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EAN : 9782266003445
Pocket (09/09/1998)
4.2/5   5 notes
Résumé :
Beau, riche, noble, et déjà célèbre à trente ans pour son talent d'écrivain, Elie de Ghiliac est paré de tous les prestiges. Veuf après une union malheureuse, il veut cette fois faire un mariage de raison. Dans la jeune Valderez de Noctare, il croit avoir trouvé l'épouse pieusement effacée qui restera au foyer. Mais la ravissante Valderez est-elle faite pour n'être qu'une maîtresse de maison ? Saura-t-elle gagner le coeur de son trop séduisant mari ?
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Editions : PLON

ISBN : Non usité à l'époque

Selon les goûts, "Entre Deux Âmes" peut être considéré comme un sommet de nunucherie ou comme l'un des Delly les plus marquants même si l'on eût souhaité, bien sûr, que l'auteur insistât un peu moins sur le baptême de Benaki, le petit Noir que M. de Ghiliac a ramené d'un voyage en Afrique. (Enfin, à notre sinistre époque, il faut insister, au contraire, ne l'oublions pas et veillons à le faire !)

Pour ceux qui l'ignoreraient encore - vous n'avez pas honte d'être aussi ignares ? - le marquis Elie de Ghiliac qui, évidemment, porte un vieux nom de la noblesse française et, ce qui ne gâte rien, est beau, encore plus riche et d'une intelligence pénétrante, partage ses loisirs de célibataire entre les voyages lointains (qui sont encore dangereux à l'époque, il faut bien le dire) et l'édition du récit desdits voyages (il ne me semble pas que ce soit des romans, non.) Ayant dépassé la trentaine, veuf d'une femme-pot-de-colle qui l'adorait mais qui ne lui a laissé qu'une petite fille, Guillemette, enfant à qui il ne manifeste que peu d'affection mais qu'il ne laisse manquer de rien, dans l'une des nombreuses propriétés secondaires qu'il possède, voilà notre marquis qui se dit qu'il lui faudrait peut-être se remarier. D'abord pour donner un héritier mâle à son nom, ensuite pour que la petite Guillemette ait une maman. (S'il pose à la froideur glaciale du Roi des Icebergs déambulant sur la terre ferme, le marquis n'est pas foncièrement méchant : très orgueilleux, seulement.)

Par l'intermédiaire d'un vieil ami de sa famille, il découvre la perle rare : Valderez (si, le prénom existe, et bien français en plus, quoique vous le trouviez aussi en Amérique latine, je pense) de Noclare, une timide (et belle, mais belle ! mais vous l'aviez déjà compris ;o) ) jeune fille de seize ou dix-sept printemps, l'aînée qui s'occupe des nombreux enfants que son égoïste de père a faits à sa mère et qui sait tenir une maison. Car c'est cela, que veut Elie de Ghiliac : une jeune femme belle, de sang bleu (cela va de soi, cela aussi, vous l'aviez deviné ), qui sache tenir son rang, intelligente mais pas bas-bleu comme on disait alors, préoccupée des tâches ménagères et de l'éducation à donner à des enfants appelés à occuper plus tard dans le monde la situation qui leur revient dès le berceau et fuyant avec horreur toutes les mondanités, ces mondanités devant lesquelles s'inclinait au contraire à deux genoux sa première épouse qui, pour mieux le faire, en négligeait la pauvre Guillemette.

Notre élégant et parisien marquis fait donc un saut dans les Pyrénées (je crois, ou alors c'est les Alpes et non : je n'aime pas la géographie, na ! ), enfin dans un vieux manoir un tantinet délabré et tout entouré de neige, où vit la famille de Noclare. Dès le début, Valderez lui plaît - le coup de foudre classique dellyesque dans toute sa splendeur. Il offre donc sans ambages à Noclare Père et Noclare Mère (l'un perclus de dettes car il est joueur, la seconde perpétuellement étendue sur une chaise longue où elle déprime à fond) d'épouser leur aînée avec contrat de mariage, douaire, etc, etc ... Et le tout, "sans dot", comme nous eût fait remarquer ce joyeux luron d'Harpagon !

Et là, lecteur, je vous prierai de vous mettre une ou deux minutes dans la peau de Noclare Père et de Noclare Mère et de répondre honnêtement à la question : que feriez-vous à leur place ? ... Merci.

Convaincue que la vie lui deviendra impossible au milieu des siens si elle refuse ce mariage aussi brillant qu'inattendu, et ne se faisant aucune illusion sur l'égoïsme de son père qui voit déjà son futur gendre lui permettre de vivre sur un grand pied à Paris et garantir les dots de ses filles cadettes et de hauts postes à ses fils, Valderez accepte. Fiançailles, mariage ... et non consommation parce que cette horrible garce de Mme de Ghiliac Mère, peu soucieuse de voir son fils présenter à la société parisienne une seconde épouse aussi belle, aussi délicate, aussi distinguée et surtout aussi jeune (c'est-à-dire susceptible de la rejeter dans l'ombre, elle, l'éblouissante et altière douairière), profite d'un moment où la toute jeune mariée se retrouve seule pour lui dresser un portrait tout bonnement effrayant de son nouvel époux en insistant tout particulièrement sur son cœur volage ...

L'époux en question, je crois l'avoir déjà dit, est orgueilleux. Très. Valderez ne veut pas s'abandonner à lui ? Très bien : il n'insistera pas. Elles sont légion, les femmes qui ne rêvent, elles, que de cela ...

Et le voilà qui reprend ses voyages et ses soirées parisiennes en laissant Valderez avec Guillemette, loin tout là-bas, à la campagne.

Mais bien sûr, un jour, notre marquis finit par revenir au port ...

Et survient ce qui arrive toujours dans Delly : à la vue de tout l'amour que Valderez donne à Guillemette, de la gaieté retrouvée de la fillette, à la sensation du plaisir tout simple (même si l'odeur sucrée de la possession charnelle rôde toujours çà et là) que lui-même éprouve à se retrouver auprès de celle qui est sa femme légitime, aux diverses comparaisons qu'il établit entre Valderez et ces femmes qui passent leur temps à le poursuivre dans les salons (et ailleurs), Elie de Ghiliac se sent devenir différent. (C'est pour ça qu'il existe, le roman à l'eau de rose : pour faire croire ou rêver aux femmes qu'un homme, ça peut se changer.) Il lance des invitations à droite et à gauche, il veut montrer sa femme et il veut montrer qu'ils s'entendent bien - ce qui est vrai, d'ailleurs même si la question charnelle n'a pas encore été réglée - et même, qu'il est amoureux d'elle.

Sa mère et sa vieille amie d'enfance (Roberte de Brayles, je crois mais prenez-le sous réserves et excusez-moi si je fais erreur ) n'en reviennent pas. La vieille amie d'enfance, amoureuse du marquis depuis des lustres (vous l'aviez deviné aussi ? Comment cela se fait-il ? ), perd même la tête jusqu'à brûler ses vaisseaux: elle laisse entendre à la malheureuse Valderez que son mari a tout simplement laissé dépérir sa première épouse parce que, suite à la l'accouchement de Guillemette, elle ne pouvait plus avoir d'enfants. La marquise douairière de Ghiliac, qui est présente, est choquée, certes (encore heureux, me direz-vous ! ) mais sa haine contre Valderez, dont elle devine la puissance monter, monter, monter ... jusqu'au septième ciel, l'empêche d'intervenir.

Mais tout se terminera rien avec un balayage en règle effectué par le beau marquis en personne dans son entourage. C'est vrai, de temps en temps, particule ou pas, il faut faire son ménage soi-même : on n'est jamais si bien servi, croyez-moi !

Allez, lisez cet "Entre Deux Âmes" qui fut l'un de mes préférés quand j'étais jeune, au temps où j'avais encore plein d'étoiles dans les yeux. Et savez-vous ? Il arrive que, malgré la vie qui s'est écoulée, une ou deux de ces étoiles se rallume, aussi brillante que jadis, quand je relis Delly. Et ça fait un bien fou ... Un septième ciel d'illusions redevenu réalité pour quelques heures, personne ne peut s'offrir le luxe de bouder pareil miracle. ;o)
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Difficile de faire une meilleure critique que celle de Woland (je ne peux pas commenter et j'en suis désolée), mais je la trouve très bonne et très complète. Un sommet de Delly, avec quelques autres titres, "Les seigneurs loups", "Une misère dorée", "la lampe ardente", "la fin d'une Walkyrie", "la maison des rossignols", etc.

A lire après un trimestre de travail intensif, quand vous avez besoin de vous vider l'esprit, les premiers jours de vos vacances ..................
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
[...] ... Le malaise qui l'avait saisie à son entrée dans cette pièce augmentait. Ces parfums étaient intolérables ... et jamais le regard d'Elie ne l'avait troublée comme aujourd'hui.

- "Je serais très heureux de vous être agréable. Il s'agit de ?

- Un jeune homme qui sollicitait une place de secrétaire, un pauvre garçon maladif, mais très honnête, qui est venu me trouver tout à l'heure avec sa mère ...

- Un nommé Louis Dubiet ? En effet. Il m'apportait d'excellentes références au double point de vue moral et intellectuel, mais quel physique ! Ce malheureux garçon semble sortir de la tombe, et vraiment je ne me soucierais pas d'avoir auprès de moi cette triste figure. Aurait-il imaginé d'en appeler près de vous ?

- Oui, sa mère et lui m'ont demandé d'essayer de changer votre résolution. Il faut dire que la mine et les vêtements du pauvre garçon ne préviennent pas en sa faveur, mais il a l'air si honnête ! Avec une bonne nourriture et la tranquillité d'esprit, sa santé s'améliorerait certainement.

- Mais il conserverait toujours sa figure ingrate, et sa taille exiguë n'en grandirait pas d'un pouce pour cela.

- Oh ! vous attachez-vous donc à si peu de chose ? Qu'est-ce que cela lorsqu'il s'agit de rendre service à un malheureux, de le sauver d'une détresse navrante ? Essayez au moins, je vous en prie !"

Ses grands yeux émus exprimaient une timide supplication, ses lèvres tremblaient un peu, car ... Oh ! oui, décidément, il lui en coûtait trop de solliciter quelque chose de lui !

Il se pencha et elle vit, tout près d'elle, étinceler son regard entre les cils foncés.

- "Vous avez l'éloquence du coeur ... et celle de la beauté. Je ne puis que m'avouer vaincu. J'accepte votre protégé, je vous promets d'être patient ... et de ne pas le regarder."

Elle balbutia :

- "Je vous remercie ... Vous êtes très bon ..."

Un étourdissement la gagnait. Elle se leva en murmurant :

- "Ouvrez une fenêtre, je vous en prie !" ... [...]
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[...] ... - "Voulez-vous monter, monsieur ?" dit-elle en désignant le vieux perron branlant dont la neige cachait l'état lamentable. "Je vais me débarrasser de ce linge, et je vous rejoins aussitôt."

Elle s'éloigna tandis que le jeune homme, gravissant le perron, entrait dans un large vestibule aux murs de pierre grisâtre, où, pour tout ornement, se voyaient quelques vieux trophées de chasse, trois ou quatre bancs et coffres de chêne usés ...

- "En vérité, tout cela sent la misère !" murmura-t-il en jetant un coup d'œil autour de lui, tandis qu'il enlevait vivement l'opulente pelisse dont il était couvert et la déposait sur l'un des coffres.

Valderez apparut presque aussitôt, débarrassée de son tablier et de son capuchon ; elle fit entrer l'étranger dans un grand salon très nu, où demeuraient, seuls vestiges d'un passé meilleur, quelques vieux meubles assez beaux et un portrait représentant un seigneur du seizième siècle portant les insignes de la Toison d'Or.

- "Qui devrai-je annoncer à mon père, monsieur ?"

En adressant cette question, Valderez levait les yeux vers l'étranger. Et ces yeux d'un brun velouté, si grands et si profonds, étaient les plus beaux qui se pussent voir ; ils avaient une saisissante expression de fierté et de douceur, et laissaient rayonner, sans ombre, l'âme pure et grave de Valderez.

- "Le marquis de Ghiliac, mademoiselle," répliqua-t-il en s'inclinant.

Elle eut un léger tressaillement de surprise et rougit un peu. Dans son regard, Elie vit passer une expression d'étonnement intense, presque incrédule. La jeune provinciale ignorante du monde avait évidemment, malgré tout, entendu parler de cette célébrité et se demandait avec stupéfaction ce qu'un homme comme lui venait faire aux Hauts-Sapins.

Elle s'éloigna d'une allure souple, extrêmement gracieuse. M. de Ghiliac s'approcha d'une fenêtre. Celle-ci donnait sur le jardin, en ce moment vaste étendue de neige. Les yeux du marquis parurent suivre pendant quelques instants les jeux du soleil sur la blanche parure des sapins.

- "Il est amusant, mon cousin d'Essil, avec sa photo datant de trois ans !" songea-t-il avec un léger rire moqueur. ... [...]
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À tous les dons reçus du ciel, il joignait encore une voix chaude,
aux inflexions singulièrement charmeuses, et dont il savait faire jouer
toutes les notes avec une incomparable souplesse.
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