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S'il y a bien une créature qui n'a pas bonne réputation dans le milieu de la fantasy, se sont bien les trolls. Laids, brutaux, stupides, maladroits... : la manière de les présenter varie peu et les cantonne au sempiternel rôle de méchants, certes un peu pénibles à abattre, mais dont on ne s'embarrasse pas bien longtemps (or on sait tous qu'il en existe pourtant de très sympathiques !). Ce n'est toutefois pas le parti pris de Marie Catherine Daniel qui met le troll à l'honneur dans ce petit roman fort plaisant paru en avril chez ActuSF. On y fait la connaissance d'Arsouille, un vieux troll qui n'attend plus grand chose de la vie, jusqu'à ce qu'il reçoive un jour une lettre de son frère jumeau qu'il n'a pas revu depuis plus de cinquante ans. Nulle brouille à l'origine de cette séparation, mais un caprice de la génétique puisque, à l'adolescence, le frère adoré s'est transformé... en ogre. Et oui, naître troll ne garantit pas de le rester ! La chose ne serait pas si tragique si l'un et l'autre n'étaient justement pas si différents. Bagarreurs, incultes et dotés d'une compréhension limitée, les trolls font office de main d'oeuvre bon marché et vivent sous le joug impitoyable des ogres qui, dotés d'une intelligence (et d'une dentition !) très supérieure, se sont naturellement placés en haut de la hiérarchie. La surprise est d'autant plus grande pour Arsouille que les ogres sont censés ne rien pouvoir éprouver, pas le moindre sentiment. Comment, alors, se fait-il que son jumeau lui écrive pour lui faire part de sa douleur d'avoir été séparé de lui toutes ces années ? Ni une, ni deux, voilà notre vieux troll en route pour résoudre ce mystère et, peut-être, renouer avec ce frère qu'il n'a cessé d'aimer en dépit de sa nature.

Le roman est court et bien rythmé, les péripéties s'enchaînant rapidement et permettant de révéler à chaque fois un aspect différent de l'univers de l'auteur. Un passage dans l'équivalent de l'éducation nationale, un voyage en train très mouvementé, un aperçu de la guerre particulièrement meurtrière menée contre le voisin... : les rebondissements ne manquent pas ! Si les aventures d'Arsouille sont intéressantes, c'est malgré tout le fonctionnement de la société telle que dépeinte ici par l'auteur qui intrigue avant tout le lecteur. On l'a dit, les trolls et les ogres appartiennent à deux races bien distinctes (quoique pas si éloignées puisqu'un représentant de l'une peut soudainement passer à l'autre), ce qui justifie la suprématie de l'une sur l'autre. Si le ton se veut volontiers léger au début du récit, cette légèreté ne suffit toutefois pas à cacher la violence omniprésente qui règne dans cette société. Ce qui choque dans un premier temps, c'est évidemment la brutalité des trolls entre eux (et en cela ils s'avèrent fidèles à leur triste réputation) puisqu'Arsouille s'attarde à plusieurs reprises sur les guerres de gangs que se livrent ses concitoyens chez qui la loi du plus fort règne en maître (notre héros trouve ainsi tout à fait normal de se faire attaquer par une bande de jeunes trolls en maraude : il n'avait cas pas avoir l'air aussi vulnérable !). Et puis, petit à petit, on se rend compte que ce comportement bestial adopté par les trolls (et qui sert à justifier leur exploitation) est avant tout la conséquence de la violence à laquelle ils sont quotidiennement confrontés de la part des ogres. Une violence qui s'exerce d'ailleurs dès le plus jeune âge, les écoles chargées d'accueillir les trolls n'étant rien d'autre que de géantes garderies où l'on essaie même pas d'éduquer les « trollinous » (j'adore ce terme) mais où on leur faire bien comprendre qu'ils ont tout intérêt à craindre les ogres.

L'auteur livre ici une très intéressante réflexion sur le déterminisme, l'éducation et l'impact de la violence. Ce qui commence comme une sympathique et légère petite aventure prend ainsi plus d'ampleur au fil du récit qui se fait de plus en plus sombre et de plus en plus profond. Cette évolution, on la constate également chez le protagoniste qui subit une grosse transformation au fur et à mesure que sa quête avance et qu'il réalise que quelque chose cloche dans le fonctionnement de la société dans laquelle il vit. Ce n'était pourtant pas gagné, Arsouille étant au début du roman un personnage assez antipathique car ayant intégré tous les codes et comportements négatifs typiquement associés aux trolls (avec notamment une manière de s'adresser et de considérer la gente féminine qui m'a, à plusieurs reprises, donné envie de l'étrangler). Et puis, peu à peu, l'auteur dégrossit son personnage qui se fait plus complexe et en vient à développer de l'empathie pour ceux qui l'entourent. Arsouille va évidemment croiser sur son chemin un certain nombre de personnages (des trolls, pour la majorité) qui se révèlent pour la plupart trop peu développés pour susciter l'affection du lecteur mais qui jouent malgré tout efficacement leur rôle d'acolytes ou de soutiens du héros. Autre aspect intéressant : s'il est évidemment facile de faire le rapprochement entre les thématiques traitées par l'auteur et notre propre société, le lien entre notre civilisation et celle-ci est bien plus étroit qu'il n'y paraît puisque le monde d'Arsouille est, d'une manière ou d'une autre, l'héritier du notre. Les humains sont en effet mentionnés à plusieurs reprises comme des êtres un peu légendaires qui auraient vécu il y a longtemps avant de disparaître (quoique...) tout en laissant quelques traces de leur passage que certains n'ont pas renoncé à tenter d'exploiter avec plus ou moins de succès (ordinateurs, véhicules, récits...).

Marie Catherine Daniel signe avec « Entre troll et ogre » un petit roman qui ne paye peut-être pas de mine au départ, mais qui se densifie au fil de la lecture pour nous offrir une véritable réflexion sur la nature humaine (ou trollesque). Porté par un personnage touchant qui entame (malgré son grand âge !) une véritable quête initiatique, le récit séduit autant par son sérieux sous-jacent que par la qualité de son univers et l'originalité de son sujet. Une sympathique découverte, à lire si vous voulez étoffer un peu votre connaissance en matière de trolls !
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Entre Troll et Ogre, un roman initiatique pas comme les autres


Dans la vie, il faut faire des choix. On le sait tous.

Dans le monde de Marie-Catherine Daniel, l'humanité a disparue et les enfants qui naissent sont très vite confrontés à la dure réalité : être soumis ou ne pas l'être. Être un ogre ou un troll. L'élite ou la chair à canon.
Pourtant ce choix se fait "naturellement", au grand désarroi de certains.

Il faut dire qu'être un troll signifie une vie de pauvreté et souvent de souffrance et de brimades, par les siens et surtout par les terribles ogres qui dominent la société. (A noter que les punitions au collège sont plutôt expéditives et d'une rare violence physique et morale.)
Intellectuellement plus faibles, les trolls sont cantonnés à des tâches subalternes, servent de garde-manger et surtout de chair à canon dans un conflit aussi mystérieux qu'enlisé.

Tout le drame de ce roman s'articule autour de deux frères. Deux frères jumeaux : Arsouille et Arpète.

70 ans auparavant, tandis que le jeune Arsouille devient un troll tout ce qu'il y a de plus troll, Arpète lui devient (par malchance ?) un ogre et disparaît de la vie de son jumeau.
Tout les sépare et le temps n'arrange pas les choses. Au crépuscule de sa vie, quelle n'est pas la surprise d'Arsouille de recevoir une missive ogresque.
Est-ce bien son frère qui lui écrit ? Ou seulement un mirage ?

Cette lettre, comme un défi, tire Arsouille d'une vie où il mourrait à petit feu pour le jeter sur les routes à la rencontre de ce frère prodigue. Pourtant, comme l'on peut s'en douter, cette quête est loin d'être de tout repos et réserve bien des surprises à notre vieux troll.
Aidé par une troupe de soldats unis et débrouillards, réussira-t-il à atteindre ce frère si longtemps perdu ?
Cette aventure loin d'épuiser notre troll, lui donne enfin une raison de vivre et de faire (et dire !) tout ce qu'il n'avait jamais osé. Ce n'est pas parce que l'on est vieux, qu'on ne peut pas rêver et aimer !

Entre Troll et Ogre est un très joli roman qui prône la tolérance, l'amitié, l'écoute des autres, l'acceptation des différences et le pardon. Entre Troll et Ogre est une lecture pleine de douceur tout en plongeant le lecteur dans des aventures trépidantes et pleines de rebondissements.

La plume de Marie-Catherine Daniel est enlevée et l'intrigue menée tambour battant. Pourtant, une fois les dernières pages avalées, c'est une impression de sérénité et de nostalgie qui étreint le lecteur.
Entre Troll et Ogre est une lecture où l'on se prend à espérer que le monde n'est pas aussi noir que l'on pourrait le penser.
Lien : https://lecomptoirdelecureui..
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Un excellent ouvrage atypique, drôle, sensible, humain. le style est vraiment très chouette et peu paraître peu accessible au premier abord, mais prendre le temps d'insister quelques pages en vaut le peine.

Le post-apo imaginé et le devenir des personnages est un vrai plaisir à suivre. Les personnages en eux-mêmes sont intéressants et changent de ce que l'on croise habituellement : "mal élevés", décatis, moches... l'autrice aborde des thèmes vraiment chouettes : le rapport à l'autre, l'éducation, la culture, la curiosité...

Un ovni qui vaut le détour pour tous ces aspects.
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Avec un titre comme Entre Troll et Ogre, ce roman ne pouvait qu'attirer mon attention. Un roman parlant de troll et le mettant à l'honneur étant un fait suffisant rare pour être souligné : hormis les romans de Jean-Claude Dunyach, les trolls sont peu présents dans la littérature et apparaissent le plus souvent sous un très mauvais jour, alors qu'en réalité, ils sont très gentils! de plus, intriguée par sa très belle couverture, je me suis laissée tenter aux Imaginales, puis j'ai profité des vacances pour le lire.

Le personnage principal du roman est un troll nommé Arsouille. Il est âgé, habite avec sa belle fille et son petit fils et n'a plus beaucoup de centres d'intérêts, hormis son petit-fils qui grandit trop vite et ne sera bientôt plus un trollinou (d'ailleurs je me demande sérieusement si Au pays des trollinous ne sonnerait pas bien comme nom pur notre blog?). Mais un jour sa vie bascule quand il reçoit une étrange missive provenant de son frère jumeau qu'il n'a pas revu depuis de nombreuses années. La raison pour laquelle il n'a plus revu son frère est somme toute assez simple: celui-ci s'est avéré être un ogre. Mais Arsouille se met à douter, cette lettre vient elle réellement de son frère? Si oui, pourquoi lui écrit-il alors que les ogres n'ont pas de sentiment? Et pourquoi son frère est il triste de ne plus le voir depuis aussi longtemps? Autant de questions sans réponses pour Arsouille et d'énigmes difficiles à résoudre quand on ne sait ni lire ni écrire. Ainsi Arsouille se voit entrainer dans une enquête pas si simple pour connaitre la vérité.

Dans l'univers du roman, les humains semblent avoir complétement disparu, mais avoir laissé quelques traces dans les livres notamment. 2 peuples principaux peuplent le monde : les ogres et les trolls. Les ogres occupent la position de dirigeants tandis que les trolls sont soumis et pauvres. le monde est en guerre et les trolls en sont les principales victimes. La violence est très présente, dès l'enfance, dès l'école où la vie est très dure pour les trolls qui sont victimes des ogres mais aussi de la violence entre eux. Et tout cela semble normal pour tout le monde. Il faut dire qu'ils ne semblent avoir rien connu d'autres et le fait de ne pas savoir lire n'aide pas à connaitre autre chose. C'est un monde sombre, âpre et difficile. Malgré tout, Marie-Catherine Daniel y place un peu d'humour dans les réflexions d'Arsouille.

Arsouille pour essayer de mener à bien sa quête de son frère Arpète et son enquête va être amené à vivre diverses aventures. Celles-ci se déroulent de manière un peu linéaire et ont pour but de nous faire découvrir plus en détail l'univers dans lequel il vit, que ce soit à l'école ou à l'armée. La guerre est toujours présente en arrière fond d'où la présence sur la couverture du livre de balles et d'une grenade. Les thèmes du roman sont ainsi plus sombres qu'il n'y parait au début, on y parle de différences, de guerre, de violence, de soumission.

Pour illustrer cette thématique assez sombre, l'auteure a choisi de faire évoluer son personnage principal de manière importante. le souci est que tout tourne autour d'Arsouille qui est quasiment le seul personnage du récit. Les protagonistes secondaires sont là pour l'aider ou lui montrer le chemin mais ont relativement peu d'importance et c'est un peu dommage. de plus, Arsouille présente un caractère plus que déplaisant au début du roman, il est misogyne, violent et franchement pas futé. On se demanderait presque comment il peut autant évoluer. Sa quête lui permet de comprendre la société et de voir que rien n'est figé, que les choses ne sont pas si simples. Il a enfin un but dans la vie et se rend compte de ce qui compte, et surtout essaie de changer les choses. Pour illustrer son propos, Marie-Catherine Daniel a choisi de relater le destin d'un personnage hors norme, et que rien ne prédestinait à cela. C'est bien fait même si cela reste un peu naïf par moments.

Entre Troll et Ogre est un roman surprenant par ses thématiques sombres et un discours sur la tolérance, la différence et l'acceptation des autres, la notion d'humanité. Les trolls y sont montrés à la fois sous un jour connu mais aussi différent de ce que l'on a l'habitude de voir. Malgré quelques petits points, ce fut une lecture agréable et étonnante et surtout un roman sur une créature qu'il faut voir sur un nouveau jour!
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Entre troll et ogre de Marie-Catherine Daniel, c'est une claque littéraire. A mi-chemin entre fantasy et post-apo, vous n'allez pas manquer de vous bidonner en suivant les aventures incroyables du troll Arsouille, parti à la recherche de son frère, perdu de vue depuis plus de 50 ans.

Comme la belle couverture de Ronan Toulhoat le suggère, ce roman est une grenade à dégoupiller délicatement sous peine de tout faire sauter. Après tout ne dit-on pas que les ogres sont chatouilleux et les trolls, bagarreurs. Bien entendu, c'est surtout valable quand ils sont jeunes et fringants et pas quand ils ont plus de 70 ans et sont perclus d'arthrite comme le troll Arsouille. Improbable ou pas, c'est à ses basques que nous attache Marie-Catherine Daniel.

Sur fond d'humour et de situations comiques, elle s'interroge sur la vraie définition de l'humanité.

Entre troll et ogre est une perle qui va dynamiter le genre tellement ce récit est époustouflant. C'est un livre à mettre entre toutes les mains afin que tous, nous ayons une vraie prise de conscience de ce que nous sommes et de ce nous faisons.... plus d'infos sur Fantasy à la carte.

Lien : https://fantasyalacarte.blog..
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Ici, les humains ont quasiment disparu de la surface de la terre et celle-ci est désormais à partager entre trolls et ogres. Les premiers gentils, bêtes et patauds … les seconds brillants mais ne ressentent plus aucun sentiment. Toujours est-il que le destin de chacun n'est pas figé puisqu'on peut naître ogre et devenir troll à l'adolescence et inversement. C'est ce qui arrive à Arsouille et Arpète, jumeaux, qui n'auront d'autre choix que d'apprendre à vivre différemment.
Il est donc question de science-fiction et là vous vous dites « mais ouah quelle analyse pour un livre de chez ActuSF ! » et vous n'avez pas tort… !
Un format court qui nous entraîne rapidement dans le vif du sujet.
Une dystopie, roman d'anticipation ou post-apocalyptique, appelez ça comme vous voulez, où les membres de la société peuvent prendre des orientations radicalement différentes et où il s'avère alors qu'au sein même d'une paire de jumeaux, cela arrive.
La relation entre les deux frères est un prétexte pour en réalité observer le comportement de la société vis-à-vis des capacités, personnalités et modes de vie différents et bien entendu il est question de peur, de rejet, de racisme, de confrontation…

Un roman qui résonne évidemment avec notre société moderne et ses dérives mais dont on peut regretter qu'il survole certains aspects... la faute au format me direz-vous !
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C'est un titre qui me faisait de l'oeil depuis sa sortie. J'étais en confiance car sous le label bad wolf jusqu'à présent je n'ai eu que des bonnes lectures. Sauf que cette fois-ci ça n'a pas fonctionné, je n'ai pas réussi à entrer dans l'histoire et une partie de moi se demande toujours s'il y avait vraiment une histoire où si on a juste une critique de la société. J'ai lu à peu près la moitié du récit sans avoir l'impression qu'il y ait un vrai fil conducteur narratif et sans trouver ce que j'attendais. Des trolls, des ogres, pour moi ça signifie une civilisation loin de la notre en mode de vie et de fonctionnement. Là j'avais l'impression de lire une allégorie de la vie dans une banlieue mal famée. La principale conséquence a été que j'avais beaucoup de mal à me mettre dans une ambiance de fantasy. Avec autant d'échos avec la vraie vie en banlieue, c'était facile de se dire qu'on n'est dans un contemporain avec juste un changement d'espèce (genre fable De La Fontaine). Une fois ce parallèle établi, j'ai passé ma lecture à faire les rapprochements : troll sans avenir sans soutien sans assez de temps à l'école vs ogre instruit qui domine, quelques changements en grandissant… Ce sentiment est amplifié par le style d'écriture et le vocabulaire. L'argot est très présent ce qui colle avec l'ambiance mais n'est pas ce que je préfère lire. le personnage principal a fini par me laisser indifférente et j'ai abandonné cette lecture.
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Il y a des rencontres qui ne se font pas. C'est ce qui s'est produit avec Entre troll et ogre de Marie-Catherine Daniel. Ayant déjà lu et apprécié deux autres ouvrages de l'auteure (une romance et un roman fantastique jeunesse), je me demandais ce qu'elle me réservait avec son nouveau roman de fantasy. Mais du registre fantasy, dans ce court roman, il n'y a que les trolls et les ogres, car tout se passe dans un monde moderne, où se côtoient immeubles, ordinateurs, train, camions, etc.

Je n'ai pas grand chose à reprocher à ce roman, si ce n'est de ne pas avoir su réellement éveiller mon intérêt. L'imagination de l'auteure fourmille de bonnes idées, et c'est sans doute pourquoi j'ai persévéré si longtemps dans ma lecture. La critique sociale est bien pensée et bien formulée, avec une écriture pleine de vocabulaire rigolo (je me souviendrais sans doute toute ma vie du mot trollinou, qui m'a fait rire à chaque apparition dans le texte) Quant à suivre un vieux troll perclus d'arthrose, j'ai adoré l'idée.

En revanche, même si j'étais intéressée par la quête du vieil Arsouille, du moins au début, j'ai trouvée l'intrigue principale trop diluée par des évènements annexes, évènements trop peu intéressants à mon goût. L'ennui a assez rapidement pointé le bout de son nez après la scène du train. Les personnages, globalement, ne sont pas très attachants. On ne trépigne pas d'impatience à l'idée de savoir ce qui va leur arriver (encore une fois, malgré toute la sympathie dégagée par ce vieil Arsouille... je sais, c'est un peu contradictoire).

En résumé, je dirais juste que l'histoire et le devenir des personnages n'ayant pas éveillé ma curiosité, la critique sociale du roman, même si elle était bien formulée, a fini par me paraître ennuyeuse et rébarbative. Dommage.
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Bien que je passe de moins en moins de temps à les décortiquer, la quatrième de couverture promet un roman proche du post-apo. On n'y est pas vraiment tout à fait, mais à défaut d'un autre terme, post-apo est ce qui colle le plus. Et puisque les néologismes approximatifs ne me font pas peur, j'aimerais moi dire que ce livre, c'est du post-humanité : il se place dans une société hautement inégalitaire (on y revient dans un instant) avec d'un côté les trolls et de l'autre les ogres. Les humains en sont les grands absents depuis que les ogres les ont jartés, entraînant pas mal de dysfonctionnements matériels et sociaux qu'on retrouve habituellement dans du post-apo : l'impossibilité de produire du neuf, la nécessité de bricoler à l'arrache pour survivre, le contexte social difficile et, plus spécifiquement à ce roman, le délabrement des clapiers trollesques qui se dispute à la modernité pénitentiaire des institutions administratives ogresques. Entre troll et ogre, c'est du post-apo sans apocalypse et sans humains : c'est donc du post-humanité et, dans ses grandes lignes, de la dystopie.

Arsouille est le héros. Il est un vieux troll arthritique de septante balais qu'on rencontre alors qu'il revient de la crémation de son meilleur pote Vantard. Dès le début du roman (littéralement à la première page), le ton est donné. Je vous cale ici le premier des deux extraits que je ne peux pas m'empêcher de vous partager :
"Mauvais de rentrer à cette heure. Top tôt ou trop tard. Pas assez jour, pas assez nuit. C'est l'heure entre chien et loup. Entre troll et ogre. En plus, il pleut (...). Mais quelle idée a eue Vantard de se faire incinérer à l'autre bout de la ville ! Soit disant qu'il venait du Sud. Et qu'elle idée il a eue, lui, de se rappeler cette dernière volonté et d'en faire part au croque-mort municipal ? Qu'est-ce qu'il en aurait su, Vantard, si on l'avait cramé au Nord ?"

En une page on a déjà cerné l'essence du personnage et du roman : il y aura de la sensibilité, beaucoup de dérision mais surtout énormément de drama.

Parce que oui, si je devais définir ce roman en trois grands axes, je commencerais par dire qu'il est d'une brutalité dramatique (1). La société dans laquelle évolue Arsouille est hautement dysfonctionnelle. D'un côté il y a les trolls : inventifs, hauts en couleurs mais carrément individualistes et intellectuellement limités - les opprimés quoi, quoi qu'en entre eux ce ne soient franchement pas des enfants de choeur non plus. de l'autre les ogres : froids, cartésiens, organisés, violents et tenant d'une main de fer l'Administration et le Pouvoir - les oppresseurs. Les exécutions et autres diverses formes de violence insoutenables dont témoigne Arsouille ont de quoi nouer les tripes, mais pour autant rien n'est jamais gratuit et chaque scène a son utilité.

Heureusement cette brutalité est contrebalancée par une narration désabusée (2) : on peut remercier chaleureusement notre ami Arsouille de faire preuve d'autant d'autodérision ! le tour de force du roman, c'est de parvenir à rendre la narration extrêmement personnelle (on se croirait dans la tête du bougre !) alors qu'elle emploie la troisième personne. le récit est ainsi dédramatisé : il en devient même tendrement drôle par moments - voire même drôle ou tendre tout court. Enfin (et c'est en lien avec la narration impeccable d'Arsouille), Entre troll et ogre est d'une sincérité désarmante (3). Arsouille ne cherche pas à se faire passer pour un bon, il cherche son frère un point c'est tout et cette quête organisée en plusieurs paliers hyper lisibles ne regarde que lui : nous on est juste les témoins de son extraordinaire périple. Dans le palier "Arsouille à l'école", je vous ai d'ailleurs pioché cet extrait qui a fait cogner mon petit coeur de pierre :

"Le vieux le sait depuis quelques jours, les yeux s'ouvrent d'autant plus grands quand on connaît plein de contes humains, quand, à force de décortiquer les lettres et les mots, les plans et les cartes, on en vient à tout analyser pour comprendre comment ça fonctionne. On cherche les rouages, ceux des autres mais aussi les siens. Et ce n'est guère reluisant comment on marche, comment on zappe ce qui dérange, comment on ne voit pas plus loin que le bout de son groin, comment on se croit incapable de frapper le faible, de dégouliner de cirage devant le fort. Et pourtant. Pourtant, ce matin, il y a eu quarante-cinq jeunots à écouter leur prof d'une oreille unanime (...). Pourtant il y a ce vieillard qui a perdu un croc il y a un mois pour crime de mocheté croulante et faiblarde, mais qui a osé devenir prof, s'est dressé devant quarante-cinq trollards avec l'envie de les réconforter. Ça veut dire que si la rébellion en nombre ne sera jamais à l'ordre du jour, en revanche, on peut détendre un peu ses propres chaînes et respirer mieux. On peut affronter sa peur et en sortir vainqueur."

Dans un monde où les trollinous peuvent devenir orgres, où les ogrelets peuvent devenir trolls mais où on n'a plus observé aucune transformation vers l'Homme depuis des générations, on creuse également la notion d'humanité avec énormément de finesse, pour venir la situer entre deux extrêmes troll et ogre. La génétique est-elle responsable de la trollardisation des individus, ou bien au contraire le vécu et le ressenti impactent-ils la génétique ? Vaste question qui sera mine de rien débattue ici, sans lourdeur ni leçon. Il y a une foule d'idées à développer et une bonne tranche de philo à aller chercher dans ce texte, à tel point que j'estime qu'il doive rejoindre d'urgence la liste des ouvrages SFFF à lire en cours (public 17-18 ans, quand même). Je situe facilement Entre troll et ogre à mi-chemin de la ferme des animaux de George Orwell et Des fleurs pour Algernon de Daniel Keyes (ouais, il se hisse haut la main à leur niveau, vraiment) - ce qui m'a d'ailleurs donné l'idée d'un petit billet sur ces livres de l'Imaginaire qui mériteraient de venir donner un coup de neuf aux lectures scolaires (j'y travaille).

Chacun lira finalement ce livre comme il le veut. C'est une fable après tout : on peut en rester à Arsouille qui cherche son frère, tout comme on peut lire entre les lignes des questions plus profondes. Si on en reste à une lecture en surface, le récit souffrira de quelques longueurs, mais rien de bien méchant. Je ne les ai pratiquement pas vues passer. On ne va pas se mentir, ce livre a été une grosse claque.
Lien : https://la-choupaille-lit.bl..
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