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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Comment arriver à rendre justice à un roman si particulier ? J'espère vous donner envie d'embarquer dans un rafiot de la marine royale pour rejoindre l'Amérique et les Caraïbes…

Voici un roman plutôt original dans sa construction, puisque l'auteur nous entraîne en réalité dans trois histoires différentes, dont le café est le point commun. le risque pourrait être de rester au bord du chemin, mais ça n'a pas été le cas pour moi… La magie a opéré !

La première histoire est celle d'un jeune homme qui ambitionne de faire richesse aux Amériques en devenant planteur de tabac. le personnage nous parait un peu loufoque dans un premier temps, on met cela sur le compte de la jeunesse et on se dit qu'il va vite rentrer à Dieppe, la queue entre les jambes, car on ne mise pas un kopeck sur le fait qu'il fasse fortune et s'acclimate à la Martinique ! Les deux autres histoires sont amenées de façon subtile par l'auteur, parsemées tout au long du roman, elles dévoilent d'une part la longue et complexe installation des européens aux Indes occidentales et d'autre part le développement du café aux quatre coins du monde.

L'auteur se sert à la fois de la vérité historique et des mythes et légendes pour construire son récit. C'est bien fait et c'est véritablement captivant ! Personnellement, j'ignorais que c'est en Abyssinie – actuellement l'Éthiopie – que l'on retrouve les premières traces de l'existence du café, avant de gagner le Yémen et le monde ottoman, puis de faire son entrée en Europe. On apprend également que la boisson a changé de goût, de consistance suivant le pays où on le consommait… Bref on prend une belle leçon d'histoire concernant le nectar que l'on aime !

Cet ouvrage soulève également des sujets complexes avec lesquels les européens ne sont pas totalement à l'aise et qui sont d'une brûlante actualité, à savoir le fonctionnement d'une société esclavagiste ou bien encore le massacre des indiens caraïbes. Ces thématiques, délicates à traiter, sont ici brillamment mises en lumière, notamment grâce à l'humour créole de l'auteur.

Je referme ce roman en ayant l'impression d'avoir lu à la fois le journal intime d'un jeune dieppois exilé aux Antilles, un ouvrage scientifique concernant l'histoire du café et enfin un petit manuel destiné aux européens qui veulent s'installer aux Amériques !

Une très bonne lecture sur fond de mythes et légendes. Cela me donne envie de me plonger dans des récits de voyage du nouveau monde !
Lien : https://ogrimoire.com/2020/0..
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Histoire, littérature, voyage, musique des mots et des langues mélangées, café bien fort et aromatique... Si vous aimez un ou plusieurs de ces ingrédients, alors ce livre est pour vous !
Je l'ai choisi pour sa magnifique couverture, pour l'auteur qui est un incontournable de la littérature mondiale – certainement pas assez connu chez nous – et pour mon goût prononcé pour les grands cafés.

Raphaël Confiant était tout indiqué pour écrire un grand roman à partir de la véridique histoire de l'introduction des premiers plans de café par un jeune Dieppois sur le Nouveau Monde en 1720. Gabriel-Mathieu d'Erchigny de Clieu, c'est de lui dont il s'agit, après une formation militaire à Rochefort, se fait nommer en Martinique. Là, il démissionne et décide de cultiver la canne à sucre, moyen d'acquérir rapidement une belle fortune et une position sur l'île. A cette époque, un nouveau breuvage devient à la mode – le café –, les français l'achètent à prix d'or au pays producteurs dans le Levant et en Afrique. Il décide alors de rentrer en France, d'essayer de se procurer quelques plants conservés au Jardin Royal des Plantes – il y parviendra de manière rocambolesque – et de tenter l'acclimatation en Martinique. Cela n'a jamais encore été réussi. le pari est osé surtout avec la difficulté du voyage de retour, l'océan étant infesté de pirates.
Cette partie consacrée au récit d'aventure maritime constitue une véritable odyssée émaillée d'embûches tragi-comiques avec attaque de pirates et combats épiques, calme plat dans les sargasses, ouragan, manque d'eau, tentative de mutinerie... le talent de conteur rend ces pages vivantes, inoubliables. Les phrases rehaussées d'une langue imagée, intégrant le créole et des mots d'argot normand permettent de se projeter dans les conditions de l'époque. Ce n'est pas de tout repos : les vivres s'épuisent, l'eau croupit et doit être rapidement rationnée, le chirurgien embarqué est « un Tourangeau quelque peu colérique » disposant des moyens de l'époque soit presque rien, les moyens de navigation sont des plus sommaires et l'équipage et les passagers ont vite l'impression désagréable de tourner en rond.
C'est écrit sous la forme d'un journal, à la première personne, ce qui permet de s'identifier facilement au personnage. Gabriel-Mathieu donne ses impressions sur le mode de vie sur l'île avec ses esclaves et toute la violence qui va avec, mais il refuse les punitions et autres sévices pratiqués alors couramment. On devient aussi fébrile que lui dans les soins prodigués à ses plants, eux aussi en bien grand péril lors de cette longue traversée de plus de deux mois.

Mais le sujet principal du livre reste le café et son histoire. Raphaël Confiant nous glisse de temps à autre, sans que cela ne nuise à la lecture, des contes, des récits historiques liés à la découverte et l'adoption dans le monde entier du café. On parcourt ainsi une longue période qui va du quatrième siècle jusqu'à notre époque. L'auteur a enquêté et les documents, retranscrits tels quels, sont passionnants. A la fois roman, essai, conte, poésie, mobilisant ainsi tout l'imaginaire possible, c'est un livre qui se déguste.
J'espère que vous aurez envie de monter à bord de ce bateau – au nom intriguant de « Dromadaire » – afin d'accompagner les fragiles et précieux plants de café de Gabriel-Mathieu d'Erchigny de Clieu, de les arroser aussi souvent que possible et de les sortir pour leur faire prendre le soleil (sauf en cas d'attaque de pirates !).

Quelques mots pour terminer sur l'auteur : Raphaël Confiant est un écrivain majeur de la littérature française. Il est à l'origine du concept de créolité qu'il a développé depuis 30 ans avec Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau et bien d'autres. Il s'agit d'utiliser toutes les langues disponibles pour créer une prose relationnelle cherchant à dire plus qu'il en a été dit dans la littérature classique ou dans les livres d'histoire dominés par les colonisateurs et le système libéral. C'est un système de représentation porteur de renouvellement, cette prose relationnelle tendant à intégrer tous les acteurs et toutes les cultures, une volonté de captation d'une totalité du monde. L'influence de ce mouvement, dans la lignée de Frantz Fanon et d'Aimé Césaire, est considérable au niveau de la littérature mondiale.

Et ce sera quoi pour vous, thé ou café ? Pour moi ce sera café le matin et à midi quand le soleil donne toute sa mesure, manière de tenter de l'accompagner dans sa merveilleuse énergie : « Café, haut-lieu du verbe et de la pensée » selon la magnifique formule de Raphaël Confiant. Ensuite quand il faut se faire à l'idée du retour prochain de l'ombre, j'aime voyager plus oriental avec la douceur envoutante du thé !

Retrouvez les chroniques complètes avec photos personnelles, illustrations sonores sur mon blog Bibliofeel ou Clesbibliofeel. A bientôt !

Lien : https://clesbibliofeel.blog
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« C'est pourquoi elle conçut un fort chagrin, puis l'inconsolation, lorsque j'émis le souhait, à l'âge de quatorze ans, de m'engager dans la marine royale. J'avais écouté tout un considérable de marins qui venaient s'encanailler avec les ribaudes des tavernes dieppoises. J'avais bu leurs paroles, j'avais rêvé aux paysages qu'ils décrivaient, j'avais soupiré auprès des créatures féminines de rêve qui abandonnaient dans les contrées où ils accostaient, j'avais goûté au tabac, à la pomme de terre, au gingembre, à la farine de maïs et au chocolat. le sucre de canne m'avais enchanté le palais.
J'ai eu très tôt le goût des Amériques.
Au désespoir de celle qui m'a donné la vie (…) »

Gabriel-Mathieu de Clieu rêve de l'Amerique. de ce Nouveau Monde où tout semble possible.
Nous sommes au XVIIIeme siècle et Gabriel-Mathieu s'engage dans la marine. Son objectif : traverser l'Atlantique et s'établir dans cette Martinique pour y cultiver le tabac. Lorsqu'il atteint enfin l'île, ses rêves semblent impossible à atteindre et le voilà à cultiver comme tant d'autres, la canne à sucre. Bien que déçu, pour autant, cette culture lui permet d'avoir un statut. Un statut qui lui permettra d'épouser une jeune femme au nom de Marie-Colombe. Sa famille, bien que native de l'Ancien Monde, elle est depuis plusieurs générations installées en Martinique. Marie-Colombe ne connaît que cette terre, ce climat et son idiome.

Avec les années, Gabriel-Mathieu, entretient de nouveau le doux rêve d'une nouvelle culture : le caféier. Fou peut-être ? Ou avant-gardiste ? Arrivera-t-il à ses fins ? Rien n'est moins sûr ? Il devra entreprendre des stratégies douteuses, traverser des mers agitées, combattre des pirates endurcis… son caféier prendra-t-il vit au coeur de la Martinique ?

Quelle aventure ! Quand on imagine, rien qu'un instant, que les traversées en mer étaient faites ainsi à cette époque. Qu'il fallait plus d'un mois pour se rendre de l'autre côté de l'Atlantique ; avec tout les risques que cela comportaient ! Vous l'aurez compris mon esprit était complètement accaparé par cette lecture d'une autre époque. Et la plume de notre auteur nous embarque d'autant plus avec une écriture presque d'autrefois. Je me suis prise tantôt à être passagers, tantôt à être cultivateur, parfois esclaves… et à ma grande surprise membre d'un équipage ! Je vous assure c'est une grande aventure qui vous attend chère lectrices et chers lecteurs. Êtes-vous prêts ? Embarquez pour « Grand café Martinique », votre navire vous attend 😉
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