ISBN : non usité à l'époque
"Encore un conte de fées !" me direz-vous en pensant à
Mme d'Aulnoy. Disons plutôt une révision du conte célèbre par
Delly, et probablement l'un de ses meilleurs ouvrages. le héros masculin, Vladimir, prince de Wittengrätz, est particulièrement réussi : sujet du Tsar mais d'origine germanique, grand, beau, énormément riche et célibataire qui se laisse encenser, tel un fauve paresseux et cynique, par toutes les dames qui le souhaitent avant d'en choisir une, particulièrement belle et, si possible, assez sotte. Ces temps-ci, il est sexuellement attiré par la jeune Myrrha Nadopoulo, petite, brune, assez jolie et "féline", adjectif qui, souvent chez
Delly, quand il s'applique à une femme, est plutôt de mauvais augure. (Chez un homme, c'est plus ambigu : c'est tantôt bon et signe de grande virilité - Cf. "
L'Orgueil dompté" par exemple, la suite d'"
Aélys Aux Cheveux d'Or", que je me dois de retrouver pour vous en parler, d'autant que je l'ai promis depuis des lustres - tantôt au contraire signe de lâcheté et de veulerie - voir de même Lionel de Camparène dans "
La Rose Qui Tue.") Poussée par sa mère, la comtesse Ismène Seminkhof (une aventurière dont cette union est le second mariage, plus reluisant, très nettement, que celui qui l'avait liée jadis à Nadopoulo, un Grec ou un Levantin, on ne sait trop), Myrrha se voit déjà en princesse de Wittengrätz - ce qui amuse infiniment l'homme convoité et sans scrupules pour lequel elle n'est qu'un jouet, un de plus. Ce qui ne l'empêche pas de la convier, avec sa mère et son beau-père, à se rendre à l'un de ses domaines lors de la prochaine saison de chasse.
Myrrha est aux anges. Sa mère, qui a roulé sa bosse et se révèle par conséquent bien plus expérimentée, lui conseille cependant la prudence et plus encore de ne pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Mais cela n'empêche toutefois pas Ismène de l'encourager fortement dans ses projets de conquête - Myrrha est probablement la seule personne, hormis elle-même, qu'elle aime sincèrement.
Seulement, la saison de la chasse est encore loin et le prince se rend entretemps à sa propriété de Stanitza où il a des comptes à revoir avec l'intendant, Streitnoff, personnage louvoyant et faux, qui fait volontiers chanter les serfs. Sa fille, Dounia, jolie mais prétentieuse et ne désespérant pas, elle non plus, d'attirer l'oeil du maître sur ses charmes, ne vaut guère mieux mais vous connaissez
Delly : ça finira mal pour elle et son escroc de père. L'action, rappelons-le, se situe dans les années 1880 et, même si les bolcheviks, nihilistes et autres, oeuvrent dans l'ombre à la destruction de l'Empire des Romanov, il n'empêche que les aristocrates ont encore droit de regard sur la vie de leurs serfs et ceci en dépit des réformes libérales tentées par Alexandre II, surnommé "le Tsar Libérateur" et si mal récompensé par la foule d'attentats qui cherchèrent à l'atteindre jusqu'à ce qu'une bombe artisanale, jetée dans sa calèche de parade, le condamnât à une mort atroce, le 13 mars 1881.
Accompagné par le lieutenant Aubert de Creuilly, jeune Français qu'il apprécie et à qui il a promis de faire visiter Stanitza, le prince s'installe dans sa modeste (c'est relatif, comprenez bien ) propriété. Excellent musicien, il aime bien jouer du violon quand la mélancolie le prend. A minuit par exemple, quand il souffre d'insomnies. Ainsi fait-il un soir mémorable avant de s'engager dans une petite promenade pédestre. Et c'est en cette occasion qu'il tombe droit sur une une jeune fille inconnue mais d'une très grande beauté, adossée à un arbre, près d'un étang. Pour le prince, cette jeune fille n'est en fait qu'une demi-inconnue car il sait déjà que Streitnoff a laissé une Mme Fabien, qui fuyait on ne sait quel mystérieux péril avec l'enfant dont elle était la gouvernante, s'établir il y a des années chez le garde-forestier Hofnik et sa cousine, Irina, et ceci bien que leurs papiers ne fussent pas en règle. (Précisons que Streitnoff en a a profité pour extorquer une belle somme au pauvre Hofnik, en échange de son silence.) Cette jeune fille doit être la pupille de Mme Fabien, décédée depuis quelque temps déjà, et qui a été élevée par Hofnik et Irina. Son nom : Lilia Vérine - enfin, c'était celui sous lequel Mme Fabien dissimulait la véritable identité de l'enfant,
laquelle avait été, assurait-elle, victime d'une tentative de meurtre par sa belle-mère.
A peine aperçoit-elle Wittengrätz que la pauvre Lilia, suivant en cela, le prince s'en doute très vite, les conseils de Hofnik, détale comme un petit lapin jusqu'à l'isba de celui-ci, dont elle claque la porte pour ainsi dire au nez de son poursuivant. Mais Vladimir est captivé, sous le charme : et en plus, qu'on fuie comme cela devant lui, ça l'excite, cet homme qui a la chasse dans le sang. Toutes les formes de chasse ... ;o)
En bonne logique, je devrais encore vous livrer quelques éléments mais je préfère vous les laisser découvrir dans cet ouvrage au style toujours raffiné, bourré de clichés certes mais des clichés dans lesquels le lecteur ravi se jette avec délices, et par dessus tout nimbé de cet érotisme si particulier qui fait le charme diabolique de
Delly, entité au visage de Janus, et de son oeuvre.
Je me relis et je me dis : "Ils en ont suffisamment déjà pour déduire et conclure. Sinon, qu'ils lisent (ou plus souvent relisent) l'ouvrage. Une bonne cure de romans à l'eau de rose, à condition que ceux-ci ne sombrent pas dans certains excès religieux et mélodramatiques (comme "
Gilles de Cesbres, par exemple, sur lequel je ne ferai pas de fiche parce que je me dis que, pour sa rédaction, l'un des deux, le frère ou la soeur, manquait certainement au rendez-vous - maladie, voyage, etc ... - ce qui explique cette lamentable daube) n'a jamais fait de mal à personne." Certes, je ne l'ignore point , certains webmestres ont peur d'ouvrir une rubrique en leur faveur, que ça ne fasse pas "sérieux", que ce soit tenu pour ridicule et fasse se plier de rire de parfaits imbéciles, que ça n'ait aucun succès ... Eh ! bien, ils ont tort. Et les lecteurs occasionnels de ce genre d'ouvrage ont tort, eux aussi, de ne pas avouer leur petite faiblesse. J'en profite d'ailleurs pour inviter tous les lecteurs éventuels de bons "Harlequin" actuels à nous rejoindre sur Nota Bene Culture Littéraire - vous lisez bien : "culture littéraire" et je vous mets au défi de prouver qu'il n'y a aucune culture de ce genre sur notre Forum-Bibliothèque !
A très bientôt, pour les fiches de "
Laquelle ?" et "
Orietta", binôme célèbre chez les amateurs de
Delly - mais laissez-moi le temps de rédiger les fiches et surtout de relire tout ça. ;o)