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Le 2ème volet du témoignage de Charlotte Delbo issu de Auschwitz et après.
Plus intimiste, plus centré sur son expérience, plus personnel. Toujours dans la pudeur mais tout aussi indispensable pour ne pas oublier.
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On se sent nu, humble et démuni pour commenter ce document.
"Je suis revenue d'entre les morts et j'ai cru que cela me donnait le droit de parler aux autres et quand je me suis retrouvée en face d'eux je n'ai plus rien eu à leur dire parce que j'avais appris là- bas qu'on ne peut pas parler aux autres."
Un ton et un ouvrage qui ne vous ne laissent pas indemnes dans une
réalité crue, sans fioritures, un travail sensible, minutieux, authentique, une sensibilité exacerbée qui se dévoile à travers les déchirements." Mémoire, Douleur, Mort." Un mise en mots infiniment poétique et bouleversante, une prière aux vivants pour leur pardonner d'être vivants !
Comme une expiation de toutes ces horreurs incompréhensibles et difficilement appréciables pour ceux qui ne l'ont point vécue!!Et Pourtant!


"Auschwitz et après, Une Connaissance Inutile"est une traduction en mots du vécu de Madame Delbo, elle y est sensible et ouverte,s'affranchissant des barrières du temps,elle passe de sa déportation à son emprisonnement, à la mort de son mari, fusillé, à sa vie avant guerre,elle parle d'elle:il y est question d'inhumanité et de désespoir "On peut faire d'un être humain un squelette où gargouille la diarrhée, lui ôter le temps de penser, la force de penser. L'imaginaire est le premier luxe du corps qui reçoit assez de nourriture, jouit d'une frange de temps libre, dispose de rudiments pour façonner ses rêves. A Auschwitz, on ne rêvait pas, on délirait".....
Il y est question d'amour:" je l'aimais parce qu'il était beau , c'est une raison futile, je l'aimais parce qu'il m'aimait, c'est une raison égoïste"....
Il y est question de mémoire et de liberté, elles et ses camarades jouent le Malade Imaginaire :"C'était magnifique parce que pendant deux heures, sans que les cheminées aient cessé de fumer leur fumée de chair humaine, pendant deux heures , nous y avons cru. Nous y avons cru plus qu'à notre seule croyance d' alors, la liberté, pour laquelle , il nous faudrait lutter cinq cents jours encore".Dans le dénuement le plus extrême, elle achète à une gitane le misanthrope de Molière et l'apprend par coeur, un fragment chaque soir, elles se
Récitent des poèmes, Charlotte Delbo réussit à se rappeler 57 poémes!
Il y est question de mort:"Pour ceux qui étaient à Auschwitz, l'attente était une course devant la mort."
Il y est question de fraternité et d'entraide , de chaleur humaine entre les déportés même si la mort est omniprésente.
Il y est question de soif:"J'avais soif depuis des jours et des jours, soif à en perdre la raison. Soif à ne plus pouvoir manger, car je n'avais plus de salive dans la bouche, soif à ne plus pouvoir parler, car on ne peut pas parler quand on n'a pas de salive dans la bouche. Mes lèvres étaient déchirées,mes gencives gonflées, ma langue un bout de bois....tous mes sens étaient abolis par la soif."....
Comment survit - on à un tel cauchemar?par l'instinct de survie ? Par la poésie et la puissance des mots, de l'imaginaire, les ressorts de l'intelligence , la sensibilité exacerbée de ces êtres admirables dans leur infortune, par l'amitié et le désespoir de l'amitié?par l'amour et le désespoir de l'amour?
Y a t- il une vie après cet enfer, dans le froid mortel de l'espoir qui s'éteint et renaît encore et encore?et s'acharne.....
Respect total pour ces hommes et ces femmes là!
"Alors vous saurez
Qu'il ne faut pas parler avec la mort
C'est une connaissance inutile."



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Nettement plus personnel qu' "Aucun de nous ne reviendra", ce deuxième tome d' "Auschwitz et après" livre une Charlotte Delbo plus présente, plus sensible, plus ouverte à écrire son ressenti et à mettre des mots sur ce qu'elle a vécu.
Il n'y a pas le dépouillement du premier tome, Charlotte Delbo y évoque Auschwitz et Ravensbrück d'une manière très sensible et personnelle, n'hésitant pas à parler et à nommer certaines de ses compagnes d'infortune.
Elle livre également des réflexions très profondes sur sa déportation, permettant au lecteur d'entrapercevoir ce qu'a pu être Auschwitz pour des millions de personnes : "On peut faire d'un être humain un squelette où gargouille la diarrhée, lui ôter le temps de penser, la force de penser. L'imaginaire est le premier luxe du corps qui reçoit assez de nourriture, jouit d'une frange de temps libre, dispose de rudiments pour façonner ses rêves. A Auschwitz, on ne rêvait pas, on délirait.".
Il y est question d'amour, d'amitié, de désespoir, de la mort, de la souffrance, de la soif, mais aussi d'une fraternité entre déporté(e)s et subrepticement entre les lignes d'espoir.
S'affranchissant des barrières temporelles, Charlotte Delbo passe de sa déportation à son emprisonnement, à la mort de son mari, à sa vie avant guerre, et ce qui pourrait apparaître comme un puzzle sans queue ni tête revêt finalement une certaine logique narrative qui ne perd à aucun moment le lecteur.
D'Auschwitz, il en est beaucoup question dans ce témoignage : "Pour ceux qui étaient à Auschwitz, l'attente était une course devant la mort.", mais si dans le premier volume Charlotte Delbo insistait sur le caractère de déshumanisation de l'endroit, ici il est aussi question d'entraide, même si la mort est omniprésente, tout comme la soif sur laquelle l'auteur revient longuement dans un chapitre particulièrement poignant.
L'utilisation du "je" est omniprésente et permet à l'auteur de se livrer comme elle n'avait pas pu le faire précédemment, d'exprimer son ressenti avec un certain recul, rendant encore plus vivant son récit : "Aucune larme ne m'est venue. Il y a longtemps, longtemps, que je n'ai plus de larmes.".
Et puis, Charlotte Delbo évoque aussi Ravensbrück après un transfert en train quasi surréaliste et un passage dans une ville de Berlin en partie en ruine.
Là aussi, les conditions d'internement sont très dures, mais Charlotte Delbo y parle aussi d'une forme d'entraide et de fraternité, avec une obsession : celle qu'au moins l'une d'elles revienne pour pouvoir témoigner.
C'est bouleversant mais aussi poétique car Charlotte Delbo n'hésite pas, lorsque le récit n'est plus possible, à utiliser la poésie.
Ainsi, il y a notamment un magnifique poème en hommage à son mari, résistant, fusillé au fort du Mont-Valérien en mai 1942.

"Une connaissance inutile", dans un style différent d' "Aucun de nous ne reviendra", est un livre fort et un bouleversant témoignage d'une rescapée d'Auschwitz et de Ravensbrück qui trouvât le moyen de faire résonner les mots de Molière au milieu de l'Enfer.
Une formidable leçon de vie et d'humilité.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
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Dans ce second volet (si on peut l'appeler comme cela), Charlotte delbo va nous donner une vision beaucoup plus personnelle des camps. On va suivre sa propre expérience et en prenant part à toute cette horreur, elle nous livre un peu d'elle-même dans ce texte.

Précédemment on avait à faire à des hommes et des femmes lambda qui avaient vécus une abomination, mais on regardait tout cela d'un point de vue presque extérieur. L'auteure ne nous permettait pas une prise de position en pénétrant à l'intérieur des camps. Dès lors que l'on entame ce livre on se retrouve plongé dans les camps à côtés d'une multitude de femmes, dont l'une est Charlotte Delbo. Car toutes ces femmes, nous les connaissons, elles sont nos mères, nos soeurs, nos voisines, elles sont des femmes inconnues ou encore des héroïnes. Mais elles représentent toutes un bout de notre histoire.

Tout d'un coup, ce texte prend une nouvelle dimension, car en prenant place au coeur de son récit, elle nous interpelle et nous emmène avec elle. Ces camps de la mort deviennent dès lors également un lieu rempli d'espoir et d'amitié. Toujours sous la forme d'un documentaire, Charlotte Delbo va nous parler de soutient, d'amitié, d'amour et d'espoir. L'espoir de meilleur lendemain, car on ne peut pas parler d'espoir de survit : il n'y en a malheureusement aucun.

Cette solidarité entre femme qui se dessine sous nos yeux, nous bouleverse. Ce texte devient un témoignage pour toutes les femmes qui ont survécus à l'appel du lendemain. A celles qui seront encore en vie mais également à toutes celles qui ne sont plus des nôtres. Entre richesse d'écriture et précision des détails on semble transporté dans les camps de la mort. A travers de nombreux chapitre court, on suit des destins tragiques et brisés qui demeurent encore aujourd'hui des forces de la nature. Puis Charlotte Delbo mêle à son texte la poésie et la littérature, avec les arts qui permettent encore une fois de s'évader malgré l'horreur.

Ce témoignage d'une grande richesse parvient à nous donner la vision la plus aboutie (à mon avis) de ces années aux camps. Un texte puissant que je ne serais que recommander aux inconditionnels de cette période. Ceux qui veulent avoir une vérité nue.
Lien : https://charlitdeslivres.wor..
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Dans ce volume, Charlotte Delbo revient sur son arrestation, la détention à la prison de la Santé, l'adieu aux hommes qui seront fusillés (ceux qui ont mené l'attentat du 21 mai 1942 au 4 rue de Buci), le séjour à Romainville, le trajet, Auschwitz-Birkenau, le kommando de Rajsko, l'évacuation à Ravensbruck. Curieusement, elle ne parle pas de la montre qu'elle a réussi à garder et qui fut d'un grand soutien pour ses co-détenues du convoi du 24 janvier, épisode dont parle Geneviève Pakula, la mère de Claude Pauquet, dans Convoi vers l'est, où elle aborde aussi les pièces de théâtre montées au fort de Romainville. La phase la plus dure, celle des premiers mois à Auschwitz-Birkenau, est assez rapidement abordée. le livre est partagé en chapitres courts, en prose ou en vers (très agréables à lire malgré le sujet), qui chacun rapportent un événement : la soif, qui se termine par l'absorption d'un seau complet grâce à ses co-détenues, les maladies, le quartier des malades (Revier), la mémorisation des dates de décès des compagnes du convoi, la procuration d'un tube de dentifrice (grâce à une jeune juive affectée aux Effekts, c'est-à-dire au tri des affaires des déportées exterminées, en court sursis, vêtues d'habits civils et non de la tenue rayée, mieux nourries). le kommando de Rajsko [la suite sur mon blog...]
Lien : http://vdujardin.com/blog/de..
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un peu plus light que le tome 1. D'ailleurs la dernière parti est la liberation. Toujours aussi beau au niveau de l'écriture
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Barbelés des mots

Charlotte Delbo (1913-1985) fut l'assistante de Louis Jouvet avant-guerre. Résistante avec son mari durant l'Occupation, ils furent arrêtés tous deux. Lui fusillé, elle déportée pour Auschwitz-Birkenau. Comment dire cela ? par quelle langue noire faire l'énoncé d'une telle atrocité ? Comme si c'était aussi simple, comme si ce fait était égal aux autres – alors que rien jamais ne pourra justifier de telles horreurs.
Vers la fin de la guerre, elle fut changée de camp. Sa nouvelle destination, à peine moins sinistre que la précédente : Ravensbrück.

À la libération du camp, elle reprendra son activité théâtrale aux côtés de Louis Jouvet. Des 230 femmes parties avec elle dans le convoi de Compiègne pour Auschwitz, seules 49 d'entre elles reviendront ; seules ces quelques femmes auront pu passer – mais à quel prix ! –, entre les griffes du massacre sans nom. Et pour quel retour ? Pour quelle vie ? Y a-t-il seulement une vie possible après ce là-bas, après cet enfer terrestre ?
Ce n'est qu'au tout début des années 70 que Charlotte Delbo décidera de faire publier son amère trilogie déchirante : Auschwitz et après.

D'un tel témoignage on ne ressort pas. Car lire de tout son être, c'est entrer nu dans la chair vivante du silence. Mais ici, dans la plaie de cet ouvrage, le silence est un squelette décharné qui claque au vent : drapeau de chair déchirée. On entre dans ce livre comme dans la peau morte d'un serpent – avec pour seul habit, la squame rayée des déportées. On pénètre dans le froid terrible des appels qui durent toute la nuit pour ces fantômes de femmes qui ne savent plus ce que c'est que le jour, qui n'ont que la lumière crue et maladive des lampes électriques pour tout soleil ; on sent la diarrhée qui colle aux jambes amaigries, desséchées de leur pulpe vitale ; on éprouve la soif tenace, l'absence de salive qui vous fait la bouche comme un gros ballon de colle ; on perçoit l'immonde cacophonie de hurlements rauques, de voix hystériques. Oui, “la mort est un maître venu d'Allemagne” ainsi que l'écrivait Paul Celan dans son Todesfuge, sa Fugue de mort.

Que celui qui ne craint pas d'être bouleversé – ébranlé au plus profond de lui-même – ; que celui-là seul ose donc s'aventurer dans cette oeuvre. Si des lambeaux de son coeur restent accrochés dans les barbelés des mots, c'est que sa lecture n'aura pas été vaine.

Comme le disait le Christ à la Bienheureuse Angèle de Foligno dans ses visions extatiques : « Ce n'est pas pour rire que je t'ai aimée !... »
Et ce n'est pas non plus pour rire que Charlotte Delbo a témoigné.
Puisque notre société est devenue celle du “rire” sur commande – qui est d'ailleurs tout sauf le rire franc et sincère de la joie –, que chaque ricaneur insipide se le tienne pour dit et passe son chemin !

Extrait du poème PRIERE AUX VIVANTS POUR LEUR PARDONNER D'ÊTRE VIVANTS (p. 186) :

"Je vous en supplie
faites quelque chose
apprenez un pas
une danse
quelque chose qui vous justifie
qui vous donne le droit
d'être habillés de votre peau de votre poil
apprenez à marcher et à rire
parce que ce serait trop bête
à la fin
que tant soient morts
et que vous viviez
sans rien faire de votre vie..."

© Thibault Marconnet
18/04/2014
Lien : http://le-semaphore.blogspot..
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Une autre série de souvenirs des camps, plus personnels et toujours aussi poignants. Avec la solidarité comme seule chance de survie. Avec les souffrances et la mort au quotidien. Et quelques références à la guerre d'Algérie ou du Vietnam où ce genre d'horreur a été répété : emprisonnement, torture, fusillade…
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lu en 2018
Un livre où elle parle d'elle « je ». Des situations de travail ; comment elle a étanché sa soif grâce a ses camarades ; Birkenau, Ravensbrück ; les différents camps et le travail différent, le typhus des amies, la date précise de leur mort, et aussi le souvenir du mari, de l'amour. le souvenir de la littérature qui maintient la mémoire et aide à survivre dans une forme de dignité malgré l'aspect physique répugnant… 70 jours sans se laver, avec les mêmes vêtements et sous vêtements. Difficile à imaginer n'est ce pas ! Et puis miracle, le départ pour la Suède (après 27 mois de survie dans l'enfer) avec la Croix-Rouge, le 23 avril 1945 ! de la belle écriture, de la poésie pour parler de l'amour, des survivants et des morts. Vous étiez une belle personne Madame Delbo, certainement comme beaucoup de vos soeurs d'infortune.
Lien : https://www.babelio.com/conf..
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Livre avalé en deux jours. Captivant. L'enfer et la sortie de l'enfer.
Pages remarquables. Poèmes.

Je reviens
D'au-delà de la connaissance
Il faut maintenant désapprendre
Je vois bien qu'autrement
Je ne pourrai plus vivre

D'où le titre : "Une connaissance inutile".
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