L'argument de ce roman d'Erri de Luca est le passage à l'age adulte d'un jeune ado napolitain habitant dans ce quartier si particulier de
Montedidio.
Les stigmates de la guerre sont omniprésents dans cette Italie des années 50, notoirement matérialisés par le personnage de Raffaniello, cordonnier juif rescapé de l'Holocauste qui rêve de rejoindre Jérusalem.
Notre héros est apprenti menuisier, ce qui lui permet d'échapper au quotidien complexe de son père ouvrier, et de sa mère flétrie par la maladie. Son vrai maître à penser est aussi son maître à l'atelier : il s'agit du menuisier Errico, tout empreint d'une sagesse éternelle. Il y a surtout le personnage de Maria, aimée de notre jeune héros, femme idéale, idéalisée?
J'ai beaucoup aimé le style très épuré, ciselé de l'auteur, déjà remarqué dans '
Trois chevaux". le verbe n'est pas néoréaliste comme on pourrait s'y attendre dans ce registre, ni austère comme dans "la peste" de Camus ou violente comme dans "l'aveuglement" de José Sarramago par exemple qui à leur façons traitent aussi d'une microcollectivité humaine face à l'épreuve. Ici un livre plein d'une vie juste au sens qu'elle ne dramatise ni n'exalte les joies et tristesses du quotidien, les naissances et les morts, les espoirs vains et bonheurs éphémères. Il y a beaucoup d'italien dans le texte ce qui donne une chaleur très vive au texte. Naples, la ville, est décrite de l'extérieur, présentée comme un être prométhéen.
La langue de l'auteur est toute en micro signes, en images, impressions et surtout symboles (le métier de charpentier, le boomerang, les ailes sous la bosse, les amoureux qui nagent, le père qui redevient enfant...)
Pour moi ce livre est avant tout un livre d'espoirs, d'espoir au singulier du reste, en la capacité de l'homme à se transcender.
C'est au final un livre pétillant d'intelligence, au style digne et sobre, empreint de cette humilité qui fait la puissance évocatrice des plus grands. Un vrai chef d'oeuvre.