« Grosse vache dégueulasse » , « Sale putain ». Ces insultes, elle les encaisse, les liste dans l'application « notes » de son téléphone.
Ces mots sont ceux d'Aurélien, son mari. Bel homme, brillant, cultivé, et sans doute malade.
Il profère ces insanités devant leurs enfants, sans prévenir du jour ni de l'heure. de loin, ça ressemble à une variante du syndrome Gilles de la Tourette, mais de près, c'est beaucoup moins drôle. Quels maux font les mots ? Des blessures invisibles, secrètes, enfouies, qui durcissent l'âme et détruisent le couple et la famille.
Il l'aime lui dit-il, il s'excuse profondément, il suit des thérapies.
Elle l'avait déjà quitté une première fois, quand Vadim, leur petit garçon, avait huit ans. Elle était alors en dépression. Lui l'attendait, lui souriait, implorant son pardon. Devant son sourire, son amour, elle avait replongé, elle a « refait sa vie avec le même ». Les années suivantes ont été les plus belles, ils ont même eu un autre bébé, une jolie petite fille prénommée Romane. Pas une seule insulte en sept ans.
Jusqu'à ce fameux matin, elle aide Vadim à ses devoirs, Aurélien pousse le volume de la musique, elle lui demande de baisser et alors il explose « Je suis chez moi je fais ce que je veux, ferme ta gueule connasse si tu ne veux pas que je te la réduise en miettes ».
Elle se donne quinze jours, jusqu'à son anniversaire, pour prendre une décision. Après elle sait qu'elle n'en sera plus capable.
Dans cette histoire d'amour passionnelle et pathologique, c'est le lecteur qui va
trancher.
Mon avis
J'ai découvert
Amélie Cordonnier, journaliste de formation, lors de son interview vidéo de
Diane Ducret pour Femme actuelle, j'avais aimé sa sensibilité et les questions qu'elle avait posées à l'auteure du Flamant rose. Quelques jours plus tard, je la rencontre à une soirée de Prix, elle m'annonce qu'elle sort un roman à la rentrée de septembre. Quelque chose me disait que je n'allais pas être déçue et je guettais avidement sa sortie.
C'est un coup de coeur absolu pour cette histoire de violence conjugale verbale, traitée par une narration parfaitement maîtrisée, celle d'une femme qui se parle à elle-même : «Tu attends, en silence, que la violence retombe» comme si elle voulait se forcer à réaliser, à ouvrir les yeux et prendre du recul sur ce que son couple est devenu. Les enfants et leurs réactions m'ont émue aux larmes, notamment lorsqu'un soir, ils s'insèrent des petits pois dans les oreilles comme paratonnerre aux insultes de leur père à leur mère. C'est brillant, c'est violent et subtil à la fois, c'est la vie qui gagne, et c'est, « malgré tout » une histoire d'amour.
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