Les armes secrètes

Cortazar compare judicieusement le conte à la photographie. Ses histoires limitées par le cadre, jouent sur la profondeur de champ, comme dans Blow up d'antonioni. Il en tire une expression artistique, un instantané d'une violence parfaite. L'homme à l'affût est un monument du jazz et de la nouvelle, hommage à Charlie Parker, qui nous fait ressentir à la fois la déchéance la plus désespérée et le génie musical le plus diabolique...

C'est un recueil de nouvelles . (on va dire comme cela même si c'est trop réducteur pour cet écrivain et ses écrits inclassables et c'est tant mieux ) .
Une découverte surprenante , pour qui aime se sentir propulsé dans les bordures , ces lieux de l'imaginaire et/ou du réel , où il fait bon planer l'espace d'un instant conscientisé ou pas , avec une modification de la sensation , de la perception nous permettant l'évasion , une autre forme de respiration , un regard de celui qui aime à fumer la moquette ou autre chose , de celui qui en appelle à Dieu ou à diable ( tiens j'ai oublié de lui donner du grand d'à ce dernier , bien fait, Cortazàr ne m'en voudrait pas je suis sûre ) aussi pour voir l'envers du décor , et de tous ceux qui ne craignent pas les horizons sans limites , avec le risque de s'y perdre ou de de trop se retrouver .
Il serait vain de vouloir faire une synthèse avec analyse logique et démonstration à mon avis (certains s'y sont essayés , ils ne m'ont pas convaincus ) : Cortazàr est un électron libre .D'aucuns verront dans son approche de la littérature une forme un peu insolente de" syncrétisme" de courants littéraires . ( Fantastique ? Surréalisme ? Influence Borgésienne ? Kafkaienne ?et quoi encore ? ).D'autres se féliciteront de cette liberté sans chercher force de référence et analyse réductrice .
Mais ne vous y trompez pas : s'engager dans l'aventure Cortàzarien implique aussi l'acceptation de l'éventualité de la rencontre avec soi .
Un petit moment de lecture comme une parenthèse à soi ou l'inverse .

En plus : Je vous trouve très beau Julio (on se retrouvera au Paradis ) .un petit air de Ricardo Darin ( excellent dans le film "Dans ses yeux "de Juan José Campanella ) .
Merci à vous tous les bavards littéraires (ou pas ) sans lesquels je ne serais jamais tombée in love : c'eût été dommage .

Un recueil de nouvelles fantastiques extraordinaire d'invention, de trouvailles, de force..L'une d'elles a servi de trame au célèbre "Blow up" d'Antonioni.

"La nuit face au ciel" reste ma nouvelles préférée: la structure se retourne comme une chaussette à l'envers et laisse pantois: deux mondes, deux époques, deux actions...laquelle est le rêve de l'autre? Vertigineux!

à lire !! entre le réel et le fantastique , un peu loufoque , mais qui nous fait aussi réfléchir.....

Les Armes secrètes est un recueil de nouvelles  qui, tel qu'édité par Gallimard en Folio, regroupe onze textes de longueurs croissantes. L'auteur y fait montre d'une grande maîtrise de l'exercice, notamment dans celles qui ouvrent le volume et qui occupent le premier tiers. L'auteur développe une géographie de l'altérité avec un basculement fascinant et étrange  du regard, comme un miroir sans tain qui réfléchi, où le sujet agissant devient objet. L'ensemble est assez inégal cependant, la dernière nouvelle, de loin la plus longue, pas inintéressante au demeurant, est cependant en décalage avec l'atmosphère globale du livre.

La nouvelle intitulée "Axolotl" est une des plus belles nouvelles que je connaisse. Elle me rappelle le roman de Queneau "Saint Glinglin" par sa poésie étrange.

Ces nouvelles m'ont déçue. En commençant la lecture de chacune, j'ai eu l'espoir d'être sous le charme de la littérature de Cortázar que je me réjouissais de découvrir.
Ce n'est pas mal écrit, le style est presque intéressant, original, mais souvent les effets qui flirtent vers l'absurde m'ont paru vains. J'ai cherché des citations percutantes, celle que j'ai copiée me semble une illustration de l'ambiance du récit qui n'avance guère. Hélas, je ne pourrais pas aller au bout de ces récits trop ennuyeux.
Quel autre livre me conseillez-vous pour me réconcilier avec Cortázar ?

LES ARMES SECRÈTES de JULIO CORTAZAR
Recueil de 10 nouvelles.
Un homme à moto percute une femme, se retrouve à l'hôpital et voit un prêtre sacrificateur avec un poignard au dessus de lui…
Un homme va tous les matins au jardin des plantes observer des axolotls, batraciens qui se reproduisent à l'état larvaire. Un jour le processus s'inverse et les batraciens parlent de l'homme…
Délia a perdu ses deux fiancés, chute et suicide. Elle fréquente Mario, veut l'épouser, rumeurs…
Elles sont trois qui aiment se déguiser en statues le long de la voie ferrée. Un jour un jeune homme leur jette un caillou avec une lettre pour leur fixer un rendez vous..
Paris, Michel écrit, sort faire des photos voit un jeune garçon avec une femme mûre, imagine, envisage les possibilités…
Elle commence à trembler un peu, elle ne peut plus travailler mais un soir on la paie pour un extra…elle doit garder des chiens…le lendemain on lui propose un travail, un peu spécial, très bien payé…
Pierre attend Michèle dans sa chambre, elle ne vient pas, déçu, ils n'ont jamais fait l'amour mais elle est seule la semaine prochaine, alors…
Johnny boit et se drogue mais c'est un saxo génial, il a un contrat pour demain soir…le saxo est au clou, seul espoir, la Marquise…
Cortazar nous parle des questions qui font nos existences, la vie, la mort, l'amour et tous les sentiments. Il les évoque avec des histoires entre réalité et fiction entre rêve et fantastique.
Une très belle plume. Il semble que sous ce titre il n'y ait pas selon les éditions toujours les mêmes nouvelles.

» 11 nouvelles qui nous font entrer dans l'univers si particulier du fantastique sud-américain . A des degrés inégaux elles sont toutes déstabilisantes , faisant hésiter le lecteur sur la frontière du réel . C'est plus charnel et moins intellectuel que Borges (que j'adore) un peu moins sensuel que Garcia-Marquez . Mes trois préférées : « la nuit face au ciel » , « Axolotl » et « Continuité des parcs » .

Cortazar, quelle découverte et quelles rencontres! Cinq nouvelles où on est saisis par chacun des personnages, leur profondeur et leur justesse. Quelques pages seulement pour faire luire la vérité des âmes par et malgré la bizarrerie et le surréalisme des situations.

Peut-on préférer une nouvelle aux autres, sans trahir le romancier? C'est l'écueil du lecteur et la tromperie des recueils. Difficile pourtant de trouver le fil rouge entre ces nouvelles.

Je pense que le format des nouvelles révèle plus qu'un autre des affinités secrètes et intimes : l'Homme à l'affût m'a bouleversée.
Johnny est splendide parce qu'il ne comprend rien en sentant tout, par son saxo et ses méditations douloureuses, floues et enchevêtrées. Le jazzman génial laisse tout le monde sans voix par son son et on entend presque la mélodie de l'instrument qui fait vibrer les pages. Quand on s'adresse à une profane du jazz, c'est énorme.
Et Bruno, le critique, assiste à tout et relate du mieux qui peut. Il seconde car il cherche à laisser assez d'espace au saxophoniste afin qu'il déploie l'immensité de son talent et qu'il sonde la profondeur de vérités métaphysiques indicibles. Il protège aussi, du mieux qu'il peut toujours, l'artiste de ses souffrances et de ses chutes.
Fragile équilibre que celui du génie fou et de l'homme fonctionnel; interdépendance : le saxophoniste survit grâce à la prévenance du critique, le critique ne vit que parce que le premier aiguillonne une conscience qu'on sent anesthésiée par la rigueur et la mécanique de la vie.

La douleur prend au ventre, la criante vérité laisse pantois. Rien à jeter dans ce bijou, on le garde au creux de soi. Je me promets d'y revenir chaque fois qu'il me faudra chercher à comprendre pour être moins seule. Pardonnez l'émotion, c'est finalement assez exceptionnel.