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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Maryse Condé rouvre une Affaire Classée à Salem.

L'écrivaine française lauréate du Prix Nobel de Littérature alternatif, nous offre une ensorcelante aventure de la Barbade, perle des Caraïbes, aux bois sombres et glacés du Massachusetts. Elle redonne chair et souffle à Tituba, l'une des sorcières des célèbres procès de Salem, à la fin du XVIIème siècle.

Condé veut rendre sa belle innocence à l'impétueuse, naïve, ingénieuse et sensuelle Tituba. Ces épithètes, l'héroïne les partagent avec le style de l'ouvrage, à la fois très abordable et marqué d'un style personnel à l'auteure.
La personnalité de Tituba, sorcière, dont les procès verbaux exacts sont retranscrits par Condé, est très bien campée, nous avons une femme d'un grand courage, d'une bonté et compassion naturelles, lesquelles sont mises à rude épreuve… Mais avant tout et une amoureuse de la vie, pour qui faire l'amour, être auprès d'un homme (ou d'une femme…) est comme prendre un congé presque mystique de l'enfer de son existence.

A travers cette histoire, Condé explore immanquablement la mémoire de sa Guadeloupe, elle dont la famille n'abordait jamais les tourments de l'esclavage. Mais, généreuse, elle veut embrasser dans son roman, mettre en lumière toutes les minorités et leurs oppressions celle des noirs bien sûr, mais aussi des femmes, et des juifs.

Un roman divertissant, entre récit de voyage et d'aventure, roman historique et portrait d'une affranchie qui veut parler à notre époque.

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Tituba a réellement existé, citée lors du procès des sorcières de Salem, en 1692 comme étant une esclave noire venue de la Barbade et pratiquant le vaudou, mais d'autres sources pensent qu'elle était Indienne, tout simplement parce qu'à l'époque, les deux peuples se confondaient dans l'esprit des colonisateurs.
Maryse Condé, elle, a pris le parti d'en faire la fille d'Abena, jeune Ashanti (du Ghana) enlevée et violée sur un vaisseau négrier, pour être vendue à des colons à la Barbade.
Tituba découvre très tôt l'oppression de son peuple, devient orpheline, est recueillie par Man Yaya, guérisseuse qui l'initie aux bienfaits des plantes et aux sacrifices rituels.
Adulte, elle est vendue à un pasteur, Parris, et emmenée avec son compagnon John Indien à Salem, où elle l'une des toutes premières à être accusée de sorcellerie, elle qui persiste à ne l'utiliser que pour guérir et non se venger.
Ainsi, toute sa vie, elle connaîtra les barbaries du 17ème siècle: esclavage, pendaisons, tortures, prison, oppression de son peuple mais aussi celui des Indiens et celui des Juifs et enfin celui des femmes, qui dans tout ça, resteront toujours les premières victimes.
Maryse Condé s'est fondée sur les rares informations qu'on ait sur Tituba - contrairement aux autres accusés, elle n'a jamais reçu le pardon officiel, n'étant qu'une simple esclave, et sa vie n' a pas été retracée dans les archives de Salem - et a imaginé le reste.
En lisant ce roman, je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Beloved, de Toni Morrison, et j'ai aimé l'écriture, envoûtante, belle et tragique. Par ce personnage, en partie fictif, elle réussit à nous faire entrevoir tous les vices de cette époque.
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C'est une histoire fascinante : la réalité mêlée à la fiction que nous conte la plume alerte de madame Maryse Condé.
Méfiance ,suspicion, superstition, bêtise, cruauté, intolérance ou l'histoire d'une jeune guérisseuse: Tituba, seule contre l'hypocrisie d'une société qui se veut pure et qui tombe dans une hystérie collective meurtrière.Tituba est fille d'esclave : sa mére Abena, violée par un marin Anglais à bord d'un vaisseau négrier, a été pendue pour avoir défendu sa vie contre un blanc....
Orpheline, Tituba, née à la Barbade, est initiée aux pouvoirs surnaturels par Man Yaya , faiseuse de sorts et guérisseuse. Solitaire, sa rencontre avec John Indien l'entraîne à Boston puis au village puritain de Salem.....au service d'un nouveau maître , le révérend Paris.
Elle est accusée injustement de sorcellerie à cause de ses connaissances et de sa liberté d'esprit, puis jetée en prison, finalement amnistiée aprés le procès des sorciéres de Salem en 1692.
On entre facilement dans la peau de cette jeune femme noire grâce à la belle plume à la fois réaliste et poignante de Madame Condé, à l'époque de l'esclavage.
On souffre, on vibre, on ressent sa force et son désarroi, sa douleur et la lourdeur de ses chaînes au sens propre et figuré! On plonge dans un monde et une époque au sein d'une Amérique naissante où cette jeune esclave passera par tous les tourments que lui feront endurer sa condition.....
Elle ne cédera ni à l'amertume ni à la rancune...
Un univers riche où magie et histoire sont mêlées , un ouvrage captivant et rude , empreint de beaucoup d'humanisme!
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Tituba est le fruit du viol de la toute jeune Abena par un marin sur le navire négrier qui cinglait vers la Barbade.

Après la mort de sa mère et de celui qui l'a considérée comme sa propre fille, la petite est élevée par Man Yaya qui lui apprend les plantes, et à écouter le vent, et à regarder, la mer, les mornes, les montagnes.
"Elle m'apprit que tout vit, tout a une âme, un souffle. Que tout doit être respecté. Que l'homme n'est pas un maître parcourant à cheval son royaume."

Puis Man Yaya meurt à son tour.
Bientôt, la jeune Tituba rencontre John Indien, l'esclave de maîtresse Susanna Endicott.
Elle veut absolument partager sa vie, renonçant à son statut de femme libre pour lui.

Mais cette décision, que les esprits de Man Yaya et Abena tentent en vain d'infléchir, entraînera Tituba "de l'autre côté de l'eau", dans une existence de misère et de labeur qui culminera dans la détresse à Salem, petit village du Massachusetts et colonie de puritains, avec l'accusation de sorcellerie dont elle est victime.

Avant d'être un personnage de roman, Tituba est un personnage historique.
En 1692, elle fut l'une des toutes premières malheureuses convaincues de sorcellerie dans le village de Salem (devenu depuis Danvers), proche de la ville du même nom où se déroula le procès.

Amérindienne Arawak déportée enfant et vendue comme esclave à la Barbade, elle avait été rachetée par Samuel Parris ensuite et emmenée à Boston puis à Salem avec la famille Parris et un autre esclave amérindien, John, qu'elle avait épousé.
Tituba était parvenue à sauver sa tête en avouant être une sorcière et en dénonçant d'autres personnes.
Elle finit par être libérée, et sa trace se perdit ensuite.

Maryse Condé a voulu donner une voix à cette ombre délaissée par les historiens.

Elle lui crée une autre identité, celle de l'enfant né du viol d'une esclave noire par un marin blanc, et un parcours qui la mène de la plantation Darnell à la Barbade aux geôles des puritains de Salem, par cette rencontre avec un homme qui la séduit et qu'elle suivrait n'importe où, non, qu'elle suivra n'importe où.

Surtout, elle nous fait entendre ses mots, ses motivations, l'amour et l'attention aux autres qui sont derrière chacun de ses gestes.
Parce que Tituba, qui traverse tant d'épreuves, le rejet, la marginalisation, la peur, ne cesse jamais d'être attentive aux autres, à leurs souffrances et aux moyens qu'elle peut mettre en oeuvre pour les soulager.

Alors même qu'elle est abandonnée par celui qu'elle aime plus que tout, elle ne parvient pas à mépriser l'homme qu'il est devenu, instrument de dénonciation et profitant de cette situation.

Même si elle se le reproche parfois, Tituba ne souhaite qu'aller à la rencontre, être avec, partager, soulager autant que possible, accompagner.

Cette volonté que rien ne parvient à plier, pas même le désespoir de la torture et de la prison, sera pourtant bien mal récompensée.
Peu d'êtres, en effet, comprendront, accepteront et aimeront Tituba pour ce qu'elle est, juste pour ce qu'elle est.

Des magnifiques horizons de la Barbade aux confins glacés du Massachusetts, Maryse Condé évoque Tituba avec finesse, sans manichéisme.

Tituba, qui est rejetée parce qu'elle est noire, femme, esclave, guérisseuse, est une belle figure de résistance dans l'ombre de ce XVIIe siècle finissant.
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Tituba, née à la Barbade est la fille de l'esclave Abena violée par un marin anglais à bord d'un vaisseau négrier. Sa mère sera pendue sous ses yeux pour avoir frappé un blanc qui tentait d'abuser d'elle. Elle sera élevée et prise en charge par la vieille Man Yaya qui lui apprendra bien des choses avant de mourir. Vendue à un prédicateur Tituba se retrouvera d'abord à Boston et ensuite à Salem. Elle sera accusée de sorcellerie avec d'autres dans le célèbre procès des sorcières de Salem dans ce qu'on peut qualifier de folie collective de cette année 1692. Maryse Condé décrit un personnage fabuleux victime de son époque. Une époque où règnent l'esclavage et la bigoterie. Une époque où Dieu et l'Homme Blanc règnent en maître. Un excellent livre sur l'intolérance humaine.
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Fascinante histoire que celle de ces femmes accusées de sorcellerie, simplement parce qu'elles étaient femmes et qu'elles dérangeaient l'ordre établi par des hommes, maîtres absolus de cette société puritaine qu'ils avaient bâtie. Femmes qui n'aspiraient qu'à la liberté d'être femmes. Et si comme Tituba, en plus, elles étaient noires et de culture différente...
Maryse Condé, de sa plume alerte, ramène à la vie cette jeune femme au destin singulier, incomprise et persécutée, nous rappelant que la peur et l'envie peuvent corrompre le coeur des hommes jusqu'à la folie meurtrière.
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Histoire fascinante que celle de Tituba, femme noire arrachée de sa Barbade natale pour devenir esclave à Salem. Roman, presque historique, qui parle d'esclavage, de rites païens, de coutumes antillaises, d'amour... et qui nous amène directement au coeur de cette sombre chasse aux sorcières qui a marqué l'histoire américaine. Condé nous livre le destin tragique de Tituba, sans détour et sans complexe, sans fioritures ou de pathos... Une plume directe, mais presque poétique, chantante... Je me suis laissé bercer par les mots, et atteindre direct au coeur par la vie de Tituba...
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Maryse Condé nous a quittés il y a deux semaines. Je ne la connaissais que de nom, sans l'avoir jamais lue encore. Et c'est seulement à l'annonce de sa disparition que je me suis rendue compte que j'avais dans ma bibliothèque l'un de ses livres. Il m'avait été offert il y a quelques temps déjà et s'était malheureusement un peu perdu dans ma pal et dans ma mémoire.
Je le retrouve donc en cette triste occasion, où tous les hommages et éloges entendus m'ont donné envie de sortir ce livre de ma pile à lire et de découvrir enfin cette grande écrivaine.
Et c'est une oeuvre vraiment particulière que ce roman.
Je connaissais assez vaguement, comme beaucoup je pense, la ville de Salem et ses célèbres procès de sorcières au XVIIe siècle. Ce que j'ignorais en revanche c'est que parmi elle figurait une esclave noire venue de la Barbade et prénommé Tituba. Là aussi, nous sommes beaucoup à ne pas la connaitre, car qui se souviendrait du sort d'une esclave, femme et noire qui plus est ? Et c'est justement cet affront, cet oubli, cette injustice qu'a voulu réparer Maryse Condé. Sous la forme d'un roman, d'une biographie romancée donc — bien qu'appuyée sur les rares documents et traces restant d'elle —, l'autrice redonne à Tituba toute la vie et la substance qu'elle mérite à l'égal de tout autre personnage historique. Quoi de mieux qu'un roman pour faire revivre et réintroduire dans l'inconscient collectif une femme disparue depuis plus de trois siècles et dont on sait si peu de choses ? Mieux encore, Maryse Condé lui donne ici la parole, libre et entière de nous faire elle-même le récit de sa vie. Alors on va l'écouter, la découvrir et voyager avec elle.
Et quelle vie va-t-telle avoir !
Une vie de servitude bien-sûr, mais pas que, une vie marquée par bien d'autres choses que l'asservissement. L'amour et les rencontres seront les deux principaux éléments marquants qui vont jalonner sa vie. Ballotée de maître en maître, de maison en maison, de ville en ville, elle croisera le chemin d'un nombre incalculable de personnes. Souvent mauvaises mais quelque fois bonnes, et ce qui frappe surtout dans la personnalité de Tituba c'est son grand coeur et sa grande naïveté. Malgré les horreurs qu'elle vit et qu'elle voit, elle continue chaque fois d'avoir spontanément foi en l'autre au premier abord, à faire confiance, comme si elle ne pouvait s'en empêcher. Et c'est d'ailleurs toujours pour aider les autres qu'elle utilisera ses talents de guérisseuse, ces talents qui lui vaudront partout le qualificatifs de sorcière. Toujours aider l'autre au détriment de ses propres interêt, un trait de caractère noble mais qui lui causera bien des tourments et bien des déceptions. Et parmi eux il y a les hommes. Tituba aime les hommes, aime l'amour charnel, aime aimer, parfois bien malgré elle, mais toujours intensément. Elle en connaîtra beaucoup, des hommes, aussi différents les uns que les autres, et qui chacun lui apporteront ou lui enlèveront quelque chose.
Tituba nous raconte son histoire elle-même donc, maison ne sait pas combien de temps après elle le fait. Quelques années ? Décennies ? Siècles ? Car je n'ai pas pu m'empêcher de sentir quelques anachronismes ici et là, dans l'usage de certains termes dans certains dialogues, et aussi au travers du grand recul qu'à Tituba sur son histoire. J'ai peut-être l'oeil un peu trop tatillon car qu'importe, ce qui compte ici c'est Tituba.
L'écrivaine fait renaitre sous sa plume simple, directe, acérée, cette sombre période de l'histoire, celle de l'esclavage et de la traite négrière, mais à échelle humaine.
Stigmatisée comme sorcière et comme esclave, connu que pour cela, Maryse Condé nous offre à découvrir une Tituba complexe, comme tout être humain finalement, humaine, avide de liberté et d'amour, forte et flamboyante, même dans la misère.
Pour cette oeuvre, merci Madame Maryse Condé !
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Ecriture fluide et très maîtrisée pour un sujet brûlant... Qui n'a pas fini de faire crier, écrire, pleurer.
Un livre écrit en 1986 qui donne un la à une foule d'autres, plus récents et essentiels ; les descendants et descendantEs des esclaves ont encore beaucoup à exprimer. L'humanité (principalement la blanche) a encore beaucoup à entendre et modifier pour qui sait un jour retrouver une certaine dignité.

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Dans les documents authentiques du procès des sorcières de Salem au 17ème siècle, apparaît une esclave de la Barbade, décrite comme pratiquant le vaudou, et prénommée Tituba. On n'en sait pas plus.
Maryse Condé, intriguée par ce personnage énigmatique, lui a donné une vie. En s'appuyant sur les données historiques sur l'esclavage, elle nous livre ici une autobiographie de cette étrange Tituba : son enfance, son apprentissage des plantes et des sorts qui guérissent, sa rencontre avec l'homme de sa vie pour lequel elle renonce à une liberté solitaire et cachée à la Barbade.
C'est ensuite sur le continent qu'elle le suit, dans ces territoires qui ne sont pas encore les États-Unis. Maryse Condé nous livre alors une dénonciation féroce du puritanisme et de l'intégrisme religieux, qui au 17ème siècle comme aujourd'hui, entrave et torture en premier lieu les femmes.
L'épisode Salem est plutôt moins réussi que le reste du roman, accumulant les personnages sans leur donner chair.
Mais l'ensemble reste une lecture très agréable, dans une belle écriture touchante.

Challenge Départements (Guadeloupe)
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