Le contenu d'une collection n'a pas plus d'importance que les quantités qu'on emploie dans une formule d'algèbre. Pour le collectionneur, il n'y a que le soin du choix et l'état complet de sa collection qui comptent. Il s'agit d'une obsession presque exclusivement masculine, d'une expression de notre besoin de contrôler le monde. Les femmes ne collectionnent guère que les chaussures et les bijoux. Et les amants, bien sûr.
« L’or blanc ! », avait dit Angelin, mais cette métaphore proverbiale se trouva bien vite obsolète. À poids égal, l’or paraissait meilleur marché que la trifola. Des acheteurs de tous pays rivalisaient d’efforts afin d’obtenir les précieux tubercules et en fournir les consommateurs fortunés de Londres, New York ou Tokyo.
C’était un marché mondial, mais l’offre était strictement locale. Certaines collines inexplorées de Russie ou du Cambodge recelaient peut-être des richesses similaires, mais les truffes blanches ne pouvaient être cultivées, et jusqu’à présent la seule source de quelque importance se trouvait dans une petite portion du Piémont, autour de la ville d’Alba.
La frustration était aussi cruelle qu’une mauvaise indigestion, gâchant chaque petit plaisir et aggravant chaque petit désagrément, chaque petite inquiétude. Ses états d’âme eussent-ils été connus qu’on aurait ainsi pu expliquer – et peut-être même empêcher – les événements ultérieurs, lesquels, bien que n’appartenant pas à la même catégorie que la chose, la cosa elle-même, n’en ont pas moins prolongé la notoriété nouvelle dont la petite communauté s’apprêtait à jouir.
Les gens, de nos jours, n’ont aucune idée de ces longues attentes de l’époque. Ils pensent que la guerre n’est que mitraille et explosions, sirènes et hurlements, mais lui, il s’en souvenait comme de longues périodes d’ennui ponctuées, comme une nuit d’été l’est par le tonnerre, de moments d’excitation intense, tels qu’il n’avait encore jamais cru qu’ils pouvaient exister. Il avait quinze ans à l’époque, et il était immortel.
Le contenu d’une collection n’a pas plus d’importance que les quantités qu’on emploie dans une formule d’algèbre. Pour le collectionneur, il n’y a que le soin du choix et l’état complet de sa collection qui comptent. Il s’agit d’une obsession presque exclusivement masculine, d’une expression de notre besoin de contrôler le monde. Les femmes ne collectionnent guère que les chaussures et les bijoux. Et les amants, bien sûr.
Michael Dibdin répond aux questions de Barbara Peters. 1/3
Non sous-titré.