, le nommé Favez et, faute de peine de mort (heureuse décision prise par la Suisse à la fin du 19°, presque cent ans avant la France, pays des droits de l'homme) il échappe au lynchage rampant et va en prison puis dans un hôpital psychiatrique ou curieusement il est plutôt (enfin) bien traité.

108 pages d'une écriture parfaite et sans complaisance nous mène vers l'issue de ce roman (qui n'est pas une nouvelle) où l'on côtoie Blaise Cendrars dans les tranchées.

Ce tour de force mérite le détour. Indéniablement.
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Inspiré d'un fait divers, le lecteur a presque l'impression de lire un article de journal tant les faits sont précis mais sans être trop détaillés non plus. L'auteur se limite à nous énoncer les faits et à nous faire prendre conscience de l'horreur des crimes (il n'a d'ailleurs pas trop besoin de le faire car le simple fait de les écrire nous donne la nausée).

Trois crimes abominables perpétrées sur des belles jeunes filles, récemment décédées de maladie. Quelle est donc le crime me direz-vous ? Il s'agit ici de nécrophilie, de viol de sépultures et de cannibalisme.
Pourquoi lire une telle horreur me direz-vous (d'autant plus pour moi qui sus si sensible à ce genre de choses) ? Tout simplement parce que j'avais lu un très bon article sur ce dernier dans "Le Magazine littéraire" il y a quelques mois et c'est donc de mon plein gré que j'ai voulu m'attaquer à cet ouvrage, que je ne regrette pas d'avoir lu d'ailleurs, bien au contraire.
L'histoire débute à Ropraz, un petit village près de Lausanne en Suisse en février 1903 (date à laquelle est commis le premier acte de barbarisme sur le cadavre de la jeune Rosa Gilliéron, la fille d'un juge renommé et ce ne sera que le début pour que la mystérieuse bête humaine qui a accompli ces gestes soit qualifié de vampire. La légende du "vampire de Ropraz" est née...

Je ne vais pas trop m'étendre sur le résumé de l'histoire car cela vous gâcherait le suspense mais je tenais simplement à vous situer le contexte. le livre se lit en un rien de temps. Très bien écrit, avec des chapitres très courts, avec certains mots que l'on préférerait ne jamais avoir lus tant ils sont durs mais pourtant, il faut bien se rendre à l'évidence que cela aurait très bien pu se passer s'est sans doute déjà produit et malheureusement se produira encore. Eh oui, il faut que j'arrête de vivre dans mes contes de fées et que je prenne conscience que l'être humain est capable d'accomplir des choses abominables, horribles et inimaginables...tout comme il peut aussi accomplir de merveilleuse choses (heureusement d'ailleurs. je crois que je vais me raccrocher à cette deuxième hypothèse). Même s'il est vrai que certains passages m'ont choqué, il n'en reste néanmoins que c'est un très bon ouvrage qui mérite d'être découvert.
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J'ai lu ce livre prenant d'une traite. Court et efficace, il revient sur les mentalités traditionnelles, protestantes des suisses roman , au début du siècle dernier. Une écriture serrée, un style grinçant et sans concession. J'ai adoré découvrir cet auteur.
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On est en 1903, la jeune Rosa Gilliéron âgée de vingt ans à peine, fille d'un notable, meurt d'une méningite et est enterrée dans son village natal de Ropraz. Mais voilà qu'on retrouve sa tombe profanée, pire son corps violé et atrocement mutilé, main et tête sectionnés, la poitrine et le sexe mâchés puis recrachés et son coeur a disparu. C'est l'horreur et la stupéfaction dans tout le village, dans ce monde rural du début du XXe siècle où les pires croyances et superstitions refont surface, la peur s'insinue dans les maison ; surtout que deux cadavres de jeunes filles subiront le même sort dans deux autres villages. La méfiance est de mise sur ces terres protestantes.

La presse parle déjà du Vampire de Ropraz, l'affaire fait grand bruit, résonne à l'international, il faut un coupable et les autorités auront tôt fait d'en trouver un : Charles-Augustin Favez. Pourquoi lui ? Tout simplement parce que son aspect physique, yeux rouges et canines longues, et que des faits de zoophilie qui lui sont reprochés en font le coupable idéal. le jeune Favez n'a pourtant pas eu une vie facile, très jeune il subit des sévices sexuels de la part de sa mère adoptive.
Un bouc-émissaire, une victime lui aussi ? Dans cette campagne reculée, où l'isolement côtoie l'alcool, et la violence l'inceste, la police se révèle inefficace et la colère gronde, ce jeune garçon, l'idiot du village comme il sera surnommé, en fera les frais, il sera condamné à perpétuité, s'enfuira et s'engagera dans la Légion étrangère.
L'auteur nous laisse entendre que Charles Favez alias le Vampire de Ropraz aurait été tué lors de la première guerre et que les cendres du soldat inconnu reposant à Paris sous l'Arc de Triomphe seraient les siennes.

Sous une écriture simple et froide c'est un roman effrayant voire malsain que l'auteur nous livre dans lequel la différence rend coupable, le mal ressort pourtant plus de la communauté elle-même que du coupable désigné.
De ce roman qui relate des faits plus qu'il ne les approfondie, laisse un goût d'inachevé, cette histoire passionnante qui garde en haleine s'arrête malheureusement trop vite.

Lien : http://stemilou.over-blog.co..
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« La peur rôde… La folie gagne… La sorcellerie foisonne…»

Un tiers de siècle après son prix Goncourt, « L'ogre » en 1973, Chessex est toujours cerné par les mêmes fantômes, les mêmes monstres de son enfance. Mais si, tel Racine, il trimballe l'image obsédante du Père -Dieu et le sien- à travers toute son oeuvre, elle a fini de le terroriser très tôt.

Ici, nous sommes conduits droit et vite au piège qui nous est tendu sans une chance de nous y soustraire. A Ropraz, pas de digressions, pas d'égarements, pas de détours. Plus de jours insouciants devant nous, le temps est venu d'avoir peur de nous-mêmes et de nos fantômes : c'est à nous, lecteurs, d'endosser « la folie meurtrière » et d'abdiquer le rempart de nos héroïsmes.
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J'ai un faible pour les fictions s'inspirant de faits réels. Ou qui sonnent comme telles. L'exercice n'est toutefois pas aussi simple qu'il n'y paraît.

J'ai récemment lu Nickel boys inspiré d'un centre de redressement pour jeunes "délinquants" dans l'Amérique des années 60. J'avais été plutôt séduit, mais il me manquait quelque chose.

Et ce quelque chose, je l'ai trouvé dans le (court) roman de Jacques Chessex. Ce quelque chose, c'est un côté viscéral. Des tripes... il y en a dans le Vampire de Ropraz, au propre comme au figuré.

Le fait divers: 1903, Haut-Jorat vaudois, 3 corps de jeunes filles récemment inhumées sont sortis de leur cercueil et sauvagement violentés. Sperme, mutilations post-mortem, décapitation, j'en passe et des meilleures... puis le corps est remis dans sa boîte de sapin. Après quelques errements, l'enquête s'oriente sur un jeune homme inadapté, désociabilisé, pris en pleine copulation avec une vache. Avoir un coupable, c'est le souhait de tout le monde, du peuple au magstrat. Et si en plus il n'a pas toutes ses frites dans le même sachet, c'est encore mieux. Tout va lui être imputé, et même davantage. Et qu'importe s'il a subi des viols répétés à l'âge de 4 ans dans la famille où il a été placé...

Jacques Chessex n'est pas complaisant. Non, pas du tout. Un chat s'appelle un chat. Et les scènes sont crûment décrites. Comment pourrait-il en être autrement, d'ailleurs?

Condamné à la perpétuité, Charles-Augustin Favez ira dans un centre psychiatrique, comme objet d'études. Cette science en est encore à ses balbutiements. Quelle aubaine que ce Favez. Mais il s'évadera. Chessex le place alors dans la Légion étrangère, aux côtés de Blaise Cendrars... Imagination débordante de Chessex. Sublimation de déviances. Convergences de destins... J'adore.

Et le style. Que dire du style... Chessex évolue d'un récit façon fait divers, froid et factuel, à des successions d'images impressionnistes, voire de récits façon "histoires racontées à la veillée un long soir d'hiver". On se balade dans l'hiver 1903 à la façon d'un colporteur fourbu qui affronte les rigueurs de la montagne.
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Du grand Chessex ! Une enquête qui remonte au siècle dernier dans le fin fond du canton de Vaud. Un cadavre de jeune femme horriblement mutilé refait surface. Sans tomber dans le sensationnalisme ni la complaisance, l'auteur analyse les mentalités de ses personnages pour essayer de comprendre comment cette horreur a pu se produire. Comme souvent avec Chessex, la Suisse en prend pour son grade !
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C'est le premier livre que je lis de ce prolifique auteur, et j'ai beaucoup aimé la qualité de sa plume.

Le contexte et l'environnement dans lesquels va se dérouler cette sordide histoire sont d'emblée posés grâce à une écriture ciselée, fluide, utilisant un vocabulaire très précis.
Ainsi, dès les premières lignes, on y est : un temps reculé,- mais pas si loin que ça-, des mentalités lourdes de superstitions et des moeurs fortement contestables sous des apparences "bien comme il faut".
Or, comme l'écrit Jacques Chessex, "la laideur de l'agression dit la méchanceté ambiante". L'horreur viendra de la multiplicité des crimes.

Un livre court (86 pages), mais puissants car extrêmement précis dans sa description de la Nature Humaine et de l'étendue de sa bêtise.

A lire donc sans réserve, comme une sorte de témoignage historique de ce dont l'homme est capable.

Mon seul regret, ne pas connaître le véritable auteur de ces sordides profanations. Mais bon, c'est un peu normal que personne ne se soit penché sur l'élucidation de ce problème, puisque tout le monde était persuadé tenir l'authentique coupable...
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