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3,29

sur 89 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
C'est pas que ça me gêne de marcher dans la boue, mais bon, jusqu'à présent je n'avais jamais laissé traîner mes sabots dans la Creuse ? La CREUSE ! oui. Tu connais ? Y'a des champs, y'a de la pluie, y'a de la boue. Alors c'est chaussé de grandes bottes en caoutchouc que j'arpente les terres creuses. Oui, je sais ça fait pas rêver, la CREUSE ! Alors là, je sens les insultes creuses qui vont envahir mon espace virtuel, pour peu qu'il y ait au moins du réseau dans cette lointaine et boueuse contrée ? La Creuse, je ne pensais jamais y aller alors que j‘ai tant arpenté las pâturages du Montana ou du Wisconsin. C'est que j‘aime le nature writing, la littérature de la boue et des grands espaces, et malgré tout la CREUSE pourrait être un p'tit coin de nature à la française, genre un plateau des milles bisons, où il fait bon y écrire. Et y boire, aussi, surtout. C'est que j'aime bien boire un verre de vin avec Madame qui fume des Gauloises… D'un autre temps, cette Creuse, j'vous le dis.

Madame de la Villonière, veuve depuis des lustres, les lustres du salon sont poussiéreux d'ailleurs dans sa vieille demeure isolée dans ce trou perdu dans cette Creuse abandonnée où la servante est presque aussi vieille que les pierres du château. Alors, Madame se prend d'amitié pour Guillaume, 14 ans qu'elle rebaptisera en Willy – on ne refuse rien à Madame – le fils des métayers qui s'occupent de ses terres. Une amitié exigeante qui a pour but de lui donner une autre éducation – meilleure à n'en pas douter que des paysans ne peuvent offrir à leur progéniture. Plus cultivée, les mathématiques et la poésie, les règles du maintien, tout pour en faire un « héritier » officieux.

Je peux d'ailleurs m'interroger sur les motivations de la Dame de la Creuse, sans titre de noblesse, juste un passé vermoulu. Et surtout comment ne pas sentir le mépris pour les parents de Guillaume qui s'effacent devant cette attitude autoritaire. Un sentiment d'humiliation, d'asservissement même. La Creuse d'un autre temps. Mais en s'enfonçant plus profondément dans la boue, je perçois le fondement de Madame, son deuil, ses peurs, sa solitude. Madame rêve d'atomiseurs, Madame rêve d'apesanteur… Des heures et des heures à la recherche d'un bonheur. Madame rêve et moi d'un verre, ad libitum… Et à la fin du roman, je me repasse le film de Madame, je revois ces gestes, ces actes, son but. Tout devient limpide comme mon verre de whisky affiné dans des fûts de Sauternes. Madame rêve, Madame fume des Gauloises.
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Dans une maison hors d'âge, vit une femme hors du temps.
Pardon.
Dans un château hors d'âge, vit une baronne hors du temps.
Ce temps qui s'est arrêté, il y a quatorze ans ... figé ... il n'y a plus que des semblants.
Guillaume fait semblant d'être le fils et la baronne se croit institutrice. Les fermiers eux, ne font pas semblant, ils travaillent la terre, s'échinent pour quelques menus fretins. Mais ils ont si peu de temps, qu'ils font un peu semblant d'être les parents de Guillaume.
Même la voiture de Madame, car c'est ainsi que la baronne aime à se faire appeler, est d'un autre âge : une vieille Frégate, que les passants montrent du doigt. C'est aussi le cas du vieux fusil, qui sert à dézinguer les ragondins, lui date de 1922.
Dans un récit déroulé au cordeau, Jean-Marie Chevrier, nous dresse des portraits qui se répondent l'un l'autre. Nous découvrons peu à peu tous les secrets de ce mystère qui entoure cette vieille femme. Guillaume y apparait comme un espoir, un espoir du temps jadis, à jamais perdu.
Du fond de ce roman, à l'atmosphère pesante et lourde, on a parfois du mal à trouver son chemin. Y aura-t-il de la lumière ? D'où surgira-t-elle ? L'auteur à tour de rôle, nous égare et nous ramène dans le bon tempo, nous manipule. Difficile de s'incarner dans les personnages, il reste toujours une distance.
Heureusement l'écriture est belle, poétique, elle sait nous décrire la pesanteur des situations et grâce à elle l'histoire y prend toute sa saveur.
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La châtelaine du lieu, solitaire et excentrique, entend instruire à sa façon le fils unique de ses fermiers, qui a quatorze ans. Entre ces deux là va naître une curieuse complicité, qui évolue vers une transmission: savoir, éducation, puis héritage...Mais à quel prix? Ceci évidemment cache de lourds secrets.
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Madame est un court roman (le dixième de l'auteur) qui possède une atmosphère toute particulière. Il emprunte d'abord la tension, les rapports entre les personnages si particuliers, les non-dits et les confrontations du huis-clos. Quant à l'intrigue, si elle se déroule clairement à notre époque (console, TV, cigarette et quelques marques sont évoqués de façon nette et précise), tout laisse pourtant penser (le personnage de Madame, Alexandrine l'ancienne bonne, la bâtisse, gentilhommière située dans la Creuse…) qu'elle s'inscrit plutôt dans une cadre passé hors d'âge, un autre temps qui n'aurait jamais évolué, ou seulement pour tomber en décrépitude. Cette ambiance accentue l'étrangeté des liens entre Madame et Guillaume, alias Willy. Les parents du jeune homme s'inquiètent d'ailleurs eux aussi. Humiliés et pris pour du personnel un peu simplet, ils ne manquent pas pour autant de s'agacer de voir cette femme stricte et exigence mettre le grappin sur le fils, tout autant que celui-ci de ne quitter les jupons de cette vieille folle. Et pourtant, Guillaume est loin d'être aussi naïf qu'il y paraît et sait que cette lourde porte noire (aux serrures toujours fermées et qui le hante) détient la réponse aux agissements de cette femme....................
Lien : http://stephanieplaisirdelir..
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Un roman totalement hors du temps sur les rapports entre une femme mûre et un jeune garçon. Mentor, mère adoptive, bourreau, on ne sait pas trop ce qu'elle est pour lui... S'y ajoute une notion de classes sociales qui donne à ce roman un côté XIXème siècle, alors qu'en fait je pense qu'il se déroule de nos jours.
Les personnages sont énigmatiques mais crédibles, c'est très bien écrit. Un roman d'ambiance délicat et intellectuel, mais que je pense oublier assez vite malheureusement...
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La coïncidence de la mort tragique d'un enfant avec la naissance d'un autre peut donner libre cours au chagrin pour engendrer des fantasmes de perpétuation. de là, pour la mère éplorée, à s'arroger des droits sur celui qu'elle conçoit comme le prolongement de son fils sur terre, il y a un pas que franchit Jean-Marie Chevrier dans Madame, un roman dans lequel l'émotion monte crescendo dans l'expression de la douleur.
14 ans ! le temps des jérémiades est passé. C'était l'âge du fils unique à sa disparition. C'est l'âge de celui qui à ses yeux a endossé le costume de sa vie. le temps est venu de la reconstruction. Mais ce sera forcément sur un mensonge à soi-même.
Difficile fin de règne pour cette aristocrate, dernière de sa lignée. Elle use de son ascendant sur l'ultime famille qui reste attachée au domaine par un contrat de fermage et trouve en la personne de leur fils une échappatoire à son désarroi, un exutoire capable d'avaler ses tourbillons d'amertume et de rancoeur. Ils s'amassent contre le barrage que le destin a élevé en travers de sa vie pour contenir les flots d'amour maternel qu'elle destinait à son fils.

“Que me font ces vallons, ces palais, ces chaumières,
Vains objets dont pour moi le charme est envolé ?
Fleuves, rochers, forêts, solitudes si chères,
Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé” (*)

Quand on a perdu un enfant, enfant unique, plus rien n'a de valeur, toutes les folies sont possibles, même s'approprier celui des autres y compris en l'affublant d'un autre prénom.
Mais quand, éduquant l'innocence de ses jeunes années à la raison des adultes, Guillaume comprendra la motivation de cet engouement pour sa personne, il optera spontanément pour une thérapie drastique qu'il croit être salvatrice.

C'est un peu artificiel, mais c'est le propre du roman, et c'est bien écrit.



(*) Alphonse de Lamartine - L'isolement

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La campagne. Profonde. Un château. En ruine ou presque. Dedans, une baronne, vieillissante. Pas loin, un ado. Fils du métayer. Et des liens qui vont se nouer au fil des mois entre cette femme austère et ce jeune homme sensible. Comme ( trop? )souvent dans les romans, il faudra aller chercher dans le passé, sur les traces d'un enfant mort, les clefs pour mieux appréhender un présent étouffant.
Ce roman est étrange. Au début, on a du mal à le situer dans le temps. Cette châtelaine avec sa famille de métayers, cela très début du siècle dernier. Puis, petit à petit, au gré de quelques petits détails contemporains, il faut se rendre à l'évidence, l'hommage déguisé à François Mauriac, est bien situé de nos jours, même si l'héroïne est d'un autre temps et le jeune garçon guère représentatif du collégien moyen des années 2010.
Si l'on arrive à faire l'impasse sur cet ado anachronique, totalement improbable, le roman possède des qualités indéniables. L'écriture est classique, agréable, l'histoire, profondément psychologique, bien menée. Cela pourra plaire à un lectorat nostalgique des romans d'antan, ceux qui garnissaient les rayons des bibliothèque bien pensantes. Les personnages sont bien fouillés et arrivent à devenir crédibles dans leur cheminement intérieur. Cependant, à vouloir concocter une histoire aux ressorts maintes fois éprouvés ( faire le deuil d'un enfant ), Jean Marie Chevrier a un peu de mal à me captiver. le dernier tiers du livre, mélange d'action (attention ce n'est pas un polar trépidant non plus, disons que ça s'agite un peu plus !) et de tension psychologique ( avec le lourd symbole de la deuxième mort du fils ) tombe un peu trop dans le déjà lu.
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Impression en demie-teinte, je n'ai pas su quoi penser de ce roman en le refermant..J'en ai aimé beaucoup de choses : la poésie des descriptions et celle apprise par coeur par Willy (Baudelaire, Verlaine..), la force des éléments de la nature (ça sent l'amour pour Dame-Nature), le côté un peu foldingue-machiavélique de la vieille aristo, le mystère autour de la mort..J'ai aimé le côté implacable du destin, la manipulation dépeinte dans les rapports entre l'aristocrate et cet ado-substitut qu'elle accapare.

Et en même temps, j'ai trouvé que ça manquait de chaleur, que c'était parfois décalé, difficile à plaquer sur une époque (quel ado de 14 ans accepterait aujourd'hui de se faire laver des pieds à la tête par sa mère ?), je n'ai pas eu de réelle empathie pour les personnages (Madame est une créature bizarre, pas maternelle, presque asexuée ; Willy-Guillaume est à cheval entre deux mondes ; les parents paysans ont l'air de sortir du Moyen-Age). C'est parfois déroutant. Il n'y a qu'à la toute fin qu'on comprend ce qui anime leurs personnalités et finalement, ça m'a semblé la seule issue possible dans ce qu'elle pouvait inclure de tragédie et de cruauté..
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Un roman intéressant, captivant, je ne l'ai pas lâché jusqu'à la fin. J'ai beaucoup aimé l'écriture élégante et l'univers de cette campagne solitaire dans laquelle s'inscrit le roman. le huit-clos entre Guillaume, cet enfant non dupe de la situation et Madame est passionnant. Madame qui se permet de lui donner un autre prénom que le sien, Willy, comme si cet enfant n'existait pas vraiment, un adolescent un tantinet manipulateur rencontre la folie d'une vieille femme aigrie et dangereuse . Par contre, la fin du roman n'est pas du tout de mon goût, je l'ai trouvé étrange.
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Madame est un court roman qui possède une atmosphère toute particulière.
Il emprunte d'abord la tension, les rapports entre les personnages si particuliers, les non-dits et les confrontations du huis-clos.
Cette ambiance accentue l'étrangeté des liens entre Madame et Guillaume, alias Willy.
Les parents du jeune homme s'inquiètent de la relation qu'à Madame et Guillaume...lui rappelle-t-il son fils disparu ?
L'intrigue est bien menée, cependant quelques longueurs persistent tout au long de celle-ci.
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