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Citations sur Psychothérapie de Dieu (122)

L'idée d'omniscience divine n'est pas due au développement de la théorie de l'esprit à laquelle tout enfant accède vers 4 ans. La représentation d'un « Dieu qui sait tout » apparaît beaucoup plus tard, probablement due à l'intériorisation des récits de son entourage.
Quand un rabbin dit : « Dieu ne veut pas entendre la voix des femmes à la synagogue », il attribue à Dieu sa propre opinion, il anthropomorphise Dieu au lieu de le diviniser2. L'adulte qui a prononcé cette phrase n'était pas capable de penser qu'on peut penser autrement que lui. Il avait divinisé ses propres idées. Or, dans toutes les religions, on trouve des prêtres qui font dire à Dieu ce qu'eux-mêmes pensent : « Dieu n'aime pas la musique » ou « Dieu veut que les femmes se voilent ». Malek Chebel répétait : « J'ai consacré dix ans de ma vie à traduire le Coran. Je n'ai pas trouvé une seule ligne disant que les femmes devaient se voiler. » Certains prêtres font de Dieu leur porte-parole alors que ce sont les prophètes qui doivent porter les paroles de Dieu. Mais quand tout un groupe répète : « Dieu ne veut pas entendre la voix des femmes » ou « Dieu veut que les femmes se voilent », c'est la preuve que cette collectivité est soumise à une contagion de croyances. Un personnage phare émet une sentence que le groupe accepte sans jugement. Une épidémie de croyances est explicable par ce qu'on pourrait appeler la « neurologie de l'être-ensemble », rendue observable et expérimentable depuis la découverte des neurones miroirs.
p. 231-32
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L'étude de l'ontogenèse d'un être humain, le développement psychique de l'oeuf jusqu'à l'âge adulte, révèle notre aptitude neurologique à percevoir des signaux émis par le corps de l'autre, surtout par son visage. Progressivement nous apprenons à agencer ces perceptions pour en faire une représentation. Ce n'est donc pas un délire coupé de la réalité, c'est au contraire un arrangement de perceptions qui sont mises en scène pour en faire une représentation. Le dispositif neuro-sensoriel induit un sentiment réellement ressenti dans le corps. Les animaux connaissent ce niveau de la théorie de l'esprit, mais l'être humain, grâce à son aptitude à la parole, est capable d'agencer des perceptions passées ou imaginées pour en faire des représentations dématérialisées qui agissent bel et bien sur ses sentiments. Ce processus invite à distinguer l'ici-bas perçu et l'au-delà représenté. Pour des raisons neurologiques et développementales, bien plus que philosophiques, nous sommes dualistes.
p. 229
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Certains religieux qui n'ont pas acquis suffisamment de confiance en eux pour éprouver le plaisir d'explorer un autre monde se cramponnent au cadre qu'ils ressentent comme un interdit sécurisant. Les mots, les gestes se mécanisent et cette manière de croire les mène à l'intégrisme. En ayant peur de tout ce qui n'est pas eux-mêmes, ils se sentent agressés par la moindre variation de chant, de prière ou de rituel. Pour eux, toute différence est un blasphème qui mérite sanction. Quand il y a rigidification, stéréotype, clonage de mentalités, la restriction du monde éteint la pensée, coupe l'élan vers l'autre, empêche la découverte, alors le plaisir de vivre se transforme en étau.
p. 225
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Les mondes ritualisés sont à la fois matériels et mentaux. On ne mange pas n'importe quoi, n'importe où, avec n'importe qui. On ne fait pas l'amour n'importe comment avec des inconnus. On n'écoute pas la musique sans s'accorder avec les autres. Le cadre rituel permet d'habiter un même monde, d'onduler avec nos voisins, de ressentir une tendre intimité avec ceux qui ont le même orgasme que nous, en même temps, dans un même lieu. Quand le cadre donne forme à la jouissance et crée le bonheur d'être ensemble, chacun sert de base de sécurité à l'autre en devenant familier. De même, dans les situations d'attachement, l'enfant sécurisé dans sa niche affective acquiert confiance en lui et plaisir de découvrir le monde des autres. Celui qui se sent affectivement épaulé par une présence sécurisante ose tenter le dépassement de soi.
p. 224
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Quand on a éprouvé ensemble le plaisir d'un bon repas, d'une relation sexuelle ou d'un concert côte à côte, nous ressentons un agréable sentiment d'intimité. Nous sommes familiers, initiés par le bonheur d'avoir vaincu la mort, donné et reçu le plaisir du sexe, partagé la nourriture et écouté la musique que nous avons aimée ensemble. Les plaisirs ritualisés « finissent par dissoudre les limites qui séparent les individus. Ils les unissent en substituant une identité de groupe à leur identité personnelle ».
p. 220
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Le désordre évolutif est inévitable puisque les milieux et les individus ne cessent de changer, en attendant la réorganisation adaptée au nouveau contexte.
Le chaos donne une impression de fracas mortifère, comme lors d'un trauma naturel (tsunami) ou culturel (guerre) où l'homme en agonie perd tout espoir, sauf quand Dieu existe pour lui. Nous sommes contraints à vivre ensemble pour façonner le milieu qui nous façonne, disposer les tuteurs de développement autour de nos enfants, et inventer les récits qui donnent sens à notre existence.
Le sexe qui donne la vie et fabrique du social est l'activité humaine la plus fortement structurée par le sacré et les interdits.
p. 219
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La laïcité fabrique du social grâce aux lois qui structurent le milieu où l'on apprend à vivre. La religion fabrique du social grâce aux rituels sacrés qui organisent la vie collective, elle met en place les scénographies qui représentent Dieu et induisent le partage des sentiments religieux. Ces stratégies de socialisation sont distinctes, elles s'opposent parfois.
Dans la socialisation laïque, l'entente se fait entre êtres humains. Elle est momentanément acceptable, donc négociable. Elle permet mille évolutions différentes selon les divergences d'opinion, les conflits, les alliances et les pressions du contexte technique ou culturel. Dans un milieu structuré par la laïcité, il faut lire mille récits, visiter cent cultures, rencontrer une infinité de personnes aux croyances différentes et tenter de vivre avec elles.
La socialisation religieuse est sacrée, universelle. Vraie une fois pour toutes, elle n'est pas négociable.
p. 217
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La soumission au passé, la rigidification défensive expliquent pourquoi il est difficile d'organiser un colloque sur la psychologie de la religion ou de faire un cours dans un lycée. Les incroyants n'osent pas réfléchir à Dieu qui ne les intéresse pas, alors que les déistes partent en guerre pour un mot de travers.
p. 210
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AMOUR RÉVOLUTIONNAIRE
L'athéisme démocratique de ceux qui aiment l'évolution s'oppose au retour à Dieu de ceux qui s'extasient sur les vérités éternelles ? L'expression de mille personnalités différentes, rendue possible par les démocraties, crée un sentiment de chaos dans le monde mental de ceux qui sont sécurisés par “un cadre sacré intransgressable”.
Le retour du religieux spectaculaire se met en place en même temps que le développement de l'athéisme discret. Depuis la Seconde Guerre mondiale, l'islam a connu un développement extraordinaire : 350 millions de Musulmans en 1945, 1,5 milliard en 2010. Le catholicisme change de continent, il s'éteint en Europe, mais flambe en Afrique et en Amérique du Sud pour transcender une population en aussi grand nombre que celle des Musulmans. Les Protestants, moins nombreux, austères et travailleurs, prennent le pouvoir en Amérique du Nord.
Les Juifs, très peu nombreux (moins de 15 millions), sont étonnamment présents dans les récits sociaux et religieux. Les Chrétiens et les Musulmans s'y réfèrent de plus en plus. Dans les récits politiques les phrases médiatiques mettent en lumière le moindre problème où un Juif est concerné, alors qu'ils laissent dans l'ombre des catastrophes mille fois plus graves, …
p. 206
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La religion satisfait une pyramide de besoins : d'abord cognitifs, puis émotionnels, puis relationnels, puis moraux. Cette pyramide a un effet socialisateur qui permet de vivre avec les autres, à tous les stades du développement. La spiritualité, elle, est une “élévation” intime, intemporelle qu'éprouve tout homme, même quand il prétend vivre sans dieu.
p. 186
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