La technologie fait plus que dépersonnaliser : elle expose votre vie à tous les vents et tous les regards indiscrets, elle vous étripe en place publique, et après ça n'allez pas rêver à une vie privée.
- Bref, peut-être que vous pourriez m'expliquer un peu ce que vous faites.
- Ma démarche concerne l'espace et les concepts. Tout est dans la création d'une ambiance.
- Je vois.
- Ce n'est pas de l'art au sens classique du terme, ça va bien au-delà. C'est l'étape suivante dans le processus d'évolution artistique.
- Je vois.
- Tout dans cette exposition a une raison d'être précise. La place du canapé. La texture du tapis. La couleur des murs. La façon dont le soleil filtre par les fenêtres. L'ensemble crée une ambiance spécifique.
Misère...
Myron désigna cette, hum, oeuvre.
- Et comment faites-vous pour vendre ce genre d'oeuvre?
Elle fronça les sourcils.
- Ca ne se vend pas.
- Pardon?
- L'art n'est pas une question d'argent, monsieur Worley. Les véritables artistes ne donnent pas une valeur pécuniaire à leur travail. Seuls les faux artistes agissent ainsi.
La technologie fait plus que dépersonnaliser : elle expose votre vie à tous les vents et tous les regards indiscrets, elle vous étripe en place publique, et après ça n'allez pas rêver à une vie privée.
A l'aide d'un périscope en carton, Myron Bolitar survolait la foule compressée des spectateurs à l'accoutrement ridicule. Il essayait de se remémorer en quelle occasion il avait recouru à ce genre de jouet. Ah oui : c'était à l'âge de sept ou huit ans, après avoir collectionné un tas de vignettes découpées sur les paquets de céréales.
Grâce au jeu de miroirs, Myron voyait un homme portant un pantalon court et mal coupé - un truc franchement impossible - qui dominait de toute sa taille une pauvre petite sphère blanche et alvéolée. Les spectateurs échangeaient des murmures excités. Myron réprima un bâillement. L'homme en culotte courte s'accroupit. Un frisson horriblement collectif agita le public, et un silence inquiétant suivit. Une immobilité totale s'instaura, comme si les arbres, les buissons et jusqu'aux brins d'herbe bien coiffés retenaient leur respiration.
Le type en culotte courte donna un grand coup dans la sphère blanche avec une sorte de canne.
A l'aide d'un périscope en carton, Myron Bolitar survolait la foule compressée des spectateurs à l'accoutrement ridicule. Il essayait de se remémorer en quelle occasion il avait recouru à ce genre de jouet. Ah oui : c'était à l'âge de sept ou huit ans, après avoir collectionné un tas de vignettes découpées sur les paquets de céréales.
- Et comment faites-vous pour vendre ce genre d'œuvre ?
Elle fronça les sourcils.
- ça ne se vend pas.
- Pardon ?
- L'art n'est pas une question d'argent, monsieur Worley. Les véritables artistes ne donnent pas une valeur pécuniaire à leur travail. Seuls les faux artistes agissent ainsi.
Ouais, comme Michel-Ange, ou Vinci, ces faux artistes.
- Vous pensez à Jessica ? demanda-t-elle d'un ton soupçonneux.
- Non, pourquoi ?
- Parce que vous avez cette expression de chiot éperdu d'amour qui file la nausée. Vous savez bien. Celle qui me donne envie de vomir sur vos chaussures.
- Tu as envie d'en parler ?
- Non.
- Je suis là, sinon.
- Oui, j'avais remarqué.
- Win aurait donc un mère ?
- Ouais.
Un silence.
- Autant pour ma théorie sur l'immaculé conception satanique.
- Ah-ah.
- Ou celle sur l'expérience du savant fou qui tourne très mal.
- Vous en avez parlé à Win ? demanda Esperanza.
- Oui.
- Comment a-t-il réagi ?
- il refuse de s’impliquer dans cette affaire.
- Pas surprenant, lâcha-t-elle.
- En effet.
- Vous travaillez moins bien seul, Myron, remarqua son assistante.
- Tout ira bien pour moi, lui affirma-t-il. Alors, impatiente de se voir décernée son diplôme ?
Esperanza suivait les cours du soir en droit de la New York University depuis six ans maintenant. Lundi, elle devait recevoir officiellement son diplôme.
- Je n’irai sans doute pas.